Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
31 août 2022
Après un voyage en train Nomad (avec une pensée quand il passe à Asnières pour celle qui me tenait la main et va bientôt reprendre son travail en collège) puis en bus Vingt-Neuf (avec une pensée quand il arrive à Bastille pour celle qui me tenait la main et reprend le travail aujourd’hui), j’entre ce dernier lundi d’août au Café du Faubourg et y trouve le patron rentré de vacances, bronzé mais toujours aussi débordé.
Mon café bu, je rejoins devant le rideau métallique du Book-Off de Ledru-Rollin, quatre vendeurs de livres à gros sacs et chariots.
A l’ouverture, ils sont rejoints par d’autres. Je n’ai jamais vu une telle file d’attente. Elle atteint l’allée principale. Cela me rappelle Gibert Jeunes autrefois. Pendant que les employé(e)s s’activent à enregistrer toute cette marchandise avec le sourire, je mets des livres à un euro dans mon panier, dont Instantanés suivi de Lettres à Maurice Rieuneau de Stéphane Mosès (L’Infini Gallimard), Rencontres avec Samuel Beckett de Charles Juliet (P.O.L) et Chronique fabuleuse d’André Dhôtel (Mercure de France).
Pas de Marché d’Aligre le lundi, je vais poursuivre ma lecture de Sérotonine au square Trousseau. Mon plaisir est moindre que mardi dernier car Houellebecq dans la deuxième moitié de son roman part dans un délire de politique fiction avec une ridicule insurrection armée de paysans bas-normands. Il devrait s’en tenir à évoquer d’un ton désabusé la relation homme femme, à faire de la littérature dépressive.
A midi je vais déjeuner au Péhemmu chinois, de mon habituel menu, sans vin en raison des antibiotiques. Je sens que j’ai épuisé le charme du lieu, de son confit de canard pommes sautées salade (que j’ai connu à neuf euros et est maintenant à douze), de sa gentille serveuse (que j’ai connue jeune fille et est maintenant mère de famille).
Je vais ensuite lire dans le Port de l’Arsenal. Près de moi se succèdent de jeunes personnes avec leur déjeuner. Si elles ne restent pas longtemps, c’est la faute à des guêpes qui les embêtent.
Au Book-Off de Quatre Septembre, pas de file d’attente côté vendeurs. Les rayonnages des grands formats « Connaissance » à un euro ont été étendus. En conséquence, j’en ressors avec davantage de livres que les fois précédentes, dont Mémoires de Montparnasse de John Glassco (Viviane Hamy), Visage slovène de Brina Svit (Gallimard), Journal du huitième hiver de Samuel Brussell (L’Age d’Homme), Odes de David Van Reybrouck (Actes Sud), Les anges de Sodome d’Albert Bensoussan (Maurice Nadeau) et Sur la scène intérieure de Marcel Cohen (Folio).
Quand je vais boire un café verre d’eau à la terrasse du Bistrot d’Edmond, je constate que la maison a encore changé de patron et de personnel. Cela se traduit par de la musique trop forte et une serveuse qui au bout d’une demi-heure vient me demander si je ne veux pas autre chose.
*
Où est le bec ? Vers la fin de Sérotonine.
L’écrivain y évoque le patron d’un bar de Falaise qui passe son temps à lire Paris Normandie.
Pas de Paris Normandie dans le Calvados, Michel, on y lit Ouest France.
Mon café bu, je rejoins devant le rideau métallique du Book-Off de Ledru-Rollin, quatre vendeurs de livres à gros sacs et chariots.
A l’ouverture, ils sont rejoints par d’autres. Je n’ai jamais vu une telle file d’attente. Elle atteint l’allée principale. Cela me rappelle Gibert Jeunes autrefois. Pendant que les employé(e)s s’activent à enregistrer toute cette marchandise avec le sourire, je mets des livres à un euro dans mon panier, dont Instantanés suivi de Lettres à Maurice Rieuneau de Stéphane Mosès (L’Infini Gallimard), Rencontres avec Samuel Beckett de Charles Juliet (P.O.L) et Chronique fabuleuse d’André Dhôtel (Mercure de France).
Pas de Marché d’Aligre le lundi, je vais poursuivre ma lecture de Sérotonine au square Trousseau. Mon plaisir est moindre que mardi dernier car Houellebecq dans la deuxième moitié de son roman part dans un délire de politique fiction avec une ridicule insurrection armée de paysans bas-normands. Il devrait s’en tenir à évoquer d’un ton désabusé la relation homme femme, à faire de la littérature dépressive.
A midi je vais déjeuner au Péhemmu chinois, de mon habituel menu, sans vin en raison des antibiotiques. Je sens que j’ai épuisé le charme du lieu, de son confit de canard pommes sautées salade (que j’ai connu à neuf euros et est maintenant à douze), de sa gentille serveuse (que j’ai connue jeune fille et est maintenant mère de famille).
Je vais ensuite lire dans le Port de l’Arsenal. Près de moi se succèdent de jeunes personnes avec leur déjeuner. Si elles ne restent pas longtemps, c’est la faute à des guêpes qui les embêtent.
Au Book-Off de Quatre Septembre, pas de file d’attente côté vendeurs. Les rayonnages des grands formats « Connaissance » à un euro ont été étendus. En conséquence, j’en ressors avec davantage de livres que les fois précédentes, dont Mémoires de Montparnasse de John Glassco (Viviane Hamy), Visage slovène de Brina Svit (Gallimard), Journal du huitième hiver de Samuel Brussell (L’Age d’Homme), Odes de David Van Reybrouck (Actes Sud), Les anges de Sodome d’Albert Bensoussan (Maurice Nadeau) et Sur la scène intérieure de Marcel Cohen (Folio).
Quand je vais boire un café verre d’eau à la terrasse du Bistrot d’Edmond, je constate que la maison a encore changé de patron et de personnel. Cela se traduit par de la musique trop forte et une serveuse qui au bout d’une demi-heure vient me demander si je ne veux pas autre chose.
*
Où est le bec ? Vers la fin de Sérotonine.
L’écrivain y évoque le patron d’un bar de Falaise qui passe son temps à lire Paris Normandie.
Pas de Paris Normandie dans le Calvados, Michel, on y lit Ouest France.
30 août 2022
Je suis à la terrasse du Sacre avec Zaza quand s’installent à la table voisine un couple et un huit ans (mojito, pinte, Coca zéro, seize euros).
« On met de l’argent sur un compte et la banque ferme le compte, c’est ça la France ! », claironne le buveur de mojito.
Des comptes bloqués, il y en a deux, celui de sa copine buveuse de bière et celui de sa sœur. Il a gagné seize mille euros et en a mis deux mille sur chacun de ces deux comptes.
-Je leur ai dit d’où venait l’argent, je l’ai gagné. Ils laissent ouvert les comptes des cassos où y a rien et ils ferment ceux où y a de l’argent.
-C’est pas ton compte qu’ils ont bloqué, c’est le nôtre.
-Si vous étiez pas fichées bancaires aussi.
-Ah parce que toi tu l’es pas peut-être.
-Le casino en ligne, c’est interdit en France, lui rappelle-t-elle.
-Alors on va quitter la France.
-Ah bon comment ?
-On va attendre que j’aie plus mon bracelet électronique.
Tous les deux sont sur leur smartphone. Deux intelligences pratiques sont à l’ouvrage. Elle appelle la Caf, déclare que son compte bancaire s’est fait pirater. Elle vient d’en ouvrir un autre en Allemagne. Elle veut savoir comment envoyer son nouveau Rib pour continuer à recevoir ses prestations.
Le huit ans a terminé son Coca.
« On met de l’argent sur un compte et la banque ferme le compte, c’est ça la France ! », claironne le buveur de mojito.
Des comptes bloqués, il y en a deux, celui de sa copine buveuse de bière et celui de sa sœur. Il a gagné seize mille euros et en a mis deux mille sur chacun de ces deux comptes.
-Je leur ai dit d’où venait l’argent, je l’ai gagné. Ils laissent ouvert les comptes des cassos où y a rien et ils ferment ceux où y a de l’argent.
-C’est pas ton compte qu’ils ont bloqué, c’est le nôtre.
-Si vous étiez pas fichées bancaires aussi.
-Ah parce que toi tu l’es pas peut-être.
-Le casino en ligne, c’est interdit en France, lui rappelle-t-elle.
-Alors on va quitter la France.
-Ah bon comment ?
-On va attendre que j’aie plus mon bracelet électronique.
Tous les deux sont sur leur smartphone. Deux intelligences pratiques sont à l’ouvrage. Elle appelle la Caf, déclare que son compte bancaire s’est fait pirater. Elle vient d’en ouvrir un autre en Allemagne. Elle veut savoir comment envoyer son nouveau Rib pour continuer à recevoir ses prestations.
Le huit ans a terminé son Coca.
29 août 2022
Encore un vide grenier organisé sur les quais hauts de Rouen, côté rive droite, et dans les rues avoisinantes, ce dimanche. Il est sept heures et demie quand je sors pour y aller.
Sur le parvis de la Cathédrale je trouve des voitures de la Police et les fonctionnaires le nez en l’air. « Y en a qui sont montés là-haut », apprends-je d’un badaud.
Ce n’est pas la première fois que des intrépides profitent de la présence d’échafaudages jusqu’à moitié de la flèche. Certains ont fait de leur exploit une vidéo impressionnante visible sur YouTube, après être redescendus sans se faire gauler.
Les exposants des quais sont surtout des particuliers qui proposent de la bonne marchandise. Dans les rues adjacentes, d’autres sont moins reluisants. C’est à un semi professionnel de ma connaissance que je dois de ne pas repartir bredouille. Pour cinq euros les trois (prix d’ami) deviennent miens Lettres des deux amants attribuées à Héloïse et Abélard (Gallimard), Promenade épistolaire sur la Côte Normande au XIXe siècle (Cahiers du temps) et « Je ne suis pas sortie de ma nuit » d’Annie Ernaux dans l’édition blanche de chez Gallimard.
Les Policiers sont en train de remonter dans leurs véhicules quand je regagne mon logis. Apparemment, ils n’ont pas fait de prisonniers.
*
Dans ce vide grenier, je croise un pas vu depuis longtemps qui me salue, que je salue. Il replonge aussitôt les yeux dans le carton de vinyles qu’il explorait, signifiant par là qu’il ne tient pas à engager la conversation, comme nous le faisions autrefois. Cela m’arrange.
Au début du premier confinement, comme il n’est pas sur les réseaux dits sociaux, je lui ai envoyé un mail pour lui demander comment il allait et comment il vivait cet enfermement. Il m’a répondu qu’avec ses congélateurs pleins (y compris de pain), il pouvait ne pas sortir pendant un an. Dans son mail, il ne parlait que de lui, pas un mot pour me demander comment j’allais et comment je vivais ça. J’ai décidé de ne plus jamais lui écrire.
*
Il en est d’autres à qui je ne demande plus de leurs nouvelles. Cette période m’a ouvert les yeux. Je me suis lassé de poser des questions auxquelles on ne répondait pas, d’offrir des livres dont on ne me disait jamais si on les avait lus et ce qu’on en avait pensé.
*
Ne plus m’en soucier, ne plus acheter de livres pour eux, traiter les autres comme ils me traitent, il m’aura fallu bien du temps pour m’y résigner.
Sur le parvis de la Cathédrale je trouve des voitures de la Police et les fonctionnaires le nez en l’air. « Y en a qui sont montés là-haut », apprends-je d’un badaud.
Ce n’est pas la première fois que des intrépides profitent de la présence d’échafaudages jusqu’à moitié de la flèche. Certains ont fait de leur exploit une vidéo impressionnante visible sur YouTube, après être redescendus sans se faire gauler.
Les exposants des quais sont surtout des particuliers qui proposent de la bonne marchandise. Dans les rues adjacentes, d’autres sont moins reluisants. C’est à un semi professionnel de ma connaissance que je dois de ne pas repartir bredouille. Pour cinq euros les trois (prix d’ami) deviennent miens Lettres des deux amants attribuées à Héloïse et Abélard (Gallimard), Promenade épistolaire sur la Côte Normande au XIXe siècle (Cahiers du temps) et « Je ne suis pas sortie de ma nuit » d’Annie Ernaux dans l’édition blanche de chez Gallimard.
Les Policiers sont en train de remonter dans leurs véhicules quand je regagne mon logis. Apparemment, ils n’ont pas fait de prisonniers.
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Dans ce vide grenier, je croise un pas vu depuis longtemps qui me salue, que je salue. Il replonge aussitôt les yeux dans le carton de vinyles qu’il explorait, signifiant par là qu’il ne tient pas à engager la conversation, comme nous le faisions autrefois. Cela m’arrange.
Au début du premier confinement, comme il n’est pas sur les réseaux dits sociaux, je lui ai envoyé un mail pour lui demander comment il allait et comment il vivait cet enfermement. Il m’a répondu qu’avec ses congélateurs pleins (y compris de pain), il pouvait ne pas sortir pendant un an. Dans son mail, il ne parlait que de lui, pas un mot pour me demander comment j’allais et comment je vivais ça. J’ai décidé de ne plus jamais lui écrire.
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Il en est d’autres à qui je ne demande plus de leurs nouvelles. Cette période m’a ouvert les yeux. Je me suis lassé de poser des questions auxquelles on ne répondait pas, d’offrir des livres dont on ne me disait jamais si on les avait lus et ce qu’on en avait pensé.
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Ne plus m’en soucier, ne plus acheter de livres pour eux, traiter les autres comme ils me traitent, il m’aura fallu bien du temps pour m’y résigner.
28 août 2022
Je ne sais pas dans quel état sera le monde dans cinq ans, s’il sera encore possible d’organiser une Election Présidentielle en France. Faisons l’hypothèse que oui et comme je ne sais pas non plus dans quel état je serai à cette date, ni même si je serai encore là, donnons le résultat dès maintenant.
Chez les Macronistes, cela s’est vu à leur attitude tout l’été, Gérald Darmanin et Bruno Lemaire seront candidats à la succession d’Emmanuel Macron, A qui s’ajoutera Edouard Philippe. Du côté de l’autre Droite, il faudra compter avec Laurent Wauquiez et Xavier Bertrand. On pourrait donc avoir jusqu’à cinq candidats, deux au minimum.
A l’Extrême-Droite, Le Pen y retournera (ou un remplaçant) et si la Nupés tient le coup, Mélenchon (ou un remplaçant) sera possiblement le seul candidat de la Gauche, laquelle a vu ce que ça donnait quand elle se présentait séparée.
Dans cette circonstance éventuelle, au premier tour Le Pen (ou son remplaçant) et Mélenchon (ou son remplaçant) seront à trente pour cent. Les quarante pour cent restant seront pour la Droite, à partager entre les cinq ou quatre ou trois ou deux Macronistes et non Macronistes.
Et alors, au second tour, Le Pen (ou son remplaçant) pourrait faire face à Mélenchon (ou son remplaçant) et gagnerait avec les voix de Droite, une partie votant pour, une partie s’abstenant.
Avoir Mélenchon (ou son remplaçant) au second tour, c’est l’assurance de donner le pouvoir à Le Pen (ou son remplaçant). C’est là où je voulais en venir.
*
Mon point de vue sur la situation actuelle : « On est bien dans la merde ». (On représentant les humains.)
Chez les Macronistes, cela s’est vu à leur attitude tout l’été, Gérald Darmanin et Bruno Lemaire seront candidats à la succession d’Emmanuel Macron, A qui s’ajoutera Edouard Philippe. Du côté de l’autre Droite, il faudra compter avec Laurent Wauquiez et Xavier Bertrand. On pourrait donc avoir jusqu’à cinq candidats, deux au minimum.
A l’Extrême-Droite, Le Pen y retournera (ou un remplaçant) et si la Nupés tient le coup, Mélenchon (ou un remplaçant) sera possiblement le seul candidat de la Gauche, laquelle a vu ce que ça donnait quand elle se présentait séparée.
Dans cette circonstance éventuelle, au premier tour Le Pen (ou son remplaçant) et Mélenchon (ou son remplaçant) seront à trente pour cent. Les quarante pour cent restant seront pour la Droite, à partager entre les cinq ou quatre ou trois ou deux Macronistes et non Macronistes.
Et alors, au second tour, Le Pen (ou son remplaçant) pourrait faire face à Mélenchon (ou son remplaçant) et gagnerait avec les voix de Droite, une partie votant pour, une partie s’abstenant.
Avoir Mélenchon (ou son remplaçant) au second tour, c’est l’assurance de donner le pouvoir à Le Pen (ou son remplaçant). C’est là où je voulais en venir.
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Mon point de vue sur la situation actuelle : « On est bien dans la merde ». (On représentant les humains.)
27 août 2022
Ce jeudi j’arrive en même temps que la secrétaire de l’urologue avec qui j’ai rendez-vous au quatrième étage du bâtiment de consultations de la Clinique Saint-Hilaire. Il est huit heures. Elle met en route l’informatique, enregistre qui je suis, scanne le courrier de mon médecin traitant et m’invite à m’asseoir. « Le docteur va arriver. »
Peu après huit heures et quart ce jeune médecin me fait entrer dans son cabinet et me demande ce qui m’amène. Il me pose quelques questions, me confirme que mon taux de Péhessa n’est pas inquiétant (pas de suspicion de cancer) puis m’invite à ôter le bas et à m’allonger sur la table de consultation.
Je sais ce qui m’attend et je n’aime pas ça (même quand c’est fait par une interne comme une fois cela m’est arrivé au Céhachu).
Ce toucher rectal exécuté sans trop de douleur, il me dit que rien ne l’inquiète particulièrement, qu’il va me donner un traitement me permettant de ne plus aller si souvent aux toilettes. Enfin il me prescrit un scanner à faire dans quelques mois. Je remercie ce jeune médecin et lui souhaite une bonne journée.
La secrétaire me donne un prochain rendez-vous pour début janvier deux mille vingt-trois avant de me réclamer soixante-quinze euros.
Soixante-quinze euros pour un doigt dans le cul, ce n’est pas donné. J’ignore ce qui me sera remboursé. Ce spécialiste pratique le dépassement d’honoraires. Pas moyen d’éviter ce désagrément si on veut se faire soigner rapidement.
Peu après huit heures et quart ce jeune médecin me fait entrer dans son cabinet et me demande ce qui m’amène. Il me pose quelques questions, me confirme que mon taux de Péhessa n’est pas inquiétant (pas de suspicion de cancer) puis m’invite à ôter le bas et à m’allonger sur la table de consultation.
Je sais ce qui m’attend et je n’aime pas ça (même quand c’est fait par une interne comme une fois cela m’est arrivé au Céhachu).
Ce toucher rectal exécuté sans trop de douleur, il me dit que rien ne l’inquiète particulièrement, qu’il va me donner un traitement me permettant de ne plus aller si souvent aux toilettes. Enfin il me prescrit un scanner à faire dans quelques mois. Je remercie ce jeune médecin et lui souhaite une bonne journée.
La secrétaire me donne un prochain rendez-vous pour début janvier deux mille vingt-trois avant de me réclamer soixante-quinze euros.
Soixante-quinze euros pour un doigt dans le cul, ce n’est pas donné. J’ignore ce qui me sera remboursé. Ce spécialiste pratique le dépassement d’honoraires. Pas moyen d’éviter ce désagrément si on veut se faire soigner rapidement.
26 août 2022
Ce mercredi à neuf heures est fixé le rendez-vous pour le détartrage semestriel de ma dentition. Or depuis deux semaines l’une de mes gencives est enflée, celle où j’avais autrefois sauvagement percé un abcès. J’en informe le dentiste qui n’est pas surpris. J’ai là une dent qui bouge un peu depuis longtemps, me dit-il, d’où ces infections répétées. Il n’y rien d’autre à faire que de l’arracher.
Après avoir endormi le théâtre des opérations, l’homme de l’art s’empare de l’outil adéquat. En quelques secondes c’est fait, signe que cette molaire ne demandait qu’à quitter ma mâchoire. Un léger détartrage termine la séance. Je ressors du cabinet avec une ordonnance pour huit jours d’antibiotiques, bain de bouche, etc.
Je m’arrête donc à la Pharmacie du Centre. Devant moi est un septuagénaire adepte de l’automédication qui demande aspirine, paracétamol et aussi un médicament « pour pas faire pipi ». Le pharmacien lève un sourcil interrogatif. « Ben vous savez quoi », lui dit l’homme. Effectivement il sait quoi, cela fera trente-cinq euros.
*
Treize heures au Son du Cor, un quidam imbibé s’assoit non loin de moi et commande un café. Comme je le craignais, au bout de cinq minutes il souhaite faire connaissance.
-Vous lisez quoi ?
-Vous ne connaissez pas, je pense.
-Vous ne voulez par me le dire ?
-Je peux vous le dire, la correspondance d’Elisabeth Lacoin.
-Ah oui, y a des fois on connaît pas mais c’est bien. Vous savez que Clovis…
-Je lis.
-Ah pardon.
Peu de temps après, il s’en va en ne marchant pas droit.
*
Effectivement c’est bien, la correspondance d’Elisabeth Lacoin, alias Zaza, la grande amie de jeunesse de Simone de Beauvoir, morte à vingt-deux ans d’une encéphalite virale. Un livre acheté via Rakuten (cinq euros port inclus), livré au sexe-chope Espace Carré Blanc. Une jolie fille mince y payait ses achats quand je suis allé le chercher.
*
Renouveler la Carte Avantage Senior de la Senecefe pour vingt-cinq euros au lieu de quarante-neuf, c’est possible jusqu’au vingt-neuf août. Je profite de l’occasion.
Ma prochaine carte sera valable du quatorze décembre deux mille vingt-deux au treize décembre deux mille vingt-trois. J’espère que j’aurai l’occasion de m’en servir.
Après avoir endormi le théâtre des opérations, l’homme de l’art s’empare de l’outil adéquat. En quelques secondes c’est fait, signe que cette molaire ne demandait qu’à quitter ma mâchoire. Un léger détartrage termine la séance. Je ressors du cabinet avec une ordonnance pour huit jours d’antibiotiques, bain de bouche, etc.
Je m’arrête donc à la Pharmacie du Centre. Devant moi est un septuagénaire adepte de l’automédication qui demande aspirine, paracétamol et aussi un médicament « pour pas faire pipi ». Le pharmacien lève un sourcil interrogatif. « Ben vous savez quoi », lui dit l’homme. Effectivement il sait quoi, cela fera trente-cinq euros.
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Treize heures au Son du Cor, un quidam imbibé s’assoit non loin de moi et commande un café. Comme je le craignais, au bout de cinq minutes il souhaite faire connaissance.
-Vous lisez quoi ?
-Vous ne connaissez pas, je pense.
-Vous ne voulez par me le dire ?
-Je peux vous le dire, la correspondance d’Elisabeth Lacoin.
-Ah oui, y a des fois on connaît pas mais c’est bien. Vous savez que Clovis…
-Je lis.
-Ah pardon.
Peu de temps après, il s’en va en ne marchant pas droit.
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Effectivement c’est bien, la correspondance d’Elisabeth Lacoin, alias Zaza, la grande amie de jeunesse de Simone de Beauvoir, morte à vingt-deux ans d’une encéphalite virale. Un livre acheté via Rakuten (cinq euros port inclus), livré au sexe-chope Espace Carré Blanc. Une jolie fille mince y payait ses achats quand je suis allé le chercher.
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Renouveler la Carte Avantage Senior de la Senecefe pour vingt-cinq euros au lieu de quarante-neuf, c’est possible jusqu’au vingt-neuf août. Je profite de l’occasion.
Ma prochaine carte sera valable du quatorze décembre deux mille vingt-deux au treize décembre deux mille vingt-trois. J’espère que j’aurai l’occasion de m’en servir.
25 août 2022
Avec un jour d’avance sur ma routine hebdomadaire, je monte dans la voiture Cinq du train Nomad pour Paris. Cela sent la rentrée des navetteurs ce mardi dans le sept heures vingt-quatre. Peu de places restent libres, j’ai une voisine à ma droite. Elle cache ses yeux derrière un masque. Je cache mon nez et ma bouche avec le mien puis entreprends la lecture de Sérotonine de Michel Houellebecq. Mon exemplaire de poche J’ai Lu est un peu abimé, je l’ai trouvé dans une boîte à livres rouennaise.
Un bus Vingt-Neuf me conduit à la Bastille d’où je rejoins pédestrement le Marché d’Aligre. Aucun vendeur de livres ne s’y trouve. Après un café au comptoir d’un bar tabac dont j’oublie de regarder le nom, je rejoins le Book-Off de Ledru-Rollin où des livres à un euro m’attendaient : Une éducation polonaise de Louis Degley (Les Cahiers Rouges / Grasset), le premier tome de Carnets de Léonard de Vinci (Tel / Gallimard), Aquarelles d’Henry Miller (Arléa), La peau dure de Raymond Guérin (Finitude), Un malheur absolu de la mère du révérend Jôjin (Le Promeneur) et Bréviaire des petits plaisirs honteux de Charles Haquet et Bernard Lalanne (JBZ & Cie). J’y ajoute, vendu sept euros, « Chacun cherche son paradis… » Correspondance choisie de Friedrich Glauser (Editions d’en bas).
Il est onze heures quand j’en sors. Sur un banc du boulevard Richard-Lenoir, je poursuis avec grand intérêt la lecture de Sérotonine jusqu’à ce qu’il soit l’heure d’entrer au café restaurant Le Paris. J’y suis accueilli comme un quasi habitué. La patronne me demande d’où vient mon bronzage. « De Normandie », lui réponds-je. Ah, elle aussi est Normande. Oui mais de Lisieux. La formule du jour à treize euros quatre-vingt-dix est copieuse et bonne : bricks de poireaux, salade et filet mignon moutarde à l’ancienne, tagliatelles.
Le temps est lourd ce jour mais on sent que l’orage n’éclatera pas. Je me rends au Port de l’Arsenal où je lis jusqu’à quatorze heures près de jeunes actives et actifs à nourriture saine. L’un se réjouit d’une soirée à venir avec Melocoton, sa peute transgenre.
Un bus Vingt-Neuf me conduit jusqu’à l’Opéra Garnier d’où je rejoins le Book-Off de Quatre-Septembre. Un seul livre à un euro m’y attendait : Journal de Kurt Cobain (Dix/Dix-Huit).
Le temps est toujours lourd quand, à la terrasse du Bistrot d’Edmond, je continue à lire Houellebecq. Ce roman me plaît fort dans lequel l’écrivain revient à son sujet de prédilection, les affres de la vie affective et sexuelle masculine. Près de moi se trouve un jeune trio. L’une des deux filles soudain s’agite, réclamant à grand cri un verre d’eau. Il s’agit de secourir une abeille tombée dans son coquetèle et engluée dans le sucre. Le lavage de l’insecte conduit à sa mort, dont la jouvencelle a du mal à se remettre (m’étonnerait pas que cette abeille ait été une guêpe).
Pour quarante centimes de plus, j’ai une place en première classe dans le train du retour, de quoi poursuivre confortablement ma lecture.
Un bus Vingt-Neuf me conduit à la Bastille d’où je rejoins pédestrement le Marché d’Aligre. Aucun vendeur de livres ne s’y trouve. Après un café au comptoir d’un bar tabac dont j’oublie de regarder le nom, je rejoins le Book-Off de Ledru-Rollin où des livres à un euro m’attendaient : Une éducation polonaise de Louis Degley (Les Cahiers Rouges / Grasset), le premier tome de Carnets de Léonard de Vinci (Tel / Gallimard), Aquarelles d’Henry Miller (Arléa), La peau dure de Raymond Guérin (Finitude), Un malheur absolu de la mère du révérend Jôjin (Le Promeneur) et Bréviaire des petits plaisirs honteux de Charles Haquet et Bernard Lalanne (JBZ & Cie). J’y ajoute, vendu sept euros, « Chacun cherche son paradis… » Correspondance choisie de Friedrich Glauser (Editions d’en bas).
Il est onze heures quand j’en sors. Sur un banc du boulevard Richard-Lenoir, je poursuis avec grand intérêt la lecture de Sérotonine jusqu’à ce qu’il soit l’heure d’entrer au café restaurant Le Paris. J’y suis accueilli comme un quasi habitué. La patronne me demande d’où vient mon bronzage. « De Normandie », lui réponds-je. Ah, elle aussi est Normande. Oui mais de Lisieux. La formule du jour à treize euros quatre-vingt-dix est copieuse et bonne : bricks de poireaux, salade et filet mignon moutarde à l’ancienne, tagliatelles.
Le temps est lourd ce jour mais on sent que l’orage n’éclatera pas. Je me rends au Port de l’Arsenal où je lis jusqu’à quatorze heures près de jeunes actives et actifs à nourriture saine. L’un se réjouit d’une soirée à venir avec Melocoton, sa peute transgenre.
Un bus Vingt-Neuf me conduit jusqu’à l’Opéra Garnier d’où je rejoins le Book-Off de Quatre-Septembre. Un seul livre à un euro m’y attendait : Journal de Kurt Cobain (Dix/Dix-Huit).
Le temps est toujours lourd quand, à la terrasse du Bistrot d’Edmond, je continue à lire Houellebecq. Ce roman me plaît fort dans lequel l’écrivain revient à son sujet de prédilection, les affres de la vie affective et sexuelle masculine. Près de moi se trouve un jeune trio. L’une des deux filles soudain s’agite, réclamant à grand cri un verre d’eau. Il s’agit de secourir une abeille tombée dans son coquetèle et engluée dans le sucre. Le lavage de l’insecte conduit à sa mort, dont la jouvencelle a du mal à se remettre (m’étonnerait pas que cette abeille ait été une guêpe).
Pour quarante centimes de plus, j’ai une place en première classe dans le train du retour, de quoi poursuivre confortablement ma lecture.
24 août 2022
Quand D. sombrera dans la maladie mentale, Teresa deviendra la troisième compagne de Simenon et l’accompagnera jusqu’à sa mort. Une qui ne vivra pas bien cette situation, c’est la fille de l’écrivain :
Je sais que Marie-Jo en est jalouse. Elle me l’avoue indirectement.
-Pourquoi, Dad, ne pourrais-je pas jouer le même rôle qu’elle près de toi ?
Depuis sa plus petite enfance, elle m’a voué un véritable culte auquel elle se raccroche. Elle n’ignore rien des relations humaines, car elle a été élevée librement, comme ses frères, Elle n’ignore pas non plus, car elle a l’œil et l’oreille partout, y compris à l’office, où l’on parle assez crûment, certains aspects de notre vie intime, à Teresa et moi.
Elle répétera souvent, néanmoins, au cours des années, à ma grande gêne :
-Pourquoi pas moi ?
N’a-t-elle pas exigé, à huit ans, que je lui achète une alliance dont elle devait connaître la signification et ne la portera-t-elle pas jusqu’à bout ?
En mil neuf cent soixante-huit, Marie-Jo sera violée :
Elle s’est retirée un moment dans une salle de bains quand un ami de Marc y a pénétré et a abusé d’elle sans toutefois aller jusqu’au bout. Cette scène, Marie-Jo la racontera plus tard dans les cahiers intimes qu’elle m’a confiés.
Le lendemain ou le surlendemain, alors qu’elle se trouve seule dans l’appartement de Marc, le même ami y entrera et, sur le lit de son frère, cette fois, fera complètement d’elle une femme.
Un événement commenté ainsi par l’écrivain :
Tu as eu dix-sept ans. Tu as eu une première expérience sexuelle décevante, dans une salle de bains, avec un homme séduisant, certes, mais qui va de femme en femme en semant des enfants, comme un coucou, au petit bonheur. J’aurais tant souhaité, pour toi, une initiation autre que celle que tu as connue ainsi, par une nuit de folie générale, entre un cabinet et un lavabo alors que vont et viennent des gens plus ou moins ivres !
Le huit février mil neuf cent soixante-quatorze, Marie-Jo revient à la charge :
Comme Teresa nous a laissés seuls, à son habitude, tu me regardes presque durement et j’ai peur de comprendre.
Tu me dis en effet, comme étouffant ta colère :
-Pourquoi elle et pas moi ?
-Tu ne comprends pas, ma petite fille ?
-Comprendre quoi ?
Je te désigne le lit.
-Teresa partage tout de ma vie.
-Et alors ? Tout ce qu’elle fait pour toi, je peux le faire, non ?
J’ai toujours craint ce que je découvre soudain. Tu me montres l’anneau d’or que tu m’as demandé quand tu avais huit ans, que tu as fait élargir plusieurs fois et que tu portes encore, que tu porteras même après que…
Même après que Marie-Jo se tire une balle dans le cœur, le dix-neuf mai mil neuf cent soixante-dix-huit. Elle avait vingt-cinq ans.
*
Une phrase me revient pendant que j’écoute leurs voix au téléphone. Je ne me souviens pas si je l’ai écrite ou si je l’ai lue je ne sais où :
-Chaque fois que nous faisons un enfant, nous nous donnons un juge., écrit aussi Simenon dans son livre confession.
*
Publié en mil neuf cent quatre-vingt-un, Mémoires intimes est un bon exemple de ce que l’autocensure empêche d’écrire aujourd’hui.
Je sais que Marie-Jo en est jalouse. Elle me l’avoue indirectement.
-Pourquoi, Dad, ne pourrais-je pas jouer le même rôle qu’elle près de toi ?
Depuis sa plus petite enfance, elle m’a voué un véritable culte auquel elle se raccroche. Elle n’ignore rien des relations humaines, car elle a été élevée librement, comme ses frères, Elle n’ignore pas non plus, car elle a l’œil et l’oreille partout, y compris à l’office, où l’on parle assez crûment, certains aspects de notre vie intime, à Teresa et moi.
Elle répétera souvent, néanmoins, au cours des années, à ma grande gêne :
-Pourquoi pas moi ?
N’a-t-elle pas exigé, à huit ans, que je lui achète une alliance dont elle devait connaître la signification et ne la portera-t-elle pas jusqu’à bout ?
En mil neuf cent soixante-huit, Marie-Jo sera violée :
Elle s’est retirée un moment dans une salle de bains quand un ami de Marc y a pénétré et a abusé d’elle sans toutefois aller jusqu’au bout. Cette scène, Marie-Jo la racontera plus tard dans les cahiers intimes qu’elle m’a confiés.
Le lendemain ou le surlendemain, alors qu’elle se trouve seule dans l’appartement de Marc, le même ami y entrera et, sur le lit de son frère, cette fois, fera complètement d’elle une femme.
Un événement commenté ainsi par l’écrivain :
Tu as eu dix-sept ans. Tu as eu une première expérience sexuelle décevante, dans une salle de bains, avec un homme séduisant, certes, mais qui va de femme en femme en semant des enfants, comme un coucou, au petit bonheur. J’aurais tant souhaité, pour toi, une initiation autre que celle que tu as connue ainsi, par une nuit de folie générale, entre un cabinet et un lavabo alors que vont et viennent des gens plus ou moins ivres !
Le huit février mil neuf cent soixante-quatorze, Marie-Jo revient à la charge :
Comme Teresa nous a laissés seuls, à son habitude, tu me regardes presque durement et j’ai peur de comprendre.
Tu me dis en effet, comme étouffant ta colère :
-Pourquoi elle et pas moi ?
-Tu ne comprends pas, ma petite fille ?
-Comprendre quoi ?
Je te désigne le lit.
-Teresa partage tout de ma vie.
-Et alors ? Tout ce qu’elle fait pour toi, je peux le faire, non ?
J’ai toujours craint ce que je découvre soudain. Tu me montres l’anneau d’or que tu m’as demandé quand tu avais huit ans, que tu as fait élargir plusieurs fois et que tu portes encore, que tu porteras même après que…
Même après que Marie-Jo se tire une balle dans le cœur, le dix-neuf mai mil neuf cent soixante-dix-huit. Elle avait vingt-cinq ans.
*
Une phrase me revient pendant que j’écoute leurs voix au téléphone. Je ne me souviens pas si je l’ai écrite ou si je l’ai lue je ne sais où :
-Chaque fois que nous faisons un enfant, nous nous donnons un juge., écrit aussi Simenon dans son livre confession.
*
Publié en mil neuf cent quatre-vingt-un, Mémoires intimes est un bon exemple de ce que l’autocensure empêche d’écrire aujourd’hui.
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