Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
2 février 2022
Ce mardi, sortant du restaurant japonais où j’ai déjeuné après avoir souhaité une bonne année du Tigre à son gérant chinois, je grimpe encore une fois un escalier en béton où montent la garde des mannequins de jeunes femmes vêtues de robes on ne peut plus affriolantes. La dernière a entre les mains une affichette qui rappelle que, comme dans tous les commerces, le masque est obligatoire à l’intérieur du sexe-cheupe Espace Carré Blanc. Nul client ne s’y trouve. La jeune femme du comptoir va chercher le colis Mondial Relay à mon nom. Celui-ci contient plusieurs livres.
Je les ai achetés chez Gibert via Rakuten, cinq livres pour seulement quinze euros soixante et onze, et des bons : Lettres d’amour de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais et Amélie Houret de La Morinaie (Fayard), Correspondance de Brancusi et Marthe (Fage), Correspondance de Salvador Dali et Federico Garcia Lorca (Carrère), Ma menthe à l’aube mon amante correspondance amoureuse de Marc Alyn et Nohad Salameh (Pierre-Guillaume de Roux) et Correspondances 1932-1959 Vouszenserancinq ! de Boris Vian (Fayard).
Je ne comprends sans doute rien au commerce car je suis étonné qu’en magasin à Paris les prix des livres d’occasion soient bien plus élevés et ces livres-là non proposés. Il me semble curieux que Gibert préfère gagner moins d’argent en les vendant à distance, à prix bas, avec des frais d’emballage et d’envoi.
Quoi qu’il en soit, me voici bien loti pour mes futures lectures. Sans doute commercerai-je par Vian. Pour l’instant, je lis au lit Tu n’es pas une mère comme les autres d’Angelika Schrobsdorff, qui fut l’épouse de Claude Lanzmann, dans l’édition de poche Libretto de chez Phébus, un gros ouvrage au titre décourageant que j’avais acheté un euro chez Book-Off il y a quelque temps pour celle qui travaille à Paris et dont la lecture l’a marquée, au point que j’ai souhaité le lire à mon tour. Je ne suis pas déçu par cette évocation affectueuse et ironique de la vie de cette mère juive allemande par sa fille.
*
Lecture précédente : un autre livre à un euro de chez Book-Off : La dernière année de Philippe Vilain (L’Infini/Gallimard) dans lequel l’auteur évoque la vie de son père qui meurt d’un cancer de la gorge à la Pitié-Salpêtrière :
Mon père était alcoolique.
Ces quatre mots s’imposent aujourd’hui en moi. Longtemps j’ai été sans pouvoir me formuler cette évidence.
L’enfance et l’adolescence de Philippe Vilain se déroulent dans l’Eure en des lieux qui me sont familiers : Beaumont-le-Roger, Notre-Dame-de-la-Garenne, le Péhemmu de Gaillon rue du Général-de-Gaulle, Nétreville, la longue côte de Saint-Sébastien-de-Morsent, l’Iton en contrebas de la route de Glisolles, l’église Sainte-Foy de Conches.
Il fut un temps où je pouvais parcourir en voiture tout ce département sans carte routière.
Je les ai achetés chez Gibert via Rakuten, cinq livres pour seulement quinze euros soixante et onze, et des bons : Lettres d’amour de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais et Amélie Houret de La Morinaie (Fayard), Correspondance de Brancusi et Marthe (Fage), Correspondance de Salvador Dali et Federico Garcia Lorca (Carrère), Ma menthe à l’aube mon amante correspondance amoureuse de Marc Alyn et Nohad Salameh (Pierre-Guillaume de Roux) et Correspondances 1932-1959 Vouszenserancinq ! de Boris Vian (Fayard).
Je ne comprends sans doute rien au commerce car je suis étonné qu’en magasin à Paris les prix des livres d’occasion soient bien plus élevés et ces livres-là non proposés. Il me semble curieux que Gibert préfère gagner moins d’argent en les vendant à distance, à prix bas, avec des frais d’emballage et d’envoi.
Quoi qu’il en soit, me voici bien loti pour mes futures lectures. Sans doute commercerai-je par Vian. Pour l’instant, je lis au lit Tu n’es pas une mère comme les autres d’Angelika Schrobsdorff, qui fut l’épouse de Claude Lanzmann, dans l’édition de poche Libretto de chez Phébus, un gros ouvrage au titre décourageant que j’avais acheté un euro chez Book-Off il y a quelque temps pour celle qui travaille à Paris et dont la lecture l’a marquée, au point que j’ai souhaité le lire à mon tour. Je ne suis pas déçu par cette évocation affectueuse et ironique de la vie de cette mère juive allemande par sa fille.
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Lecture précédente : un autre livre à un euro de chez Book-Off : La dernière année de Philippe Vilain (L’Infini/Gallimard) dans lequel l’auteur évoque la vie de son père qui meurt d’un cancer de la gorge à la Pitié-Salpêtrière :
Mon père était alcoolique.
Ces quatre mots s’imposent aujourd’hui en moi. Longtemps j’ai été sans pouvoir me formuler cette évidence.
L’enfance et l’adolescence de Philippe Vilain se déroulent dans l’Eure en des lieux qui me sont familiers : Beaumont-le-Roger, Notre-Dame-de-la-Garenne, le Péhemmu de Gaillon rue du Général-de-Gaulle, Nétreville, la longue côte de Saint-Sébastien-de-Morsent, l’Iton en contrebas de la route de Glisolles, l’église Sainte-Foy de Conches.
Il fut un temps où je pouvais parcourir en voiture tout ce département sans carte routière.
1er février 2022
C’est avant que ma commissure gauche blessée par mon dentiste lors de la première séance de gros travaux sur une dent du fond ait eu le temps de cicatriser que je reprends ce lundi après-midi le chemin de son cabinet. Un rendez-vous à seize heures, qui me fait craindre de devoir attendre, mais quand j’arrive la salle d’attente est vide. Sitôt le patient précédent parti c’est à moi.
L’homme de l’art me promet de faire son possible pour ne pas m’abîmer davantage la lèvre, mais vu ma difficulté à ouvrir la bouche en grand il faut bien qu’il se fasse un passage pour atteindre le chantier en cours.
Une seconde fois je supporte ce qu’il fait stoïquement, et sans comprendre. Ce ne sont pas les quelques mots qu’il échange avec sa discrète et efficace assistante qui m’éclairent.
Enfin, au bout d’une demi-heure, c’est terminé. Après m’avoir mis une pommade cicatrisante au coin des lèvres, il m’invite à me lever.
« Donc pour le détartrage on remet ça à plus tard ? », lui demandé-je tandis qu’il insère ma Carte Vitale dans le boîtier. « Ah c’est vrai, j’avais oublié. » Il regarde sa montre, demande à son assistante si le patient suivant est là. Il l’est, mais on peut quand même le faire maintenant si je veux, décide-t-il. J’accepte. « Je suis surpris que vous en vouliez encore. », me dit-il tandis que je me réinstalle.
Après ce que j’ai subi, ce nettoyage est peu de chose. D’autant que je sens qu’il le bâcle un peu. Cette fois, c’est vraiment terminé. Il me reste à prendre un rendez-vous de routine pour fin août, et à croiser les doigts pour que d’ici là ne survienne aucun imprévu.
L’homme de l’art me promet de faire son possible pour ne pas m’abîmer davantage la lèvre, mais vu ma difficulté à ouvrir la bouche en grand il faut bien qu’il se fasse un passage pour atteindre le chantier en cours.
Une seconde fois je supporte ce qu’il fait stoïquement, et sans comprendre. Ce ne sont pas les quelques mots qu’il échange avec sa discrète et efficace assistante qui m’éclairent.
Enfin, au bout d’une demi-heure, c’est terminé. Après m’avoir mis une pommade cicatrisante au coin des lèvres, il m’invite à me lever.
« Donc pour le détartrage on remet ça à plus tard ? », lui demandé-je tandis qu’il insère ma Carte Vitale dans le boîtier. « Ah c’est vrai, j’avais oublié. » Il regarde sa montre, demande à son assistante si le patient suivant est là. Il l’est, mais on peut quand même le faire maintenant si je veux, décide-t-il. J’accepte. « Je suis surpris que vous en vouliez encore. », me dit-il tandis que je me réinstalle.
Après ce que j’ai subi, ce nettoyage est peu de chose. D’autant que je sens qu’il le bâcle un peu. Cette fois, c’est vraiment terminé. Il me reste à prendre un rendez-vous de routine pour fin août, et à croiser les doigts pour que d’ici là ne survienne aucun imprévu.
31 janvier 2022
Chaque samedi je me réveille avec Affinités culturelles de Tewfik Hakem. Cette fois il est question du « wwoofing ». Quèsaco ? me dis-je. « Une nouvelle forme de volontariat choisie par des personnes, généralement jeunes, qui viennent prêter main forte à des agriculteurs pour découvrir et partager le quotidien des fermes biologiques ».
Nouvelle non, cela existait déjà au début des années soixante-dix à la naissance de l’écologie politique. Aujourd’hui, cela passe par un site dédié. Autrefois, cela se faisait par le biais de petites annonces dans Libération, La Gueule Ouverte, Le Sauvage, Survivre et Vivre et tutti.
Je me souviens avoir répondu à l’une d’elles, passée par un maraîcher de Bretagne. Par retour du courrier, il me donna son accord. Pendant un mois de mes vacances d’été, je travaillerais pour lui en échange du gite et du couvert.
La fin de l’année scolaire approchant, j’ai commencé à mollir et une semaine avant la date prévue de mon arrivée, j’ai écrit au paysan breton qu’il me fallait renoncer à cause d’un bras cassé. Puis avec ma petite voiture je suis allé me balader dans le Massif Central.
*
Jeudi dernier est mort à Paris à l’âge de cent trois ans René de Obaldia. Son recueil de poésie intitulé Les Innocentines (poèmes pour enfants et quelques adultes) avait un gros succès dans ma classe unique du Bec-Hellouin où il était disponible sous forme de fiches en libre-service. Certains de ces poèmes aujourd’hui ne seraient plus de mise, comme Le zizi perpétuel qui commence ainsi :
Mon petit frère a un zizi / Mais moi, Zaza, / Je n’en ai pas. / Mon petit frère a un zizi / Toujours placé au bon endroit / Mais moi, Zaza, / Je n’en ai pas. / Pourquoi ? / Il me le montre sans répit / Pour me donner du dépit / Pour se donner un air gaulois / Pour m’enfoncer dans l’désarroi ! / Il me le sort en catimini / En tapis rouge en tapinois / Et me le fait toucher du doigt : / C’est assez doux / Comme caoutchouc / Mais y a pas de quoi / Perdre la foi…
C’est avec sa pièce de théâtre Du vent dans les branches de sassafras que j’avais découvert René de Obaldia un soir à la télévision familiale en mil neuf cent soixante-cinq quand j’avais quatorze ans. Michel Simon était grandiose dans le rôle principal.
*
« Le monde prend congé de moi au moment où je prends congé de lui. Je suis en fin de vie, et un autre monde surgit, auquel je ne comprends pas grand-chose, et qui m’est étranger, voilà tout. », déclarait Jacques Abeille il y a deux ans à Diacritik. Lui aussi vient de mourir, à l’âge de soixante-dix-neuf ans, ce dimanche vingt-trois janvier à Libourne.
De lui, j’aime les textes érotico-pornographiques, certains publiés sous le nom de Léo Barthe, notamment la trilogie La vie d’une chienne éditée aux Editions Climats au début des années deux mille : Histoire de la bergère, Histoire de la bonne et Histoire de l'affranchie (on y trouve quelques jolies scènes de zoophilie).
Nouvelle non, cela existait déjà au début des années soixante-dix à la naissance de l’écologie politique. Aujourd’hui, cela passe par un site dédié. Autrefois, cela se faisait par le biais de petites annonces dans Libération, La Gueule Ouverte, Le Sauvage, Survivre et Vivre et tutti.
Je me souviens avoir répondu à l’une d’elles, passée par un maraîcher de Bretagne. Par retour du courrier, il me donna son accord. Pendant un mois de mes vacances d’été, je travaillerais pour lui en échange du gite et du couvert.
La fin de l’année scolaire approchant, j’ai commencé à mollir et une semaine avant la date prévue de mon arrivée, j’ai écrit au paysan breton qu’il me fallait renoncer à cause d’un bras cassé. Puis avec ma petite voiture je suis allé me balader dans le Massif Central.
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Jeudi dernier est mort à Paris à l’âge de cent trois ans René de Obaldia. Son recueil de poésie intitulé Les Innocentines (poèmes pour enfants et quelques adultes) avait un gros succès dans ma classe unique du Bec-Hellouin où il était disponible sous forme de fiches en libre-service. Certains de ces poèmes aujourd’hui ne seraient plus de mise, comme Le zizi perpétuel qui commence ainsi :
Mon petit frère a un zizi / Mais moi, Zaza, / Je n’en ai pas. / Mon petit frère a un zizi / Toujours placé au bon endroit / Mais moi, Zaza, / Je n’en ai pas. / Pourquoi ? / Il me le montre sans répit / Pour me donner du dépit / Pour se donner un air gaulois / Pour m’enfoncer dans l’désarroi ! / Il me le sort en catimini / En tapis rouge en tapinois / Et me le fait toucher du doigt : / C’est assez doux / Comme caoutchouc / Mais y a pas de quoi / Perdre la foi…
C’est avec sa pièce de théâtre Du vent dans les branches de sassafras que j’avais découvert René de Obaldia un soir à la télévision familiale en mil neuf cent soixante-cinq quand j’avais quatorze ans. Michel Simon était grandiose dans le rôle principal.
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« Le monde prend congé de moi au moment où je prends congé de lui. Je suis en fin de vie, et un autre monde surgit, auquel je ne comprends pas grand-chose, et qui m’est étranger, voilà tout. », déclarait Jacques Abeille il y a deux ans à Diacritik. Lui aussi vient de mourir, à l’âge de soixante-dix-neuf ans, ce dimanche vingt-trois janvier à Libourne.
De lui, j’aime les textes érotico-pornographiques, certains publiés sous le nom de Léo Barthe, notamment la trilogie La vie d’une chienne éditée aux Editions Climats au début des années deux mille : Histoire de la bergère, Histoire de la bonne et Histoire de l'affranchie (on y trouve quelques jolies scènes de zoophilie).
29 janvier 2022
Mieux vaut avoir affaire à Dieu qu’à ses saints, dit l’adage. Aussi ai-je renoncé à mon rendez-vous de début janvier avec le collaborateur de mon dentiste attitré et me voici, ce vendredi à neuf heures, premier patient du jour de celui que je fréquente depuis plus de vingt ans.
Une carie sous un soin mais cela ne me fait plus mal. Peut-être que le nerf est mort. Par prudence, l’homme de l’art me pique par trois fois pour bien endormir la zone. « On va essayer de sauver la dent », me dit-il. « Ce serait bien oui », lui réponds-je. Ce sont mes dernières paroles.
Allongé sur le dos, je ne suis plus qu’un objet que l’on s’efforce de restaurer. Ça ne va pas de soi car, comme toujours, je ne peux ouvrir très grand la bouche. Le dentiste, sans perdre son calme, trouve des solutions de contournement, allant jusqu’à bricoler ses outils. Je ne souffre pas mais je suis dans un grand inconfort. Après plus d’une demi-heure, on en voit le bout. Un deuxième rendez-vous permettra d’achever les travaux.
*
Pour me remettre, un petit verre de schnaps des montagnes.
*
Cette difficulté à ouvrir grand la bouche n’est pas liée à la situation. Cela me joue des tours dans d’autres circonstances. Impossible par exemple d’enfourner un sushi.
Si les hasards de la vie avaient fait de moi un pratiquant de la fellation, j’aurais dû me contenter des petites bites.
Une carie sous un soin mais cela ne me fait plus mal. Peut-être que le nerf est mort. Par prudence, l’homme de l’art me pique par trois fois pour bien endormir la zone. « On va essayer de sauver la dent », me dit-il. « Ce serait bien oui », lui réponds-je. Ce sont mes dernières paroles.
Allongé sur le dos, je ne suis plus qu’un objet que l’on s’efforce de restaurer. Ça ne va pas de soi car, comme toujours, je ne peux ouvrir très grand la bouche. Le dentiste, sans perdre son calme, trouve des solutions de contournement, allant jusqu’à bricoler ses outils. Je ne souffre pas mais je suis dans un grand inconfort. Après plus d’une demi-heure, on en voit le bout. Un deuxième rendez-vous permettra d’achever les travaux.
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Pour me remettre, un petit verre de schnaps des montagnes.
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Cette difficulté à ouvrir grand la bouche n’est pas liée à la situation. Cela me joue des tours dans d’autres circonstances. Impossible par exemple d’enfourner un sushi.
Si les hasards de la vie avaient fait de moi un pratiquant de la fellation, j’aurais dû me contenter des petites bites.
27 janvier 2022
Cinq cent mille cas positifs au Covid hier mardi, cela ne m’empêche pas de prendre une nouvelle fois ce mercredi à sept heures vingt-quatre le train Nomad Krono Plus pour Paris puis le bus Vingt-Neuf afin de me rapprocher du Book-Off de Ledru-Rollin.
En attendant dix heures, je bois un café assis à une table haute collée au comptoir du Café du Faubourg. Ce qui me permet de ne le payer qu’un euro vingt, comme si j’étais debout.
Je passe ensuite plus d’une heure à explorer les rayonnages à un euro, y trouve moins que les fois précédentes mais y déniche deux ouvrages surprenants : Notre oncle Lautrec de Marie Tapié de Céleyran, Comtesse Attems, qui avait six ans à la mort d’Henri, ouvrage richement illustré autoédité en mil neuf cent quatre-vingt-dix par Nicole Tapié de Céleyran, un exemplaire qui bénéficie en page de garde d’un envoi d’une autre descendante de la famille, prénommée Hélène : « Pour M. Bouhours en souvenir d’une conférence autour de notre arrière-grand-oncle Henri de Toulouse-Lautrec. Avec nos remerciements. » et Noblesse de la robe d’Oscar Wilde et Stéphane Mallarmé publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept aux Belles Lettres, un ouvrage regroupant les chroniques de mode des deux écrivains qui furent rédacteurs en chef des premiers grands journaux sur la question : Woman’s World et La Dernière Mode, pour Oscar Wilde cela ne me surprend pas, pour Stéphane Mallarmé j’en suis tout retourné.
Vers onze heures et demie, je reviens vers la Bastille, tourne à droite boulevard Richard-Lenoir et entre au Paris. Assis à une table près de l’entrée, je commande un café à deux euros vingt. L’ayant bu, je commence la lecture de Loin de New York d’Annemarie Schwarzenbach en attendant celle que j’ai rejointe un jour là-bas, mon plus lointain voyage assurément.
J’ai le temps d’en lire la moitié avant qu’elle n’arrive vers midi et demie. Nous décidons de déjeuner sur place, choisissant une table ronde en retrait près d’un radiateur. Si la cuisine n’est pas exceptionnelle, le personnel est affable et notre conversation enjouée.
Il est presque quatorze heures lorsque le travail se rappelle à elle. Nous nous séparons près du Génie. Un bus Vingt-Neuf me conduit près du Book-Off de Quatre Septembre. Je n’y trouve rien pour me plaire. Ce n’est pas plus mal car mon sac à dos est déjà plein avec les deux cadeaux qu’elle m’a faits : une grande boîte de chocolats Lindt et, rapportée d’une récente escapade à Annecy, une bouteille de Suc des Glaciers, une liqueur au génépi et à la menthe glaciale de la maison Meunier Mère & Fils.
*
Quelques minutes de retard pour le train du retour où j’ai le temps de terminer Loin de New York, cette chronique de l’Amérique des années trente signée Annemarie Schwarzenbach, journaliste et photographe suisse, fille d’un riche industriel pronazi, dépendante à la morphine, dont les amours saphiques furent malheureuses et la mort prématurée due à un accident de bicyclette. A l’arrivée à Rouen, le chef de bord annonce que la correspondance avec Dieppe est maintenue, de même que celle avec Grey’s Anatomy sur Téheffun.
En attendant dix heures, je bois un café assis à une table haute collée au comptoir du Café du Faubourg. Ce qui me permet de ne le payer qu’un euro vingt, comme si j’étais debout.
Je passe ensuite plus d’une heure à explorer les rayonnages à un euro, y trouve moins que les fois précédentes mais y déniche deux ouvrages surprenants : Notre oncle Lautrec de Marie Tapié de Céleyran, Comtesse Attems, qui avait six ans à la mort d’Henri, ouvrage richement illustré autoédité en mil neuf cent quatre-vingt-dix par Nicole Tapié de Céleyran, un exemplaire qui bénéficie en page de garde d’un envoi d’une autre descendante de la famille, prénommée Hélène : « Pour M. Bouhours en souvenir d’une conférence autour de notre arrière-grand-oncle Henri de Toulouse-Lautrec. Avec nos remerciements. » et Noblesse de la robe d’Oscar Wilde et Stéphane Mallarmé publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept aux Belles Lettres, un ouvrage regroupant les chroniques de mode des deux écrivains qui furent rédacteurs en chef des premiers grands journaux sur la question : Woman’s World et La Dernière Mode, pour Oscar Wilde cela ne me surprend pas, pour Stéphane Mallarmé j’en suis tout retourné.
Vers onze heures et demie, je reviens vers la Bastille, tourne à droite boulevard Richard-Lenoir et entre au Paris. Assis à une table près de l’entrée, je commande un café à deux euros vingt. L’ayant bu, je commence la lecture de Loin de New York d’Annemarie Schwarzenbach en attendant celle que j’ai rejointe un jour là-bas, mon plus lointain voyage assurément.
J’ai le temps d’en lire la moitié avant qu’elle n’arrive vers midi et demie. Nous décidons de déjeuner sur place, choisissant une table ronde en retrait près d’un radiateur. Si la cuisine n’est pas exceptionnelle, le personnel est affable et notre conversation enjouée.
Il est presque quatorze heures lorsque le travail se rappelle à elle. Nous nous séparons près du Génie. Un bus Vingt-Neuf me conduit près du Book-Off de Quatre Septembre. Je n’y trouve rien pour me plaire. Ce n’est pas plus mal car mon sac à dos est déjà plein avec les deux cadeaux qu’elle m’a faits : une grande boîte de chocolats Lindt et, rapportée d’une récente escapade à Annecy, une bouteille de Suc des Glaciers, une liqueur au génépi et à la menthe glaciale de la maison Meunier Mère & Fils.
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Quelques minutes de retard pour le train du retour où j’ai le temps de terminer Loin de New York, cette chronique de l’Amérique des années trente signée Annemarie Schwarzenbach, journaliste et photographe suisse, fille d’un riche industriel pronazi, dépendante à la morphine, dont les amours saphiques furent malheureuses et la mort prématurée due à un accident de bicyclette. A l’arrivée à Rouen, le chef de bord annonce que la correspondance avec Dieppe est maintenue, de même que celle avec Grey’s Anatomy sur Téheffun.
25 janvier 2022
« Qu’est-ce que je fais là ? », me demandé-je tout en discutant pendant la recréation de mes élèves de maternelle avec un couple de parents, une musicienne et un musicien de l’Opéra de Rouen. Il faut absolument que j’arrête à la fin de l’année mais comment partir en catimini, sans faire un second pot de départ à la retraite. Car j’en ai déjà fait un, il y a longtemps. Comment est-il possible que je sois encore au travail ? La réponse m’est donnée par mon réveil au milieu de la nuit. Encore une fois, j’ai fait ce rêve obscur et effrayant.
Sans doute est-ce dû au fait que l’Education Nationale, faute de personnel disponible, rappelle des retraité(e)s pour effectuer des remplacements (pas moi qui ai dépassé ma date de péremption). Sur 76 actu, j’ai lu le témoignage d’un rappelé, fraîchement retraité de soixante-trois ans qui enseignait à l’école maternelle Georges Pompidou de Bois-Guillaume, par où je suis passé avant lui. Il a accepté pour rendre service et parce qu’il ne prenait la place de personne.
Beaucoup refusent. « Pas question d’y retourner ». J’ai lu leurs témoignages sur différents sites de la presse nationale via le groupe Effe Bé « 800 000 feignasses » qui regroupe des enseignants de la maternelle à l’université et dont je suis membre en tant que feignasse à la retraite. On peut y lire des anecdotes réjouissantes, comme celle de cette professeure des écoles qui doit se mettre en congé pour garder sa fille qui est dans la classe d’un professeur des écoles qui a chopé le Covid et n’est pas remplacé. Une remplaçante est alors envoyée dans la classe de la gardeuse d’enfant. Peut-être qu’un homme ne peut pas être remplacé par une femme, suggère quelqu’une.
Sans doute est-ce dû au fait que l’Education Nationale, faute de personnel disponible, rappelle des retraité(e)s pour effectuer des remplacements (pas moi qui ai dépassé ma date de péremption). Sur 76 actu, j’ai lu le témoignage d’un rappelé, fraîchement retraité de soixante-trois ans qui enseignait à l’école maternelle Georges Pompidou de Bois-Guillaume, par où je suis passé avant lui. Il a accepté pour rendre service et parce qu’il ne prenait la place de personne.
Beaucoup refusent. « Pas question d’y retourner ». J’ai lu leurs témoignages sur différents sites de la presse nationale via le groupe Effe Bé « 800 000 feignasses » qui regroupe des enseignants de la maternelle à l’université et dont je suis membre en tant que feignasse à la retraite. On peut y lire des anecdotes réjouissantes, comme celle de cette professeure des écoles qui doit se mettre en congé pour garder sa fille qui est dans la classe d’un professeur des écoles qui a chopé le Covid et n’est pas remplacé. Une remplaçante est alors envoyée dans la classe de la gardeuse d’enfant. Peut-être qu’un homme ne peut pas être remplacé par une femme, suggère quelqu’une.
22 janvier 2022
Depuis le temps qu’elle a migré, passant de la rue de la Croix de Fer au coin de ma ruelle, en lieu et place de la faïencerie Augy, lequel est parti à la retraite, il serait temps que j’aille voir s’il y a un livre pour moi à la bouquinerie Rollon, me dis-je.
Les quelques dizaines de mètres parcourus, j’aperçois à travers la vitre de la porte d’entrée les deux libraires sans masque. Bon, ce ne sera pas pour cette fois, je vais là aussi attendre les beaux jours.
A cette même époque, une nouvelle entrepreneuse devrait ouvrir une librairie café dans le quartier de la Croix de Pierre. Elle aura nom La Tonne pour la raison qu’elle s’épanouira là où était le café restaurant du même nom, dont je regrette la fermeture et où se tinrent des rencontres Rouen Stockholm.
Ouvrir une librairie de neuf dans un lieu excentré est audacieux, voire périlleux. Même dans l’hypercentre, hormis L’Armitière, il n’y en a plus, sauf des spécialisées dans la religion et la bande dessinée.
*
C’est gentil de rouvrir les boîtes de nuit pour mon anniversaire. Je n’en demandais pas tant.
Les quelques dizaines de mètres parcourus, j’aperçois à travers la vitre de la porte d’entrée les deux libraires sans masque. Bon, ce ne sera pas pour cette fois, je vais là aussi attendre les beaux jours.
A cette même époque, une nouvelle entrepreneuse devrait ouvrir une librairie café dans le quartier de la Croix de Pierre. Elle aura nom La Tonne pour la raison qu’elle s’épanouira là où était le café restaurant du même nom, dont je regrette la fermeture et où se tinrent des rencontres Rouen Stockholm.
Ouvrir une librairie de neuf dans un lieu excentré est audacieux, voire périlleux. Même dans l’hypercentre, hormis L’Armitière, il n’y en a plus, sauf des spécialisées dans la religion et la bande dessinée.
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C’est gentil de rouvrir les boîtes de nuit pour mon anniversaire. Je n’en demandais pas tant.
21 janvier 2022
Pour ce qui me concerne, en matière de faits divers, plus que la mort d’un acteur dans un accident de ski ou celle de lycéen(ne)s dans un accident de voiture, m’intéressent, et ce n’est pas parce que ça se passe à Rouen, les mystères du pont Mathilde.
Une femme inconnue d’une cinquantaine d’années qui enjambe le garde-corps et chute de la place Saint-Paul à la chaussée du pont où son corps est heurté par une camionnette dont le jeune conducteur ne s’arrête pas mais se rend après coup à la Police sur l’injonction de son employeur puis, quelques jours plus tard, un homme de vingt-neuf ans, joueur de rugby connu, qui écrase sa voiture contre le terre-plein central de ce même pont, s’en sort vivant et court se jeter du quatrième étage d’un immeuble en travaux près de la place Saint-Paul, voilà qui est intrigant et excitant.
Pourquoi n’a-t-on pas parlé de ce double fait divers dans les médias autres que locaux ? Sans doute parce que si l’on peut évoquer à loisir les accidents, le suicide est tabou.
*
Un ex-camarade du groupuscule trotskyste rouennais La Gauche Révolutionnaire jugé pour harcèlement, diffamation et injures envers d’anciens camarades accusé(e)s par lui de couvrir un autre camarade qui en aurait violé une autre, l’ex-compagne du poursuivi, et aurait aussi été coupable d’agressions sexuelles sur des femmes de seize à vingt-trois ans, cela en deux mille douze, c’est pas mal non plus.
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Ce qui m’intéresse n’est pas toujours ce qui m’importe. (Paul Valéry)
Une femme inconnue d’une cinquantaine d’années qui enjambe le garde-corps et chute de la place Saint-Paul à la chaussée du pont où son corps est heurté par une camionnette dont le jeune conducteur ne s’arrête pas mais se rend après coup à la Police sur l’injonction de son employeur puis, quelques jours plus tard, un homme de vingt-neuf ans, joueur de rugby connu, qui écrase sa voiture contre le terre-plein central de ce même pont, s’en sort vivant et court se jeter du quatrième étage d’un immeuble en travaux près de la place Saint-Paul, voilà qui est intrigant et excitant.
Pourquoi n’a-t-on pas parlé de ce double fait divers dans les médias autres que locaux ? Sans doute parce que si l’on peut évoquer à loisir les accidents, le suicide est tabou.
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Un ex-camarade du groupuscule trotskyste rouennais La Gauche Révolutionnaire jugé pour harcèlement, diffamation et injures envers d’anciens camarades accusé(e)s par lui de couvrir un autre camarade qui en aurait violé une autre, l’ex-compagne du poursuivi, et aurait aussi été coupable d’agressions sexuelles sur des femmes de seize à vingt-trois ans, cela en deux mille douze, c’est pas mal non plus.
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Ce qui m’intéresse n’est pas toujours ce qui m’importe. (Paul Valéry)
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