Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

Au temps où Stefan Zweig était de passage à Rouen

16 juillet 2019


En lisant Le Monde d’hier (Souvenirs d’un européen) de Stefan Zweig, édité chez Belfond en mil neuf cent quatre-vingt-treize dans une nouvelle traduction de Serge Niémetz,  un ouvrage initialement paru en mil neuf cent quarante-quatre chez Bermann-Fisher Verlag AB à Stockholm, dans lequel l’écrivain fit le bilan de sa vie avant de se suicider en entraînant sa femme avec lui le vingt-deux février mil neuf cent quarante-deux, je découvre qu’il passa par Rouen peu avant le déclenchement de ce que l’on appellera la Grande Guerre :
Durant ces derniers jours, j’accompagnai Verhaeren à Rouen, où il devait donner une conférence. Dans la nuit, nous nous tînmes devant la cathédrale, dont les flèches brillaient d’une lueur magique à la clarté de la lune. De telles merveilles de douceur appartiennent-elles encore à une « patrie », ne nous appartiennent-elles pas à nous tous ? A la gare de Rouen, à l’endroit même où, deux ans plus tard, une de ces machines qu’il avait chantées allait le déchirer, nous prîmes congé. Il m’embrassa : « Au 1er août, chez moi, au Caillou qui bique. » Je le lui promis : chaque année, je lui rendais visite dans sa maison de campagne pour traduire avec lui, la main dans la main, ses derniers vers. Pourquoi pas cette année aussi ? Sans éprouver aucune appréhension, je pris congé de mes autres amis, je pris congé de Paris, un congé insouciant, nullement sentimental, comme lorsqu’on quitte sa propre maison pour quelques semaines. Mes plans pour les mois suivants étaient bien tracés. (…) Tout se présentait uni et clair à mes yeux en cette trente-deuxième année de ma vie ; le monde s’offrait à moi beau et chargé de sens comme un fruit délicieux dans cet été rayonnant. Et je l’aimais pour son présent et pour son avenir encore plus beau.
Alors, le 28 juin 1914, retentit à Sarajevo ce coup de feu qui, en une seconde, fit voler en mille éclats, comme un vase de terre creux, ce monde de la sécurité et de la raison créatrice dans lequel nous avions été élevés, dans lequel nous avions grandi, et où nous nous sentions chez nous.