Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
20 décembre 2021
Une lecture que je n’aurais pas faite si je n’en avais découvert un exemplaire, en collection de poche J’ai Lu, dans une boîte à livres rouennaise : L’aube le soir ou la nuit de Yasmina Reza. Je connaissais l’existence de ce livre, il ne me tentait pas. Le parcourant, je l’ai trouvé suffisamment bien écrit et intéressant pour avoir envie de le lire au lit.
L’écrivaine, avec la ténacité d’une entomologiste étudiant un insecte dont la principale caractéristique est de ne jamais rester en place, suit Nicolas Sarkozy pendant sa campagne électorale de la Présidentielle de deux mille sept.
Je me souviens comme j’étais énervé par le duel Royal Sarko, ne voulant ni de l’une ni de l’un. Aujourd’hui, c’est avec beaucoup de recul et pas mal d’amusement que je suis le spectacle de la campagne deux mille vingt-deux, me disant seulement que dans le domaine du possible, mieux vaut Macron que Pécresse, Zorglub ou Le Pen.
*
A Rouen. Un bon quart d’heure (qui me paraît trois heures) sur Jeanne d’Arc. Je veux dire sur Jeanne. Jeanne tout court, Jeanne la France en personne, l’innocente, la martyre, la sainte, l’enfant du peuple, criant le nom de Jésus au milieu des flammes, etc. Quel lien avec le Nicolas Sarkozy que je connais ? (Yasmina Reza, L’aube le soir ou la nuit)
*
Saison Un : je croise François Hollande sur un quai de la Gare Saint-Lazare. Il devient Président de la République.
Saison Deux : je croise Emmanuel Macron dans la zone commerciale de la Gare Saint-Lazare. Il devient Président de la République.
Saison Trois : je côtoie Christiane Taubira dans un train allant de la Gare Saint-Lazare à la Gare de Rouen. Là, ça ne marchera pas.
L’écrivaine, avec la ténacité d’une entomologiste étudiant un insecte dont la principale caractéristique est de ne jamais rester en place, suit Nicolas Sarkozy pendant sa campagne électorale de la Présidentielle de deux mille sept.
Je me souviens comme j’étais énervé par le duel Royal Sarko, ne voulant ni de l’une ni de l’un. Aujourd’hui, c’est avec beaucoup de recul et pas mal d’amusement que je suis le spectacle de la campagne deux mille vingt-deux, me disant seulement que dans le domaine du possible, mieux vaut Macron que Pécresse, Zorglub ou Le Pen.
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A Rouen. Un bon quart d’heure (qui me paraît trois heures) sur Jeanne d’Arc. Je veux dire sur Jeanne. Jeanne tout court, Jeanne la France en personne, l’innocente, la martyre, la sainte, l’enfant du peuple, criant le nom de Jésus au milieu des flammes, etc. Quel lien avec le Nicolas Sarkozy que je connais ? (Yasmina Reza, L’aube le soir ou la nuit)
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Saison Un : je croise François Hollande sur un quai de la Gare Saint-Lazare. Il devient Président de la République.
Saison Deux : je croise Emmanuel Macron dans la zone commerciale de la Gare Saint-Lazare. Il devient Président de la République.
Saison Trois : je côtoie Christiane Taubira dans un train allant de la Gare Saint-Lazare à la Gare de Rouen. Là, ça ne marchera pas.
18 décembre 2021
Voici venu le jour de mon test d’effort. Ce n’est pas de gaîté de cœur (c’est le cas de le dire, dirait Madame Michu) que je me dirige ce vendredi matin pour la quatrième fois vers le service de cardiologie du bâtiment Mathilde Deux.
Quand l’infirmière de mon cardiologue me fait entrer dans la salle d’examen, je lui dis que je ne suis pas rassuré. Elle m’explique que jamais elle n’a connu de problème, qu’il n’y a danger que pour un fumeur qui allumerait une cigarette juste après. Elle ajoute que l’examen est adapté à chacun et que je pourrai arrêter de pédaler à tout moment. Par ailleurs, le matériel a beaucoup évolué depuis l’examen d’il y a quinze ans qui me laisse un si mauvais souvenir.
C’est exact, fini l’espèce de vélo d’appartement. Là, on est en position presque allongée et des écrans permettent au médecin et à elle-même de constater en temps réel tout problème.
Je m’installe et me laisse faire par cette jeune femme. Elle fixe mes pieds avec des scratchs, me fait attraper une barre située derrière moi avec la main gauche pour dégager mon torse côté cœur, fixe les capteurs sur ma peau et allume les écrans. Elle me montre les battements de mon cœur au repos et m’apprend que je souffre d’une extrasystole, un battement qui détonne, un trouble du rythme qu’elle me fait entendre en tapant dans ses mains. Ce n’est pas grave en soi, beaucoup le subissent, dû à l’âge.
Mon cardiologue surgit alors de la pièce voisine. C’est parti, il faut que je pédale suffisamment vite pour atteindre soixante-dix. Au fil du temps, un frein progressif sera appliqué, rendant l'effort de plus en plus important.
Je ne réussis pas à monter au-delà de soixante-cinq, ce qui semble suffisant. A chaque augmentation de la difficulté, l’infirmière prend ma tension. Pendant ce temps, le médecin promène la douchette de l’échographie sur mon torse. Cela dure moins longtemps que je pensais. J’en ressors essoufflé mais pas épuisé. L’examen continue pendant la période de récupération.
Tout est normal, me dit le cardiologue. Mes coronaires sont en bon état. L’extrasystole disparaît pendant l’effort puis réapparait ensuite. Pourquoi donc mon cœur battait-il si vite le jour où mon généraliste s’est alarmé ? Vous êtes comme ça, me dit le spécialiste. Il n’est pas nécessaire qu’on se revoie.
Je le remercie, ainsi que son aimable infirmière puis, mon compte-rendu à la main, je rentre d’un meilleur pas, me disant toutefois que je ne peux plus compter sur la perspective d’une mort douce une nuit pendant mon sommeil, à moins que…
*
Sur mon compte-rendu : « Récupération normale. A noter : bigéminisme ventriculaire asymptomatique, sans signe de sévérité. » Le bigéminisme est un trouble du rythme cardiaque caractérisé par deux battements cardiaques très rapprochés, le second étant une extrasystole, suivis d'une pause, m’apprend Ouiquipédia.
*
-Je n’ai pas de tenue ni de chaussures de sport, ai-je dit à l’infirmière en entrant dans la salle.
-Oh ça ce n’est pas grave. J’ai déjà eu des femmes en jupe avec des talons hauts.
*
Un à qui ce test fut fatal : René Goscinny, mort à cinquante et un ans le cinq novembre mil neuf cent soixante-dix-sept. Suite à cet évènement, il fut décidé que, dorénavant, les épreuves d'effort se feraient en présence d'un cardiologue et d'un service de réanimation.
Quand l’infirmière de mon cardiologue me fait entrer dans la salle d’examen, je lui dis que je ne suis pas rassuré. Elle m’explique que jamais elle n’a connu de problème, qu’il n’y a danger que pour un fumeur qui allumerait une cigarette juste après. Elle ajoute que l’examen est adapté à chacun et que je pourrai arrêter de pédaler à tout moment. Par ailleurs, le matériel a beaucoup évolué depuis l’examen d’il y a quinze ans qui me laisse un si mauvais souvenir.
C’est exact, fini l’espèce de vélo d’appartement. Là, on est en position presque allongée et des écrans permettent au médecin et à elle-même de constater en temps réel tout problème.
Je m’installe et me laisse faire par cette jeune femme. Elle fixe mes pieds avec des scratchs, me fait attraper une barre située derrière moi avec la main gauche pour dégager mon torse côté cœur, fixe les capteurs sur ma peau et allume les écrans. Elle me montre les battements de mon cœur au repos et m’apprend que je souffre d’une extrasystole, un battement qui détonne, un trouble du rythme qu’elle me fait entendre en tapant dans ses mains. Ce n’est pas grave en soi, beaucoup le subissent, dû à l’âge.
Mon cardiologue surgit alors de la pièce voisine. C’est parti, il faut que je pédale suffisamment vite pour atteindre soixante-dix. Au fil du temps, un frein progressif sera appliqué, rendant l'effort de plus en plus important.
Je ne réussis pas à monter au-delà de soixante-cinq, ce qui semble suffisant. A chaque augmentation de la difficulté, l’infirmière prend ma tension. Pendant ce temps, le médecin promène la douchette de l’échographie sur mon torse. Cela dure moins longtemps que je pensais. J’en ressors essoufflé mais pas épuisé. L’examen continue pendant la période de récupération.
Tout est normal, me dit le cardiologue. Mes coronaires sont en bon état. L’extrasystole disparaît pendant l’effort puis réapparait ensuite. Pourquoi donc mon cœur battait-il si vite le jour où mon généraliste s’est alarmé ? Vous êtes comme ça, me dit le spécialiste. Il n’est pas nécessaire qu’on se revoie.
Je le remercie, ainsi que son aimable infirmière puis, mon compte-rendu à la main, je rentre d’un meilleur pas, me disant toutefois que je ne peux plus compter sur la perspective d’une mort douce une nuit pendant mon sommeil, à moins que…
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Sur mon compte-rendu : « Récupération normale. A noter : bigéminisme ventriculaire asymptomatique, sans signe de sévérité. » Le bigéminisme est un trouble du rythme cardiaque caractérisé par deux battements cardiaques très rapprochés, le second étant une extrasystole, suivis d'une pause, m’apprend Ouiquipédia.
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-Je n’ai pas de tenue ni de chaussures de sport, ai-je dit à l’infirmière en entrant dans la salle.
-Oh ça ce n’est pas grave. J’ai déjà eu des femmes en jupe avec des talons hauts.
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Un à qui ce test fut fatal : René Goscinny, mort à cinquante et un ans le cinq novembre mil neuf cent soixante-dix-sept. Suite à cet évènement, il fut décidé que, dorénavant, les épreuves d'effort se feraient en présence d'un cardiologue et d'un service de réanimation.
17 décembre 2021
Ce jeudi vers midi à travers le mur de mon logis me parvient un son caractéristique : celui de l’utilisation d’une bombe de peinture. Un voyou ne serait quand même pas en train d’écrire sur mon mur en plein jour ?
Je monte à l’étage et sous la fenêtre découvre un jeune homme peignant en blanc l’entourage en béton d’une plaque d’égout. Même si je ne l’ai jamais vu, je sais qu’il s’agit, pieds nus dans ses sandales, d’InkOj, un artiste de rue dont la spécialité est de s’inspirer du décor existant pour agrémenter les trottoirs et chaussées de la ville. J’ai notamment vu ses premières interventions, il y a un certain temps, du côté de la place Saint-Marc, puis celles qu’il a faites à la demande des restaurants de la rue Eau-de-Robec.
Quand le blanc est sec, l’artiste revient avec une bombe de rouge et un pochoir qui lui permet de réaliser un motif s’inspirant des murs à pans de bois des maisons de la ruelle. De mon poste d’observation, je photographie les étapes de son travail (si l’on peut appeler ça ainsi). A un moment, deux sexagénaires l’interrompent et échangent quelques mots avec lui. Je n’entends pas tout ce qui se dit mais je comprends que ce couple le félicite.
C’est aussi ce que je fais quand il a terminé, en ouvrant la fenêtre et en le remerciant. « J’ai pris des photos », lui dis-je. « Ah cool, vous me les enverrez. ».
Ce que j'effectue via le réseau social Effe Bé où nous devenons « amis ».
*
Toute la venelle a bénéficié de l’intervention d’InkOj, même motif et même couleur aux divers accidents du revêtement.
Je monte à l’étage et sous la fenêtre découvre un jeune homme peignant en blanc l’entourage en béton d’une plaque d’égout. Même si je ne l’ai jamais vu, je sais qu’il s’agit, pieds nus dans ses sandales, d’InkOj, un artiste de rue dont la spécialité est de s’inspirer du décor existant pour agrémenter les trottoirs et chaussées de la ville. J’ai notamment vu ses premières interventions, il y a un certain temps, du côté de la place Saint-Marc, puis celles qu’il a faites à la demande des restaurants de la rue Eau-de-Robec.
Quand le blanc est sec, l’artiste revient avec une bombe de rouge et un pochoir qui lui permet de réaliser un motif s’inspirant des murs à pans de bois des maisons de la ruelle. De mon poste d’observation, je photographie les étapes de son travail (si l’on peut appeler ça ainsi). A un moment, deux sexagénaires l’interrompent et échangent quelques mots avec lui. Je n’entends pas tout ce qui se dit mais je comprends que ce couple le félicite.
C’est aussi ce que je fais quand il a terminé, en ouvrant la fenêtre et en le remerciant. « J’ai pris des photos », lui dis-je. « Ah cool, vous me les enverrez. ».
Ce que j'effectue via le réseau social Effe Bé où nous devenons « amis ».
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Toute la venelle a bénéficié de l’intervention d’InkOj, même motif et même couleur aux divers accidents du revêtement.
16 décembre 2021
Ce mercredi, en Gare de Rouen, le train Nomad de sept heures vingt-quatre pour Paris est aussi long que prévu. J’y ai donc place assise selon ma réservation. Une voix d’homme s’adresse à nous : « J’ai le plaisir d’être votre conducteur. Nous sommes dans un train Chrono Plus. Nous circulons à l’heure. »
Porte de Montempoivre est-il écrit sur la girouette du bus Vingt-Neuf. Je ne saurai jamais à quoi ressemble ce terminus car après l’embouteillage du Marais, j’en descends toujours à Bastille. La serveuse du Café du Faubourg n’omet pas de me demander mon passe sanitaire avant de me servir un café au comptoir. Nous y sommes trois, personne en salle, personne en terrasse. A dix heures, je vais bookoffier à côté, puis me rends au marché d’Aligre. Les deux marchands de livres sont présents. La plupart des ouvrages qu’ils proposent étaient déjà là avant-guerre.
Pas loin de la statue de Beaumarchais, où j’ai souvent eu rendez-vous avec celle qui travaille près de la Bastille, se trouve la brasserie Bofinger. De part et d’autre de son nom sont inscrites deux mentions : « Déjeuners » « Soupers ». C’est là qu’à son initiative elle doit me retrouver à midi et demi.
Après la porte tournante, je montre mon passe sanitaire puis négocie avec celui qui me conduit en salle une table pas trop collée aux autres. « Où que vous soyez, vous aurez des voisins, me dit-il, nous sommes toujours complets. » Cette maison remonte à mil huit cent soixante-quatre. Elle fut créée par Frédéric Bofinger, venu de son Alsace natale. Ce fut la première à Paris à servir de la bière « à la pompe ». Dans les années Vingt, les gendres reprirent l’affaire et, grâce à l’architecte Legay et au décorateur Mitgen, elle devint la « plus belle brasserie de Paris ». François Mitterrand y fêta son entrée à l’Elysée.
Par la vitre, je la vois arriver. Ce mercredi, nous fêtons le plaisir de nous retrouver, ainsi que tout ce que le Covid nous a empêché de célébrer au cours de cette année, et aussi la fin de celle-ci. Bien sûr, nous choisissons la choucroute, avec auparavant un velouté de légumes pour elle et six escargots pour moi, et enfin une île flottante pour deux. Une serveuse asiatique nous apporte dans un seau de glace une bouteille d’un vin d’Alsace que nous verserons dans les petits verres au pied vert. Durant deux heures et demie, nous passons un très bon moment, le seul bémol étant le bruit ambiant qui nuit un peu à la conversation.
Avant de quitter ce bel endroit, je l’invite à entrer dans les toilettes des messieurs pour admirer les urinoirs en céramique blanche ornés de gros poissons puis elle m’accompagne jusqu’à l’arrêt du bus Vingt-Neuf. En attendant qu’il arrive, je la regarde traverser la place de la Bastille. Quand elle est de l’autre côté, elle se retourne. Nous nous faisons un dernier signe la main.
*
Un train Chrono Plus, première fois que j’entends cette dénomination. Ce bolide va de Rouen à Paris en une heure quinze. Au début du vingtième siècle, c’était en une heure.
Porte de Montempoivre est-il écrit sur la girouette du bus Vingt-Neuf. Je ne saurai jamais à quoi ressemble ce terminus car après l’embouteillage du Marais, j’en descends toujours à Bastille. La serveuse du Café du Faubourg n’omet pas de me demander mon passe sanitaire avant de me servir un café au comptoir. Nous y sommes trois, personne en salle, personne en terrasse. A dix heures, je vais bookoffier à côté, puis me rends au marché d’Aligre. Les deux marchands de livres sont présents. La plupart des ouvrages qu’ils proposent étaient déjà là avant-guerre.
Pas loin de la statue de Beaumarchais, où j’ai souvent eu rendez-vous avec celle qui travaille près de la Bastille, se trouve la brasserie Bofinger. De part et d’autre de son nom sont inscrites deux mentions : « Déjeuners » « Soupers ». C’est là qu’à son initiative elle doit me retrouver à midi et demi.
Après la porte tournante, je montre mon passe sanitaire puis négocie avec celui qui me conduit en salle une table pas trop collée aux autres. « Où que vous soyez, vous aurez des voisins, me dit-il, nous sommes toujours complets. » Cette maison remonte à mil huit cent soixante-quatre. Elle fut créée par Frédéric Bofinger, venu de son Alsace natale. Ce fut la première à Paris à servir de la bière « à la pompe ». Dans les années Vingt, les gendres reprirent l’affaire et, grâce à l’architecte Legay et au décorateur Mitgen, elle devint la « plus belle brasserie de Paris ». François Mitterrand y fêta son entrée à l’Elysée.
Par la vitre, je la vois arriver. Ce mercredi, nous fêtons le plaisir de nous retrouver, ainsi que tout ce que le Covid nous a empêché de célébrer au cours de cette année, et aussi la fin de celle-ci. Bien sûr, nous choisissons la choucroute, avec auparavant un velouté de légumes pour elle et six escargots pour moi, et enfin une île flottante pour deux. Une serveuse asiatique nous apporte dans un seau de glace une bouteille d’un vin d’Alsace que nous verserons dans les petits verres au pied vert. Durant deux heures et demie, nous passons un très bon moment, le seul bémol étant le bruit ambiant qui nuit un peu à la conversation.
Avant de quitter ce bel endroit, je l’invite à entrer dans les toilettes des messieurs pour admirer les urinoirs en céramique blanche ornés de gros poissons puis elle m’accompagne jusqu’à l’arrêt du bus Vingt-Neuf. En attendant qu’il arrive, je la regarde traverser la place de la Bastille. Quand elle est de l’autre côté, elle se retourne. Nous nous faisons un dernier signe la main.
*
Un train Chrono Plus, première fois que j’entends cette dénomination. Ce bolide va de Rouen à Paris en une heure quinze. Au début du vingtième siècle, c’était en une heure.
14 décembre 2021
Une bonne lecture : Paris 1941 de Felix Hartlaub publié chez Solin/Actes Sud en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.
Soldat de l’armée nazie, Felix Hartlaub est muté à la commission des archives historiques de Paris. Il tient alors un journal où il relate ses balades du dimanche dans la capitale occupée et sa banlieue. Cela dans un style qui oscille entre le poème en prose et le reportage satirique, comme il le raconte dans une lettre à sa famille.
Une seule fois, Felix Hartlaub quitte la région parisienne et c’est pour passer une journée à Rouen. Ce qu’il narre sous le titre Souvenir de Rouen et dont voici l’essentiel :
La ville, gris-violet, peu de rouge brique. Les églises aux couleurs de toiles d’araignées. Le cuivre vert du toit du chœur de la cathédrale. Saint-Ouen sonne de toutes ses cloches, le son semble provenir de la nef de l’église, ne monte pas. Les tours se tiennent là muettes, éteintes dans leur manteau de dentelle de pierre. La Fête-Dieu a été reportée à ce dimanche. La sonnerie des cloches s’arrête dans un écho, s’abat sur les toits les plus proches. Le gros bourdon de la cathédrale continue seul en de lentes volées, mais avec un son étouffé lui aussi, souterrain, et on ne sait de laquelle des deux tours. Le quartier anéanti entre la cathédrale et le fleuve ; vu de là-haut, il se resserre en un empan de coloris roussis. Les murs extérieurs des halles sont encore debout, sur un étage, répètent sur une longue étendue toujours le même carré de fenêtres vides. Des murs de vieilles maisons à colombages, des rayures couleur noisette serrées les unes contre les autres. Les quais, qui s’étendent jusque dans la zone de décombres, à nouveau jonchés de sable jaune après l’inondation, n’ont pas encore de profil cohérent. De noires figurines du dimanche se déplacent lentement en amont et en aval du fleuve.
Le pont, traversé par de nouvelles poutrelles rouge minium, tient encore à peine. Plus loin, en amont du fleuve, une étroite passerelle de secours pour les piétons, tordue elle aussi. Les entrepôts peu élevés qui se trouvent sur l’île paraissent avoir été enfoncés par le simple souffle ou par l’onde de choc des explosions, ils se sont affaissés sur eux-mêmes. Des toits qui pendent jusqu’au sol, recouverts de toutes les tuiles, tombés dans les bosquets de sureaux des jardins du rivage.
Plus loin vers le sud, une partie de la « flotte d’invasion » est à l’ancre au milieu du fleuve, des remorqueurs sombres réduits en une masse compacte. Dans le squelette parcimonieusement simple d’un moderne pont suspendu de chemin de fer, il ne manque qu’une pièce étroite. En aval, la Seine s’écarte infiniment loin vers l’ouest. Une rive escarpée, de hauteur égale et couverte de sombres forets la suit d’un côté. Elle se perd dans les brumes entre des zones de forêts denses.
*
Felix Hartlaub, fils d’un historien d'art, le devint lui-même, d’où son affectation en décembre mil neuf cent quarante à la commission des archives historiques à Paris qui examinait les archives françaises saisies.
Ultérieurement, il sera envoyé à l'Oberkommando de la Wehrmacht à Berlin. De mai mil neuf cent quarante-deux à mars mil neuf cent quarante-cinq, il fera partie de l'équipe du Journal de Guerre (Kriegstagebuch). Au cours de cette période, il aura accès au cercle fermé du Quartier général du Führer à Vinnytsia, Rastenburg et Berchtesgaden.
En avril mil neuf cent quarante-cinq, Felix Hartlaub sera muté à Berlin, au grade de caporal-chef, dans une unité d'infanterie de combat et un jour disparaitra en se rendant à Berlin-Spandau.
La déclaration officielle de son décès, publiée dix ans plus tard, indique comme date de décès le trente et un décembre mil neuf cent quarante-cinq.
Soldat de l’armée nazie, Felix Hartlaub est muté à la commission des archives historiques de Paris. Il tient alors un journal où il relate ses balades du dimanche dans la capitale occupée et sa banlieue. Cela dans un style qui oscille entre le poème en prose et le reportage satirique, comme il le raconte dans une lettre à sa famille.
Une seule fois, Felix Hartlaub quitte la région parisienne et c’est pour passer une journée à Rouen. Ce qu’il narre sous le titre Souvenir de Rouen et dont voici l’essentiel :
La ville, gris-violet, peu de rouge brique. Les églises aux couleurs de toiles d’araignées. Le cuivre vert du toit du chœur de la cathédrale. Saint-Ouen sonne de toutes ses cloches, le son semble provenir de la nef de l’église, ne monte pas. Les tours se tiennent là muettes, éteintes dans leur manteau de dentelle de pierre. La Fête-Dieu a été reportée à ce dimanche. La sonnerie des cloches s’arrête dans un écho, s’abat sur les toits les plus proches. Le gros bourdon de la cathédrale continue seul en de lentes volées, mais avec un son étouffé lui aussi, souterrain, et on ne sait de laquelle des deux tours. Le quartier anéanti entre la cathédrale et le fleuve ; vu de là-haut, il se resserre en un empan de coloris roussis. Les murs extérieurs des halles sont encore debout, sur un étage, répètent sur une longue étendue toujours le même carré de fenêtres vides. Des murs de vieilles maisons à colombages, des rayures couleur noisette serrées les unes contre les autres. Les quais, qui s’étendent jusque dans la zone de décombres, à nouveau jonchés de sable jaune après l’inondation, n’ont pas encore de profil cohérent. De noires figurines du dimanche se déplacent lentement en amont et en aval du fleuve.
Le pont, traversé par de nouvelles poutrelles rouge minium, tient encore à peine. Plus loin, en amont du fleuve, une étroite passerelle de secours pour les piétons, tordue elle aussi. Les entrepôts peu élevés qui se trouvent sur l’île paraissent avoir été enfoncés par le simple souffle ou par l’onde de choc des explosions, ils se sont affaissés sur eux-mêmes. Des toits qui pendent jusqu’au sol, recouverts de toutes les tuiles, tombés dans les bosquets de sureaux des jardins du rivage.
Plus loin vers le sud, une partie de la « flotte d’invasion » est à l’ancre au milieu du fleuve, des remorqueurs sombres réduits en une masse compacte. Dans le squelette parcimonieusement simple d’un moderne pont suspendu de chemin de fer, il ne manque qu’une pièce étroite. En aval, la Seine s’écarte infiniment loin vers l’ouest. Une rive escarpée, de hauteur égale et couverte de sombres forets la suit d’un côté. Elle se perd dans les brumes entre des zones de forêts denses.
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Felix Hartlaub, fils d’un historien d'art, le devint lui-même, d’où son affectation en décembre mil neuf cent quarante à la commission des archives historiques à Paris qui examinait les archives françaises saisies.
Ultérieurement, il sera envoyé à l'Oberkommando de la Wehrmacht à Berlin. De mai mil neuf cent quarante-deux à mars mil neuf cent quarante-cinq, il fera partie de l'équipe du Journal de Guerre (Kriegstagebuch). Au cours de cette période, il aura accès au cercle fermé du Quartier général du Führer à Vinnytsia, Rastenburg et Berchtesgaden.
En avril mil neuf cent quarante-cinq, Felix Hartlaub sera muté à Berlin, au grade de caporal-chef, dans une unité d'infanterie de combat et un jour disparaitra en se rendant à Berlin-Spandau.
La déclaration officielle de son décès, publiée dix ans plus tard, indique comme date de décès le trente et un décembre mil neuf cent quarante-cinq.
12 décembre 2021
Ce douze décembre deux mille vingt et un est le jour du bicentenaire de la naissance de Gustave Flaubert. Laissons-le évoquer sa venue au monde dans une lettre à Louise Colet écrite à Rouen le jeudi soir vingt et un janvier mil huit cent quarante-sept :
La belle chose ! ils s’aimaient ! ils se le disaient et une nuit ils m’ont fait, pour leur plus grande satisfaction. Et quant à la mienne ils ne s’en souciaient guère.
Sa ville natale, durant un an, a multiplié les animations plus ou moins bouffonnes pour célébrer ce double centenaire. S’il avait pu le savoir, il en aurait été fort marri, lui qui détestait Rouen et ses habitants, comme on peut notamment le lire dans les missives à sa maîtresse :
Je ne reçois aucune visite, je n’ai à Rouen aucun ami. (Croisset, mercredi vingt-six aout mil huit cent quarante-six)
D’abord : 1° tout ce qui est vers est sifflé à Rouen ; 2° tout ce qui est beau : 3° les cochonneries seules réussissent. Voilà mon opinion, et ancrée si avant dans mon individu que, si jamais je faisais quelque chose pour la scène, je défendrais qu’on le jouât sur le théâtre du pays qui me donna le jour. (Pontorson, mercredi quatorze juillet mil huit cent quarante-sept)
Bouilhet va s’occuper des journaux de Rouen. Ce sont des brutes, des ânes, etc…. Faire un article sérieux dans l’une de ces feuilles, c’est du temps complètement perdu. – Est-ce qu’on lit à Rouen ! (Croisset, mercredi minuit premier septembre mil huit cent cinquante-deux)
Il faut que j’aille à Rouen pour un enterrement ; quelle corvée ! Ce n’est pas l’enterrement qui m’attriste, mais la vue de tous les bourgeois qui y seront. (Croisset, dimanche soir dix-neuf septembre mil huit cent cinquante-deux)
Figure-toi, du reste, que je connais bien peu de monde, ayant, depuis 15 ans, fait tout ce que j’ai pu pour laisser tomber dans l’eau toute espèce de relation avec mes compatriotes. – Et j’ai réussi. Beaucoup de Rouennais ignorent parfaitement mon existence. (Croisset, dimanche dix avril mil huit cent cinquante-trois)
Pour conclure, cette réflexion du célébré du jour à la même dans une lettre écrite à Croisset pendant la nuit du mardi vingt novembre mil huit cent cinquante-trois :
Quelle saleté que la vie ! Quel maigre potage couvert de cheveux !
La belle chose ! ils s’aimaient ! ils se le disaient et une nuit ils m’ont fait, pour leur plus grande satisfaction. Et quant à la mienne ils ne s’en souciaient guère.
Sa ville natale, durant un an, a multiplié les animations plus ou moins bouffonnes pour célébrer ce double centenaire. S’il avait pu le savoir, il en aurait été fort marri, lui qui détestait Rouen et ses habitants, comme on peut notamment le lire dans les missives à sa maîtresse :
Je ne reçois aucune visite, je n’ai à Rouen aucun ami. (Croisset, mercredi vingt-six aout mil huit cent quarante-six)
D’abord : 1° tout ce qui est vers est sifflé à Rouen ; 2° tout ce qui est beau : 3° les cochonneries seules réussissent. Voilà mon opinion, et ancrée si avant dans mon individu que, si jamais je faisais quelque chose pour la scène, je défendrais qu’on le jouât sur le théâtre du pays qui me donna le jour. (Pontorson, mercredi quatorze juillet mil huit cent quarante-sept)
Bouilhet va s’occuper des journaux de Rouen. Ce sont des brutes, des ânes, etc…. Faire un article sérieux dans l’une de ces feuilles, c’est du temps complètement perdu. – Est-ce qu’on lit à Rouen ! (Croisset, mercredi minuit premier septembre mil huit cent cinquante-deux)
Il faut que j’aille à Rouen pour un enterrement ; quelle corvée ! Ce n’est pas l’enterrement qui m’attriste, mais la vue de tous les bourgeois qui y seront. (Croisset, dimanche soir dix-neuf septembre mil huit cent cinquante-deux)
Figure-toi, du reste, que je connais bien peu de monde, ayant, depuis 15 ans, fait tout ce que j’ai pu pour laisser tomber dans l’eau toute espèce de relation avec mes compatriotes. – Et j’ai réussi. Beaucoup de Rouennais ignorent parfaitement mon existence. (Croisset, dimanche dix avril mil huit cent cinquante-trois)
Pour conclure, cette réflexion du célébré du jour à la même dans une lettre écrite à Croisset pendant la nuit du mardi vingt novembre mil huit cent cinquante-trois :
Quelle saleté que la vie ! Quel maigre potage couvert de cheveux !
11 décembre 2021
Ce jeudi, vers quatorze heures quinze, l’ascenseur de la Clinique Mathilde me mène au deuxième étage. Au bout du couloir est la petite entreprise d’ophtalmologie où j’ai rendez-vous un quart d’heure plus tard. Je laisse ma Carte Vitale à l’accueil puis vais m’asseoir dans la salle d’attente en compagnie de personnes de mon âge. Peu après arrive un ancêtre chancelant sur sa canne, accompagné d’un moins vieux que lui. Tous deux se vouvoient. A leur dialogue, je songe à un Maire de village accompagnant l’un de ses administrés qui, comme il le dit, n’aurait jamais pu arriver là sans lui.
Comme d’habitude, c’est d’abord une orthoptiste qui appelle mon nom. Elle se livre aux examens coutumiers. Ma vue a très légèrement baissé. Le flou que je ressens à l’œil droit est dû, ainsi que je le savais, à la cataracte. Il faut que je lui pose la question pour que cette jeune femme me donne ma tension oculaire : seize et dix-sept. Elle me met une goutte dans chaque œil et me renvoie en salle d’attente.
L’ancêtre prend ma place. Comme la cloison est mince, chacun entend qu’il a bien du mal à comprendre ce que lui dit l’orthoptiste. Va-t-il, oui ou non, voir la petite croix verte ?
Comme d’habitude, ce n’est pas l’ophtalmologue en titre qui me reçoit mais un remplaçant. Il m’annonce que mon glaucome est stable puis il m’examine lui aussi en me collant une violente lumière dans les yeux. Il veut me faire une ordonnance pour des verres de lunettes adaptés à ma légère baisse de vue mais je lui dis que ce n’est pas la peine. Il renouvelle pour un an l’ordonnance du collyre destiné à ralentir mon glaucome. Il faudrait songer à une opération de la cataracte dans un an ou deux, laquelle pourrait être jumelée avec la pose d’un stent pour diminuer la tension. « Ça me laisse le temps de me faire à l’idée », lui dis-je.
Quand je reviens pédestrement vers chez moi, la vue brouillée par les gouttes, j’ai l’impression d’être sorti d’un tribunal, condamné à une peine avec sursis.
Comme d’habitude, c’est d’abord une orthoptiste qui appelle mon nom. Elle se livre aux examens coutumiers. Ma vue a très légèrement baissé. Le flou que je ressens à l’œil droit est dû, ainsi que je le savais, à la cataracte. Il faut que je lui pose la question pour que cette jeune femme me donne ma tension oculaire : seize et dix-sept. Elle me met une goutte dans chaque œil et me renvoie en salle d’attente.
L’ancêtre prend ma place. Comme la cloison est mince, chacun entend qu’il a bien du mal à comprendre ce que lui dit l’orthoptiste. Va-t-il, oui ou non, voir la petite croix verte ?
Comme d’habitude, ce n’est pas l’ophtalmologue en titre qui me reçoit mais un remplaçant. Il m’annonce que mon glaucome est stable puis il m’examine lui aussi en me collant une violente lumière dans les yeux. Il veut me faire une ordonnance pour des verres de lunettes adaptés à ma légère baisse de vue mais je lui dis que ce n’est pas la peine. Il renouvelle pour un an l’ordonnance du collyre destiné à ralentir mon glaucome. Il faudrait songer à une opération de la cataracte dans un an ou deux, laquelle pourrait être jumelée avec la pose d’un stent pour diminuer la tension. « Ça me laisse le temps de me faire à l’idée », lui dis-je.
Quand je reviens pédestrement vers chez moi, la vue brouillée par les gouttes, j’ai l’impression d’être sorti d’un tribunal, condamné à une peine avec sursis.
10 décembre 2021
De la station Iéna, ce mercredi, je me rends par la Neuf et la Une à la station Châtelet et rejoins, rue Saint-Martin, la librairie d’occasion Book-Off, ex Gai Rossignol, ex Mona Lisait, devant laquelle est désormais garé un vélo cargo utilisé pour aller chercher à domicile les livres à vendre. Cette bouquinerie dispose d’un sous-sol que certains clients ne voient pas. Je suis donc assez tranquille pour fureter dans les rayons de Littérature à un euro. Parmi les romans se cachent quelques livres pour moi : Estive et L’Assoiffée de Blaise Hofmann (Editions Zoé), Portrait des Vaudois de Jacques Chessex (Babel/Labor/L’Aire) et La Méridienne Saint-Malo Bamako de Marc Roger (Folies d’Encre & Merle Moqueur).
A midi, je choisis pour déjeuner Le Vigouroux, place Sainte-Opportune, qui propose une formule entrée plat à douze euros cinquante. Cette gargote n’est pas bien grande, On n’y demande pas le passe sanitaire. Le personnel et l’essentiel de la clientèle se baladent sans masque. Mes voisins les plus proches sont des collègues en télétravail. Ils en profitent pour manger au restaurant. Dans ce lieu à haut risque, je ne reste que le temps nécessaire pour consommer un potage de légumes et un confit de canard frites salade.
De retour à l’air libre, je passe rue des Bourbonnais pour voir les livres de trottoir de Gilda. Je découvre les vitres de la bouquinerie couvertes d’affichettes « Bail à céder ». Elle est cependant ouverte. Après fouille, j’entre avec à la main Rimbaud ailé précédé de La Disparition, textes et photos de Jean-Luc Parant, un joli petit ouvrage publié par le Musée-Bibliothèque Arthur Rimbaud, vendu là un euro cinquante. Je m’enquiers auprès du responsable de la situation de la librairie, va-t-elle fermer bientôt ?
-On n’est pas pressé, me répond le sexagénaire. On attend le pige... heu l’acheteur. Après, ce sera moins trente, moins cinquante, moins soixante-dix, on donne, on jette.
Je lui demande si la libraire Parallèles, la cousine de Gilda, est sur la même pente fatale.
-Non, ils sont jeunes là-bas. Eux, ils font le neuf, ils ne reprendront pas l’occasion, ils n’ont pas la place.
Après la mort de la meilleure des Boulinier, celle de Gibert Jeunes, ce sera donc celle de Gilda. Fichue époque.
Le métro Quatorze me rapproche du Book-Off de la rue Monsigny. C’est encore l’heure méridienne, d’où la présence de trop de monde, un problème qui se résout assez vite. Là aussi, quelques livres à un euro sont pour moi : La Lorette d’Edmond et Jules de Goncourt (Du Lérot, éditeur), Ce monde et moi d’Abel Bonnard (Dismas) et Les ossements dispersés de Jimmy Gladiator (L’Embellie Roturière), ce dernier avec un envoi de l’auteur « Pour Christine, sans effet de manche et de méditerranée ».
*
Retour à Rouen par le seize heures quarante où j’ai place Trente-Sept en voiture Quatre. Derrière moi, on s’extasie sur ce train Nomad : « « C’est plus propre que dans le Tégévé ». Devant moi, tandis que son mari lit sur tablette, une femme est plongée dans un article de la revue Psychologies : « Un mirage, le coup de foudre en ligne ? ».
A midi, je choisis pour déjeuner Le Vigouroux, place Sainte-Opportune, qui propose une formule entrée plat à douze euros cinquante. Cette gargote n’est pas bien grande, On n’y demande pas le passe sanitaire. Le personnel et l’essentiel de la clientèle se baladent sans masque. Mes voisins les plus proches sont des collègues en télétravail. Ils en profitent pour manger au restaurant. Dans ce lieu à haut risque, je ne reste que le temps nécessaire pour consommer un potage de légumes et un confit de canard frites salade.
De retour à l’air libre, je passe rue des Bourbonnais pour voir les livres de trottoir de Gilda. Je découvre les vitres de la bouquinerie couvertes d’affichettes « Bail à céder ». Elle est cependant ouverte. Après fouille, j’entre avec à la main Rimbaud ailé précédé de La Disparition, textes et photos de Jean-Luc Parant, un joli petit ouvrage publié par le Musée-Bibliothèque Arthur Rimbaud, vendu là un euro cinquante. Je m’enquiers auprès du responsable de la situation de la librairie, va-t-elle fermer bientôt ?
-On n’est pas pressé, me répond le sexagénaire. On attend le pige... heu l’acheteur. Après, ce sera moins trente, moins cinquante, moins soixante-dix, on donne, on jette.
Je lui demande si la libraire Parallèles, la cousine de Gilda, est sur la même pente fatale.
-Non, ils sont jeunes là-bas. Eux, ils font le neuf, ils ne reprendront pas l’occasion, ils n’ont pas la place.
Après la mort de la meilleure des Boulinier, celle de Gibert Jeunes, ce sera donc celle de Gilda. Fichue époque.
Le métro Quatorze me rapproche du Book-Off de la rue Monsigny. C’est encore l’heure méridienne, d’où la présence de trop de monde, un problème qui se résout assez vite. Là aussi, quelques livres à un euro sont pour moi : La Lorette d’Edmond et Jules de Goncourt (Du Lérot, éditeur), Ce monde et moi d’Abel Bonnard (Dismas) et Les ossements dispersés de Jimmy Gladiator (L’Embellie Roturière), ce dernier avec un envoi de l’auteur « Pour Christine, sans effet de manche et de méditerranée ».
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Retour à Rouen par le seize heures quarante où j’ai place Trente-Sept en voiture Quatre. Derrière moi, on s’extasie sur ce train Nomad : « « C’est plus propre que dans le Tégévé ». Devant moi, tandis que son mari lit sur tablette, une femme est plongée dans un article de la revue Psychologies : « Un mirage, le coup de foudre en ligne ? ».
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