Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
8 août 2022
Ayant été privé du réseau social Effe Bé durant de nombreuses semaines cet été, je n’ai plus su ce que devenaient mes « ami(e)s ». Retrouvant la connexion, j’ai pu à nouveau connaître ce qu’elles et eux veulent bien montrer de leur vie. Ce dimanche, je me suis avisé que l’un ne publiait plus rien. C’est ainsi que, cliquant sur son nom, j’ai appris la mort de Jean Braunstein le vingt juin dernier. Je n’ai pas été complètement étonné car je le savais malade, mais cela m’a bien attristé.
Un soir de deux mille seize à l’Opéra de Rouen, après que j’ai évoqué dans mon Journal l’entracte d’un précédent concert en poussant le bouchon (de champagne) un peu loin, disant que les Centristes de Droite semblaient fêter la victoire de Trump, je vis s’avancer vers moi deux spectateurs qui se présentèrent ainsi : « Bonsoir, nous sommes des Centristes de Droite ».
C’est ainsi que je fis la connaissance du duo constitué par Jean Braunstein et Mathieu Dranguet, deux individus que je trouvais d’emblée sympathiques. Quand ils me demandèrent en ami (comme on dit) sur Effe Bé, j’acceptais et au fil du temps découvris deux personnalités intéressantes que leur engagement politique n’avait pas doté d’œillères.
Malgré sa maladie, Jean Braunstein animait des émissions culturelles sur la Radio Chrétienne Francophone, publiait des guides touristiques aux Editions des Falaises et partait le plus souvent possible en voyage avec sa femme et parfois son ami Mathieu en Europe et au-delà. La dernière fois que nous nous sommes parlé, c’était il y a quelques mois à la boulangerie du Fournil du Carré d’Or. Il était amaigri et avait des difficultés pour marcher. Ce qui ne l’empêcha pas d’enfourcher son vélo.
*
Message reçu sur Effe Bé, le vingt-trois décembre deux mille seize :
« Bonsoir, nous tenions à vous dire que nous avons passé avant-hier soir dans une brasserie de Cologne une excellente soirée en compagnie de votre journal, dont nous avons lu quelques extraits à haute voix. Il est vrai qu'il y avait aussi de la Kölsch. Bravo pour votre style, vos observations du public de l'opéra, de la bourgeoisie bourgeoisante, de la campagne électorale de 2014 que nous avons vécu de l'intérieur. Jean Braunstein, Mathieu Dranguet, centristes de droite »
Un soir de deux mille seize à l’Opéra de Rouen, après que j’ai évoqué dans mon Journal l’entracte d’un précédent concert en poussant le bouchon (de champagne) un peu loin, disant que les Centristes de Droite semblaient fêter la victoire de Trump, je vis s’avancer vers moi deux spectateurs qui se présentèrent ainsi : « Bonsoir, nous sommes des Centristes de Droite ».
C’est ainsi que je fis la connaissance du duo constitué par Jean Braunstein et Mathieu Dranguet, deux individus que je trouvais d’emblée sympathiques. Quand ils me demandèrent en ami (comme on dit) sur Effe Bé, j’acceptais et au fil du temps découvris deux personnalités intéressantes que leur engagement politique n’avait pas doté d’œillères.
Malgré sa maladie, Jean Braunstein animait des émissions culturelles sur la Radio Chrétienne Francophone, publiait des guides touristiques aux Editions des Falaises et partait le plus souvent possible en voyage avec sa femme et parfois son ami Mathieu en Europe et au-delà. La dernière fois que nous nous sommes parlé, c’était il y a quelques mois à la boulangerie du Fournil du Carré d’Or. Il était amaigri et avait des difficultés pour marcher. Ce qui ne l’empêcha pas d’enfourcher son vélo.
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Message reçu sur Effe Bé, le vingt-trois décembre deux mille seize :
« Bonsoir, nous tenions à vous dire que nous avons passé avant-hier soir dans une brasserie de Cologne une excellente soirée en compagnie de votre journal, dont nous avons lu quelques extraits à haute voix. Il est vrai qu'il y avait aussi de la Kölsch. Bravo pour votre style, vos observations du public de l'opéra, de la bourgeoisie bourgeoisante, de la campagne électorale de 2014 que nous avons vécu de l'intérieur. Jean Braunstein, Mathieu Dranguet, centristes de droite »
5 août 2022
Durant ma lecture, achevée à Brest, du Diable en France de Lion Feuchtwanger, récit dans lequel l'auteur du Juif Süss, qui était réfugié à Sanary, raconte son internement au camp des Milles près d'Aix-en-Provence puis au camp de Saint-Nicolas près de Nîmes, enfermé comme d’autres par la France parce qu’il est ressortissant allemand, bien que pacifiste, antimilitariste et antinazi, j’ai noté ceci :
Nous avions tous imaginé notre sort bien autrement lorsque nous étions arrivés en France. Les mots Liberté, Egalité, Fraternité étaient inscrits en lettres géantes au-dessus du portail de la mairie, on nous avait fêtés lorsque nous étions arrivés des années plus tôt. Les journaux avaient publié pour nous des articles affectueux et pleins de respect, les autorités avaient assuré que c’était un honneur pour la France de nous accorder l’hospitalité, le président de la République m’ayant reçu personnellement. A présent, on nous incarcérait. Nous prenions la chose avec une sorte d’impassibilité mêlée d’amertume, car les années que nous venions de vivre nous avaient montré l’inconstance humaine de façon on ne peut plus claire… (…)
Je me disais : en ce moment même, au moment où tu es là, allongé sur ta paillasse, il y a des gens, un peu partout dans le monde, qui lisent tes livres sur la barbarie nazie, et dont le cœur se remplit de colère devant cette barbarie, alors que toi, tu es interné ici pitoyablement et dans des conditions indignes, et l’on te soupçonne d’être un complice de ces barbares.
Nous avions tous imaginé notre sort bien autrement lorsque nous étions arrivés en France. Les mots Liberté, Egalité, Fraternité étaient inscrits en lettres géantes au-dessus du portail de la mairie, on nous avait fêtés lorsque nous étions arrivés des années plus tôt. Les journaux avaient publié pour nous des articles affectueux et pleins de respect, les autorités avaient assuré que c’était un honneur pour la France de nous accorder l’hospitalité, le président de la République m’ayant reçu personnellement. A présent, on nous incarcérait. Nous prenions la chose avec une sorte d’impassibilité mêlée d’amertume, car les années que nous venions de vivre nous avaient montré l’inconstance humaine de façon on ne peut plus claire… (…)
Je me disais : en ce moment même, au moment où tu es là, allongé sur ta paillasse, il y a des gens, un peu partout dans le monde, qui lisent tes livres sur la barbarie nazie, et dont le cœur se remplit de colère devant cette barbarie, alors que toi, tu es interné ici pitoyablement et dans des conditions indignes, et l’on te soupçonne d’être un complice de ces barbares.
4 août 2022
Cet été, le mercredi semble être le jour de la pire chaleur, que ce soit à Paris où ailleurs. C’est précisément dans la capitale que je la subis à nouveau après un voyage sans histoire. Je me déplace sous terre puis à l’ombre autant qu’il est possible.
Désormais, dans les boutiques, c’est porte ouverte ou climatisation, pas les deux. Au Book-Off de Ledru-Rollin on a choisi la porte ouverte. Il y fait donc trop chaud. Cela ne m’empêche pas de mettre dans mon panier quelques livres à un euro : Le témoin compromis d’Edith Thomas (Viviane Hamy), Mémoires de la princesse Daschkoff, dame d’honneur de Catherine II, impératrice de toutes les Russies (Le temps retrouvé, Mercure de France) et Le carnet du Vermont de John Ashbery et Joe Brainard (Joca Seria), auxquels j’ajoute à huit euros Sur l’écriture de Charles Bukowski (Au Diable Vauvert).
La dépense réglée, je rejoins le Marché d’Aligre où la chaleur est encore plus déplaisante. Aucun vendeur de livres n’est venu s’y faire suer. Ici, contrairement à Rouen, où au Marché des Emmurées il est passé à un euro quarante-neuf, le kilo de bananes est toujours à un euro.
Longeant les murs, je me traîne jusqu’au boulevard Richard-Lenoir où j’ai le plaisir de trouver Le Paris ouvert. J’y déjeune d’une formule plat dessert à treize euros quatre-vingt-dix. Elle se compose d’un copieux gigot d’agneau au romarin ratatouille et d’une délicieuse tarte aux prunes. Les trois quarts d’une bouteille d’eau de Paris me sont nécessaires.
Traverser une place de la Bastille au sol entièrement minéralisé est un exploit dont je sors indemne. Au Port de l’Arsenal je trouve place à l’ombre avec léger vent et poursuis ma lecture du jour, le Journal d’Alice James. Cette persifleuse est de bonne compagnie.
Un nouveau coup de métro et je bois le café au comptoir du Bistrot d’Edmond. Au Book Off de Quatre Septembre, climatisé, porte fermée, je paie un euro Acqua alta de Joseph Brodsky (Arcades Gallimard).
Mon retour à Rouen se passe heureusement sans incident. Je songe à ce que j’ai entendu d’une climatologue à la télé : « Dites-vous bien que vous vivez l’été le moins chaud du reste de votre vie. »
*
Au Paris, au Bistrot d’Edmond, on a au moins adapté la musique. Elle est latino.
*
Je me sens moi-même déjà le débris d’un monde ancien et suspect. (Jean Guéhenno, Journal des années noires)
Désormais, dans les boutiques, c’est porte ouverte ou climatisation, pas les deux. Au Book-Off de Ledru-Rollin on a choisi la porte ouverte. Il y fait donc trop chaud. Cela ne m’empêche pas de mettre dans mon panier quelques livres à un euro : Le témoin compromis d’Edith Thomas (Viviane Hamy), Mémoires de la princesse Daschkoff, dame d’honneur de Catherine II, impératrice de toutes les Russies (Le temps retrouvé, Mercure de France) et Le carnet du Vermont de John Ashbery et Joe Brainard (Joca Seria), auxquels j’ajoute à huit euros Sur l’écriture de Charles Bukowski (Au Diable Vauvert).
La dépense réglée, je rejoins le Marché d’Aligre où la chaleur est encore plus déplaisante. Aucun vendeur de livres n’est venu s’y faire suer. Ici, contrairement à Rouen, où au Marché des Emmurées il est passé à un euro quarante-neuf, le kilo de bananes est toujours à un euro.
Longeant les murs, je me traîne jusqu’au boulevard Richard-Lenoir où j’ai le plaisir de trouver Le Paris ouvert. J’y déjeune d’une formule plat dessert à treize euros quatre-vingt-dix. Elle se compose d’un copieux gigot d’agneau au romarin ratatouille et d’une délicieuse tarte aux prunes. Les trois quarts d’une bouteille d’eau de Paris me sont nécessaires.
Traverser une place de la Bastille au sol entièrement minéralisé est un exploit dont je sors indemne. Au Port de l’Arsenal je trouve place à l’ombre avec léger vent et poursuis ma lecture du jour, le Journal d’Alice James. Cette persifleuse est de bonne compagnie.
Un nouveau coup de métro et je bois le café au comptoir du Bistrot d’Edmond. Au Book Off de Quatre Septembre, climatisé, porte fermée, je paie un euro Acqua alta de Joseph Brodsky (Arcades Gallimard).
Mon retour à Rouen se passe heureusement sans incident. Je songe à ce que j’ai entendu d’une climatologue à la télé : « Dites-vous bien que vous vivez l’été le moins chaud du reste de votre vie. »
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Au Paris, au Bistrot d’Edmond, on a au moins adapté la musique. Elle est latino.
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Je me sens moi-même déjà le débris d’un monde ancien et suspect. (Jean Guéhenno, Journal des années noires)
1er août 2022
En allant faire mes courses chez U Express, je vois à quoi ressemble le Napoléon équestre rentré à Rouen jeudi dernier après avoir été restauré pour près de trois cent mille euros. D’où je suis, sa nouvelle couleur le rend moins visible. Elle ne se détache pas de celle des feuilles des arbres. C’est déjà ça.
Napo a été reposé discrètement sur son socle en travaux. Il y avait pour l’accueillir des quidams de droite et d’extrême-droite. Certains criaient « Vive l’Empereur ». L’un d’eux agitait furieusement un drapeau normand. J’ai vu ça à la télé.
La municipalité de gauche voulait l’envoyer à Sainte-Hélène, c’est-à-dire sur l’île Lacroix, et mettre à sa place une statue de Gisèle Halimi. Une consultation populaire en a décidé autrement. Je ne m’en suis pas mêlé mais, comme je l’ai déjà écrit, je trouve intéressant que l’on continue à voir que la Ville de Rouen a autrefois trouvé bon d’ériger devant la Mairie pareille statue à la gloire d’un criminel de guerre.
Au moment de la votation populaire, l’un des branlotins qui pratiquent la planche à roulettes autour du socle déclarait à une journaliste qui l’interrogeait : « Moi tout me va, Napoléon, l’avocate ou le socle sans rien, c’est comme on veut ».
Il ne pouvait pas deviner que cette votation demanderait aussi qu’on le vire d’ici, lui et ses peutes.
*
Vu sortir de la Cathédrale de Rouen, un prêtre en soutane et canotier.
Napo a été reposé discrètement sur son socle en travaux. Il y avait pour l’accueillir des quidams de droite et d’extrême-droite. Certains criaient « Vive l’Empereur ». L’un d’eux agitait furieusement un drapeau normand. J’ai vu ça à la télé.
La municipalité de gauche voulait l’envoyer à Sainte-Hélène, c’est-à-dire sur l’île Lacroix, et mettre à sa place une statue de Gisèle Halimi. Une consultation populaire en a décidé autrement. Je ne m’en suis pas mêlé mais, comme je l’ai déjà écrit, je trouve intéressant que l’on continue à voir que la Ville de Rouen a autrefois trouvé bon d’ériger devant la Mairie pareille statue à la gloire d’un criminel de guerre.
Au moment de la votation populaire, l’un des branlotins qui pratiquent la planche à roulettes autour du socle déclarait à une journaliste qui l’interrogeait : « Moi tout me va, Napoléon, l’avocate ou le socle sans rien, c’est comme on veut ».
Il ne pouvait pas deviner que cette votation demanderait aussi qu’on le vire d’ici, lui et ses peutes.
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Vu sortir de la Cathédrale de Rouen, un prêtre en soutane et canotier.
29 juillet 2022
Mon occupation du jour, ce jeudi : débloquer.
Je commence par le plus simple, Le Bon Coin, dont je suis parfois client. Quel intérêt pour un site marchand d’empêcher certains d’acheter ou de vendre ? C’est une logique commerciale qui m’échappe. Et je me demande si ça ne pourrait pas faire l’objet d’une plainte pour discrimination.
Qu’un autre s’en charge, car des réfractaires au téléphone portatif, même si, au fil du temps leur nombre s'est réduit (je n’en connais plus), il en est encore. « Je n’ai pas de téléphone portable et je n’en aurai jamais », peste un client du Bon Coin sur un forum. « Dans ce cas, il faudra vous passer du Bon Coin », lui répond-on.
Je m’occupe ensuite d’Effe Bé, retrouvant des ami(e)s à qui, je le constate sans surprise, je n’ai guère manqué. Ce déblocage de réseau social me permet de retrouver Air Bibi, ce qui devient plus intéressant. Depuis quelques jours, j’ai en tête ma prochaine destination. Cela après avoir lu dans Le Figaro un article expliquant que cette ville, où je ne suis jamais allé, était plus intéressante qu’on le croit.
J’y trouve rapidement où me loger à moindre frais pendant plusieurs semaines. J’emporterai mon téléphone. D’ici là, il quittera rarement mon bureau et si l’on me demande mon numéro lors d’une réservation au restaurant ou ailleurs, je continuerai à dire que je n’en ai pas. Tout comme je prétends au laboratoire n’avoir pas d’adresse mail pour obtenir mes résultats de prise de sang sur papier.
*
Vingt ans sans téléphone mobile, ça en fait de l’argent économisé, utile pour aller en vadrouille.
*
La citation qui s’impose : La défaite rend moderne. (Jean Giono, Le Désastre de Pavie)
Je commence par le plus simple, Le Bon Coin, dont je suis parfois client. Quel intérêt pour un site marchand d’empêcher certains d’acheter ou de vendre ? C’est une logique commerciale qui m’échappe. Et je me demande si ça ne pourrait pas faire l’objet d’une plainte pour discrimination.
Qu’un autre s’en charge, car des réfractaires au téléphone portatif, même si, au fil du temps leur nombre s'est réduit (je n’en connais plus), il en est encore. « Je n’ai pas de téléphone portable et je n’en aurai jamais », peste un client du Bon Coin sur un forum. « Dans ce cas, il faudra vous passer du Bon Coin », lui répond-on.
Je m’occupe ensuite d’Effe Bé, retrouvant des ami(e)s à qui, je le constate sans surprise, je n’ai guère manqué. Ce déblocage de réseau social me permet de retrouver Air Bibi, ce qui devient plus intéressant. Depuis quelques jours, j’ai en tête ma prochaine destination. Cela après avoir lu dans Le Figaro un article expliquant que cette ville, où je ne suis jamais allé, était plus intéressante qu’on le croit.
J’y trouve rapidement où me loger à moindre frais pendant plusieurs semaines. J’emporterai mon téléphone. D’ici là, il quittera rarement mon bureau et si l’on me demande mon numéro lors d’une réservation au restaurant ou ailleurs, je continuerai à dire que je n’en ai pas. Tout comme je prétends au laboratoire n’avoir pas d’adresse mail pour obtenir mes résultats de prise de sang sur papier.
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Vingt ans sans téléphone mobile, ça en fait de l’argent économisé, utile pour aller en vadrouille.
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La citation qui s’impose : La défaite rend moderne. (Jean Giono, Le Désastre de Pavie)
28 juillet 2022
Depuis une dizaine de jours, Le Bon Coin s’est ajouté à la liste des sites où je ne peux plus me connecter faute d’avoir un téléphone portatif, et je sens que ça pourrait bientôt être le cas pour Rakuten et même pour mes fournisseurs d’adresses mail.
Cette absence de téléphone m’a déjà été préjudiciable lors de mon séjour à Brest, en m’empêchant de contacter Air Bibi via Effe Bé (heureusement la conciergerie qui gérait mes locations était dans le même bâtiment que mon second logement et j’ai pu dialoguer de visu avec son personnel).
A ce moment-là, seul l’ami d’Orléans a essayé de m’aider en me proposant de recevoir les messages avec code chiffré sur son téléphone et de me les envoyer immédiatement par mail. Je n’ai pas donné suite car d’une part cela me paraissait un peu acrobatique et d’autre part il aurait fallu que je le dérange à tout moment.
Je vais devoir capituler et me procurer un smartphone, lui ai-je alors écrit.
Je n’aurai pas de téléphone mobile sauf si un jour cela devient obligatoire, disais-je. Cet été, c’est devenu obligatoire.
Mercredi dernier, celle qui travaille à Paris a spontanément proposé de m’aider en me donnant son ancien téléphone et en faisant les démarches chez Free.
Ce mercredi, après des passages décevants dans deux des Book-Off et un repas habituel au Péhemmu chinois, je rejoins Le Rempart où j’ai rendez-vous avec elle à quatorze heures. Elle arrive tout juste d’un aller et retour de travail en matinée à Dijon.
A une table isolée, devant un café, elle me donne l'engin et toutes les explications nécessaires qu'elle me regarde mettre maladroitement en œuvre. Parfois elle s’impatiente mais s’efforce de ne pas le laisser trop paraître. Il y a trop à montrer sur ce genre d’appareil et je me sens noyé par ce qui lui semble des évidences. Que garderai-je de toutes ces informations ?
Je la remercie fort quand elle repart travailler et je range l’objet dans mon sac. Le trajet de retour à Rouen me semble bien long. Mon compagnon de voyage, Jean Guéhenno, m’ennuie.
« Je me sens fatigué et surtout déprimé. », lui écris-je par mail avec mon ordinateur sitôt rentré.
« Tu as créé et entretenu pendant des années une sorte de combat du « seul contre le reste du monde » via le rejet de cet objet (que ledit reste du monde possède mais qui ne reste qu’un simple outil). Combat d’avance perdu puisqu’il consiste à s’opposer symboliquement à la fois à tous tes congénères et à une époque (c’est-à-dire au temps lui-même).
Sans compter que ne pas avoir cet objet avait fini par devenir une caractéristique à part entière de ta personne, une façon simple et efficace de montrer sa différence.
Maintenant tu es devenu comme tout le monde, ce qui te parait très déplaisant.
En détenir un aujourd’hui ressemble donc forcément à une capitulation et c’est plutôt logique que ça te déprime », me répond-elle.
*
A l’aller, une annonce de la cheffe de bord pour expliquer que notre train va s’arrêter à Conflans-Sainte-Honorine pour se laisser dépasser par un train en retard.
*
Gare Saint-Lazare, sur le ticheurte d’un trentenaire : « Ce papa génial appartient à Noah et Noémie ».
*
A la sortie de la Gare de Rouen : un homme seul sur un tandem dont le second pédalier tourne dans le vide.
Cette absence de téléphone m’a déjà été préjudiciable lors de mon séjour à Brest, en m’empêchant de contacter Air Bibi via Effe Bé (heureusement la conciergerie qui gérait mes locations était dans le même bâtiment que mon second logement et j’ai pu dialoguer de visu avec son personnel).
A ce moment-là, seul l’ami d’Orléans a essayé de m’aider en me proposant de recevoir les messages avec code chiffré sur son téléphone et de me les envoyer immédiatement par mail. Je n’ai pas donné suite car d’une part cela me paraissait un peu acrobatique et d’autre part il aurait fallu que je le dérange à tout moment.
Je vais devoir capituler et me procurer un smartphone, lui ai-je alors écrit.
Je n’aurai pas de téléphone mobile sauf si un jour cela devient obligatoire, disais-je. Cet été, c’est devenu obligatoire.
Mercredi dernier, celle qui travaille à Paris a spontanément proposé de m’aider en me donnant son ancien téléphone et en faisant les démarches chez Free.
Ce mercredi, après des passages décevants dans deux des Book-Off et un repas habituel au Péhemmu chinois, je rejoins Le Rempart où j’ai rendez-vous avec elle à quatorze heures. Elle arrive tout juste d’un aller et retour de travail en matinée à Dijon.
A une table isolée, devant un café, elle me donne l'engin et toutes les explications nécessaires qu'elle me regarde mettre maladroitement en œuvre. Parfois elle s’impatiente mais s’efforce de ne pas le laisser trop paraître. Il y a trop à montrer sur ce genre d’appareil et je me sens noyé par ce qui lui semble des évidences. Que garderai-je de toutes ces informations ?
Je la remercie fort quand elle repart travailler et je range l’objet dans mon sac. Le trajet de retour à Rouen me semble bien long. Mon compagnon de voyage, Jean Guéhenno, m’ennuie.
« Je me sens fatigué et surtout déprimé. », lui écris-je par mail avec mon ordinateur sitôt rentré.
« Tu as créé et entretenu pendant des années une sorte de combat du « seul contre le reste du monde » via le rejet de cet objet (que ledit reste du monde possède mais qui ne reste qu’un simple outil). Combat d’avance perdu puisqu’il consiste à s’opposer symboliquement à la fois à tous tes congénères et à une époque (c’est-à-dire au temps lui-même).
Sans compter que ne pas avoir cet objet avait fini par devenir une caractéristique à part entière de ta personne, une façon simple et efficace de montrer sa différence.
Maintenant tu es devenu comme tout le monde, ce qui te parait très déplaisant.
En détenir un aujourd’hui ressemble donc forcément à une capitulation et c’est plutôt logique que ça te déprime », me répond-elle.
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A l’aller, une annonce de la cheffe de bord pour expliquer que notre train va s’arrêter à Conflans-Sainte-Honorine pour se laisser dépasser par un train en retard.
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Gare Saint-Lazare, sur le ticheurte d’un trentenaire : « Ce papa génial appartient à Noah et Noémie ».
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A la sortie de la Gare de Rouen : un homme seul sur un tandem dont le second pédalier tourne dans le vide.
25 juillet 2022
A la terrasse du Sacre, un néo barbu qui s’était rasé, peut-être effrayé par la redécouverte de son menton en galoche, a laissé le poil repousser.
A la terrasse du Son du Cor, des quadragénaires qui se retrouvent font une constatation : « On a tous la maladie du boulanger : la brioche qui grossit, la baguette qui rétrécit. »
Je passe de l’une à l’autre et y enchaîne les lectures, ce qui est la meilleure façon de ne rien faire, car comme le déclarait Edwige d’Antwerpen Il y a mieux à faire qu’à faire quelque chose.
« J’ai trouvé ça décevant », m’avait dit mercredi dernier celle qui m’a offert Le jeune homme d’Annie Ernaux. Il ne me faut qu’un quart d’heure pour l’achever et partager son point de vue. Dans la narration expéditive de cet épisode rouennais de la vie amoureuse de l’écrivaine, je trouve même des maladresses d’écriture.
Me déçoit aussi Juste avant d’éteindre, le roman d’Hélios Azoulay. S’agissant de la Shoah, je préfèrerai toujours un témoignage vécu à une évocation romancée (surtout si elle est largement postérieure aux faits). Il ne me faut qu’un quart d’heure pour l’abandonner.
Le livre qui me fera plus d’un quart d’heure est Je savais lire le ciel dans lequel Timothy O’Grady raconte, accompagné par des photos en noir et blanc de Steve Pyke, la jeunesse irlandaise obligée à l’exil par la misère. J’y trouve cette phrase qui me rappelle mon enfance : A la maison, on avait toujours l’impression que tout le monde savait toujours où était tout le monde.
*
Dans Le jeune homme d’Annie Ernaux :
Certains [épisodes] avaient été écrits déjà, telle l’escapade à Venise, où j’étais allée pour la première fois avec un homme en 1963, où j’y avais retrouvé en 1990 un jeune Italien. (syntaxe boiteuse)
Je n’étais pas non plus la Léa de Chéri, le roman de Colette, que j’avais relu. (on le sait que Chéri est un roman de Colette)
A la terrasse du Son du Cor, des quadragénaires qui se retrouvent font une constatation : « On a tous la maladie du boulanger : la brioche qui grossit, la baguette qui rétrécit. »
Je passe de l’une à l’autre et y enchaîne les lectures, ce qui est la meilleure façon de ne rien faire, car comme le déclarait Edwige d’Antwerpen Il y a mieux à faire qu’à faire quelque chose.
« J’ai trouvé ça décevant », m’avait dit mercredi dernier celle qui m’a offert Le jeune homme d’Annie Ernaux. Il ne me faut qu’un quart d’heure pour l’achever et partager son point de vue. Dans la narration expéditive de cet épisode rouennais de la vie amoureuse de l’écrivaine, je trouve même des maladresses d’écriture.
Me déçoit aussi Juste avant d’éteindre, le roman d’Hélios Azoulay. S’agissant de la Shoah, je préfèrerai toujours un témoignage vécu à une évocation romancée (surtout si elle est largement postérieure aux faits). Il ne me faut qu’un quart d’heure pour l’abandonner.
Le livre qui me fera plus d’un quart d’heure est Je savais lire le ciel dans lequel Timothy O’Grady raconte, accompagné par des photos en noir et blanc de Steve Pyke, la jeunesse irlandaise obligée à l’exil par la misère. J’y trouve cette phrase qui me rappelle mon enfance : A la maison, on avait toujours l’impression que tout le monde savait toujours où était tout le monde.
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Dans Le jeune homme d’Annie Ernaux :
Certains [épisodes] avaient été écrits déjà, telle l’escapade à Venise, où j’étais allée pour la première fois avec un homme en 1963, où j’y avais retrouvé en 1990 un jeune Italien. (syntaxe boiteuse)
Je n’étais pas non plus la Léa de Chéri, le roman de Colette, que j’avais relu. (on le sait que Chéri est un roman de Colette)
22 juillet 2022
C’est sous le parapluie que je rejoins la Gare ce mercredi matin pour un Rouen Paris en deux heures sept si tout se passe bien, mais tout ne se passe pas bien, à peine partis nous sommes arrêtés à Oissel car un train précédent est en panne à Vernon.
En conséquence (comme on dit à la Senecefe), j’ai davantage de temps pour lire Journal des années noires 1940 1944 de Jean Guéhenno. Le relire précisément, car je me souviens l’avoir emprunté à la Bibliothèque Municipale de Louviers quand j’étais lycéen. C’est avec trente minutes de retard que se profile Saint-Lazare.
Au Book-Off de Ledru-Rollin, j’explore les rayonnages à un euro avec moins de réussite que la semaine précédente. J’en sors quand même avec trois livres : Portrait d’une femme romanesque Jean Voilier de Célia Bertin (Editions de Fallois), Je savais lire le ciel de Timothy O’Grady et Steve Pyke (Actes Sud) et Petit catéchisme à l’usage de la classe inférieure d’August Strindberg (Babel).
Je me rapproche alors de la Bastille sous de grosses gouttes de pluie. Après un café au comptoir du Rempart, je me poste près de la statue de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais. Cela fait trop longtemps que je n’ai vu celle qui travaille dans le coin, en cause mon équipée brestoise. Elle me rejoint à douze heures trente.
Rue des Tournelles, nous entrons au Rusti pour un déjeuner italien qui s’avère fort bon. Dans notre conversation, il est d’abord question de sa courte escapade à Binic et des soucis qui sont les siens (malheureusement, elle n’en manque pas), puis je lui parle de ce qui me soûle depuis un mois et elle me propose une solution qui me va tout à fait et qui devrait se concrétiser mercredi prochain. Notre moment de retrouvailles se conclut par un échange non organisé de livres, d’elle à moi Le jeune homme d’Annie Ernaux et de moi à elle Carnets d’un vieil amoureux de Marcel Mathiot, des choix qui ne manquent pas de piquant.
Elle repartie au travail, je rejoins le Book-Off de Quatre Septembre. Je crains un long moment d’en sortir bredouille, jusqu’à ce que je déniche parmi les romans à un euro le dernier écrit par Hélios Azoulay, Juste avant d’éteindre, publié aux Editions du Rocher.
Le train Nomad du retour se traîne, mais comme prévu. Il ne met donc que deux heures seize pour me ramener à Rouen.
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Chez Book-Off et au Rempart, des familles à cinq enfants, tous vêtus en petit catho. Les mères ont la coupe de cheveux de celle qui a des amis chez ces gens-là, Caroline Cayeux, Ministre, Droitiste.
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Trains normands : toute accélération est la promesse d’un prochain ralentissement.
En conséquence (comme on dit à la Senecefe), j’ai davantage de temps pour lire Journal des années noires 1940 1944 de Jean Guéhenno. Le relire précisément, car je me souviens l’avoir emprunté à la Bibliothèque Municipale de Louviers quand j’étais lycéen. C’est avec trente minutes de retard que se profile Saint-Lazare.
Au Book-Off de Ledru-Rollin, j’explore les rayonnages à un euro avec moins de réussite que la semaine précédente. J’en sors quand même avec trois livres : Portrait d’une femme romanesque Jean Voilier de Célia Bertin (Editions de Fallois), Je savais lire le ciel de Timothy O’Grady et Steve Pyke (Actes Sud) et Petit catéchisme à l’usage de la classe inférieure d’August Strindberg (Babel).
Je me rapproche alors de la Bastille sous de grosses gouttes de pluie. Après un café au comptoir du Rempart, je me poste près de la statue de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais. Cela fait trop longtemps que je n’ai vu celle qui travaille dans le coin, en cause mon équipée brestoise. Elle me rejoint à douze heures trente.
Rue des Tournelles, nous entrons au Rusti pour un déjeuner italien qui s’avère fort bon. Dans notre conversation, il est d’abord question de sa courte escapade à Binic et des soucis qui sont les siens (malheureusement, elle n’en manque pas), puis je lui parle de ce qui me soûle depuis un mois et elle me propose une solution qui me va tout à fait et qui devrait se concrétiser mercredi prochain. Notre moment de retrouvailles se conclut par un échange non organisé de livres, d’elle à moi Le jeune homme d’Annie Ernaux et de moi à elle Carnets d’un vieil amoureux de Marcel Mathiot, des choix qui ne manquent pas de piquant.
Elle repartie au travail, je rejoins le Book-Off de Quatre Septembre. Je crains un long moment d’en sortir bredouille, jusqu’à ce que je déniche parmi les romans à un euro le dernier écrit par Hélios Azoulay, Juste avant d’éteindre, publié aux Editions du Rocher.
Le train Nomad du retour se traîne, mais comme prévu. Il ne met donc que deux heures seize pour me ramener à Rouen.
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Chez Book-Off et au Rempart, des familles à cinq enfants, tous vêtus en petit catho. Les mères ont la coupe de cheveux de celle qui a des amis chez ces gens-là, Caroline Cayeux, Ministre, Droitiste.
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Trains normands : toute accélération est la promesse d’un prochain ralentissement.
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