Bénéficiant une nouvelle fois d’un billet qui n’est pas à moi, j’entre ce jeudi soir à l’Opéra de Rouen. L’affluence des grands jours y est perceptible dès que l’on grimpe à l’étage. On ne sait où poser son verre et son assiette. Les serveuses derrière le bar ne cessent d’appeler une quiche. Suis-je le seul à penser qu’il pourrait s’agir d’une spectatrice ? Il y a des jours où la bourgeoisie bourgeoisante m’exaspère. Ce jeudi en est un.
A l’ouverture de la salle je prends place à l’orchestre en Bé Un. De ce milieu du deuxième rang on est assuré d’avoir la meilleure vue sur le dos du maestro. Pour les doigts du pianiste, ce sera non.
-T’as pris tes pastilles ? demande une femme derrière moi à son mari qui à peine assis tousse.
A mon côté gauche et devant moi sont des quadragénaires se connaissant. Tou(te)s travaillent dans la téléphonie. L’une raconte à l’un un achat de burgueur qui a mal tourné : « Il est parti en vrille et m’a attrapé par le col. »
Un poème tombé du ciel, lu par la voix de La Factorie (Maison de Poésie de Normandie), relève le niveau. Il s’agit de Tout entière de Charles Baudelaire tout en correspondances.
Comme la calvitie de ce musicien s’est étendue depuis que je ne l’ai vu. Comme tel autre, en laissant pousser ses cheveux ondulés, s’est fait une belle tête de musicien. Tiens celui-ci a pris du galon, le voici assis à la gauche de la cheffe d’attaque des premiers violons, lui qui était toujours au dernier rang et dont j’ai appris qu’en second métier il est vigneron. Telles sont les pensées qui occupent mon cerveau lorsque s’installe l’Orchestre, chaque instrumentiste de deuxième ou troisième rang disposant désormais d’une estrade individuelle le rehaussant.
Bientôt arrive le jeune chef à la barbe florissante : Pierre Dumoussaud.
C’est d’abord la Sinfonietta de Serge Prokofiev puis le piano est roulé à l’avant-scène afin que soit donné le Concerto numéro deux pour piano et orchestre en fa majeur que Dimitri Chostakovitch composa pour l’examen de son fils Maxime.
Toujours aussi fluet et légèrement grisonnant au sommet de son crâne s’y assoit Alexandre Tharaud. Pour reprendre les mots d’un de ma connaissance, il nous enchante de son jeu « véloce, sensible, puissant et espiègle » et obtient de gros applaudissements. En bonus et, nous dit-il, « en miroir avec Chostakovitch, ce qui peut paraître paradoxal, mais pas à moi », il nous offre une sonate de Dominico Scarlatti.
A l’entracte, coincé comme je suis au milieu de la rangée, je mets bien du temps à m’extraire de la salle. Si j’en restais là, me dis-je, fatigué de côtoyer ces quidams qui à peine la musique terminée se ruent sur la messagerie de leur téléphone. Cela me permettrait de rester sur un excellent moment.
Néanmoins je persiste et je n’ai pas tort. La Symphonie numéro quatre en si bémol majeur de Ludwig van Beethoven dirigée par le chef bondissant me plaît fort.
*
Comme l’ignoraient mes voisin(e)s, ce jeudi était l’une des « Journées mondiales sans téléphone portable ».
*
Tous les téléphones sont portables, même les fixes. Ce pourquoi je n’emploie jamais ce mot pour parler d’un téléphone mobile ou portatif.
A l’ouverture de la salle je prends place à l’orchestre en Bé Un. De ce milieu du deuxième rang on est assuré d’avoir la meilleure vue sur le dos du maestro. Pour les doigts du pianiste, ce sera non.
-T’as pris tes pastilles ? demande une femme derrière moi à son mari qui à peine assis tousse.
A mon côté gauche et devant moi sont des quadragénaires se connaissant. Tou(te)s travaillent dans la téléphonie. L’une raconte à l’un un achat de burgueur qui a mal tourné : « Il est parti en vrille et m’a attrapé par le col. »
Un poème tombé du ciel, lu par la voix de La Factorie (Maison de Poésie de Normandie), relève le niveau. Il s’agit de Tout entière de Charles Baudelaire tout en correspondances.
Comme la calvitie de ce musicien s’est étendue depuis que je ne l’ai vu. Comme tel autre, en laissant pousser ses cheveux ondulés, s’est fait une belle tête de musicien. Tiens celui-ci a pris du galon, le voici assis à la gauche de la cheffe d’attaque des premiers violons, lui qui était toujours au dernier rang et dont j’ai appris qu’en second métier il est vigneron. Telles sont les pensées qui occupent mon cerveau lorsque s’installe l’Orchestre, chaque instrumentiste de deuxième ou troisième rang disposant désormais d’une estrade individuelle le rehaussant.
Bientôt arrive le jeune chef à la barbe florissante : Pierre Dumoussaud.
C’est d’abord la Sinfonietta de Serge Prokofiev puis le piano est roulé à l’avant-scène afin que soit donné le Concerto numéro deux pour piano et orchestre en fa majeur que Dimitri Chostakovitch composa pour l’examen de son fils Maxime.
Toujours aussi fluet et légèrement grisonnant au sommet de son crâne s’y assoit Alexandre Tharaud. Pour reprendre les mots d’un de ma connaissance, il nous enchante de son jeu « véloce, sensible, puissant et espiègle » et obtient de gros applaudissements. En bonus et, nous dit-il, « en miroir avec Chostakovitch, ce qui peut paraître paradoxal, mais pas à moi », il nous offre une sonate de Dominico Scarlatti.
A l’entracte, coincé comme je suis au milieu de la rangée, je mets bien du temps à m’extraire de la salle. Si j’en restais là, me dis-je, fatigué de côtoyer ces quidams qui à peine la musique terminée se ruent sur la messagerie de leur téléphone. Cela me permettrait de rester sur un excellent moment.
Néanmoins je persiste et je n’ai pas tort. La Symphonie numéro quatre en si bémol majeur de Ludwig van Beethoven dirigée par le chef bondissant me plaît fort.
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Comme l’ignoraient mes voisin(e)s, ce jeudi était l’une des « Journées mondiales sans téléphone portable ».
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Tous les téléphones sont portables, même les fixes. Ce pourquoi je n’emploie jamais ce mot pour parler d’un téléphone mobile ou portatif.