Un objectif, ce mercredi à Paris, visiter Jeff Koons La Rétrospective le premier jour afin de précéder la foule qui ne manquera pas de s’y ruer suite aux reportages des télévisions, des radios et des journaux de toute nature. Ce pourquoi, après un tour au Book-Off de la Bastille, je déjeune dès onze heures chez Délices Traiteur d’un menu vapeur. A la table voisine s’affaire un contrôleur de l’Urssaf dont les conclusions sont les suivantes : pas grand-chose à vous reprocher mais vous aurez quand même un redressement sur deux années pour avoir déclaré au forfait ce qui devait l’être au tarif horaire et puis comme votre convention collective est celle de la restauration rapide, il faudra remplacer vos assiettes et vos verres par des jetables en carton ou en plastique, enfin pour le défibrillateur cardiaque, ce n’est pas obligatoire, mais si vous en prenez un, il faut qu’il y ait une personne formée à son utilisation.
-De toute façon, ajoute-t-il, vous ne devez pas avoir beaucoup de personnes âgées dans votre clientèle.
Ce quinquagénaire ignore qu’il est pile dans le bon créneau pour la crise cardiaque.
A pied, je rejoins le Centre Pompidou où manifestement on attend du monde. Du personnel est à l’extérieur pour accueillir les visiteurs, peu occupé. Au sixième étage, des cordons sont en place pour les canaliser, pour l’instant inutiles. Marcel Duchamp, dont l’expo de peinture voisine est si peu fréquentée, aura de quoi être jaloux mais, ce premier jour, il n’y a aucune attente à l’entrée de Jeff Koons La Rétrospective.
J’y suis accueilli par les Infatables, jouets gonflables colorés trouvés à Manhattan posés sur miroirs. Suit la collection d’aspirateurs. L’exposition est chronologique. On passe aux œuvres bien connues, que de couleur, que de brillant, que de rondeur, vive le néo Pop Art. La plupart des présent(e)s déambulent l’appareil en main. On photographie son reflet dans l’immense Balloon Dog. « Tu sais pas si c’est froid, chaud, dur, mou », entends-je. « Je suis emballée mais je suis quand même un peu déçue », ajoute une autre. Une femme en chaise roulante se lève, comme quoi l’Art peut faire des miracles, rejoint trois amis, et tous quatre bras dessus bras dessous se font photographier devant le cœur baudruche géant. Un homme se recoiffe à l’aide d’un des miroirs en forme de tête d’animal. Une femme permanentée photographie le caniche frisé de ses rêves. On s’amuse comme à la fête foraine, d’autant qu’innovation hardie des capteurs de plafond détectent celles et ceux qui s’approchent trop près des peintures. Des sonneries indignées se déclenchent régulièrement. L’un des gardiens commente la nouveauté : « Putain, si ça sonne comme ça toute la journée, je vais devenir dingue. »
Quelques aspects non lisses quand même chez Jeff Koons, sa Liberty Bell fissurée et, bien sûr, ses photos pornos géantes et quelques sculptures annexes, du temps où il était avec la Cicciolina. Celles-ci sont dans une salle « strictement interdite aux moins de dix-huit ans » sous la surveillance d’une gardienne qui n’y laisse entrer que peu de monde à la fois.
Louche, la porcelaine représentant Michael Jackson avec son jeune singe sur les genoux l’est, c’est sûr, mais surtout au regard de ce qu’on sait maintenant de la vie du chanteur (elle date de mil neuf cent quatre-vingt-huit).
Toutes les productions récentes sont inoffensives, de quoi confirmer le propos écrit sur le mur : « Koons semble souligner ici l’inéluctable devenir décoratif des œuvres d’art. ». Je dirais même plus, il y contribue allègrement.
Après un tour dans les librairies du Quartier Latin et au Book-Off de l’Opéra, je rentre par le train de dix-huit heures trente, le direct de dix-huit heures vingt-cinq pour lequel j’ai un billet étant supprimé « pour raison de maintenance ». Le contrôleur m’en fait presque le reproche. J’y lis Alain, ouvrage de Catherine Robbe-Grillet consacré à son défunt mari (Editions Fayard) dont il y a peu à retenir, ceci quand même : ... et des colliers de chien dont j’ai porté, un temps, un petit modèle élégant, discret qui m’a valu un beau matin la réflexion d’une coiffeuse : « Vous avez perdu une petite chienne que vous aimiez beaucoup ? ». Je n’ai pas eu le courage de lui dire que la petite chienne aimée, c’était moi.
*
Sur une porte des toilettes du Centre Pompidou : « Hey, G. Pompidou, nobody clean this shit toilete ? ».
Si pourtant, des femmes dont il n’est pas utile de préciser la couleur de peau.
*
Un jour nous prendrons des trains qui n’existent pas (pour faire plaisir au contrôleur).
-De toute façon, ajoute-t-il, vous ne devez pas avoir beaucoup de personnes âgées dans votre clientèle.
Ce quinquagénaire ignore qu’il est pile dans le bon créneau pour la crise cardiaque.
A pied, je rejoins le Centre Pompidou où manifestement on attend du monde. Du personnel est à l’extérieur pour accueillir les visiteurs, peu occupé. Au sixième étage, des cordons sont en place pour les canaliser, pour l’instant inutiles. Marcel Duchamp, dont l’expo de peinture voisine est si peu fréquentée, aura de quoi être jaloux mais, ce premier jour, il n’y a aucune attente à l’entrée de Jeff Koons La Rétrospective.
J’y suis accueilli par les Infatables, jouets gonflables colorés trouvés à Manhattan posés sur miroirs. Suit la collection d’aspirateurs. L’exposition est chronologique. On passe aux œuvres bien connues, que de couleur, que de brillant, que de rondeur, vive le néo Pop Art. La plupart des présent(e)s déambulent l’appareil en main. On photographie son reflet dans l’immense Balloon Dog. « Tu sais pas si c’est froid, chaud, dur, mou », entends-je. « Je suis emballée mais je suis quand même un peu déçue », ajoute une autre. Une femme en chaise roulante se lève, comme quoi l’Art peut faire des miracles, rejoint trois amis, et tous quatre bras dessus bras dessous se font photographier devant le cœur baudruche géant. Un homme se recoiffe à l’aide d’un des miroirs en forme de tête d’animal. Une femme permanentée photographie le caniche frisé de ses rêves. On s’amuse comme à la fête foraine, d’autant qu’innovation hardie des capteurs de plafond détectent celles et ceux qui s’approchent trop près des peintures. Des sonneries indignées se déclenchent régulièrement. L’un des gardiens commente la nouveauté : « Putain, si ça sonne comme ça toute la journée, je vais devenir dingue. »
Quelques aspects non lisses quand même chez Jeff Koons, sa Liberty Bell fissurée et, bien sûr, ses photos pornos géantes et quelques sculptures annexes, du temps où il était avec la Cicciolina. Celles-ci sont dans une salle « strictement interdite aux moins de dix-huit ans » sous la surveillance d’une gardienne qui n’y laisse entrer que peu de monde à la fois.
Louche, la porcelaine représentant Michael Jackson avec son jeune singe sur les genoux l’est, c’est sûr, mais surtout au regard de ce qu’on sait maintenant de la vie du chanteur (elle date de mil neuf cent quatre-vingt-huit).
Toutes les productions récentes sont inoffensives, de quoi confirmer le propos écrit sur le mur : « Koons semble souligner ici l’inéluctable devenir décoratif des œuvres d’art. ». Je dirais même plus, il y contribue allègrement.
Après un tour dans les librairies du Quartier Latin et au Book-Off de l’Opéra, je rentre par le train de dix-huit heures trente, le direct de dix-huit heures vingt-cinq pour lequel j’ai un billet étant supprimé « pour raison de maintenance ». Le contrôleur m’en fait presque le reproche. J’y lis Alain, ouvrage de Catherine Robbe-Grillet consacré à son défunt mari (Editions Fayard) dont il y a peu à retenir, ceci quand même : ... et des colliers de chien dont j’ai porté, un temps, un petit modèle élégant, discret qui m’a valu un beau matin la réflexion d’une coiffeuse : « Vous avez perdu une petite chienne que vous aimiez beaucoup ? ». Je n’ai pas eu le courage de lui dire que la petite chienne aimée, c’était moi.
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Sur une porte des toilettes du Centre Pompidou : « Hey, G. Pompidou, nobody clean this shit toilete ? ».
Si pourtant, des femmes dont il n’est pas utile de préciser la couleur de peau.
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Un jour nous prendrons des trains qui n’existent pas (pour faire plaisir au contrôleur).