Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
24 mars 2015
Dimanche matin, je suis de nouveau à attendre devant le lycée Marc-Bloch de Védéherre, seul cette fois. Ce que voyant, les membres d’Amnesty International déjà présents me font entrer avant l’heure avec la cordialité un peu trop expressive qui caractérise ce genre de militants.
-Ça a marché hier ? demande l’un aux deux autres.
-Oui, on a vendu quatre mille livres. A un moment, on a dû ouvrir quatre caisses en parallèle.
-Oui, mais des livres à un ou deux euros, tempère le troisième.
-Quand même, entre quatre mille et huit mille euros en une journée, c’est pas mal.
Effectivement, me dis-je.
J’ai toutes les salles pour moi, jusqu’à ce qu’arrive à l’heure officielle l’une de mes connaissances rouennaises, ancien relieur qui fit aussi bouquiniste à une époque dans une partie de son atelier.
-Vous êtes déjà là ? Comment avez-vous fait pour entrer avant l’heure ? me demande-t-il.
Aujourd’hui, c’est moi qui fais figure de privilégié. Il est spécialement intéressé par les philosophes et encore plus par les Pères de l’Eglise mais ayant manqué la journée d’hier faute d’information, il ne trouve rien pour lui dans les bacs. Reste la salle baptisée « livres anciens » où il va aller faire un tour. On y trouve tout et n’importe quoi à condition que ce soit vieux et dépenaillé et donc considéré par celui qui s’en occupe jalousement comme rare et de grande valeur. C’est lui, improvisé libraire d’ancien chaque année, qui fixe les prix selon ses critères dont sans doute celui de deviner combien l’éventuel acheteur est prêt à mettre dans la vieillerie.
L’ancien relieur en revient dépité :
-Je ne peux pas le supporter, me dit-il et m’expliquant que ce cas relève de la psychiatrie.
De mon côté, je trouve de quoi emplir un sac, dont Messages, Signes & Dyables, trois cent quatre-vingts dessins d’André Malraux (Jacques Damase-Denoël éditeurs), Le Temps du cœur, la correspondance amoureuse d’Ingeborg Bachmann et Paul Celan (Le Seuil) et J’avais peur de Virginia Woolf, les souvenirs de Richard Kennedy, qui fut à seize ans le grouillot de l’écrivaine, illustrés par lui-même, avec « un poster pliant de la vie avec les Woolf, par la grande porte et la petite » (Anatolia).
Je paie mon modeste dû, semblant ne pas entendre les voix féminines qui tentent de m’attirer vers les tables à pétitions, et arrive à la maison à midi pile, l’heure de l’apéritif que je prends désormais et malheureusement seul.
*
Petits malentendus sans importance, recueil de nouvelles d’Antonio Tabucchi, dont le titre est à la fois une explication et une excuse à sa présence au rayon des policiers en poche à la vente de Védéherre.
*
Ce dimanche est celui du premier tour des élections départementales mais dégoûté à des titres divers par tou(te)s les candidat(e)s, je m’abstiens. Plus précisément, je fais la grève du vote.
*
Il n’empêche que j’ai quand même failli voter, pour un autre ne pouvant y aller, mais il s’est avéré que nous n’étions pas du même bureau.
-Ça a marché hier ? demande l’un aux deux autres.
-Oui, on a vendu quatre mille livres. A un moment, on a dû ouvrir quatre caisses en parallèle.
-Oui, mais des livres à un ou deux euros, tempère le troisième.
-Quand même, entre quatre mille et huit mille euros en une journée, c’est pas mal.
Effectivement, me dis-je.
J’ai toutes les salles pour moi, jusqu’à ce qu’arrive à l’heure officielle l’une de mes connaissances rouennaises, ancien relieur qui fit aussi bouquiniste à une époque dans une partie de son atelier.
-Vous êtes déjà là ? Comment avez-vous fait pour entrer avant l’heure ? me demande-t-il.
Aujourd’hui, c’est moi qui fais figure de privilégié. Il est spécialement intéressé par les philosophes et encore plus par les Pères de l’Eglise mais ayant manqué la journée d’hier faute d’information, il ne trouve rien pour lui dans les bacs. Reste la salle baptisée « livres anciens » où il va aller faire un tour. On y trouve tout et n’importe quoi à condition que ce soit vieux et dépenaillé et donc considéré par celui qui s’en occupe jalousement comme rare et de grande valeur. C’est lui, improvisé libraire d’ancien chaque année, qui fixe les prix selon ses critères dont sans doute celui de deviner combien l’éventuel acheteur est prêt à mettre dans la vieillerie.
L’ancien relieur en revient dépité :
-Je ne peux pas le supporter, me dit-il et m’expliquant que ce cas relève de la psychiatrie.
De mon côté, je trouve de quoi emplir un sac, dont Messages, Signes & Dyables, trois cent quatre-vingts dessins d’André Malraux (Jacques Damase-Denoël éditeurs), Le Temps du cœur, la correspondance amoureuse d’Ingeborg Bachmann et Paul Celan (Le Seuil) et J’avais peur de Virginia Woolf, les souvenirs de Richard Kennedy, qui fut à seize ans le grouillot de l’écrivaine, illustrés par lui-même, avec « un poster pliant de la vie avec les Woolf, par la grande porte et la petite » (Anatolia).
Je paie mon modeste dû, semblant ne pas entendre les voix féminines qui tentent de m’attirer vers les tables à pétitions, et arrive à la maison à midi pile, l’heure de l’apéritif que je prends désormais et malheureusement seul.
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Petits malentendus sans importance, recueil de nouvelles d’Antonio Tabucchi, dont le titre est à la fois une explication et une excuse à sa présence au rayon des policiers en poche à la vente de Védéherre.
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Ce dimanche est celui du premier tour des élections départementales mais dégoûté à des titres divers par tou(te)s les candidat(e)s, je m’abstiens. Plus précisément, je fais la grève du vote.
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Il n’empêche que j’ai quand même failli voter, pour un autre ne pouvant y aller, mais il s’est avéré que nous n’étions pas du même bureau.
23 mars 2015
Samedi, avant que ne commence à quatorze heures la vente de livres d’occasion annuelle d’Amnesty International à Val-de-Reuil, j’ai l’idée de faire le détour par le Champ de Foire d’Elbeuf où il y a vide grenier. C’en est une mauvaise ; sur place, c’est poussière et misère. Je m’extrais de cette ville au réseau routier compliqué et arrive en avance devant le lycée Marc-Bloch de Védéherre.
A ce moment en sort Marc-Antoine Jamet, Maire, Socialiste, accompagné de ses amis. Ils portent sous le bras des livres qu’ils ont pu choisir avant tout le monde. Chaque année c’est ainsi.
Je suis rejoint par quelques autres pressés dans mon genre devant la porte coulissante qu’il est interdit de franchir avant l’heure officielle. Monsieur le Maire revient. Il a oublié son manteau. Quand il ressort, il nous déclare avec un grand sourire :
-Vous remarquerez que je n’emporte pas de livres.
Je raconte aux autres qu’il en avait deux sous le bras, il y a cinq minutes.
-Quand on est Socialiste, on peut se servir avant les autres, leur dis-je.
D’autres sont d’ailleurs en train de le faire. La dame d’Amnesty est offusquée par mon propos.
-Ce sont des gens qui nous aident, les élus, le directeur du lycée, les copains, c’est normal qu’on les remercie.
Nous sommes bientôt nombreux à attendre. Au feu vert, chacun se précipite vers son intérêt particulier, au rayon littérature pour moi où me rattrape la souriante bouquiniste rouennaise des Mondes Magiques, puis je continue par les livres d’art et les éditions de poche, cependant que ça ne cesse d’arriver sous l’œil d’une caméra de télévision.
Cette année, la politique des prix est à l’avantage des acheteurs, beaucoup de livres sont à un euro et les poches toujours à cinquante centimes. Je passe par tous les rayons, même ceux du sport et de la cuisine où peut m’attendre un ouvrage mal rangé.
Je recroise la jeune femme des Mondes Magiques. Elle peine à porter l’un de ses sacs.
-Vous allez pouvoir emporter tout ça ? lui dis-je.
-Pas en une seule fois.
Je suis moi-même lourdement chargé lorsque, saturant, je choisis d’en rester là en me promettant de revenir le lendemain. Dans mon butin : Les Soleils révolus (Journal 1979-1982) de Gabriel Matzneff (L’Infini/Gallimard) et le catalogue de la mythique exposition Paris Moscou 1900/1930 organisée en mil neuf cent soixante-dix-neuf au Centre Georges Pompidou.
De retour à Rouen, j’attends qu’un bus Teor passe pour traverser la rue du Général-Leclerc quand celui-ci, d’un coup de rétroviseur, pulvérise le feu qui commande sa circulation. Par chance aucune partie n’en est projetée. Mourir sur la voie publique un sac de livres au bout de chaque bras aurait pu m’arriver ce samedi après-midi.
*
Ces élus du Parti Socialiste qui se servent avant les électeurs ne sont pas une concurrence bien dangereuse. Ce qui est époustouflant, c’est qu’ils ne voient pas ce qu’il y a de choquant à faire ce qu’ils font, l’effet déplorable produit chez celles et ceux qui les regardent.
A ce moment en sort Marc-Antoine Jamet, Maire, Socialiste, accompagné de ses amis. Ils portent sous le bras des livres qu’ils ont pu choisir avant tout le monde. Chaque année c’est ainsi.
Je suis rejoint par quelques autres pressés dans mon genre devant la porte coulissante qu’il est interdit de franchir avant l’heure officielle. Monsieur le Maire revient. Il a oublié son manteau. Quand il ressort, il nous déclare avec un grand sourire :
-Vous remarquerez que je n’emporte pas de livres.
Je raconte aux autres qu’il en avait deux sous le bras, il y a cinq minutes.
-Quand on est Socialiste, on peut se servir avant les autres, leur dis-je.
D’autres sont d’ailleurs en train de le faire. La dame d’Amnesty est offusquée par mon propos.
-Ce sont des gens qui nous aident, les élus, le directeur du lycée, les copains, c’est normal qu’on les remercie.
Nous sommes bientôt nombreux à attendre. Au feu vert, chacun se précipite vers son intérêt particulier, au rayon littérature pour moi où me rattrape la souriante bouquiniste rouennaise des Mondes Magiques, puis je continue par les livres d’art et les éditions de poche, cependant que ça ne cesse d’arriver sous l’œil d’une caméra de télévision.
Cette année, la politique des prix est à l’avantage des acheteurs, beaucoup de livres sont à un euro et les poches toujours à cinquante centimes. Je passe par tous les rayons, même ceux du sport et de la cuisine où peut m’attendre un ouvrage mal rangé.
Je recroise la jeune femme des Mondes Magiques. Elle peine à porter l’un de ses sacs.
-Vous allez pouvoir emporter tout ça ? lui dis-je.
-Pas en une seule fois.
Je suis moi-même lourdement chargé lorsque, saturant, je choisis d’en rester là en me promettant de revenir le lendemain. Dans mon butin : Les Soleils révolus (Journal 1979-1982) de Gabriel Matzneff (L’Infini/Gallimard) et le catalogue de la mythique exposition Paris Moscou 1900/1930 organisée en mil neuf cent soixante-dix-neuf au Centre Georges Pompidou.
De retour à Rouen, j’attends qu’un bus Teor passe pour traverser la rue du Général-Leclerc quand celui-ci, d’un coup de rétroviseur, pulvérise le feu qui commande sa circulation. Par chance aucune partie n’en est projetée. Mourir sur la voie publique un sac de livres au bout de chaque bras aurait pu m’arriver ce samedi après-midi.
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Ces élus du Parti Socialiste qui se servent avant les électeurs ne sont pas une concurrence bien dangereuse. Ce qui est époustouflant, c’est qu’ils ne voient pas ce qu’il y a de choquant à faire ce qu’ils font, l’effet déplorable produit chez celles et ceux qui les regardent.
21 mars 2015
Le merle fait ce qu’il faut vers six heures pour que cette journée soit bien celle du nouveau printemps mais quand je mets le pied dehors deux heures plus tard en direction du marché du Clos, il fait gris et froid. Les ouvriers polonais travaillant depuis des mois sur le chantier du vingt-quatre de la rue Saint-Romain déchargent leur matériel du vieux camion immatriculé dans leur pays garé tout contre le mur de l’Archevêché. Ils semblent aussi épuisés que s’ils terminaient leur journée. Je ne trouve aucun livre et rentre.
Deux heures plus tard, il fait encore plus froid et sombre. L’éclipse de soleil que personne ne verra doit expliquer cela, mais pour le gris du ciel la pollution a son rôle. Autre éclipse, depuis deux jours plus de France Culture en raison d’une grève reconductible des personnels de Radio France contre le manque de moyens et les suppressions de postes. La daube musicale remplaçant les émissions me fait prendre conscience du nombre de mauvaises chansons françaises en circulation.
Le soir venu, après avoir vu sur France Trois Haute-Normandie l’apparition de Laurent le Fabuleux à l’inauguration de l’Historial Jeanne d’Arc et entendu sa déclaration historique : « A partir de maintenant, on ne dira plus la Pucelle d’Orléans mais l’Héroïne de Rouen », je prends sous un ciel toujours plombé le chemin qui mène à l’Opéra. En loge neuf, j’assiste à la création mondiale de Contes de la lune vague après la pluie, musique de Xavier Dayer, livret d’Alain Perroux d’après le scénario du film de Mizoguchi, un opéra de chambre d’une heure et demie. Cette histoire d’hommes qui partent à l’aventure et de femmes qui en font les frais est mise en scène, en lumière, en costumes, par les anciens collaborateurs de Patrice Chéreau, dont son compagnon Richard Peduzzi. Les musicien(ne)s de l’Opéra sont dirigé(e)s par Jean-Philippe Wurtz et les chanteurs et chanteuses à la hauteur, me semble-t-il, mais à l’issue les applaudissements sont mesurés et certain(e)s pressé(e)s de s’en aller.
*
Reçu une nouvelle carte d’électeur, sur laquelle la Mairie de Rouen a l’amabilité de me rajeunir de deux jours, et le matériel de vote qui ne me servira pas pour les Départementales à double candidature. Parmi les partis se présentant dans mon canton, le Mudi qui s’affirme Patriote et Ouvrier.
Dans ces duos homme femme, le plus souvent c’est l’homme qui pédale devant et dirige l’engin, la femme appuyant mollement derrière. Il y a des exceptions, notamment quand le tandem est fabriqué par Carelman, avec deux guidons opposés, la Communiste pédalant à fond vers la centrale nucléaire cependant que l’Ecologiste fait de même dans l’autre sens. Ce tandem à deux guidons pourrait réussir à faire chuter le Socialiste en l’empêchant d’obtenir le nombre de voix nécessaire pour faire la course du deuxième tour (douze virgule cinq pour cent des inscrits).
Tous ces duos n’ont plus des suppléant(e)s mais des remplaçant(e)s, le côté sportif sans doute.
*
V’là que le Lavomatic Tour est arrivé à Rouen, après Paris, Le Havre, Marseille, Lyon et Rennes. Il était temps, on a failli se sentir hors de la modernité. Le principe : empêcher celles et ceux qui n’ont pas de machine à laver de faire leur lessive en donnant un concert dans un Lavomatic. Le premier rouennais s’est déroulé dans le quartier de la Croix de Pierre, boboïtude oblige. Le public débordait loin dans la rue, pour des musiciens que pas grand monde serait allé ouïr s’ils avaient joué dans un lieu dédié à ça.
Jicé Decaux réfléchirait à mettre ses toilettes à disposition pour quand on se sera lassé de l’odeur de la lessive.
Deux heures plus tard, il fait encore plus froid et sombre. L’éclipse de soleil que personne ne verra doit expliquer cela, mais pour le gris du ciel la pollution a son rôle. Autre éclipse, depuis deux jours plus de France Culture en raison d’une grève reconductible des personnels de Radio France contre le manque de moyens et les suppressions de postes. La daube musicale remplaçant les émissions me fait prendre conscience du nombre de mauvaises chansons françaises en circulation.
Le soir venu, après avoir vu sur France Trois Haute-Normandie l’apparition de Laurent le Fabuleux à l’inauguration de l’Historial Jeanne d’Arc et entendu sa déclaration historique : « A partir de maintenant, on ne dira plus la Pucelle d’Orléans mais l’Héroïne de Rouen », je prends sous un ciel toujours plombé le chemin qui mène à l’Opéra. En loge neuf, j’assiste à la création mondiale de Contes de la lune vague après la pluie, musique de Xavier Dayer, livret d’Alain Perroux d’après le scénario du film de Mizoguchi, un opéra de chambre d’une heure et demie. Cette histoire d’hommes qui partent à l’aventure et de femmes qui en font les frais est mise en scène, en lumière, en costumes, par les anciens collaborateurs de Patrice Chéreau, dont son compagnon Richard Peduzzi. Les musicien(ne)s de l’Opéra sont dirigé(e)s par Jean-Philippe Wurtz et les chanteurs et chanteuses à la hauteur, me semble-t-il, mais à l’issue les applaudissements sont mesurés et certain(e)s pressé(e)s de s’en aller.
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Reçu une nouvelle carte d’électeur, sur laquelle la Mairie de Rouen a l’amabilité de me rajeunir de deux jours, et le matériel de vote qui ne me servira pas pour les Départementales à double candidature. Parmi les partis se présentant dans mon canton, le Mudi qui s’affirme Patriote et Ouvrier.
Dans ces duos homme femme, le plus souvent c’est l’homme qui pédale devant et dirige l’engin, la femme appuyant mollement derrière. Il y a des exceptions, notamment quand le tandem est fabriqué par Carelman, avec deux guidons opposés, la Communiste pédalant à fond vers la centrale nucléaire cependant que l’Ecologiste fait de même dans l’autre sens. Ce tandem à deux guidons pourrait réussir à faire chuter le Socialiste en l’empêchant d’obtenir le nombre de voix nécessaire pour faire la course du deuxième tour (douze virgule cinq pour cent des inscrits).
Tous ces duos n’ont plus des suppléant(e)s mais des remplaçant(e)s, le côté sportif sans doute.
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V’là que le Lavomatic Tour est arrivé à Rouen, après Paris, Le Havre, Marseille, Lyon et Rennes. Il était temps, on a failli se sentir hors de la modernité. Le principe : empêcher celles et ceux qui n’ont pas de machine à laver de faire leur lessive en donnant un concert dans un Lavomatic. Le premier rouennais s’est déroulé dans le quartier de la Croix de Pierre, boboïtude oblige. Le public débordait loin dans la rue, pour des musiciens que pas grand monde serait allé ouïr s’ils avaient joué dans un lieu dédié à ça.
Jicé Decaux réfléchirait à mettre ses toilettes à disposition pour quand on se sera lassé de l’odeur de la lessive.
20 mars 2015
A la main le carton pour l’avant-première, ce jeudi après-midi, de Sienne aux origines de la Renaissance au Musée des Beaux-Arts de Rouen, exposition placée « sous le haut patronage de Monsieur François Hollande Président de la République », et à laquelle m’invitent Laurent Fabius et les personnels des musées, je croise l’un de mes lecteurs. Je lui propose de faire la deuxième personne mais il préfère aller au cinéma. Il me dit alors qu’il a deux places pour Le Vaisseau fantôme à Caen, mais là c’est moi qui décline : « Je n’arrive déjà plus à aller jusqu’au Rive Gauche. »
Il y a bien du monde dans les salles assombries du Musée aux murs duquel scintillent les œuvres importées (quelques-unes pas encore installées ne seront visibles qu’à partir de demain, jour de vernissage auquel je ne suis pas invité). Ce foisonnant public est constitué d’une grande majorité de vieilles et de vieux qui connaissent tous les personnages représentés et l’histoire racontée, bien que certain(e)s en aient oublié l’un des épisodes :
-C’est quoi déjà la dormition de la Vierge ?
-On regardera ça sur Internet.
D’autres se plaignent que les cartouches soient trop petits. Un qui a une bonne vue explique à une autre qu’il y a une erreur sur le cartel de l’œuvre numéro douze, l’ordre des saints est inversé.
-Je vais tout de suite le dire à Sylvain Amic, lui déclare-t-elle, il est là, je viens de le voir.
Directeur des Musées de Rouen, il doit savoir s’il faut parler de cartel ou de cartouche.
Evidemment, moi y compris, tout le monde trouve ça magnifique. Comme le résume l’une : « Même si tu crois en rien, tu vois la beauté de ce qui a été fait ». De plus, la scénographie et les éclairages sont réussis. La statue du bébé Jésus nu a son ombre deux fois portée au sol. Une femme lui photographie les fesses malgré l’interdiction.
Je fais une deuxième fois le tour, profitant d’un peu moins de monde pour m’approcher au plus près d’une chevelure ou d’un drapé, puis entre dans la salle où en annexe sont exposées les œuvres de François Rouan Un printemps à Sienne, lesquelles ne suscitent guère mon intérêt.
*
Bien longtemps que le Musée des Beaux-Arts de Rouen n’avait organisé une exposition de cette importance, englué qu’il est le plus souvent dans le localisme.
Bien dommage que cette initiative ne soit pas davantage l’objet de publicité, c’est plus l’occasion pour les Parisien(ne)s et autres lointain(e)s de venir à Rouen qu’une énième expo sur les Impressionnistes.
*
Les lumières et les caméras de télévision sont pointées ailleurs, sur l’Historial Jeanne d’Arc qui ouvre ses portes ce ouiquennede dans les locaux de l’Archevêché au bout de ma ruelle. On y verra, en groupes et en temps limité, des images créées par les technologies modernes retraçant l’histoire de celle devenue sainte bien longtemps après le bûcher. Que du virtuel donc mais on ne peut exclure une apparition bien réelle de celui qui est à l’initiative de cette nouvelle animation du Rouen Parc à Thèmes : Laurent le Fabuliste.
Il y a bien du monde dans les salles assombries du Musée aux murs duquel scintillent les œuvres importées (quelques-unes pas encore installées ne seront visibles qu’à partir de demain, jour de vernissage auquel je ne suis pas invité). Ce foisonnant public est constitué d’une grande majorité de vieilles et de vieux qui connaissent tous les personnages représentés et l’histoire racontée, bien que certain(e)s en aient oublié l’un des épisodes :
-C’est quoi déjà la dormition de la Vierge ?
-On regardera ça sur Internet.
D’autres se plaignent que les cartouches soient trop petits. Un qui a une bonne vue explique à une autre qu’il y a une erreur sur le cartel de l’œuvre numéro douze, l’ordre des saints est inversé.
-Je vais tout de suite le dire à Sylvain Amic, lui déclare-t-elle, il est là, je viens de le voir.
Directeur des Musées de Rouen, il doit savoir s’il faut parler de cartel ou de cartouche.
Evidemment, moi y compris, tout le monde trouve ça magnifique. Comme le résume l’une : « Même si tu crois en rien, tu vois la beauté de ce qui a été fait ». De plus, la scénographie et les éclairages sont réussis. La statue du bébé Jésus nu a son ombre deux fois portée au sol. Une femme lui photographie les fesses malgré l’interdiction.
Je fais une deuxième fois le tour, profitant d’un peu moins de monde pour m’approcher au plus près d’une chevelure ou d’un drapé, puis entre dans la salle où en annexe sont exposées les œuvres de François Rouan Un printemps à Sienne, lesquelles ne suscitent guère mon intérêt.
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Bien longtemps que le Musée des Beaux-Arts de Rouen n’avait organisé une exposition de cette importance, englué qu’il est le plus souvent dans le localisme.
Bien dommage que cette initiative ne soit pas davantage l’objet de publicité, c’est plus l’occasion pour les Parisien(ne)s et autres lointain(e)s de venir à Rouen qu’une énième expo sur les Impressionnistes.
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Les lumières et les caméras de télévision sont pointées ailleurs, sur l’Historial Jeanne d’Arc qui ouvre ses portes ce ouiquennede dans les locaux de l’Archevêché au bout de ma ruelle. On y verra, en groupes et en temps limité, des images créées par les technologies modernes retraçant l’histoire de celle devenue sainte bien longtemps après le bûcher. Que du virtuel donc mais on ne peut exclure une apparition bien réelle de celui qui est à l’initiative de cette nouvelle animation du Rouen Parc à Thèmes : Laurent le Fabuliste.
19 mars 2015
C’est d’abord pour voir celle qui travaille à Paris que j’attends le train de huit heures sept à la gare de Rouen ce mercredi, un œil sur le nouveau numéro de Charlie Hebdo et l’autre sur un essaim de jeunes Anglaises, le printemps étant la saison du renouveau des voyages scolaires, mais je suis aussi content à l’idée de revoir la capitale, dont mon vagabondage en Somme et Pas de Calais m’a privé pendant deux semaines.
A l’arrivée, je file directement au centre du dix-huitième arrondissement, sortant de terre devant la Mairie et avant l’heure du rendez-vous, profitant du beau temps qui s’annonce, grimpe tous les escaliers de la rue du Mont-Cenis, levant mon chapeau au croisement de sa rue au chevalier de La Barre et essayant d’imaginer à quoi pouvait ressembler la maison paysanne où vécut Berlioz à l’endroit de l’immeuble en béton sur lequel est posée la plaque. J’atteins la basilique du Sacré-Cœur, du parvis de laquelle j’ai une belle vue sur la brume qui empêche de voir la ville, un mélange de vapeur d’eau et de fines particules.
A cette heure n’y rodent que des privés de liberté, scolaires cornaqués par les profs et retraités par les guides. De faux artistes s’apprêtent à portraiturer le gogo. Des vendeurs de tours Eiffel chinoises ont déjà déballé. Les militaires du plan Vigipirate rouge renforcé guette l’islamiste ou le futuriste : un grand, un moyen, une petite, les trois à la peau noire, qu’on n’aille pas en déduire quoi que ce soit.
Redescendu à la Mairie, j’ai encore le temps de faire le tour de l’église Notre-Dame-de-Clignancourt, photographiant au passage les tentes des sans abris de la rue Aimé Lavy. A l’heure dite, je toque à sa porte, ma bouteille de vin et mes chips à la main.
Un mois que nous ne nous sommes vus. Heureux de nous retrouver, nous déjeunons d’un plat à la mexicaine de son invention face à la dent creuse dont je fais une photo afin d’en avoir trace le jour où un immeuble sur pivot y sera implanté. Au dessert, un tiramisu, je lui offre l’exemplaire des Trois Brigands de Tomi Ungerer trouvé chez Détéherre, la plus grande bouquinerie rurale de Normandie. Une mini sieste s’impose.
Au réveil, le travail l’appelle près de la Bastille où des livres m’attendent chez Book-Off. Ensemble, nous prenons le métro. Elle ne se sent pas trop en forme mais cela s’améliore au cours du trajet grâce à deux musiciens chanteurs qui investissent la rame : « Comment ça va ? Comme-ci, comme-ci, comme-ci, comme ça… »
*
Un sexagénaire chez Book-Off :
-Bonjour, est-ce que vous avez L’Officiel des spectacles ?
L’employée l’envoie chez un marchand de journaux.
Le même, de retour dix minutes plus tard :
-Bonjour, est-ce que vous avez L’Officiel des spectacles ?
Son deuxième prénom doit être Aloïs.
*
Mercredi soir à la gare Saint-Lazare : le piano mis à disposition des passant(e)s est monopolisé par un groupe de gospel. On n’entend pas l’instrument. On n’entend que les chants extatiques de ces frappé(e)s de dieu utilisant l’initiative de la Senecefe pour propager leur croyance de façon ostentatoire dans un lieu public.
*
Lecture d’un des livres bookoffiés dans le train du retour : Vénus et Tannhäuser, seule œuvre littéraire d’Aubrey Bearsdsley, illustrée par lui-même, censurée pendant longtemps, publiée chez Salvy en mil neuf cent quatre-vingt-quinze :
Sophie manifesta une intimité extrême avec une bouteille de champagne vide, jurant que celle-ci l’avait engrossée, avant de simuler un accouchement sur la table…
A l’arrivée, je file directement au centre du dix-huitième arrondissement, sortant de terre devant la Mairie et avant l’heure du rendez-vous, profitant du beau temps qui s’annonce, grimpe tous les escaliers de la rue du Mont-Cenis, levant mon chapeau au croisement de sa rue au chevalier de La Barre et essayant d’imaginer à quoi pouvait ressembler la maison paysanne où vécut Berlioz à l’endroit de l’immeuble en béton sur lequel est posée la plaque. J’atteins la basilique du Sacré-Cœur, du parvis de laquelle j’ai une belle vue sur la brume qui empêche de voir la ville, un mélange de vapeur d’eau et de fines particules.
A cette heure n’y rodent que des privés de liberté, scolaires cornaqués par les profs et retraités par les guides. De faux artistes s’apprêtent à portraiturer le gogo. Des vendeurs de tours Eiffel chinoises ont déjà déballé. Les militaires du plan Vigipirate rouge renforcé guette l’islamiste ou le futuriste : un grand, un moyen, une petite, les trois à la peau noire, qu’on n’aille pas en déduire quoi que ce soit.
Redescendu à la Mairie, j’ai encore le temps de faire le tour de l’église Notre-Dame-de-Clignancourt, photographiant au passage les tentes des sans abris de la rue Aimé Lavy. A l’heure dite, je toque à sa porte, ma bouteille de vin et mes chips à la main.
Un mois que nous ne nous sommes vus. Heureux de nous retrouver, nous déjeunons d’un plat à la mexicaine de son invention face à la dent creuse dont je fais une photo afin d’en avoir trace le jour où un immeuble sur pivot y sera implanté. Au dessert, un tiramisu, je lui offre l’exemplaire des Trois Brigands de Tomi Ungerer trouvé chez Détéherre, la plus grande bouquinerie rurale de Normandie. Une mini sieste s’impose.
Au réveil, le travail l’appelle près de la Bastille où des livres m’attendent chez Book-Off. Ensemble, nous prenons le métro. Elle ne se sent pas trop en forme mais cela s’améliore au cours du trajet grâce à deux musiciens chanteurs qui investissent la rame : « Comment ça va ? Comme-ci, comme-ci, comme-ci, comme ça… »
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Un sexagénaire chez Book-Off :
-Bonjour, est-ce que vous avez L’Officiel des spectacles ?
L’employée l’envoie chez un marchand de journaux.
Le même, de retour dix minutes plus tard :
-Bonjour, est-ce que vous avez L’Officiel des spectacles ?
Son deuxième prénom doit être Aloïs.
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Mercredi soir à la gare Saint-Lazare : le piano mis à disposition des passant(e)s est monopolisé par un groupe de gospel. On n’entend pas l’instrument. On n’entend que les chants extatiques de ces frappé(e)s de dieu utilisant l’initiative de la Senecefe pour propager leur croyance de façon ostentatoire dans un lieu public.
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Lecture d’un des livres bookoffiés dans le train du retour : Vénus et Tannhäuser, seule œuvre littéraire d’Aubrey Bearsdsley, illustrée par lui-même, censurée pendant longtemps, publiée chez Salvy en mil neuf cent quatre-vingt-quinze :
Sophie manifesta une intimité extrême avec une bouteille de champagne vide, jurant que celle-ci l’avait engrossée, avant de simuler un accouchement sur la table…
18 mars 2015
Une lecture qui ne m’a pas emballé, celle des Souvenirs indiscrets de Natalie Clifford Barney (Flammarion). Ces souvenirs manquent de révélations sur elle-même. Préférant évoquer les autres (Renée Vivien, Rémy de Gourmont, la duchesse de Clermont-Tonnerre, les Mardrus, Colette, Milosz), cela dans un style ampoulé fâcheusement daté, elle reste là aussi trop discrète et respectueuse à mon goût.
Quand même, cette perfidie sur Colette :
Au début de ce siècle, lorsque je vis Colette pour la première fois, elle n’était déjà plus la mince adolescente aux longues nattes, couchée dans un hamac, que nous montre une photographie, mais une jeune femme bien campée sur des jambes solides, et dont la chute de reins dévalait vers un derrière rebondi…
Cette anecdote confirmant ce que l’on sait de Willy :
Et j’eus cette fois un exemple pénible de la contrainte que Willy exerçait sur Colette : lorsque j’arrivai chez eux pour inviter Colette seule à cette petite fête que j’improvisais à la hâte chez moi à Neuilly, où Mata-Hari m’avait proposé de redonner une séance de ses danses japonaise, mais toute nue, et devant un groupe de dames seules, Willy, de mauvaise humeur d’être ainsi exclu, ne voulut donner son consentement qu’en imposant des conditions scabreuses. Et Colette, chemin faisant, m’avoua : « J’ai honte que tu aies vu d’aussi près ma chaîne. »
Et cette autre, montrant Gide faire face à une surprise-party :
A Paris, Gide vivait retiré dans sa haute maison du parc de Montmorency, avec des meurtrières en guise de fenêtres, afin de ne pas être dérangé. C’est de l’une d’elles qu’il nous vit arriver, à l’instigation de Mardrus, avec des paniers de provisions et le fou-rire, devant sa porte étroite, que Gide dut entrebâiller pour nous laisser entrer. (…)
Sur ce, Mardrus ayant déballé couverts et vivres sur la dernière marche du vestibule, pria cérémonieusement Gide de devenir notre hôte, ce qu’il fit de façon tortueuse et cachant mal son déplaisir.
*
En fin d’ouvrage, une série d’aphorismes sur l’amour dont je ne peux sauver que celui-ci :
« Aime ton prochain comme toi-même. » A croire que personne ne s’aime !
*
Natalie Clifford Barney, dans son Avertissement, en toute modestie :
Je crois ne m’être jamais approchée d’un être sans lui faire du bien.
Renée Vivien aurait-elle trouvé sa voie sans moi ?
Remy de Gourmont aurait-il eu sa vie renouvelée, sans son Amazone ?
Quand même, cette perfidie sur Colette :
Au début de ce siècle, lorsque je vis Colette pour la première fois, elle n’était déjà plus la mince adolescente aux longues nattes, couchée dans un hamac, que nous montre une photographie, mais une jeune femme bien campée sur des jambes solides, et dont la chute de reins dévalait vers un derrière rebondi…
Cette anecdote confirmant ce que l’on sait de Willy :
Et j’eus cette fois un exemple pénible de la contrainte que Willy exerçait sur Colette : lorsque j’arrivai chez eux pour inviter Colette seule à cette petite fête que j’improvisais à la hâte chez moi à Neuilly, où Mata-Hari m’avait proposé de redonner une séance de ses danses japonaise, mais toute nue, et devant un groupe de dames seules, Willy, de mauvaise humeur d’être ainsi exclu, ne voulut donner son consentement qu’en imposant des conditions scabreuses. Et Colette, chemin faisant, m’avoua : « J’ai honte que tu aies vu d’aussi près ma chaîne. »
Et cette autre, montrant Gide faire face à une surprise-party :
A Paris, Gide vivait retiré dans sa haute maison du parc de Montmorency, avec des meurtrières en guise de fenêtres, afin de ne pas être dérangé. C’est de l’une d’elles qu’il nous vit arriver, à l’instigation de Mardrus, avec des paniers de provisions et le fou-rire, devant sa porte étroite, que Gide dut entrebâiller pour nous laisser entrer. (…)
Sur ce, Mardrus ayant déballé couverts et vivres sur la dernière marche du vestibule, pria cérémonieusement Gide de devenir notre hôte, ce qu’il fit de façon tortueuse et cachant mal son déplaisir.
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En fin d’ouvrage, une série d’aphorismes sur l’amour dont je ne peux sauver que celui-ci :
« Aime ton prochain comme toi-même. » A croire que personne ne s’aime !
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Natalie Clifford Barney, dans son Avertissement, en toute modestie :
Je crois ne m’être jamais approchée d’un être sans lui faire du bien.
Renée Vivien aurait-elle trouvé sa voie sans moi ?
Remy de Gourmont aurait-il eu sa vie renouvelée, sans son Amazone ?
17 mars 2015
Ce dimanche après-midi, j’ai place décentrée en corbeille à l’Opéra de Rouen pour un concert intitulé Quatuors viennois, entouré uniquement par des vieilles et des vieux (neuf femmes pour un homme), autrement dit par des personnes qui me ressemblent et ce n’est pas pour me plaire.
Heureusement, il y a la musique jouée par Jane Peters (violon), Hervé Walczak Le Sauder (violon), Agathe Blondel (alto) et Florent Audibert (violoncelle), les Six bagatelles d’Anton Webern, le Quatuor numéro dix-neuf en do majeur « Les Dissonances » de Wolfgang Amadeus Mozart et le Quatuor numéro treize en la mineur « Rosamund » de Franz Schubert.
Ces deux quatuors sont de toute beauté mais leur interprétation est perturbée par les toux des malades de service et les trop nombreux accordages d’instruments entre les mouvements.
A l’issue, je quitte vite mon entourage de peur d’être emporté jusqu’à un salon de thé.
*
Avant le concert, dialogue de deux de mes voisines :
-T’as fermé ton téléphone ?
-Il est dans mon sac.
-Oui, mais tu l’as arrêté ?
-Oh, personne va m’appeler.
Ce qui s’est confirmé.
Heureusement, il y a la musique jouée par Jane Peters (violon), Hervé Walczak Le Sauder (violon), Agathe Blondel (alto) et Florent Audibert (violoncelle), les Six bagatelles d’Anton Webern, le Quatuor numéro dix-neuf en do majeur « Les Dissonances » de Wolfgang Amadeus Mozart et le Quatuor numéro treize en la mineur « Rosamund » de Franz Schubert.
Ces deux quatuors sont de toute beauté mais leur interprétation est perturbée par les toux des malades de service et les trop nombreux accordages d’instruments entre les mouvements.
A l’issue, je quitte vite mon entourage de peur d’être emporté jusqu’à un salon de thé.
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Avant le concert, dialogue de deux de mes voisines :
-T’as fermé ton téléphone ?
-Il est dans mon sac.
-Oui, mais tu l’as arrêté ?
-Oh, personne va m’appeler.
Ce qui s’est confirmé.
16 mars 2015
Ce dimanche matin, je suis de retour au vide grenier rouennais du quartier Augustins Molière, moins fourni en vendeurs et surtout en visiteurs que la veille, ce qui est un bien. Un déballeur de ma connaissance m’a dit hier qu’il serait près du Crédit Agricole avec beaucoup de livres à bas prix et c’est exact. Il m’en fait sept pour quatre euros, parmi lesquels Ma vie, mes conneries de Ben Vautier (Z’éditions, Nice) et la réédition Jean de Bonnot pour bibliophile (avec certificat d’authenticité) de Plaidoyer contre l’introduction de cadenas ou ceinture de chasteté de Maître Freydier, avocat à Nîmes, une harangue datant de mil sept cent cinquante.
A l’autre extrémité du déballage, je trouve une jeune femme qui se débarrasse sans envie d’une partie de sa bibliothèque, n’ayant gardé que les deux cents livres qui lui tiennent le plus à cœur. Je fais là aussi quelques affaires, oubliant la déception du samedi.
*
Bihorel, banlieue de Rouen, a pour Maire Pascal Houbron de l’Hudéhi, un adepte du gazouillis :
« J'ai décidé de ne plus recevoir en Mairie les personnes qui n'iront pas voter ; nous avons des droits, mais aussi des devoirs de citoyen »
« Je ne vote pas : je ne suis pas prioritaire pour une place de crèche ou pour m'inscrire au voyage des anciens. J'ai des droits et des devoirs »
A Bihorel, si l’on vote et donc si l’on est reçu par Monsieur le Maire, on bénéficie de favoritisme pour avoir une place en crèche ou dans le car des retraités réjouis.
*
Un autre politicien de je ne sais où et dont je n’ai pas retenu le nom, un Ecologiste, demande à ce que le vote soit obligatoire, une vieille idée défendue autrefois par Laurent le Fabuleux, mais je crains que cette proposition ne soit pas appliquée avant la fin de ma vie.
Cela m’éviterait de me demander à chaque fois si j’y vais ou si je n’y vais pas, puisque je refuserais d’obéir, payant à chaque fois avec plaisir l’amende qui sanctionnerait les réfractaires.
A l’autre extrémité du déballage, je trouve une jeune femme qui se débarrasse sans envie d’une partie de sa bibliothèque, n’ayant gardé que les deux cents livres qui lui tiennent le plus à cœur. Je fais là aussi quelques affaires, oubliant la déception du samedi.
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Bihorel, banlieue de Rouen, a pour Maire Pascal Houbron de l’Hudéhi, un adepte du gazouillis :
« J'ai décidé de ne plus recevoir en Mairie les personnes qui n'iront pas voter ; nous avons des droits, mais aussi des devoirs de citoyen »
« Je ne vote pas : je ne suis pas prioritaire pour une place de crèche ou pour m'inscrire au voyage des anciens. J'ai des droits et des devoirs »
A Bihorel, si l’on vote et donc si l’on est reçu par Monsieur le Maire, on bénéficie de favoritisme pour avoir une place en crèche ou dans le car des retraités réjouis.
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Un autre politicien de je ne sais où et dont je n’ai pas retenu le nom, un Ecologiste, demande à ce que le vote soit obligatoire, une vieille idée défendue autrefois par Laurent le Fabuleux, mais je crains que cette proposition ne soit pas appliquée avant la fin de ma vie.
Cela m’éviterait de me demander à chaque fois si j’y vais ou si je n’y vais pas, puisque je refuserais d’obéir, payant à chaque fois avec plaisir l’amende qui sanctionnerait les réfractaires.
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