Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
14 avril 2024
Rêvé que je faisais la rentrée dans une classe maternelle, rêve que je mets sur le compte des sorties scolaires que j’ai croisées ce vendredi. « Ils sont tous en sortie scolaire », remarquait l’une des lycéennes du France, continuant ainsi : « Hier, je monte dans le bus, une sortie scolaire était dedans, j’arrive à Liberté, trois sorties scolaires qui veulent monter. » Sorties scolaires ou pas, il ne se passe pas un mois sans que je rêve encore d’école de façon la plus réaliste.
C’est samedi, donc peu de risque de côtoyer de nouveau une sortie scolaire. Je prends le bateau bus pour Saint-Mandrier. Il sort du port après qu’un ferry y est entré, d’où un peu de tangage quand il en croise le sillage.
Un beau marché occupe la place devant le Café de la Place et les rues avoisinantes jusqu’à l’église que je vise. Ensuite, c’est à gauche et puis tout droit. Je n’ai pas longtemps à marcher pour atteindre, de l’autre côté de la presqu’île, la plage de la Coudoulière.
Près de celle-ci, le jardin du Conservatoire du Littoral est encore fermé ainsi que celui de la Salle des Fêtes où se trouve une Vénus sans bras (comme celle de Milo) avec de jolis petits seins (contrairement à celle du Petit Gaou).
Je longe cette plage de la Coudoulière à tribord puis monte un rude escalier qui me mène sur le sentier littoral qu’un panneau signale dangereux. Un petit malin a transformé le « Attention aux chutes » en « Attention aux putes ».
Ce sentier est fort beau, bordé de pins maritimes torturés par le vent et de plantes qui piquent. Il offre des vues plongeantes sur la Baie de Cavalas et me mène jusqu’à la plage du même nom. Ensuite, c’est trop dangereux pour moi. De plus, bientôt c’est militaire donc interdit.
Je reviens par le même chemin avec au loin visibles les Deux Frères. Près de la Salle des Fêtes, une affiche oubliée montre que Saint-Mandrier fait partie des communes pour lesquelles le neuf mars, c’est la Journée de la Femme. Au programme : stand de minéraux, bijoux, prêt-à-porter, cosmétiques, soins du visage, déco, conseil en image, diététique avec Herbalife, cours de self-défense.
Quand je retrouve le Port, je m’installe au Mistral parmi la population locale pour un café verre d’eau lecture. C’est affolant comme tout le monde se connaît ici. « T’es pas encore parti ou t’es déjà revenu ? » « C’est annulé ». Les conversations ne vont pas loin. « Oui, on la connaît l’histoire, Robert. »
De retour à Toulon, je déjeune sous un parasol au Mondial Café d’un burgueur reblochon au lait cru frites salade suivi d’un nougat glacé pour dix-huit euros cinquante. La serveuse est moins empressée auprès de moi maintenant qu’elle me considère comme un client acquis.
Pour le café lecture d’après-midi, je me perche à La Gitane sous un parasol et reste là jusqu’à ce qu’arrive une manifestation de motards en colère (ils le sont toujours). Tandis que je m’éloigne, ces rebelles autoproclamés font hurler leur moteur autour de la Mairie, polluant par les gaz et le bruit.
*
Ma définition du motard : un automobiliste qui n’a que deux roues.
C’est samedi, donc peu de risque de côtoyer de nouveau une sortie scolaire. Je prends le bateau bus pour Saint-Mandrier. Il sort du port après qu’un ferry y est entré, d’où un peu de tangage quand il en croise le sillage.
Un beau marché occupe la place devant le Café de la Place et les rues avoisinantes jusqu’à l’église que je vise. Ensuite, c’est à gauche et puis tout droit. Je n’ai pas longtemps à marcher pour atteindre, de l’autre côté de la presqu’île, la plage de la Coudoulière.
Près de celle-ci, le jardin du Conservatoire du Littoral est encore fermé ainsi que celui de la Salle des Fêtes où se trouve une Vénus sans bras (comme celle de Milo) avec de jolis petits seins (contrairement à celle du Petit Gaou).
Je longe cette plage de la Coudoulière à tribord puis monte un rude escalier qui me mène sur le sentier littoral qu’un panneau signale dangereux. Un petit malin a transformé le « Attention aux chutes » en « Attention aux putes ».
Ce sentier est fort beau, bordé de pins maritimes torturés par le vent et de plantes qui piquent. Il offre des vues plongeantes sur la Baie de Cavalas et me mène jusqu’à la plage du même nom. Ensuite, c’est trop dangereux pour moi. De plus, bientôt c’est militaire donc interdit.
Je reviens par le même chemin avec au loin visibles les Deux Frères. Près de la Salle des Fêtes, une affiche oubliée montre que Saint-Mandrier fait partie des communes pour lesquelles le neuf mars, c’est la Journée de la Femme. Au programme : stand de minéraux, bijoux, prêt-à-porter, cosmétiques, soins du visage, déco, conseil en image, diététique avec Herbalife, cours de self-défense.
Quand je retrouve le Port, je m’installe au Mistral parmi la population locale pour un café verre d’eau lecture. C’est affolant comme tout le monde se connaît ici. « T’es pas encore parti ou t’es déjà revenu ? » « C’est annulé ». Les conversations ne vont pas loin. « Oui, on la connaît l’histoire, Robert. »
De retour à Toulon, je déjeune sous un parasol au Mondial Café d’un burgueur reblochon au lait cru frites salade suivi d’un nougat glacé pour dix-huit euros cinquante. La serveuse est moins empressée auprès de moi maintenant qu’elle me considère comme un client acquis.
Pour le café lecture d’après-midi, je me perche à La Gitane sous un parasol et reste là jusqu’à ce qu’arrive une manifestation de motards en colère (ils le sont toujours). Tandis que je m’éloigne, ces rebelles autoproclamés font hurler leur moteur autour de la Mairie, polluant par les gaz et le bruit.
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Ma définition du motard : un automobiliste qui n’a que deux roues.
13 avril 2024
Refaire le tour de l’île du Gaou, dite aussi île du Grand Gaou par opposition à celle du Petit Gaou désormais attachée au continent, tel est mon but ce vendredi matin. C’est pourquoi je prends le bateau bus de sept heures trente pour La Seyne puis avec l’aide d’un autochtone trouve l’endroit d’où part le bus Quatre-Vingt-Sept dont le terminus est Le Brusc (commune de Six-Fours). A peine y suis-je monté qu’il démarre.
Le trajet est longuet. Nous passons par tout Six-Fours et je suis le seul à aller au terminus. L’île du Gaou est tout près, accessible par une passerelle en bois, mais quand j’y suis, c’est pour découvrir qu’elle est en travaux et donc inaccessible. « Peut-être demain », me dit l’un des ouvriers.
Je peux au moins me balader sur le Petit Gaou dont les rochers ont des allures de Bretagne et qui est doté de la plus moche statue que je connaisse, Vénus de Robert Forrer.
Cela fait, je longe le bord de mer pour revenir au Port du Brusc, rencontrant d’abord quelques pointus décoratifs puis nombre de bateaux de plaisance. Il y a aussi dans ce port l’embarcadère pour l’île des Embiez, toute proche, où je n’ai pas envie d’aller. C’est chez Paul Ricard et dix-huit euros cinquante l’aller et retour pour un petit quart d’heure de bateau.
Aucun bar ne m’attirant (il y a la route entre eux et la mer), j’attends que se présente un bus pour rentrer. Il arrive à La Seyne juste à temps pour que je puisse prendre le bateau de dix heures. De retour à Toulon, je me perche au soleil à La Gitane où les serveurs n’ont plus à me demander ce que je bois.
Pour déjeuner, je choisis La Feuille de Chou, place Baboulène, sous les oliviers. On y propose ce midi une formule à vingt et un euros quatre-vingt-dix : filet mignon de porc, pommes grenaille, verre de vin rouge, tiramisu et café. « Vous étiez à côté de moi dans le bateau », me dit la patronne quand elle m’installe à la table du coin à l’ombre. Je dois faire un effort pour reconnaître la jeune femme qui était assise devant moi à l’arrière et qui à un moment s’est levée pour souhaiter un bon anniversaire avec son téléphone. En revanche, je me souviens parfaitement de sa petite serveuse d’il y a deux ans et de son combo crop top pantalon taille basse. Une autre la remplace aussi efficace et davantage vêtue.
Je prends ensuite un autre café sous l’auvent latéral du France où il fait presque trop chaud. Le ciel est d’azur. Je lis Strindberg. Trois lycéennes dont l’une au moins sèche les cours sont à la table voisine. « Putain, dit l’une, il y a un mec au loin, on dirait Justin Bieber » « Où ça ? » « Au loin ». Un type en trottinette électrique passe avec Capri c’est fini à fond. C’est Marguerite qui serait contente si elle était encore vivante et en vacances à Toulon.
*
La place Baboulène, un quadrilatère arboré entouré de belles façades, peut-être le plus joli endroit pour manger en extérieur à Toulon, La terrasse de La Feuille de Chou occupe tout l’espace mais la circulation piétonnière se poursuit entre les tables éloignées les unes des autres. Le cuisinier a vue sur la clientèle. A un moment, il éternue. « A tes souhaits », lui dit le brocanteur d’en face.
Le trajet est longuet. Nous passons par tout Six-Fours et je suis le seul à aller au terminus. L’île du Gaou est tout près, accessible par une passerelle en bois, mais quand j’y suis, c’est pour découvrir qu’elle est en travaux et donc inaccessible. « Peut-être demain », me dit l’un des ouvriers.
Je peux au moins me balader sur le Petit Gaou dont les rochers ont des allures de Bretagne et qui est doté de la plus moche statue que je connaisse, Vénus de Robert Forrer.
Cela fait, je longe le bord de mer pour revenir au Port du Brusc, rencontrant d’abord quelques pointus décoratifs puis nombre de bateaux de plaisance. Il y a aussi dans ce port l’embarcadère pour l’île des Embiez, toute proche, où je n’ai pas envie d’aller. C’est chez Paul Ricard et dix-huit euros cinquante l’aller et retour pour un petit quart d’heure de bateau.
Aucun bar ne m’attirant (il y a la route entre eux et la mer), j’attends que se présente un bus pour rentrer. Il arrive à La Seyne juste à temps pour que je puisse prendre le bateau de dix heures. De retour à Toulon, je me perche au soleil à La Gitane où les serveurs n’ont plus à me demander ce que je bois.
Pour déjeuner, je choisis La Feuille de Chou, place Baboulène, sous les oliviers. On y propose ce midi une formule à vingt et un euros quatre-vingt-dix : filet mignon de porc, pommes grenaille, verre de vin rouge, tiramisu et café. « Vous étiez à côté de moi dans le bateau », me dit la patronne quand elle m’installe à la table du coin à l’ombre. Je dois faire un effort pour reconnaître la jeune femme qui était assise devant moi à l’arrière et qui à un moment s’est levée pour souhaiter un bon anniversaire avec son téléphone. En revanche, je me souviens parfaitement de sa petite serveuse d’il y a deux ans et de son combo crop top pantalon taille basse. Une autre la remplace aussi efficace et davantage vêtue.
Je prends ensuite un autre café sous l’auvent latéral du France où il fait presque trop chaud. Le ciel est d’azur. Je lis Strindberg. Trois lycéennes dont l’une au moins sèche les cours sont à la table voisine. « Putain, dit l’une, il y a un mec au loin, on dirait Justin Bieber » « Où ça ? » « Au loin ». Un type en trottinette électrique passe avec Capri c’est fini à fond. C’est Marguerite qui serait contente si elle était encore vivante et en vacances à Toulon.
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La place Baboulène, un quadrilatère arboré entouré de belles façades, peut-être le plus joli endroit pour manger en extérieur à Toulon, La terrasse de La Feuille de Chou occupe tout l’espace mais la circulation piétonnière se poursuit entre les tables éloignées les unes des autres. Le cuisinier a vue sur la clientèle. A un moment, il éternue. « A tes souhaits », lui dit le brocanteur d’en face.
12 avril 2024
La balayeuse et la laveuse de rues passent dès six heures ce jeudi matin. Je suis déjà debout, occupé à organiser ma journée. Prendre le bateau pour Les Sablettes puis le bus Huit jusqu’à son terminus Marégau (commune de Saint-Mandrier) pour ensuite revenir à pied le long de la mer par Sainte-Asile.
Après mon petit-déjeuner près d’un marché de nouveau semblable à lui-même, j’inaugure ma deuxième carte de sept jours en illimité sur le Réseau Mistral dans le bateau de huit heures, le premier depuis mon arrivée où je trouve une femme d’équipage.
Tout ça pour qu’arrivé au débarcadère, je constate que la ligne Huit ne fonctionne jusqu’à Marégau que les dimanches et jours fériés. Fichtre ! Je décide de marcher en direction des Deux Frères, ces rochers jumeaux triangulaires qui prolongent le Cap Sicié. Hélas, des propriétés privées obligent à passer par la route. Un chemin goudronné me permet de retrouver la côte mais pour aller plus loin il faudrait reprendre la route aussi je renonce et j’ai la chance qu’un bus Dix-Huit arrive. Il me ramène aux Sablettes où je croise la brigade anti incivilités et où je m’assois à la terrasse du Prôvence Plage pour un café verre d’eau. Je lis là jusqu’à l’arrivée d’un camion de vidange qui me fait fuir par le bateau de dix heures vingt-cinq.
Dans ce bateau pour Toulon voyagent un couple bourgeois et ses deux moutards à lunettes de soleil de petits frimeurs. Les parents sont assis devant leur progéniture qui a ordre de ne pas se lever sinon… (de la part de la mère, le père inexistant). A la fin de la traversée, la marmaille court partout (la mère regarde ailleurs, le père toujours inexistant). Pas une vacance scolaire sans que je me dise « Putain de famille ».
Le foie d’agneau est de retour chez Béchir, avec frites maison et salade pour quatorze euros quatre-vingt-dix. Aussi y suis-je moi-même de retour ce midi à une table ensoleillée puis je vais me percher à La Gitane pour terminer le premier volume de Correspondance d’August Strindberg. Près de moi sont une mère et son dix ans, accompagnés du grand-père ventru à casquette qui comate devant un verre de vin blanc. L’enfant tente de calculer je ne sais quoi sur une feuille de papier. « Ça fait une semaine qu’il ne va plus à l’école, il sait déjà plus poser une addition », constate la génitrice. « En rentrant tout à l’heure, tu vas m’en faire, tu vas voir. » Moi, in petto encore une fois « Putain de famille ».
Par une translation pédestre sur la droite, je me déplace jusqu’au France où je commence la lecture du deuxième volume de Correspondance d’August Strindberg. Derrière moi sont trois jeunes femmes en train de déjeuner au vin blanc. Le téléphone de l’une sonne : « Allo, là je suis au resto et j’ai pas envie de manger froid. Juste je te dis que Margot est dévastée, Manon est dévastée et moi je suis très triste, mais bon, il n’est pas mort. Allez bisous. Je te rappelle. » Que dire ?
Heureusement, il y a sur les marches du bas du port, devant le vieux gréement, une jeune fille qui lit un casque sur les oreilles et une autre qui fait de même plus loin face au large près de sa bicyclette. J’en fais une photo depuis ma table au moment où personne ne passe sur le quai et où un bateau bus bleu arrive à la Gare Maritime.
*
Toulon est une ville propre. Elle n’a pas besoin de l’afficher dans les rues (ce que font les villes sales, Rouen par exemple). Il faut voir l’escouade d’engins et d’hommes qui descendent le cours Lafayette sitôt le marché terminé. Une véritable armée qui derrière elle laisse un pavage rutilant.
Après mon petit-déjeuner près d’un marché de nouveau semblable à lui-même, j’inaugure ma deuxième carte de sept jours en illimité sur le Réseau Mistral dans le bateau de huit heures, le premier depuis mon arrivée où je trouve une femme d’équipage.
Tout ça pour qu’arrivé au débarcadère, je constate que la ligne Huit ne fonctionne jusqu’à Marégau que les dimanches et jours fériés. Fichtre ! Je décide de marcher en direction des Deux Frères, ces rochers jumeaux triangulaires qui prolongent le Cap Sicié. Hélas, des propriétés privées obligent à passer par la route. Un chemin goudronné me permet de retrouver la côte mais pour aller plus loin il faudrait reprendre la route aussi je renonce et j’ai la chance qu’un bus Dix-Huit arrive. Il me ramène aux Sablettes où je croise la brigade anti incivilités et où je m’assois à la terrasse du Prôvence Plage pour un café verre d’eau. Je lis là jusqu’à l’arrivée d’un camion de vidange qui me fait fuir par le bateau de dix heures vingt-cinq.
Dans ce bateau pour Toulon voyagent un couple bourgeois et ses deux moutards à lunettes de soleil de petits frimeurs. Les parents sont assis devant leur progéniture qui a ordre de ne pas se lever sinon… (de la part de la mère, le père inexistant). A la fin de la traversée, la marmaille court partout (la mère regarde ailleurs, le père toujours inexistant). Pas une vacance scolaire sans que je me dise « Putain de famille ».
Le foie d’agneau est de retour chez Béchir, avec frites maison et salade pour quatorze euros quatre-vingt-dix. Aussi y suis-je moi-même de retour ce midi à une table ensoleillée puis je vais me percher à La Gitane pour terminer le premier volume de Correspondance d’August Strindberg. Près de moi sont une mère et son dix ans, accompagnés du grand-père ventru à casquette qui comate devant un verre de vin blanc. L’enfant tente de calculer je ne sais quoi sur une feuille de papier. « Ça fait une semaine qu’il ne va plus à l’école, il sait déjà plus poser une addition », constate la génitrice. « En rentrant tout à l’heure, tu vas m’en faire, tu vas voir. » Moi, in petto encore une fois « Putain de famille ».
Par une translation pédestre sur la droite, je me déplace jusqu’au France où je commence la lecture du deuxième volume de Correspondance d’August Strindberg. Derrière moi sont trois jeunes femmes en train de déjeuner au vin blanc. Le téléphone de l’une sonne : « Allo, là je suis au resto et j’ai pas envie de manger froid. Juste je te dis que Margot est dévastée, Manon est dévastée et moi je suis très triste, mais bon, il n’est pas mort. Allez bisous. Je te rappelle. » Que dire ?
Heureusement, il y a sur les marches du bas du port, devant le vieux gréement, une jeune fille qui lit un casque sur les oreilles et une autre qui fait de même plus loin face au large près de sa bicyclette. J’en fais une photo depuis ma table au moment où personne ne passe sur le quai et où un bateau bus bleu arrive à la Gare Maritime.
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Toulon est une ville propre. Elle n’a pas besoin de l’afficher dans les rues (ce que font les villes sales, Rouen par exemple). Il faut voir l’escouade d’engins et d’hommes qui descendent le cours Lafayette sitôt le marché terminé. Une véritable armée qui derrière elle laisse un pavage rutilant.
11 avril 2024
Un marché tout nu ce mercredi matin, que je n’ai jamais vu comme ça. A cause du vent, les grands parasols jaunes ou orange qui font le charme de cet endroit n’y sont pas. Un marché à trous aussi, beaucoup de vendeurs sont absents. C’est le jour de la fête de fin de ramadan.
Un autre serveur au Maryland, à qui je demande la formule à deux cinquante. « C’est deux soixante à partir de ce matin, je préfère vous le dire tout de suite. » « Bon, je la prends quand même. » La clientèle commente l’augmentation générale des prix de ce bar puis passe à l’actualité télévisée. « Encore un gamin qui s’est fait tuer hier » « Ouais, j’ai vu ça » « La jeunesse de maintenant, elle part en couille ».
Le ciel est bleu mais ça caille un peu. Je repasse à mon studio Air Bibi pour enfiler mon vêtement de pluie qui fait aussi office de coupe-vent. Aujourd’hui, je reste en ville, Ville Basse et Ville Haute, autrement dit : vieille ville et moins vieille ville. Je zone avec mon appareil photo dans les rues étroites et colorées et sur les vastes places, allant de monuments en lieux typiques, Cathédrale Sainte-Marie-de-la-Seds, ancienne Halle Municipale, Fontaine des Trois Dauphins envahie par la végétation place Puget, Opéra, façade du Grand Hôtel et Fontaine de la Fédération place de la Liberté, grande roue, place Raimu (Jules Muraire) lequel est statufié en joueur de cartes de chez Pagnol.
Un peu de vent, un peu de nuages, un peu de soleil, c’est le coquetèle avec lequel je m’installe au premier rang de la terrasse du Grand Café de la Rade. Bientôt les nuages l’emportent et j’ai cette grande terrasse pour moi seul.
A midi, comme un touriste, je déjeune sur le port. Mon choix se porte sur le Midi Moins le Quart dont une jeune serveuse sert de produit d’appel en disant bonjour à qui passe sur le quai. Une autre, mignonne aussi, me donne pour table à l’intérieur celle que je désire, dans un coin pour être tranquille, avec vue sur le port. Dans la salle sont déjà installées des familles de vacanciers de Paris ou de Montpellier. Je choisis la dorade au pesto (quatorze euros quatre-vingt-dix). Un jeune couple arrive et gare son landau entre la table voisine et la mienne. « Désolé, on vient vous embêter », me dit-elle. « Oui, je vois ça ». Bien que le bébé ne dorme pas, nulle autre gêne ne s’ensuit. « L’enfant est bien sage », leur dis-je en partant. « A cet âge-là, ça va », me répond-il.
C’est ensuite un long café lecture à la tersasse du France avec le soleil revenu. Parmi les promeneuses et promeneurs qui passent sur le quai, celles et ceux pour qui c’est fête portent leur plus bel habit.
*
Une femme à une autre sur le quai : « Après on va aller dans le centre ville voir s’il y a quelque chose. »
*
Toujours aussi peu de bancs à Toulon. Deux ont quand même été installés face à l’entrée et sortie du port. Impossible d’en avoir un pour soi seul. Tu te retrouves toujours à côté d’un glandu.
Un autre serveur au Maryland, à qui je demande la formule à deux cinquante. « C’est deux soixante à partir de ce matin, je préfère vous le dire tout de suite. » « Bon, je la prends quand même. » La clientèle commente l’augmentation générale des prix de ce bar puis passe à l’actualité télévisée. « Encore un gamin qui s’est fait tuer hier » « Ouais, j’ai vu ça » « La jeunesse de maintenant, elle part en couille ».
Le ciel est bleu mais ça caille un peu. Je repasse à mon studio Air Bibi pour enfiler mon vêtement de pluie qui fait aussi office de coupe-vent. Aujourd’hui, je reste en ville, Ville Basse et Ville Haute, autrement dit : vieille ville et moins vieille ville. Je zone avec mon appareil photo dans les rues étroites et colorées et sur les vastes places, allant de monuments en lieux typiques, Cathédrale Sainte-Marie-de-la-Seds, ancienne Halle Municipale, Fontaine des Trois Dauphins envahie par la végétation place Puget, Opéra, façade du Grand Hôtel et Fontaine de la Fédération place de la Liberté, grande roue, place Raimu (Jules Muraire) lequel est statufié en joueur de cartes de chez Pagnol.
Un peu de vent, un peu de nuages, un peu de soleil, c’est le coquetèle avec lequel je m’installe au premier rang de la terrasse du Grand Café de la Rade. Bientôt les nuages l’emportent et j’ai cette grande terrasse pour moi seul.
A midi, comme un touriste, je déjeune sur le port. Mon choix se porte sur le Midi Moins le Quart dont une jeune serveuse sert de produit d’appel en disant bonjour à qui passe sur le quai. Une autre, mignonne aussi, me donne pour table à l’intérieur celle que je désire, dans un coin pour être tranquille, avec vue sur le port. Dans la salle sont déjà installées des familles de vacanciers de Paris ou de Montpellier. Je choisis la dorade au pesto (quatorze euros quatre-vingt-dix). Un jeune couple arrive et gare son landau entre la table voisine et la mienne. « Désolé, on vient vous embêter », me dit-elle. « Oui, je vois ça ». Bien que le bébé ne dorme pas, nulle autre gêne ne s’ensuit. « L’enfant est bien sage », leur dis-je en partant. « A cet âge-là, ça va », me répond-il.
C’est ensuite un long café lecture à la tersasse du France avec le soleil revenu. Parmi les promeneuses et promeneurs qui passent sur le quai, celles et ceux pour qui c’est fête portent leur plus bel habit.
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Une femme à une autre sur le quai : « Après on va aller dans le centre ville voir s’il y a quelque chose. »
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Toujours aussi peu de bancs à Toulon. Deux ont quand même été installés face à l’entrée et sortie du port. Impossible d’en avoir un pour soi seul. Tu te retrouves toujours à côté d’un glandu.
10 avril 2024
Des pluies éparses, voilà ce que prévoit la météo pour Toulon ce mardi. L’une au moins est déjà tombée lorsque je sors à sept heures. De la terrasse du Maryland, je vois de gros nuages noirs qui stagnent au-dessus des ferrys pour la Corse. Toulon sous la pluie est une nouveauté pour moi et une cause de déprime pour les commerçants du marché : « Temps de merde alors ! ».
C’est le dernier jour de validité de ma carte sept jours en illimité sur le Réseau Mistral. Je décide de l’utiliser pour traverser la rade jusqu’à Saint-Mandrier. Quand j’arrive à la Gare Maritime le bateau bus pour La Seyne la quitte. Un retardataire le voyant partir sans lui s’emporte : « Sale fils de pute ! » « Sale fils de pute ! » (ne pas lui demander s’il parle de lui).
Dix minutes d’attente, vingt minutes de traversée, me voici à Saint-Mandrier. Il pleut un peu. Le Mistral est fermé le mardi. Je le remplace par le Café de la Place qui a vue sur la place où se garent les voitures. Mon café à un euro soixante-dix bu, je sors mon volume un de Correspondance d’August Strindberg. A ma droite, deux jeunes femmes parlent à voix basse pensant que je n’entends pas. Il s’agit des zones intimes de leurs filles qu’elles leur apprennent à ne laisser toucher par personne, même pas par leurs grands-mères pendant la douche. Un peu plus tard, un fils explique d’une voix forte à son père combien ça va coûter de le mettre en maison de retraite quand il voudra y aller et comment il pourrait faire pour financer ça, vendre sa maison par exemple. Je suis toujours étonné de la facilité avec laquelle les client(e)s des bars évoquent des questions d’ordre privé en public.
Rentré à Toulon, je déjeune à l’intérieur de chez Côté Cochon de cochon grillé à la broche avec son écrasé de pommes de terre (treize euros quatre-vingt-dix). Une spécialité que je retrouve avec plaisir. Le patron est d’une amabilité commerciale. « Allez, on passe au sucré ? » me dit-il quand j’en ai terminé. Je lui dis que non et paie l’addition.
La pluie a cessé mais le temps reste gris. Aussi prends-je le café (deux euros) à La Réale dont la terrasse avec vue sur le port est bien abritée. Près de moi sont deux bourgeoises d’un âge certain. L’une porte une toque. L’autre a lu hier la préface d’un recueil de poèmes de Verlaine. « Une heure cinq, dit la première après avoir consulté sa montre, toi aussi ? » La seconde confirme. Elles ont bien la même heure et elles s’ennuient. Que c’est triste Venise chante en sourdine Aznavour pour plomber un peu plus l’ambiance. Le ferry La Méridionale crache une fumée noire. Mes deux voisines se lèvent. « On va jusqu’au bout du port ? » suggère la porteuse de toque. « Non, je préfère rentrer », lui répond l’autre. Words don’t come easy to me, ajoute tout bas la sono.
Il est deux heures quand le soleil fait son apparition. Aussitôt le monde semble revivre. La serveuse se précipite pour essuyer les tables mouillées.
*
Plus de sucre avec mon café, plus de vin avec mon repas. Ça ne m’empêchera pas de continuer à me dégrader.
*
Michel de Montaigne : Je réponds ordinairement à ceux qui me demandent raison de mes voyages que je sais bien ce que je fuis mais non pas ce que je cherche.
C’est le dernier jour de validité de ma carte sept jours en illimité sur le Réseau Mistral. Je décide de l’utiliser pour traverser la rade jusqu’à Saint-Mandrier. Quand j’arrive à la Gare Maritime le bateau bus pour La Seyne la quitte. Un retardataire le voyant partir sans lui s’emporte : « Sale fils de pute ! » « Sale fils de pute ! » (ne pas lui demander s’il parle de lui).
Dix minutes d’attente, vingt minutes de traversée, me voici à Saint-Mandrier. Il pleut un peu. Le Mistral est fermé le mardi. Je le remplace par le Café de la Place qui a vue sur la place où se garent les voitures. Mon café à un euro soixante-dix bu, je sors mon volume un de Correspondance d’August Strindberg. A ma droite, deux jeunes femmes parlent à voix basse pensant que je n’entends pas. Il s’agit des zones intimes de leurs filles qu’elles leur apprennent à ne laisser toucher par personne, même pas par leurs grands-mères pendant la douche. Un peu plus tard, un fils explique d’une voix forte à son père combien ça va coûter de le mettre en maison de retraite quand il voudra y aller et comment il pourrait faire pour financer ça, vendre sa maison par exemple. Je suis toujours étonné de la facilité avec laquelle les client(e)s des bars évoquent des questions d’ordre privé en public.
Rentré à Toulon, je déjeune à l’intérieur de chez Côté Cochon de cochon grillé à la broche avec son écrasé de pommes de terre (treize euros quatre-vingt-dix). Une spécialité que je retrouve avec plaisir. Le patron est d’une amabilité commerciale. « Allez, on passe au sucré ? » me dit-il quand j’en ai terminé. Je lui dis que non et paie l’addition.
La pluie a cessé mais le temps reste gris. Aussi prends-je le café (deux euros) à La Réale dont la terrasse avec vue sur le port est bien abritée. Près de moi sont deux bourgeoises d’un âge certain. L’une porte une toque. L’autre a lu hier la préface d’un recueil de poèmes de Verlaine. « Une heure cinq, dit la première après avoir consulté sa montre, toi aussi ? » La seconde confirme. Elles ont bien la même heure et elles s’ennuient. Que c’est triste Venise chante en sourdine Aznavour pour plomber un peu plus l’ambiance. Le ferry La Méridionale crache une fumée noire. Mes deux voisines se lèvent. « On va jusqu’au bout du port ? » suggère la porteuse de toque. « Non, je préfère rentrer », lui répond l’autre. Words don’t come easy to me, ajoute tout bas la sono.
Il est deux heures quand le soleil fait son apparition. Aussitôt le monde semble revivre. La serveuse se précipite pour essuyer les tables mouillées.
*
Plus de sucre avec mon café, plus de vin avec mon repas. Ça ne m’empêchera pas de continuer à me dégrader.
*
Michel de Montaigne : Je réponds ordinairement à ceux qui me demandent raison de mes voyages que je sais bien ce que je fuis mais non pas ce que je cherche.
9 avril 2024
Un marché riquiqui composé de deux vendeurs de fruits et légumes et du fleuriste, occupe le bas du cours Lafayette ce lundi. Le ciel est un peu gris tandis que je petit-déjeune mais je sens que le bleu va venir. Au programme du jour une balade jusqu’à un endroit toulonnais réputé que je n’ai pas vu lors de mon précédent séjour : l’anse Méjean.
Pour ce faire, je prends le bus Trois jusqu’à son terminus Le Mourillon. Au-delà du Centre Nautique le sentier littoral permettant d’y aller n’est plus. La mer l’a grignoté. Il faut désormais passer par la route de la Corniche. Pour monter, ça monte.
Je marche longtemps, arrive à une petite route qui descend sur la droite où j’aperçois un autochtone à qui je demande si oui. « Oui, vous descendez et vous allez y arriver. » Pour descendre, ça descend.
En bas, un panneau m’indique que j’ai encore un kilomètre à parcourir. Je trouve sur la droite une porte en pierre suivie d’un escalier de pierre. Il monte rudement jusqu’à la Chapelle Notre-Dame-du-Cap-Falcon. Près d’elle, la statue de la Vierge qui regarde la mer est une rapatriée d’Algérie derrière qui sont accrochés à une grille des bouquets de fleurs et des messages à des péris en mer. Je suis au Cap Brun et de là-haut j’aperçois l’anse Méjean.
Redescendu, je n’ai plus longtemps à marcher pour y arriver par un escalier. Cette anse Méjean abrite quelques maisons blanches aux volets bleus, anciennement cabanons de pêcheurs. C’est un endroit qui se prête à la photo. Un café restaurant nommé L’Escale en occupe le centre. Un jeune couple ou duo commence à installer une vaste terrasse. Ce n’est pas encore ouvert mais exception est faite pour moi. Mon café verre d’eau est le bienvenu. Je les bois en observant des ouvriers en orange qui font un état des lieux de la falaise éboulée juste après la dernière construction. Deux pêcheurs sont à l’autre extrémité de ce petit bout de paradis. Ce lundi en début de matinée, je suis le seul venu d’ailleurs à en jouir.
« Deux euros cinquante », me répond le jeune homme quand je lui demande combien. « Ah oui ! », ne lui dis-je pas.
Pour rentrer, je trouve un sentier qui longe la mer en offrant de jolis points de vue en contrebas sur des rochers et de petites criques. « Nudisme interdit », prévient une pancarte où est ajouté un sibyllin « S’adresser à l’Office de Tourisme ». Après être passé sur un cheminement en bois puis sur un rebord en béton soumis aux vagues (sans que je me mouille les pieds), je me heurte à une barrière fermée. On ne va pas plus loin, le sentier n’existe plus. Un sévère escalier de pierre me permet de remonter sur la petite route.
Arrivé sur celle de la Corniche, je découvre que le bus Vingt-Trois passe par là. J’attends le prochain, dans dix minutes. Deux troupeaux de marcheurs à bâtons et à gilet jaune se succèdent sur le trottoir d’en face. La tranquillité ne va pas durer à l’anse Méjean. Je descends du bus en bas du cours Lafayette et je me perche à La Gitane avec Strindberg.
Comme déjeuner c’est un poulet basquaise à quatorze euros au Mondial Café, avec sa coupelle de piment doux, le café au France sous un soleil un peu venté. « Au bout d’un moment, l’ouverture d’esprit, ça ne suffit pas. », entends-je dire derrière moi.
*
Evidemment, en y réfléchissant, le prix du café et du reste à L’Escale peut se justifier par la difficulté d’accès. Tout ce qui est livré doit être descendu à pied. A moins qu’un bateau s’en charge ? J’aurais dû demander.
Pour ce faire, je prends le bus Trois jusqu’à son terminus Le Mourillon. Au-delà du Centre Nautique le sentier littoral permettant d’y aller n’est plus. La mer l’a grignoté. Il faut désormais passer par la route de la Corniche. Pour monter, ça monte.
Je marche longtemps, arrive à une petite route qui descend sur la droite où j’aperçois un autochtone à qui je demande si oui. « Oui, vous descendez et vous allez y arriver. » Pour descendre, ça descend.
En bas, un panneau m’indique que j’ai encore un kilomètre à parcourir. Je trouve sur la droite une porte en pierre suivie d’un escalier de pierre. Il monte rudement jusqu’à la Chapelle Notre-Dame-du-Cap-Falcon. Près d’elle, la statue de la Vierge qui regarde la mer est une rapatriée d’Algérie derrière qui sont accrochés à une grille des bouquets de fleurs et des messages à des péris en mer. Je suis au Cap Brun et de là-haut j’aperçois l’anse Méjean.
Redescendu, je n’ai plus longtemps à marcher pour y arriver par un escalier. Cette anse Méjean abrite quelques maisons blanches aux volets bleus, anciennement cabanons de pêcheurs. C’est un endroit qui se prête à la photo. Un café restaurant nommé L’Escale en occupe le centre. Un jeune couple ou duo commence à installer une vaste terrasse. Ce n’est pas encore ouvert mais exception est faite pour moi. Mon café verre d’eau est le bienvenu. Je les bois en observant des ouvriers en orange qui font un état des lieux de la falaise éboulée juste après la dernière construction. Deux pêcheurs sont à l’autre extrémité de ce petit bout de paradis. Ce lundi en début de matinée, je suis le seul venu d’ailleurs à en jouir.
« Deux euros cinquante », me répond le jeune homme quand je lui demande combien. « Ah oui ! », ne lui dis-je pas.
Pour rentrer, je trouve un sentier qui longe la mer en offrant de jolis points de vue en contrebas sur des rochers et de petites criques. « Nudisme interdit », prévient une pancarte où est ajouté un sibyllin « S’adresser à l’Office de Tourisme ». Après être passé sur un cheminement en bois puis sur un rebord en béton soumis aux vagues (sans que je me mouille les pieds), je me heurte à une barrière fermée. On ne va pas plus loin, le sentier n’existe plus. Un sévère escalier de pierre me permet de remonter sur la petite route.
Arrivé sur celle de la Corniche, je découvre que le bus Vingt-Trois passe par là. J’attends le prochain, dans dix minutes. Deux troupeaux de marcheurs à bâtons et à gilet jaune se succèdent sur le trottoir d’en face. La tranquillité ne va pas durer à l’anse Méjean. Je descends du bus en bas du cours Lafayette et je me perche à La Gitane avec Strindberg.
Comme déjeuner c’est un poulet basquaise à quatorze euros au Mondial Café, avec sa coupelle de piment doux, le café au France sous un soleil un peu venté. « Au bout d’un moment, l’ouverture d’esprit, ça ne suffit pas. », entends-je dire derrière moi.
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Evidemment, en y réfléchissant, le prix du café et du reste à L’Escale peut se justifier par la difficulté d’accès. Tout ce qui est livré doit être descendu à pied. A moins qu’un bateau s’en charge ? J’aurais dû demander.
8 avril 2024
Ce sept avril, un vide grenier est organisé par le Comité d'Intérêt Local de Toulon Centre Historique. Il se tient place d'Armes. Mon petit déjeuner Paradis Maryland pris, j’ai le temps d’y aller avant le premier bateau dominical pour La Seyne qui ne part qu’à neuf heures cinq.
Cette vaste place n’est occupée que par une petite armée de déballeurs. Hormis deux Moebius, je ne vois aucun livre d’intérêt. N’éprouvant pas le besoin ou l’envie de les acheter, je repars bredouille et vais prendre un deuxième café à La Gitane.
Après vingt minutes de traversée, je descends au premier arrêt de La Seyne-sur-Mer, Espace Marine, et marche vers un autre vide grenier, hebdomadaire celui-ci, qui se tient sur une place terreuse. Quand j’y suis passé il y a deux ans s’y trouvait un vendeur de bons livres. Il n’est plus là.
Je ne m’attarde pas et vais faire un tour dans le centre où se trouve notamment un Café des Arts mais rien à voir avec celui d’Annecy puis je m’assois sur un banc près de l’embarcadère principal face au pont-levant toujours levé pour attendre le bateau bus de dix heures trente-cinq et rentrer à Toulon en longeant les bateaux militaires.
A l’arrivée, je m’installe au premier rang de terrasse du Grand Café de la Rade où, me semble-t-il, n’opère plus la serveuse au physique un peu étrange que j’aimais bien. Il est onze heures, j’ouvre mon livre, le soleil s’efforce de poindre mais échoue.
Le Mondial Café ne fait pas à manger le dimanche comme je le croyais. Aussi je retourne chez Béchir et y déjeune d’une daube aux pennes à quatorze euros quatre-vingt-dix.
En allant boire le café à La Gitane, j’assiste à la sortie de messe des traditionalistes de l’église Saint-François-de-Paule jouxtée par le marché (deux mondes se coudoient). De fringants jeunes curés en soutane blanche draguent des paroissiennes en jupe longue. Des enfants habillés comme des images courent partout. Des pères en costume chic parlent entre eux. Je me risque à photographier ce beau monde. Mon image me déçoit.
Du haut de mon perchoir, je considère un trio de vingtenaires d’allure modeste. Tous trois grattent frénétiquement les grilles de jeux à perdre achetées par l’un d’eux qui ne cesse de faire l’aller et retour entre leur table de terrasse et le comptoir de la Française Des Jeux. Quand ils quittent les lieux, c’est avec ce commentaire du meneur : « Ils nous ont bien niqués les salauds, cent quarante balles de dépensées, zéro gagnant. »
*
Pas de cars Zou ! pour moi cette fois. Ils ne mènent qu’à des endroits que je n’ai pas envie de revoir : Bandol, Cavalaire, Carqueiranne, Le Lavandou, Saint-Tropez.
Cette vaste place n’est occupée que par une petite armée de déballeurs. Hormis deux Moebius, je ne vois aucun livre d’intérêt. N’éprouvant pas le besoin ou l’envie de les acheter, je repars bredouille et vais prendre un deuxième café à La Gitane.
Après vingt minutes de traversée, je descends au premier arrêt de La Seyne-sur-Mer, Espace Marine, et marche vers un autre vide grenier, hebdomadaire celui-ci, qui se tient sur une place terreuse. Quand j’y suis passé il y a deux ans s’y trouvait un vendeur de bons livres. Il n’est plus là.
Je ne m’attarde pas et vais faire un tour dans le centre où se trouve notamment un Café des Arts mais rien à voir avec celui d’Annecy puis je m’assois sur un banc près de l’embarcadère principal face au pont-levant toujours levé pour attendre le bateau bus de dix heures trente-cinq et rentrer à Toulon en longeant les bateaux militaires.
A l’arrivée, je m’installe au premier rang de terrasse du Grand Café de la Rade où, me semble-t-il, n’opère plus la serveuse au physique un peu étrange que j’aimais bien. Il est onze heures, j’ouvre mon livre, le soleil s’efforce de poindre mais échoue.
Le Mondial Café ne fait pas à manger le dimanche comme je le croyais. Aussi je retourne chez Béchir et y déjeune d’une daube aux pennes à quatorze euros quatre-vingt-dix.
En allant boire le café à La Gitane, j’assiste à la sortie de messe des traditionalistes de l’église Saint-François-de-Paule jouxtée par le marché (deux mondes se coudoient). De fringants jeunes curés en soutane blanche draguent des paroissiennes en jupe longue. Des enfants habillés comme des images courent partout. Des pères en costume chic parlent entre eux. Je me risque à photographier ce beau monde. Mon image me déçoit.
Du haut de mon perchoir, je considère un trio de vingtenaires d’allure modeste. Tous trois grattent frénétiquement les grilles de jeux à perdre achetées par l’un d’eux qui ne cesse de faire l’aller et retour entre leur table de terrasse et le comptoir de la Française Des Jeux. Quand ils quittent les lieux, c’est avec ce commentaire du meneur : « Ils nous ont bien niqués les salauds, cent quarante balles de dépensées, zéro gagnant. »
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Pas de cars Zou ! pour moi cette fois. Ils ne mènent qu’à des endroits que je n’ai pas envie de revoir : Bandol, Cavalaire, Carqueiranne, Le Lavandou, Saint-Tropez.
7 avril 2024
Ce six avril est le premier samedi du mois et c’est donc vide greniers au Mourillon, le seul quartier de Toulon valant le détour. Il est aussi celui des plages de la ville.
Je prends le bus Trois devant le mythique Stade Mayol. J’en descends boulevard Bazeilles dès que j’aperçois le déballage. Il y a là une moitié de professionnels et une moitié de particuliers. Chez les professionnels, quelques bouquinistes mais ces fainéants ne sont pas encore complètement installés. Chez les particuliers, rien de particulier. Je profite de cet arrêt infructueux pour monter voir l’église Saint-Flavien puis reprends un bus Trois jusqu’à son terminus Le Mourillon, près de la Base Nautique.
C’est ensuite une agréable balade le long des plages d’anse en anse, à bâbord la presqu’île de Giens, à tribord la presqu’île de Saint-Mandrier. Avant le Fort Saint-Louis, je retrouve le bar tabac La Réserve et sa terrasse surélevée avec vue sur le large. Mon café bu (un euro soixante-dix), je lis quelques lettres d’August Strindberg. Je poursuis ensuite la marche côtière jusqu’au Port Saint-Louis puis attends le bus Trois du retour à l’arrêt Mitre.
Arrivé au centre de Toulon, je m’installe au premier rang de la terrasse du Grand Café de la Rade pour un café à deux euros face à l’entrée et sortie du Port. A ma gauche s’assoient une fille et ses parents. « L’autre fois, leur dit-elle, on s’est toutes pris des nouvelles, les filles du lycée. Elles ont toutes des gosses ou bien elles sont enceintes. » Cela dit du ton de la fille qui n’a trouvé personne. Cette future pharmacienne va bientôt partir en expédition de survie sur un radeau avec trente autres volontaires. Je n’en saurai pas plus car comme ils sont déjà là depuis un quart d’heure sans que l’on se soit occupé d’eux, vexés ils s’en vont. Derrière moi, un jeune homme cite Frank Lloyd Wright : « La construction est l’art de transformer les matériaux en espace. »
C’est le jour où retourner à l’Unic Bar, chez Béchir, place Hubac, pour manger en terrasse le couscous à quinze euros quatre-vingt-dix fabriqué par son épouse dans une cuisine peu confortable. Il est toujours aussi copieux, et bon comme là-bas, disent ceux qui en viennent et ne font pas le ramadan. A ma droite, des buveurs de pastis se racontent des histoires de pêche d’antan. Ils sont contents : cet après-midi, il y a deux matchs de rugby à la télé et demain, c’est le Paris Roubaix.
Le café, il fait trop chaud pour que je le prenne ailleurs qu’à l’ombre. Je trouve une place au France, vue sur le Port et les fesses du Génie de la Navigation. Là encore, je lis quelques lettres de Strindberg après avoir bu mon noir breuvage (un euro quatre-vingts). Un couple et leurs deux filles sont à peine installés que leur bondit dessus un trentenaire du genre affranchi : « Je vends ces marque-pages artistiques. C’est moi qui les fais. C’est deux euros, mais si vous n’avez pas de thunes, je vous en offre un. Non ? Vous ne réalisez pas ce que c’est qu’un don ? Moi, à chaque fois que l’on m’a offert quelque chose, je l’ai pris, et c’est rare de nos jours les cadeaux. Bon, si vous ne comprenez pas mon geste, je vous laisse. »
Il retourne s’asseoir devant l’ancienne Mairie.
-Purée, il fallait que ça tombe sur nous, commente la mère de famille.
Le plus étrange, c’est que le seul avec qui il ne tente pas le coup, c’est moi qui ai un livre ouvert sur la table. Dommage, j’aurais aimé lui dire que je ne prendrai pas son marque-pages gratuit parce que j’ai de la thune et que je ne l’achèterai pas parce que j’en ai déjà un.
*
Au premier étage d’un petit immeuble du Mourillon un panneau « A louer » accompagné d’une banderole « Nos appartements sont plus beaux que nos collaborateurs ».
*
Dans le Port de Toulon, un affreux bateau de croisière. Non seulement il pollue et défigure l’endroit mais on entend les annonces faites à bord.
*
Pas trouvé trace de la citation de Frank Lloyd Wright en interrogeant Gougueule de retour dans mon studio Air Bibi.
Je prends le bus Trois devant le mythique Stade Mayol. J’en descends boulevard Bazeilles dès que j’aperçois le déballage. Il y a là une moitié de professionnels et une moitié de particuliers. Chez les professionnels, quelques bouquinistes mais ces fainéants ne sont pas encore complètement installés. Chez les particuliers, rien de particulier. Je profite de cet arrêt infructueux pour monter voir l’église Saint-Flavien puis reprends un bus Trois jusqu’à son terminus Le Mourillon, près de la Base Nautique.
C’est ensuite une agréable balade le long des plages d’anse en anse, à bâbord la presqu’île de Giens, à tribord la presqu’île de Saint-Mandrier. Avant le Fort Saint-Louis, je retrouve le bar tabac La Réserve et sa terrasse surélevée avec vue sur le large. Mon café bu (un euro soixante-dix), je lis quelques lettres d’August Strindberg. Je poursuis ensuite la marche côtière jusqu’au Port Saint-Louis puis attends le bus Trois du retour à l’arrêt Mitre.
Arrivé au centre de Toulon, je m’installe au premier rang de la terrasse du Grand Café de la Rade pour un café à deux euros face à l’entrée et sortie du Port. A ma gauche s’assoient une fille et ses parents. « L’autre fois, leur dit-elle, on s’est toutes pris des nouvelles, les filles du lycée. Elles ont toutes des gosses ou bien elles sont enceintes. » Cela dit du ton de la fille qui n’a trouvé personne. Cette future pharmacienne va bientôt partir en expédition de survie sur un radeau avec trente autres volontaires. Je n’en saurai pas plus car comme ils sont déjà là depuis un quart d’heure sans que l’on se soit occupé d’eux, vexés ils s’en vont. Derrière moi, un jeune homme cite Frank Lloyd Wright : « La construction est l’art de transformer les matériaux en espace. »
C’est le jour où retourner à l’Unic Bar, chez Béchir, place Hubac, pour manger en terrasse le couscous à quinze euros quatre-vingt-dix fabriqué par son épouse dans une cuisine peu confortable. Il est toujours aussi copieux, et bon comme là-bas, disent ceux qui en viennent et ne font pas le ramadan. A ma droite, des buveurs de pastis se racontent des histoires de pêche d’antan. Ils sont contents : cet après-midi, il y a deux matchs de rugby à la télé et demain, c’est le Paris Roubaix.
Le café, il fait trop chaud pour que je le prenne ailleurs qu’à l’ombre. Je trouve une place au France, vue sur le Port et les fesses du Génie de la Navigation. Là encore, je lis quelques lettres de Strindberg après avoir bu mon noir breuvage (un euro quatre-vingts). Un couple et leurs deux filles sont à peine installés que leur bondit dessus un trentenaire du genre affranchi : « Je vends ces marque-pages artistiques. C’est moi qui les fais. C’est deux euros, mais si vous n’avez pas de thunes, je vous en offre un. Non ? Vous ne réalisez pas ce que c’est qu’un don ? Moi, à chaque fois que l’on m’a offert quelque chose, je l’ai pris, et c’est rare de nos jours les cadeaux. Bon, si vous ne comprenez pas mon geste, je vous laisse. »
Il retourne s’asseoir devant l’ancienne Mairie.
-Purée, il fallait que ça tombe sur nous, commente la mère de famille.
Le plus étrange, c’est que le seul avec qui il ne tente pas le coup, c’est moi qui ai un livre ouvert sur la table. Dommage, j’aurais aimé lui dire que je ne prendrai pas son marque-pages gratuit parce que j’ai de la thune et que je ne l’achèterai pas parce que j’en ai déjà un.
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Au premier étage d’un petit immeuble du Mourillon un panneau « A louer » accompagné d’une banderole « Nos appartements sont plus beaux que nos collaborateurs ».
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Dans le Port de Toulon, un affreux bateau de croisière. Non seulement il pollue et défigure l’endroit mais on entend les annonces faites à bord.
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Pas trouvé trace de la citation de Frank Lloyd Wright en interrogeant Gougueule de retour dans mon studio Air Bibi.
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