Le Journal de Michel Perdrial

Le Journal de Michel Perdrial




Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

11 octobre 2017


L’une de mes connaissances m’ayant convaincu que l’on peut parfois trouver de bons livres dans les boîtes à livres installées en divers lieux de Rouen (comme partout en France), j’en ouvre.
C’est vrai qu’il m’arrive d’y trouver un livre que j’aurais acheté un euro dans un vide grenier. J’y vois aussi des livres qui peuvent plaire à autres. Parfois, malheureusement, les ouvrages proposés ont l’air de sortir d’une poubelle.
Sont aussi déposés dans ces boîtes des objets ayant peu à voir avec la littérature. Certains s’y débarrassent de leurs cassettes vidéo. D’autres y déposent des jouets d’enfant. Ce dernier dimanche, celle de la place de la Calende contenait deux paires de chaussures.
Il en est même qui profitent de l’occasion pour faire de la propagande. J’y trouve régulièrement des tracts animalistes et jéhovistes. Je les transfère à la poubelle la plus proche.
Les livres cradingues et les vieilles cassettes disparaissent également, mais je n’y suis pour rien.
                                                            *
Polémique actuelle : celle de l’orthographe inclusive. Je suis plutôt pour, et le montre depuis longtemps en écrivant par exemple « des étudiant(e)s » quand j’évoque un groupe d’élèves de l’Université dans lequel se trouvent des filles et des garçons.
Les garçons cachent souvent les filles, c’est dommage.
Il arrive que ce soit le contraire. Quand je parle de « l’une de mes connaissances », cela m’ennuie que l’on ne sache pas s’il s’agit d’une femme ou d’un homme. Il en est de même quand j’évoque une personne.
Ce féminin est gênant, il faudrait pouvoir masculiniser.
Pour « une connaissance », je ne vois pas comment faire. Pour « une personne », je proposerais bien « un person », mais je crains que cela donne naissance à une nouvelle polémique.
 

10 octobre 2017


Ce samedi, je voulais aller au Havre mais ayant appris (tardivement) que c’était le jour du l’opération de désherbage annuel des petites bibliothèques de quartier rouennaises, j’ai fait annuler mon billet à la gare. Il ne pleut pas. Je pourrais rejoindre le centre commercial des Docks à pied par le bord de la Seine mais j’ai la flemme. C’est un bus Teor qui m’y mène.
Je passe par les toilettes du déprimant temple de la consommation. Celle dédiée à Robert le Brochet a été restaurée. L’animal à la dent carnassière est toujours d’humeur inégale, (ses amis se comptent sur la phalange d’un doigt).
Redescendu au rez-de-chaussée et arrivé à proximité du lieu où s’activent les bibliothécaires, je constate qu’aucun brochet concurrent n’est là. Du moins ceux que je connais. D’autres impatient(e)s m’ont précédé. Certaines essaient d’anticiper l’ouverture officielle mais se font rabrouer. Un peu avant dix heures, c’est la ruée sur les livres. Celles et ceux qui viennent pour les romans ont de quoi faire. Pour les autres, c’est portion congrue (comme on dit). On ne pourra pas accuser les bibliothécaires rouennais(e)s de dilapider leur fond.
Pas plus de vingt livres par personne, c’est la règle. J’en suis loin quand je passe à la caisse où l’on me remet un reçu officiel justifiant de mon paiement. Le peu de poids au bout de mon bras justifierait un retour à pied mais je n’en ai pas l’envie.
Les absents n’ont pas forcément toujours tort, peut-être aurais-je mieux fait d’aller au Havre.
                                                                 *
On peut aussi compter sur ceux qui travaillent pour foutre le bordel (je parle comme le Président Macron). Depuis des semaines les rues du centre du Rouen sont pleines de trous consécutifs à une remise à niveau du réseau électrique. On ne peut se déplacer sans subir le bruit des scies à bitume, des marteaux-piqueurs et des camions aspirateurs de gravas.
L’un des engins a détruit l’auvent de la bouquinerie Le Rêve de l’Escalier où je passe après la déception du désherbage. J’y trouve le Journal de Catherine Pozzi dans sa première édition, celle qu’en fit Claire Paulhan chez Ramsay en mil neuf cent quatre-vingt-sept. Douze euros quand même, mais payé avec mon avoir.
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Cruel démenti. Contrairement à ce que je croyais, on trouve parfois des enfants dans les restaurants japonais. Ceux-là sont quatre, sous la surveillance relative d’une grand-mère et d’une amie de celle-ci. Prénommés pour trois d’entre eux : José, Joseph et Juliette. J’ignore le prénom du quatrième qui se tient tranquille. Peut-être Jasmin ou Jéroboam.
L’un des pères arrive, une planche à roulettes sous le bras. Il ne sait pas trouver les assiettes sans l’aide de sa descendance.
 

9 octobre 2017


Qui est ce David Lafore invité à donner concert à l’Hôtel de l’Europe ce vendredi soir ? Je n’en ai pas la moindre idée mais les qualificatifs employés pour le définir  par La Terrasse, Libération, Télérama, France Culture, France Inter, Radio France Internationale, Sud-Ouest: effronté, nonchalant incisif, impudique, givré, sensible, farfelu, insolent, extravagant, caustique, provocant, désinvolte, espiègle, caustique, hédoniste ; ainsi que les noms de ceux à qui il peut faire penser selon ces mêmes radios et journaux: Philippe Katerine, Elmer Food Beat, Brigitte Fontaine, me convainquent que cette soirée est faite pour moi, aussi j’emprunte la rue aux Ours vers vingt heures, constatant qu’un autre événement y a cours. Beaucoup des vendeurs et vendeuses de drouille issue de vidages d’appartements exerçant le vendredi matin sur le marché du Clos Saint-Marc sont là car l’un ouvre un magasin pour y proposer ses plus belles trouvailles. Afin de boire un coup (comme ils disent), une table a été installée sur la chaussée.
-Qui est Brigitte Grandjean ? demandé-je au maître des lieux quand j’arrive (le premier évidemment) à l’Hôtel de l’Europe alors que David Lafore s’échauffe la voix. Je découvre que je la connais depuis longtemps, ayant eu un de ses enfants dans ma classe de petite section de maternelle à Val-de-Reuil quand elle portait un autre nom.
C’est un concert en petit comité pour spectateurs et spectatrices confortablement installés dans la salle des petits-déjeuners. Brigitte Grandjean présente David Lafore en quelques mots. S’accompagnant à la guitare électrique, celui-ci chante essentiellement des histoires d’amour dans lesquelles le garçon n’a pas le meilleur rôle, se livre à des facéties vocales et musicales, dit quelques bêtises.
A la pause, je m’offre un verre de vin blanc et discute un peu avec l’un des présents nommé Philo. J’ai travaillé avec ce musicien martiniquais et son compère conteur burkinabé Adji (que je croise souvent dans les ventes de livres) l’année où j’ai eu une moyenne section de maternelle à Bois-Guillaume.
Après avoir chanté a capella Ta petite culotte, le facétieux Lafore se livre à un lancer d’eau auquel j’échappe de peu. Tandis que le barman éponge la banquette et que mon voisin fait de même avec ses vêtements, il nous offre une reprise allumée de Do you really want to hurt me puis revient à son répertoire. L’artiste mérite tous les qualificatifs dont l’affublent la presse et la radio. Entre deux chansons on entend un couple de clients de l’hôtel s’informer de l’heure du petit-déjeuner.
À l’issue, David Lafore, né en soixante-douze, au physique passe-partout et à la vêture volontairement quelconque, propose ses disques à dix, quinze ou vingt euros, c’est comme on veut. Je m’abstiens car je ne mets plus de disques chez moi depuis qu’il n’y a personne pour en partager l’écoute. Je me contente de mettre un petit billet dans le chapeau à la sortie et repars content de l’Hôtel de l’Europe.
Il est presque vingt-trois heures. A l’autre bout de la rue aux Ours, les brocanteurs et brocanteuses rangent la table installée sur la chaussée. Au son des rires et des voix, on devine que leur soirée a été bien arrosée.
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 Je suis ta petite culotte/ Une culotte de coton blanc/ Je suis ta petite culotte/ Tu cours, tu trottes/ Et mes élastiques/ Se tendent et s'agrippent/ Tu t'assois sur moi/ M'écrase et croise les jambes/ M'étouffe/ J'ai peur quand tu tousses. (David Lafore)
 

6 octobre 2017


Quatrième et dernière partie de mes notes prises lors de la lecture des rapports de Ferdinand de Federici publiés sous le titre Flagrants délits sur les Champs-Elysées (1777-1791) dans la collection Le Temps retrouvé du Mercure de France. C’est l’époque de la Révolution. Dans un premier temps, cela ne change rien à l’activité du sieur Federici (bien que l’on sente une certaine baisse de motivation, comme on dirait aujourd’hui), mais quand en mil sept quatre-vingt-onze les Champs-Elysées passent sous la responsabilité de la ville de Paris, Federici et ses gardes suisses sont remerciés :
Ce lundi matin, l’on a trouvé un Suisse noyé dans l’égout qui règne le long de la ruelle des Gourdes ; fait garder le corps par un homme de la garde, tandis qu’un autre est allé à la compagnie de Chaillot pour l’avertir de faire la levée de ce cadavre. (Rapport du 9 au 16 février 1789)
La nuit du vendredi au samedi, une chaumière du maraîcher Amat, dans le marais, s’est écroulée et sa chute a occasionné la mort d’un jeune homme et quatre personnes, hommes et femmes, ont été plus ou moins blessées. M. le commissaire Carré a rempli les formalités d’usage. (Rapport du 16 au 23 mars 1789)
La garde est sans cesse occupée à renvoyer la mendicité pour la tranquillité des personnes honnêtes qui jouissent de la promenade.
Jeudi 13, de toute l’après-midi on n’a pu quitter S.A.S. Mme la duchesse d’Orléans et les princes ses enfants, à l’effet d’éloigner une quantité de mendiants qui la tourmentaient malgré 12 livres qu’elle leur avait fait distribuer. (Rapport du 10 au 17 août 1789)
Il ne s’est rien passé de nouveau, si ce n’est qu’une fille vers minuit est entrée par le jardin de Mme la comtesse de Sabran, dont un domestique lui a ouvert les grilles en disant que c’était sa femme. (Rapport du 1er au 8 octobre 1789)
La nuit du vendredi au samedi, a relevé et mis sur son chemin un bourgeois fort bien couvert, qui était pris de vin. Idem, à la même heure, arrêté et conduit au district une fille trouvée en posture indécente avec un particulier, qui s’est sauvé. Idem, arrêté et conduit au district une fille pour cause de persévérance dans le scandale. (Rapport du 23 au 30 août 1790)
Mercredi 1er, la garde s’est portée deux fois avec les armes pour dissiper des gardes nationaux qui se disposaient pour se battre. Idem, la patrouille réunie a arrêté et conduit au district vers les dix heures du soir un particulier qui faisait du tapage. (Rapport du 30 août au 6 septembre 1790)
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Lettre du comte d’Affry, colonel des gardes suisses, à M. de la Porte, intendant de la liste civile, Paris, le 19 décembre 1791 :
J’ai reçu, monsieur, la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire par laquelle vous m’annoncez que l’intention du Roi est de ne plus entretenir aux Champs-Elysées le poste de six soldats aux gardes suisses, commandé par le sieur Federici qui y avait été établi pour la conservation des arbres et pour veiller jour et nuit par des patrouilles à la sûreté et à l’ordre public. Les ordres de Sa Majesté seront exécutés et ce détachement rentrera au régiment le 31 de ce mois.
 

5 octobre 2017


Quand j’arrive à la gare de Rouen, ce mercredi, vingt minutes de retard sont affichées pour le sept heures cinquante-neuf menant directement à Paris. Je demande à un employé de la Senecefe si l’omnibus de huit heures douze arrivera avant et si je peux le prendre malgré mon billet à tarif réduit. Il répond oui aux deux questions. Bientôt le retard du premier passe à trente minutes environ. La raison en est un problème de signalisation.
Beaucoup font comme moi et le huit heures douze part complet. Celles et ceux qui montent à Oissel, Val-de-Reuil, Gaillon Aubevoye, Vernon Giverny et Mantes-la-Jolie ont des places debout.
Hélas, une nouvelle complication a lieu à l’approche de Paris. Notre train doit changer d’itinéraire suite à un mystérieux « problème d’installation ». Il est détourné par Bois-Colombes, ce qui entraîne un retard de vingt minutes à l’arrivée.
En conséquence, il y a bien longtemps que c’est ouvert quand j’entre chez Book-Off, rue du Faubourg-Saint-Antoine. Deux sexagénaires amateurs de musique populaire anglo-saxonne s’y livre à une concurrence bavarde, faisant le tour de leurs admirations, dont pas mal de chanteurs et chanteuses ayant vécu peu longtemps pour cause d’excès divers.
-Il reste les Stones, dit l’un.
-C’est parce qu’ils ont fait changer leur sang en Suisse, répond l’autre.
Je sors de là avec presque rien et un peu soûlé.
Après avoir déjeuné au Palais de Pékin, je me trouve à treize heures dans la petite foule de pauvres et de marchands camouflés qui attend l’ouverture de la Petite Rockette, la ressourcerie de la rue du Chemin Vert. Comme l’indique une grande banderole, son avenir est compromis par la politique de Macron. Quatorze salariés sur vingt sont menacés par la suppression des contrats aidés. Une femme qui se trouve devant moi ouvre son courrier. Une enveloppe venant de Montpellier contient une amende de trois cents euros. A l’ouverture, je ne trouve aucun livre à mon goût.
J’en trouve peu au deuxième Book-Off. Mon dos fatigué n’a pas à souffrir du poids de mon sac quand je rejoins La Ville d’Argentan. J’y prends un café en attendant un train de retour que j’espère à l’heure. Derrière moi, un réalisateur de séries discute avec Jean-Michel Cousteau, fils du Commandant, qui repart demain aux Etats-Unis. Il s’agit d’un projet sur les aventures de la Calypso. Il est surtout question d’argent, du surcoût entraîné par les films tournés en mer. « Surtout ne pas oublier la Chine pour les droits », insiste le descendant à barbe blanche sans bonnet rouge. « C’est vingt pour cent de la population mondiale et ils connaissent le Commandant Cousteau, ils ont piraté ses films à l’époque. »
                                                                     *
Mes voisines au Palais de Pékin en ont après Mimie, celle qui gueule quand on lui téléphone à midi :
-Aller coucher avec le père de son copain. Quand même, ça se fait pas. Un peu de respect.
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Rue Ledru-Rollin, des employés de Jicé Decaux se consacrent à neutraliser les bornes des Vélib’. Leur patron a perdu le marché.
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Un drapeau catalan suspendu à une fenêtre parisienne, le siège de la future Ambassade peut-être.
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Pas une journée sans qu’un problème ne perturbe la circulation ferroviaire sur la ligne Paris Rouen Le Havre. Depuis qu’il a commandé des trains de grande largeur qui ne changeront rien aux problèmes d’infrastructure, Hervé Morin, Duc de Normandie, Centriste de Droite, semble se désintéresser de la question.
On l’a vu récemment s’amuser avec des voitures électriques sans conducteur en compagnie de Frédéric Sanchez, Chef de la Matmutropole, Socialiste. Ces deux gars sont résolument modernes.
 

4 octobre 2017


Troisième partie de mes notes prises lors de la lecture des rapports de Ferdinand de Federici publiés sous le titre Flagrants délits sur les Champs-Elysées (1777-1791) dans la collection Le Temps retrouvé du Mercure de France :
Samedi 29, Marie Caponier âgée de vingt ans, native de Reims, arrêtée pour cause d’avoir raccroché et de s’être enfuite à grand course après avoir pris le chapeau sur la tête du concierge des marchands drapiers, demeurant rue des Déchargeurs. La fille est à la prison de Saint-Martin. (Rapport du 24 au 31 mai 1784)
Mercredi 2, arrêté un jeune homme pour cause d’avoir troublé des enfants en coupant la ficelle de leur cerf-volant, leur avoir fait perdre un mouchoir blanc et avoir déchiré le déshabillé de la gouvernante. Relaxé en payant 6 livres de dédommagement à la dame domestique. (Rapport du 31 mai 7 juin 1784)
Rien de nouveau. (Rapport du 3 au 10 janvier 1785)
Mardi 11, arrêté un particulier âgé de soixante-dix-neuf ans, pour cause d’avoir pris nuitamment des pieux de la haie de M. le duc de Charost, relaxé deux heures après en considération de son âge. (Rapport du 10 au 17 janvier 1785)
Vendredi, envoyé la garde jusqu’à l’Etoile pour séparer des Suisses d’avec des dragons, qui y étaient pour se battre.
Hier dimanche, trouvé dans les fossés un paquet de hardes et l’épée d’un soldat des gardes-françaises qui avait apparemment déserté, envoyé ledit paquet à l’adjudant du dépôt dudit corps. (Rapport du 10 au 17 octobre 1785)
Mardi 23, arrêté une jeune femme de dix-huit ans fort bien et décemment vêtue qui raccrochait depuis trois jours, conduisant les personnes au cabaret de l’allée d’Antin, relaxée vu qu’elle était grosse de huit mois.
Le même jour, fait arrêter par la garde de Paris, qui était à portée un particulier qui s’amusait en plein jour avec une petite fille de six à sept ans, il a été emprisonné. (Rapport du 22 au 29 avril 1786)
Vendredi, 23, fait conduire ici un cheval et des porcs appartenant à des marchands, qui pâturaient à l’Etoile, hors de la grille des Champs-Elysées, et remis leurs animaux moyennant 6 livres d’amende au profit de la cuisine des Suisses. (Rapport du 19 au 26 mai 1788)
Samedi 18, arrêté Jean-Marie Boudin, âgé de vingt-huit ans, tout déguenillé, rôdeur suspect, sans papiers ni domicile, il est emprisonné. (Rapport du 13 au 20 octobre 1788)
Jeudi vers les dix heures du soir, arrêté un ecclésiastique prédicateur anglais surpris en action de pédérastie, dont son complice s’est sauvé. Il a offert pour sa liberté, tant aux Suisses qu’à moi, sa bourse et sa montre, mais j’ai cru devoir en écrire à M. le duc de Dorset qui, aussitôt sa rentrée, vers minuit, a envoyé deux personnes pour me faire bien des remerciements sur mon attention pour lui, auxquelles j’ai remis ledit ecclésiastique qui, au seul nom de cet ambassadeur, me disait : « Tuez-moi, tuez-moi, je suis ruiné, kill me, kill me, I am undone, I am lost. » (Rapport du 27 octobre au 3 novembre 1788)
Lundi soir 19, dispersé et désarmé de manches à balai une dizaine de polissons, avec lesquels ils s’étaient donné rendez-vous pour se battre. (Rapport du 19 au 26 janvier 1789)
                                                              *
On notera que la raccrocheuse Marie Caponier, si elle est emprisonnée, après s’être enfuite, c’est pour avoir volé un chapeau.
 

3 octobre 2017


Ma nouvelle saison à l’Opéra de Rouen commence ce dimanche après-midi premier octobre. J’ai place décentrée en corbeille côté cour pour Norma de Vincenzo Bellini dont la mise en scène est due à Frédéric Roels, le maître des lieux sur le départ. En quoi cette histoire de Gaulois occupés par les Romains va-t-elle pouvoir m’intéresser, c’est la question que je me pose.
Le décor se compose d’une structure en forme de charpente, symbolisant les entrailles de la terre, dans laquelle est ménagée une trouée circulaire sur le ciel qui ne leur tombera pas sur la tête. Ces Gaulois habillés par Lionel Lesire ont des allures de fashion victimes. La druidesse Norma a eu deux enfants avec Pollione, son amant proconsul romain, mais celui-ci tombe amoureux d’Adalgisa, d’où courroux de la première qui veut la guerre, c’est en gros l’intrigue.
Frédéric Roels a choisi de revenir aux sources en faisant chanter Norma par une mezzo-soprano (Diana Axentii) et Adalgisa par une soprano (Ludivine Gombert). Pollione est interprété par le ténor Lorenzo Decaro. Dans la fosse, l’Orchestre est dirigé par Fabrizio Maria Carminati. Le chœur est confié à accentus. Les duos et trios chantés sont également dansés par des artistes de la Compagnie Beau Geste. Cet opéra qui ne me disait rien est une suite d’airs connus au point qu’un voisin de derrière se laisse aller à chantonner tandis qu’à ma gauche une femme participe à la musique avec la brocante qui lui sert de boucles d’oreilles.
A l’entracte, je retrouve un aventurier retour de Stockholm. Lui aussi apprécie plus qu’il ne l’aurait cru, même s’il trouve cette musique un peu facile. Ayant regagné ma place, j’observe une femme installée dans une loge côté jardin qui photographie sous toutes ses épines un bouquet de roses rouges qu’elle destine certainement à l’interprète du rôle titre.
Hélas, l’acte deux tourne au Grand-Guignol avec la présence envahissante d’un couteau dont on ne sait qui en sera victime. Adalgisa ? Pollione ? Norma elle-même ? Les enfants ? Il est passé par ici, il repassera par là. Une spectatrice a un cri d’effroi lorsque la lame s’approche de la blonde petite fille à longues nattes. Ce long suspense est bien fatigant, d’autant que ce couteau ne sert à rien. Cela se termine autrement, ce qui nous vaut cette déclaration ébouriffante que met l’auteur du livret, Felice Romani, dans la bouche de Norma : « Comblée, je vais au bûcher. » Pollione l’y rejoint avant le baisser de rideau.
Tout le monde est fort applaudi et pour une fois (et la dernière) Frédéric Roels vient recevoir timidement sa part. L’enfant garçon offre une rose rouge aux principales interprètes ce qui n’arrange pas les affaires de la femme au bouquet. Après s’être bien agitée, elle finit par réussir à attirer l’attention du petit porteur de fleurs qui remet l’offrande à la diva.
                                                                 *
En rentrant, j’apprends qu’un couteau tenu par un islamiste a tué deux jeunes femmes à Marseille. Celle pour qui je m’inquiète m’envoie rapidement un message rassurant.
 

2 octobre 2017


Le temps est gris quand je sors de chez moi ce dimanche matin. Le jour, lui, n’est pas encore levé. Cela me vaut le privilège de parcourir la rue du Gros, de la Cathédrale au Vieux-Marché, sans croiser âme qui vive (comme on dit).
Mon objectif est d’arriver dans le quartier de la Madeleine avant la pluie. J’y réussis.  Celle-ci ne semble pas vouloir tomber pendant que je parcours les rues du déballage où les installés sont moins nombreux que l’an dernier. Du jardin situé face au bâtiment universitaire provient une odeur de putréfaction, La fourrière est à l’ouvrage, pour qui cet évènement, quel que soit le temps, est une aubaine.
Cette année, il n’en est pas une pour moi. Je ne vois pas le moindre livre parmi le peu offert à mes yeux qui me fasse envie. Je n’en reviens pas moins lourdement chargé, la faute à une ramette de cinq cents feuilles, quatre-vingts grammes, format A Trois, achetée un euro.
L’ayant déposée à la maison, je ressors illico pour me rendre au vide grenier de la Rougemare. Celui-là a l’avantage d’être à proximité et l’inconvénient d’être peu étendu. J’y trouve des piles de livres dans lesquelles je cherche mon bonheur et y croise des connaissances dont l’ancien bouquiniste du Rêve de l’Escalier à qui j’indique que des Pléiades Mauriac et Racine sont en vente un peu plus loin au prix de cinq euros. Elles deviennent siennes.
Pour ma part, je repars avec notamment Chronique d’une déraison (Moscou 1937-1938) d’Ioulia Pianitskaïa (Editions du Seuil), le journal de la femme d’Ossip Piatnitski qui pour s’être opposé à Staline en plein Comité Central fut arrêté, torturé et tué d’une balle dans la nuque.
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Ce dimanche, des images venues d’Espagne dans lesquelles on voit la Guardia Civil agir d’une façon qui rappelle l’époque où Franco était au pouvoir. Je n’ai pas d’avis arrêté sur l’envie d’indépendance d’une partie des habitants de la Catalogne, laquelle si elle y parvenait serait automatiquement sortie de l’Union Européenne, mais j’ai du mal à comprendre pourquoi le Chef du Gouvernement Rajoy (Droitiste soutenu par les Centristes et les Socialistes) a choisi de réprimer violemment alors qu’il aurait pu laisser faire et déclarer ensuite le référendum illégal.
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Projet palpitant d’un jeune couple au Son du Cor : « La véranda, c’est pour fin novembre. »
 

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