Douze douze est l’heure de départ du train qui me conduit à Val-de-Reuil ce samedi pour la vente de livres d’occasion qu’organise la section locale d’Amnesty International au lycée Marc-Bloch. Arrivé à douze heures trente, je rejoins à pied la dalle qui traverse le centre de la ville où ont ouvert deux tondeurs barbiers à dix euros et où a fermé le café kebab La Méditerranée.
Il reste le Tatoo, toujours tenu par une famille chinoise (le père en connaît un rayon sur les plantes grasses et la fille a des soucis de puce de téléphone). J’y bois un café verre d’eau à un euro vingt parmi une clientèle essentiellement masculine, yo, ouala, salam.
J’ai vue sur la place des Quatre-Saisons où arrivent les participants au Carnaval Japonais. Y a-t-il des Japonais à Védéherre ? J’en doute. Cette fête est autant touchante que désespérante. J’en ai connu d’autres lorsque je vivais ici, y participant même.
A treize heure trente, je reprends la marche et trouve à la porte du lycée les deux frères de ma connaissance que je m’attendais à y voir. Nous discutons de notre addiction commune en attendant quatorze heures.
Juste avant l’ouverture sort de là Marc-Antoine Jamet, employé de Bernard Arnault, Maire, Socialiste. Il fait son petit numéro, déclarant qu’il a vu une biographie du dix-septième siècle pour laquelle nous allons nous battre. Le suivent deux hommes plus jeunes qui ont l’air d’être ses obligés.
Comme chaque année une table est disposée dans la cour afin qu’on y inscrive nos noms et prénoms et comme chaque année j’usurpe une identité, cette fois celle d’Alexandre Benalla.
L’an dernier j’avais fait une excellente récolte qui m’avait conduit à revenir le dimanche. Ce n’est pas le cas cette fois, même si au moment où je renonce, lassé par la foule, j’ai quand même dans mon sac treize livres qui me coûtent douze euros, parmi lesquels les deux tomes de l’intégrale des Chroniques de La Montagne d’Alexandre Vialatte publiés chez Bouquins/Laffont.
Je porte ce fardeau jusqu’à la gare et y attends le train de quinze heures vingt-huit. Vingt minutes après son départ, je suis à Rouen où pour leur vingtième samedi, les Jaunes ne sont ni visibles ni audibles.
*
Mon Crédit Agricole de la rue de la Jeanne, après avoir tenté de rouvrir le samedi, a définitivement baissé les bras : « En raison des manifestations actuelles, nous vous informons que les agences de Rouen Jeanne d'Arc, Rouen Pasteur et Rouen Gare seront fermées chaque samedi, jusqu'à l'arrêt du mouvement. »
Il reste le Tatoo, toujours tenu par une famille chinoise (le père en connaît un rayon sur les plantes grasses et la fille a des soucis de puce de téléphone). J’y bois un café verre d’eau à un euro vingt parmi une clientèle essentiellement masculine, yo, ouala, salam.
J’ai vue sur la place des Quatre-Saisons où arrivent les participants au Carnaval Japonais. Y a-t-il des Japonais à Védéherre ? J’en doute. Cette fête est autant touchante que désespérante. J’en ai connu d’autres lorsque je vivais ici, y participant même.
A treize heure trente, je reprends la marche et trouve à la porte du lycée les deux frères de ma connaissance que je m’attendais à y voir. Nous discutons de notre addiction commune en attendant quatorze heures.
Juste avant l’ouverture sort de là Marc-Antoine Jamet, employé de Bernard Arnault, Maire, Socialiste. Il fait son petit numéro, déclarant qu’il a vu une biographie du dix-septième siècle pour laquelle nous allons nous battre. Le suivent deux hommes plus jeunes qui ont l’air d’être ses obligés.
Comme chaque année une table est disposée dans la cour afin qu’on y inscrive nos noms et prénoms et comme chaque année j’usurpe une identité, cette fois celle d’Alexandre Benalla.
L’an dernier j’avais fait une excellente récolte qui m’avait conduit à revenir le dimanche. Ce n’est pas le cas cette fois, même si au moment où je renonce, lassé par la foule, j’ai quand même dans mon sac treize livres qui me coûtent douze euros, parmi lesquels les deux tomes de l’intégrale des Chroniques de La Montagne d’Alexandre Vialatte publiés chez Bouquins/Laffont.
Je porte ce fardeau jusqu’à la gare et y attends le train de quinze heures vingt-huit. Vingt minutes après son départ, je suis à Rouen où pour leur vingtième samedi, les Jaunes ne sont ni visibles ni audibles.
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Mon Crédit Agricole de la rue de la Jeanne, après avoir tenté de rouvrir le samedi, a définitivement baissé les bras : « En raison des manifestations actuelles, nous vous informons que les agences de Rouen Jeanne d'Arc, Rouen Pasteur et Rouen Gare seront fermées chaque samedi, jusqu'à l'arrêt du mouvement. »