Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
6 avril 2015
Sous la direction artistique de Thomas Cartron et Sylvain Wavrant c’est exposition, performance et concert ce samedi soir à l’Ubi pour la parution du quatrième numéro de l’élégant magazine Nos Années Sauvages, fruit de plusieurs artistes de tous les domaines. Le thème en est « Résurrection », ça tombe à Pâques.
Grâce aux nombreux humains qui s’y trouvent déjà, il fait une chaleur inhabituelle à l’Ubi quand j’y arrive vers dix-neuf heures. Je fais le tour des œuvres montrées, dont beaucoup de volatiles morts, peints ou empaillés, parmi lesquels les moineaux moulés et colorés de T.D.H. On en mangerait. Un petit bâton en plus et on les prendrait pour des glaces coulantes qui auraient beaucoup de succès auprès des enfants. Quelques-un(e)s sont présents, pour qui le sol jonché de plumes est terrain de jeu. Que de volailles il a fallu plumer pour cette soirée ! Deux garçons se roulent également dedans mais là il s’agit d’une performance. Je vais chercher un cocktail aux fruits rouges au bar où officient Claire et Laura fort élégamment munies dans les cheveux d’un accessoire à plumes signé Wavrant
-Michel, dans son coin, se demande ce qu’il va bien pouvoir raconter de la soirée, me dit un acteur ayant bureau ici.
Ce soir, je ne peux pas compter sur quelques réparties intéressantes, les conversations sont platement quotidiennes. Une fille perchée sur le bar énonce de façon faussement dramatique l’objet de la soirée. « Ça n’est pas grave si le roi ne vient pas », chantonne-t-elle. Peut-être que si. Ou du moins que la plupart des présent(e)s s’intéressent peu à ce qui se passe, ne commentant les évènements ou les œuvres que sur le ton de la plaisanterie. C’est encore une soirée bar et trottoir, boissons et cigarettes.
Tallisker est de la fête. A huit heures précises, elle commence à interpréter ses compositions que ne viennent écouter qu’une partie des présent(e)s. La plus belle honte de la soirée est alors pour la fille qui marchant parmi les plumes se prend le pied dans le câble électrique et arrache la prise, coupant net la musique pour un moment car il ne s’agit pas seulement de rebrancher, il faut à la chanteuse refaire tous ses réglages d’ordinateurs et autres appareils sophistiqués. La maladroite se met elle-même au piquet derrière le comptoir de la MAM Galerie. Encore deux chansons, puis Tallisker annonce qu’elle ne veut pas monopoliser la soirée.
Je ne reste pas davantage. A la sortie, les Ubien(ne)s de ma connaissance, occupés à fumer, me moquent sur ma « phobie technologique ». Rien de plus simple que de changer sa box Internet, me dit le chœur. Je laisse dire. Ce samedi après-midi, ailleurs, celle à qui je demandais si elle ne connaîtrait pas quelqu’un capable de m’aider m’a répondu : « Moi, je dois savoir le faire ». Rendez-vous est pris pour ce dimanche pascal.
*
Au programme de l’Ubi, en avril, un évènement « festif », un autre « convivial », un autre « participatif », ainsi qu’un artiste invitant à la rencontre « improbable » de Bach et de Ferré. Il serait temps d’instituer un système d’amende. Pour tout emploi des mots convivial ou festif ou participatif, un euro dans la tirelire. Pour improbable, c’est directement dix euros. Au bout d’un an, il n’y aurait sans doute pas de quoi payer le remplacement de la porte d’entrée chue mais au moins de quoi organiser une soirée bar et trottoir sans adjectif automatique.
*
Sur les vieilles pierres de ma maison, rue du Pétard (nouveau nom de la ruelle, tracé sur un mur à l’une de ses entrées), ce samedi matin, je trouve des affiches collées par les noctambules de la Fédération Régionale des Artistes Potentiels, quatre en noir et blanc et une en couleur titrée Prolo Ralph Lauren et montrant les vieilles barbes du marxisme-léninisme vêtus de jolis maillots bariolés. L’humour aussi est potentiel. J’en fais une photo floue et je fais bien car à dix heures tout est déjà arraché.
Grâce aux nombreux humains qui s’y trouvent déjà, il fait une chaleur inhabituelle à l’Ubi quand j’y arrive vers dix-neuf heures. Je fais le tour des œuvres montrées, dont beaucoup de volatiles morts, peints ou empaillés, parmi lesquels les moineaux moulés et colorés de T.D.H. On en mangerait. Un petit bâton en plus et on les prendrait pour des glaces coulantes qui auraient beaucoup de succès auprès des enfants. Quelques-un(e)s sont présents, pour qui le sol jonché de plumes est terrain de jeu. Que de volailles il a fallu plumer pour cette soirée ! Deux garçons se roulent également dedans mais là il s’agit d’une performance. Je vais chercher un cocktail aux fruits rouges au bar où officient Claire et Laura fort élégamment munies dans les cheveux d’un accessoire à plumes signé Wavrant
-Michel, dans son coin, se demande ce qu’il va bien pouvoir raconter de la soirée, me dit un acteur ayant bureau ici.
Ce soir, je ne peux pas compter sur quelques réparties intéressantes, les conversations sont platement quotidiennes. Une fille perchée sur le bar énonce de façon faussement dramatique l’objet de la soirée. « Ça n’est pas grave si le roi ne vient pas », chantonne-t-elle. Peut-être que si. Ou du moins que la plupart des présent(e)s s’intéressent peu à ce qui se passe, ne commentant les évènements ou les œuvres que sur le ton de la plaisanterie. C’est encore une soirée bar et trottoir, boissons et cigarettes.
Tallisker est de la fête. A huit heures précises, elle commence à interpréter ses compositions que ne viennent écouter qu’une partie des présent(e)s. La plus belle honte de la soirée est alors pour la fille qui marchant parmi les plumes se prend le pied dans le câble électrique et arrache la prise, coupant net la musique pour un moment car il ne s’agit pas seulement de rebrancher, il faut à la chanteuse refaire tous ses réglages d’ordinateurs et autres appareils sophistiqués. La maladroite se met elle-même au piquet derrière le comptoir de la MAM Galerie. Encore deux chansons, puis Tallisker annonce qu’elle ne veut pas monopoliser la soirée.
Je ne reste pas davantage. A la sortie, les Ubien(ne)s de ma connaissance, occupés à fumer, me moquent sur ma « phobie technologique ». Rien de plus simple que de changer sa box Internet, me dit le chœur. Je laisse dire. Ce samedi après-midi, ailleurs, celle à qui je demandais si elle ne connaîtrait pas quelqu’un capable de m’aider m’a répondu : « Moi, je dois savoir le faire ». Rendez-vous est pris pour ce dimanche pascal.
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Au programme de l’Ubi, en avril, un évènement « festif », un autre « convivial », un autre « participatif », ainsi qu’un artiste invitant à la rencontre « improbable » de Bach et de Ferré. Il serait temps d’instituer un système d’amende. Pour tout emploi des mots convivial ou festif ou participatif, un euro dans la tirelire. Pour improbable, c’est directement dix euros. Au bout d’un an, il n’y aurait sans doute pas de quoi payer le remplacement de la porte d’entrée chue mais au moins de quoi organiser une soirée bar et trottoir sans adjectif automatique.
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Sur les vieilles pierres de ma maison, rue du Pétard (nouveau nom de la ruelle, tracé sur un mur à l’une de ses entrées), ce samedi matin, je trouve des affiches collées par les noctambules de la Fédération Régionale des Artistes Potentiels, quatre en noir et blanc et une en couleur titrée Prolo Ralph Lauren et montrant les vieilles barbes du marxisme-léninisme vêtus de jolis maillots bariolés. L’humour aussi est potentiel. J’en fais une photo floue et je fais bien car à dix heures tout est déjà arraché.
4 avril 2004
La Cathédrale carillonne ce jeudi soir à l’heure où je traverse son parvis en diagonale, de quoi me mettre dans l’ambiance car Café Zimmermann, l’ensemble dirigé par Céline Frisch et Pablo Valetti, pour son passage annuel à l’Opéra, donne cette année des cantates sacrées de Bach, lequel en composait quasiment une par semaine, rude labeur que celui de maître de chapelle.
J’ai une chaise au premier rang et défends celle d’à côté au bénéfice de celui qui me rejoint à la sonnerie. Le chapeau vissé sur l’un de ses genoux, il juge nécessaire de sortir ses lunettes lorsque Frédéric Roels, maître des lieux, apparaît sur la scène pour nous annoncer que la soprano attendue est malade et remplacée par Hélène Le Corre.
-J’admire toujours le pli du pantalon, me dit-il.
-Ça, c’est madame, lui dis-je.
Nous sommes d’excellente humeur ce soir. Lorsque Hélène Le Corre passe de profil devant les musicien(ne)s je me dis qu’elle porte bien son nom puis me concentre sur ses qualités vocales. Elles lui valent bien des applaudissements à l’issue de la cantate Jauchzet Gott in allen Landen.
Christian Immler, grand, barbu et élégamment vêtu, lui succède pour interpréter de sa voix de basse la cantate Ich habe genug. Il obtient lui aussi un beau succès.
-C’est un très bel homme, déclare une connaisseuse à l’entracte.
Pour ma part, j’ai surtout été sous le charme (comme on dit) de l’hautboïste Katharina Andres, à qui je donnerais le bon dieu sans confession.
Chacun est d’accord pour trouver admirables les cantates de Bach et leur interprétation par Café Zimmermann. Le bémol est mis par l’un assis derrière moi :
-C’est un peu endormissant mais c’est bien joli quand même.
Après la Sonate pour violon et basse continue en sol majeur, c’est la cantate Liebster Jesu, mein Verlangen, que se partagent Hélène Le Corre et Christian Immler. Elle est moult applaudie.
Pablo Valetti prend la parole pour nous annoncer le bonus :
-Comme vous le savez, Bach a surtout composé de la musique religieuse, mais aussi quelques cantates profanes et parmi celles-ci une seule drôle. Devinez ce que l’on va vous interpréter. Enfin, un extrait. C’est la cantate des paysans.
Je présume que la drôlerie était dans le texte.
-Bon, ils peuvent revenir l’an prochain, dis-je à mon voisin à qui je me plaignais en début de soirée d’avoir chaque année Café Zimmermann au programme.
*
Avant concert, la conversation alentour était sur le désespoir de vivre sans France Culture et France Musique pour cause de grève prolongée.
-J’ai essayé d’autres radios, dit l’un. La première chose que j’ai entendue c’est : « Allo, c’est Janine, je rentre juste de faire les courses… »
*
« Le bis qu'a interprété notre fougueux pianiste n'est pas la sonate n° 1 de Beethoven, mais le dernier mouvement (allegretto) de sa sonate n° 17 "La Tempête". » m’écrit un lecteur suite à mon évocation du concert d’Andreï Korobeinikov. Pour une fois que je pensais avoir reconnu kekchose.
*
On pourrait croire que ça s’arrange ce vendredi matin en entendant à nouveau Marc Voinchet aux Matins de France Culture, mais c’est pour une émission pleine de trous remplis par des chansonnettes la plupart niaises. Et plus moyen d’écouter d’anciennes émissions via Internet, ma box Orange clignote toujours bleu. Il faut la remplacer, me dit l’assistance, à qui j’apprends que j’en ai reçu une autre il y a plusieurs mois.
J’ai une chaise au premier rang et défends celle d’à côté au bénéfice de celui qui me rejoint à la sonnerie. Le chapeau vissé sur l’un de ses genoux, il juge nécessaire de sortir ses lunettes lorsque Frédéric Roels, maître des lieux, apparaît sur la scène pour nous annoncer que la soprano attendue est malade et remplacée par Hélène Le Corre.
-J’admire toujours le pli du pantalon, me dit-il.
-Ça, c’est madame, lui dis-je.
Nous sommes d’excellente humeur ce soir. Lorsque Hélène Le Corre passe de profil devant les musicien(ne)s je me dis qu’elle porte bien son nom puis me concentre sur ses qualités vocales. Elles lui valent bien des applaudissements à l’issue de la cantate Jauchzet Gott in allen Landen.
Christian Immler, grand, barbu et élégamment vêtu, lui succède pour interpréter de sa voix de basse la cantate Ich habe genug. Il obtient lui aussi un beau succès.
-C’est un très bel homme, déclare une connaisseuse à l’entracte.
Pour ma part, j’ai surtout été sous le charme (comme on dit) de l’hautboïste Katharina Andres, à qui je donnerais le bon dieu sans confession.
Chacun est d’accord pour trouver admirables les cantates de Bach et leur interprétation par Café Zimmermann. Le bémol est mis par l’un assis derrière moi :
-C’est un peu endormissant mais c’est bien joli quand même.
Après la Sonate pour violon et basse continue en sol majeur, c’est la cantate Liebster Jesu, mein Verlangen, que se partagent Hélène Le Corre et Christian Immler. Elle est moult applaudie.
Pablo Valetti prend la parole pour nous annoncer le bonus :
-Comme vous le savez, Bach a surtout composé de la musique religieuse, mais aussi quelques cantates profanes et parmi celles-ci une seule drôle. Devinez ce que l’on va vous interpréter. Enfin, un extrait. C’est la cantate des paysans.
Je présume que la drôlerie était dans le texte.
-Bon, ils peuvent revenir l’an prochain, dis-je à mon voisin à qui je me plaignais en début de soirée d’avoir chaque année Café Zimmermann au programme.
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Avant concert, la conversation alentour était sur le désespoir de vivre sans France Culture et France Musique pour cause de grève prolongée.
-J’ai essayé d’autres radios, dit l’un. La première chose que j’ai entendue c’est : « Allo, c’est Janine, je rentre juste de faire les courses… »
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« Le bis qu'a interprété notre fougueux pianiste n'est pas la sonate n° 1 de Beethoven, mais le dernier mouvement (allegretto) de sa sonate n° 17 "La Tempête". » m’écrit un lecteur suite à mon évocation du concert d’Andreï Korobeinikov. Pour une fois que je pensais avoir reconnu kekchose.
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On pourrait croire que ça s’arrange ce vendredi matin en entendant à nouveau Marc Voinchet aux Matins de France Culture, mais c’est pour une émission pleine de trous remplis par des chansonnettes la plupart niaises. Et plus moyen d’écouter d’anciennes émissions via Internet, ma box Orange clignote toujours bleu. Il faut la remplacer, me dit l’assistance, à qui j’apprends que j’en ai reçu une autre il y a plusieurs mois.
3 avril 2015
Le train de huit heures sept me mène encore une fois à Paris ce mercredi et je fais en sorte de ne pas y tenir le rôle de celui pour qui c’est le dernier voyage, comme il est arrivé lundi à un quadragénaire victime d’une crise cardiaque au départ et qui n’a pu être ranimé ni par un médecin et un chirurgien présents à bord ni par les secours appelés à Sotteville.
La ligne Huit du métro étant en panne, c’est par un détour Neuf et Cinq que j’arrive à la Bastille et avec retard chez Book-Off. J’y trouve de bons livres et en quantité. Déjà bien chargé, je prends à pied le chemin du Centre Pompidou, m’arrêtant rue Saint-Antoine aux Mousquetaires pour y manger des lasagnes de bœuf, un plat du jour assez quelconque, et passe ensuite au Rivolux où je bois un café en lisant Libération (le Maire Colomb, Socialiste, s’en prend aux prostituées les obligeant à exercer dans des camionnettes loin du centre de Lyon) et Le Parisien (La Maire Hidalgo, Socialiste, promet de s’en prendre aux terrasses couvertes qui ne respectent pas la loi anti-tabac). Des syndromes d’impuissance, me dis-je, révélant qu’on ne sait pas résoudre les vrais problèmes de ses administré(e)s : manque de travail, manque de logement, etc.
Peu de monde au Centre Pompidou et aucune attente pour entrer à l’exposition Jeff Koons dont ce sont les derniers jours, est-il écrit sur les affiches du métro. Le public y est si clairsemé que je me trouve seul avec une jeune femme, expérience troublante, dans la salle réservée aux photos où, en quatre sur trois, Jeff pénètre la Cicciolina de différentes façons. Redescendu au quatrième, je fais assez vite le tour de la rétrospective consacrée à Hervé Télémaque. La peinture de cet acteur de la Figuration narrative m’intéresse sans plus.
-Ça coûte combien ? demande une lycéenne allemande à l’un des gardiens.
-Je ne sais pas exactement, mais ça doit coûter cher, lui répond-il.
Je passe par la librairie Gilda, rue des Bourbonnais, et trouve dans un des bacs de trottoir Fool for Love de Sam Shepard (Christian Bourgois), une pièce vue, il y a maintenant bien longtemps, avec celle qui me tenait la main cet été-là à Avignon, ce pourquoi je l’achète, puis la ligne Quatorze me rapproche du deuxième Book-Off.
Les employées y sont une nouvelle fois à changer la disposition de la boutique. Là aussi je trouve de très bonnes choses. Plusieurs livres achetés sont couverts de papier cristal. Ils ont dû appartenir au même lecteur soucieux de les maintenir en bon état : Une adolescence au temps du Maréchal et de multiples aventures de François Augiéras (La Différence), La colonne d’air suivi de Raymond Queneau ou l’oignon de Moebius de Jacques Duchateau (Ramsay), Etudes sur la Chartreuse de Parme de Monsieur Beyle d’Honoré de Balzac (Climats) et Carentan deux minutes d’arrêt de Frédéric Lasaygues (Le Castor Astral). Comment sont-ils arrivés là ? A-t-il été victime d’une crise cardiaque un jour où il partait en voyage ?
Le soir, rentré, c’est pour découvrir que ma box Orange passe à nouveau par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, plus d’Internet à la maison.
*
Autre livre rapporté de Paris : Historiettes de Tallemant des Réaux, un choix extrait de l’édition de Messieurs de Monmerqué et Paulin en mil huit cent soixante-deux et publié par Balland en mil neuf cent quatre-vingt-six.
J’ignorais l’existence de cette édition, pensant que les Historiettes n’étaient trouvables que sous la forme édition complète en deux tomes dans la Pléiade. Je vais enfin savoir ce que voulait dire Alexandrian dans sa préface à mon recueil Erotica quand il rapprochait mes écritures de celles de cet écrivain du dix-septième siècle.
*
Aussi : Pages du journal de la reine Victoria (Le Promeneur) et Anthologie de la fessée et de la flagellation d’Alexandre Dupouy (La Musardine). Il y a une certaine logique dans tout ça.
La ligne Huit du métro étant en panne, c’est par un détour Neuf et Cinq que j’arrive à la Bastille et avec retard chez Book-Off. J’y trouve de bons livres et en quantité. Déjà bien chargé, je prends à pied le chemin du Centre Pompidou, m’arrêtant rue Saint-Antoine aux Mousquetaires pour y manger des lasagnes de bœuf, un plat du jour assez quelconque, et passe ensuite au Rivolux où je bois un café en lisant Libération (le Maire Colomb, Socialiste, s’en prend aux prostituées les obligeant à exercer dans des camionnettes loin du centre de Lyon) et Le Parisien (La Maire Hidalgo, Socialiste, promet de s’en prendre aux terrasses couvertes qui ne respectent pas la loi anti-tabac). Des syndromes d’impuissance, me dis-je, révélant qu’on ne sait pas résoudre les vrais problèmes de ses administré(e)s : manque de travail, manque de logement, etc.
Peu de monde au Centre Pompidou et aucune attente pour entrer à l’exposition Jeff Koons dont ce sont les derniers jours, est-il écrit sur les affiches du métro. Le public y est si clairsemé que je me trouve seul avec une jeune femme, expérience troublante, dans la salle réservée aux photos où, en quatre sur trois, Jeff pénètre la Cicciolina de différentes façons. Redescendu au quatrième, je fais assez vite le tour de la rétrospective consacrée à Hervé Télémaque. La peinture de cet acteur de la Figuration narrative m’intéresse sans plus.
-Ça coûte combien ? demande une lycéenne allemande à l’un des gardiens.
-Je ne sais pas exactement, mais ça doit coûter cher, lui répond-il.
Je passe par la librairie Gilda, rue des Bourbonnais, et trouve dans un des bacs de trottoir Fool for Love de Sam Shepard (Christian Bourgois), une pièce vue, il y a maintenant bien longtemps, avec celle qui me tenait la main cet été-là à Avignon, ce pourquoi je l’achète, puis la ligne Quatorze me rapproche du deuxième Book-Off.
Les employées y sont une nouvelle fois à changer la disposition de la boutique. Là aussi je trouve de très bonnes choses. Plusieurs livres achetés sont couverts de papier cristal. Ils ont dû appartenir au même lecteur soucieux de les maintenir en bon état : Une adolescence au temps du Maréchal et de multiples aventures de François Augiéras (La Différence), La colonne d’air suivi de Raymond Queneau ou l’oignon de Moebius de Jacques Duchateau (Ramsay), Etudes sur la Chartreuse de Parme de Monsieur Beyle d’Honoré de Balzac (Climats) et Carentan deux minutes d’arrêt de Frédéric Lasaygues (Le Castor Astral). Comment sont-ils arrivés là ? A-t-il été victime d’une crise cardiaque un jour où il partait en voyage ?
Le soir, rentré, c’est pour découvrir que ma box Orange passe à nouveau par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, plus d’Internet à la maison.
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Autre livre rapporté de Paris : Historiettes de Tallemant des Réaux, un choix extrait de l’édition de Messieurs de Monmerqué et Paulin en mil huit cent soixante-deux et publié par Balland en mil neuf cent quatre-vingt-six.
J’ignorais l’existence de cette édition, pensant que les Historiettes n’étaient trouvables que sous la forme édition complète en deux tomes dans la Pléiade. Je vais enfin savoir ce que voulait dire Alexandrian dans sa préface à mon recueil Erotica quand il rapprochait mes écritures de celles de cet écrivain du dix-septième siècle.
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Aussi : Pages du journal de la reine Victoria (Le Promeneur) et Anthologie de la fessée et de la flagellation d’Alexandre Dupouy (La Musardine). Il y a une certaine logique dans tout ça.
2 avril 2015
Ce mardi soir, pour me rendre à l’Opéra de Rouen où l’on danse, je dois affronter le vent fort qui toute la journée a fait suite à une nouvelle tempête nocturne. Jean-Claude Gallotta y propose Yvan Vaffan, recréation des Aventures d’Yvan Vaffan, sa chorégraphie de mil neuf cent quatre-vingt-quatre, avec une musique d’aujourd’hui due à Strigall.
La danse a cette vertu de considérablement rajeunir le public de la maison. De ma place, en bas du premier balcon, j’ai bonne vue sur les jolies jambes de demoiselles court vêtues et haut perchées, venues là à la demande du lycée, élèves de ces classes à dominante artistique où l’on trouve un garçon pour neuf filles. J’ai également bonne vue sur la scène.
Bientôt s’y ébroue la dizaine de danseurs et danseuses racontant la vie de ce héros inventé nommé Vaffan. Je ne cherche pas à comprendre l’histoire, me contentant d’apprécier les évolutions de cette bande de jeunes. C’est tonique, varié, avec un zeste d’humour et un soupçon d’érotisme.
Je suis content à la fin, ainsi que la plupart, si j’en juge par les applaudissements forts et les bravos. Jean-Claude Gallotta vient saluer, vêtu de noir comme il se doit.
*
Femme à la gazinière au café Le Clos Saint-Marc :
Elle a acheté cette gazinière d’occasion sur Internet. Son fils a mis des heures à la monter dans l’appartement puis à l’installer et au final (comme elle dit), elle ne marche pas.
-Je n’ai pas de chance, répète-t-elle, là où d’autres diraient : Ce salaud de vendeur m’a entubée.
*
Rouen rive gauche, rue Saint-Sever :
-Il veut, mais il a pas la volonté.
La danse a cette vertu de considérablement rajeunir le public de la maison. De ma place, en bas du premier balcon, j’ai bonne vue sur les jolies jambes de demoiselles court vêtues et haut perchées, venues là à la demande du lycée, élèves de ces classes à dominante artistique où l’on trouve un garçon pour neuf filles. J’ai également bonne vue sur la scène.
Bientôt s’y ébroue la dizaine de danseurs et danseuses racontant la vie de ce héros inventé nommé Vaffan. Je ne cherche pas à comprendre l’histoire, me contentant d’apprécier les évolutions de cette bande de jeunes. C’est tonique, varié, avec un zeste d’humour et un soupçon d’érotisme.
Je suis content à la fin, ainsi que la plupart, si j’en juge par les applaudissements forts et les bravos. Jean-Claude Gallotta vient saluer, vêtu de noir comme il se doit.
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Femme à la gazinière au café Le Clos Saint-Marc :
Elle a acheté cette gazinière d’occasion sur Internet. Son fils a mis des heures à la monter dans l’appartement puis à l’installer et au final (comme elle dit), elle ne marche pas.
-Je n’ai pas de chance, répète-t-elle, là où d’autres diraient : Ce salaud de vendeur m’a entubée.
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Rouen rive gauche, rue Saint-Sever :
-Il veut, mais il a pas la volonté.
1er avril 2015
Vendredi après-midi, à proximité de l’Opéra de Rouen, je croise l’homme au chapeau sans son couvre-chef et sans les nouvelles lunettes suédoises qui lui donnent un air intellectuel. J’en suis déjà à l’accuser d’avoir chopé le dernière bonne place disponible pour le récital d’Andreï Korobeinikov, dimanche après-midi, quand au contraire, me dit-il, il vient de libérer sa place, ne pouvant en être.
Je file au guichet et bientôt cette place devient la mienne, de quoi être au plus près pour le retour du prodige russe du barreau et du piano (avocat à dix-sept ans, spécialiste du droit de la propriété intellectuelle, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet, « Meilleur musicien de la décennie » à dix-neuf ans au Conservatoire de Moscou, couvert de distinctions musicales nationales et internationales et ayant déjà enregistré moult cédés). A l’ouverture de la salle, malgré la concurrence, je peux m’asseoir sur l’une des chaises de premier rang offrant la vue sur les mains du pianiste.
Andreï Korobeinikov donne d’abord l’immense et difficile Sonate numéro vingt-neuf en si bémol majeur « Hammerklavier » de Ludwig van Beethoven, pendant laquelle s’ajoute aux habituels bruits parasites des toux celui de son siège qui grince. J’imagine qu’il en est le premier gêné mais une fois la machine lancée, impossible de l’arrêter. Il bondit debout à l’issue et est fort applaudi.
On se lève pour l’entracte et partout résonne « le siège ! le siège ! ». Le premier technicien attrapé en est averti. Au retour dans la salle, le fautif n’est plus là.
-Il va peut-être jouer du piano debout, dit un petit malin derrière moi.
Un autre siège est apporté, ce qui donne lieu à quelques applaudissements, puis Andreï Korobeinikov surgit de la coulisse et se précipite sur l’instrument pour la Sonate numéro trente-deux en ut mineur du même Beethoven, pendant laquelle s’expriment encore les toussoteux et les toussoteuses dont certaines font en plus du bruit en ouvrant leur sac pour y attraper un médicament inefficace dont elles épluchent l’emballage avant de le gober. S’ajoutent à cela, des sons étranges venus des coulisses, côté jardin. Il est quand même possible d’entendre la musique de Beethoven et d’apprécier le jeu du pianiste sans partition aux doigts multipliés sur le clavier.
A la fin, très applaudi, Andreï Korobeinikov salue raidement, esquissant un quart de sourire, puis il nous offre en bonus le début de la Sonate numéro un de Ludwig van, se livre à de nouveaux saluts empruntés, ose une sorte de geste d’au revoir un peu réprimé et disparaît.
Dehors, il règne un vent tempétueux bien en accord avec la musique tourmentée du « Maître de Bonn ».
*
Le soir venu, la Seine Maritime bascule à droite (comme disent les journalistes). Nicolas Rouly perd son poste de Chef de Département. Va-t-il reprendre sa place de défenseur des Sans Papiers au sein du Cabinet Eden? Il faisait cela très bien.
Deux des trois cantons de Rouen restent à gauche. Le perdant est Eric de Falco qui jusqu’à ce que j’en parle copiait collait dans son blog des articles du Monde, de Libération ou du Nouvel Obs en les mettant à son nom. Il donne maintenant la source. Ne manque plus que l’autorisation des journaux concernés.
Je file au guichet et bientôt cette place devient la mienne, de quoi être au plus près pour le retour du prodige russe du barreau et du piano (avocat à dix-sept ans, spécialiste du droit de la propriété intellectuelle, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet, « Meilleur musicien de la décennie » à dix-neuf ans au Conservatoire de Moscou, couvert de distinctions musicales nationales et internationales et ayant déjà enregistré moult cédés). A l’ouverture de la salle, malgré la concurrence, je peux m’asseoir sur l’une des chaises de premier rang offrant la vue sur les mains du pianiste.
Andreï Korobeinikov donne d’abord l’immense et difficile Sonate numéro vingt-neuf en si bémol majeur « Hammerklavier » de Ludwig van Beethoven, pendant laquelle s’ajoute aux habituels bruits parasites des toux celui de son siège qui grince. J’imagine qu’il en est le premier gêné mais une fois la machine lancée, impossible de l’arrêter. Il bondit debout à l’issue et est fort applaudi.
On se lève pour l’entracte et partout résonne « le siège ! le siège ! ». Le premier technicien attrapé en est averti. Au retour dans la salle, le fautif n’est plus là.
-Il va peut-être jouer du piano debout, dit un petit malin derrière moi.
Un autre siège est apporté, ce qui donne lieu à quelques applaudissements, puis Andreï Korobeinikov surgit de la coulisse et se précipite sur l’instrument pour la Sonate numéro trente-deux en ut mineur du même Beethoven, pendant laquelle s’expriment encore les toussoteux et les toussoteuses dont certaines font en plus du bruit en ouvrant leur sac pour y attraper un médicament inefficace dont elles épluchent l’emballage avant de le gober. S’ajoutent à cela, des sons étranges venus des coulisses, côté jardin. Il est quand même possible d’entendre la musique de Beethoven et d’apprécier le jeu du pianiste sans partition aux doigts multipliés sur le clavier.
A la fin, très applaudi, Andreï Korobeinikov salue raidement, esquissant un quart de sourire, puis il nous offre en bonus le début de la Sonate numéro un de Ludwig van, se livre à de nouveaux saluts empruntés, ose une sorte de geste d’au revoir un peu réprimé et disparaît.
Dehors, il règne un vent tempétueux bien en accord avec la musique tourmentée du « Maître de Bonn ».
*
Le soir venu, la Seine Maritime bascule à droite (comme disent les journalistes). Nicolas Rouly perd son poste de Chef de Département. Va-t-il reprendre sa place de défenseur des Sans Papiers au sein du Cabinet Eden? Il faisait cela très bien.
Deux des trois cantons de Rouen restent à gauche. Le perdant est Eric de Falco qui jusqu’à ce que j’en parle copiait collait dans son blog des articles du Monde, de Libération ou du Nouvel Obs en les mettant à son nom. Il donne maintenant la source. Ne manque plus que l’autorisation des journaux concernés.
31 mars 2015
« Il nous avait prévenus, Leo Hussain n’assigne aucune frontière à la musique ni temporelle, ni matérielle », nous avertit le livret programme, de quoi s’accrocher à son fauteuil, le mien est au premier balcon côté jardin. L’audace du nouveau chef, ce vendredi soir, c’est de mettre au même programme Mozart et des compositeurs contemporains originaires d’outre Méditerranée. Audace mesurée, il n’en est pas à nous proposer un mixage des deux musiques à la Hughes de Courson dans Mozart l’Egyptien.
« En fait, il y a peu de choses que je hais autant que la classification « musique classique ». La musique est musique avant tout, et définir de telles délimitations à notre art est le desservir. J’aime la musique, c’est aussi simple que cela, que ce soit un quatuor à cordes de Beethoven ou le dernier album de Cold Play ! » explique Leo Hussain dans l’entretien lisible dans ce livret programme, propos recueilli par Vinciane Laumonier. Je ne sais à qui il faut attribuer ce Cold Play mis pour Coldplay, mais cela montre qu’à l’Opéra de Rouen, on a encore du chemin à faire avant d’être familier de toutes les musiques.
D’abord, ce vendredi soir, c’est Fusion d’Ali Osman, compositeur né au Soudan mais qui doit être Egyptien, une œuvre pleine d’allant. Les contrebasses deviennent instruments de percussion. Certains interprètes donnent de la voix et du pied. C’est plaisant.
La suite l’est moins, Light upon light, création mondiale avec la participation à l’oud de son compositeur Hossam Mahmoud, né au Caire, une œuvre dépouillée et austère qui me mène à l’ennui et au bord du sommeil, bien que j’aie pour fixer mon attention trois joueurs d’instruments à vent détachés de l’Orchestre et perchés au balcon sur ma gauche. Je ne sais ce qu’en pensent les autres car à l’entracte, je reste sur le promenoir d’où l’on entend, venu d’en bas, un brouhaha indéchiffrable.
Mon voisin de droite n’a pas quitté son siège. Il lit Albert Cohen. A la reprise, c’est la bien connue Symphonie numéro quarante en sol mineur de Wolfgang Amadeus Mozart, né à Salzbourg, où réside Hossam Mahmoud, où Leo Hussain fut directeur musical, on voit le fil. Le célèbre premier mouvement génère des applaudissements qui sont déplorés par celles et ceux qui savent que ça ne se fait pas, et même le deuxième, ce qui entraîne des chut ! indignés. Leo Hussain se démène et à l’issue on peut dire, au sens propre, qu’il a mouillé sa chemise. Sa sortie de scène est néanmoins en petite foulée.
*
Contrebassistes : plus petits lorsqu’ils sont sans leur instrument.
*
Arrivée d’une lettre circulaire avec mes quatre prénoms sur l’enveloppe. La Droite locale fait la chasse aux abstentionnistes et tente de me convaincre d’aller voter pour ses candidat(e)s au deuxième tour des départementales car elle est le recours « pour celles et ceux qui refusent la politique politicienne ». De quoi se gausser.
Parmi ces quatre chantres de la libre entreprise, deux sont à l’abri dans la Fonction Publique Territoriale.
« En fait, il y a peu de choses que je hais autant que la classification « musique classique ». La musique est musique avant tout, et définir de telles délimitations à notre art est le desservir. J’aime la musique, c’est aussi simple que cela, que ce soit un quatuor à cordes de Beethoven ou le dernier album de Cold Play ! » explique Leo Hussain dans l’entretien lisible dans ce livret programme, propos recueilli par Vinciane Laumonier. Je ne sais à qui il faut attribuer ce Cold Play mis pour Coldplay, mais cela montre qu’à l’Opéra de Rouen, on a encore du chemin à faire avant d’être familier de toutes les musiques.
D’abord, ce vendredi soir, c’est Fusion d’Ali Osman, compositeur né au Soudan mais qui doit être Egyptien, une œuvre pleine d’allant. Les contrebasses deviennent instruments de percussion. Certains interprètes donnent de la voix et du pied. C’est plaisant.
La suite l’est moins, Light upon light, création mondiale avec la participation à l’oud de son compositeur Hossam Mahmoud, né au Caire, une œuvre dépouillée et austère qui me mène à l’ennui et au bord du sommeil, bien que j’aie pour fixer mon attention trois joueurs d’instruments à vent détachés de l’Orchestre et perchés au balcon sur ma gauche. Je ne sais ce qu’en pensent les autres car à l’entracte, je reste sur le promenoir d’où l’on entend, venu d’en bas, un brouhaha indéchiffrable.
Mon voisin de droite n’a pas quitté son siège. Il lit Albert Cohen. A la reprise, c’est la bien connue Symphonie numéro quarante en sol mineur de Wolfgang Amadeus Mozart, né à Salzbourg, où réside Hossam Mahmoud, où Leo Hussain fut directeur musical, on voit le fil. Le célèbre premier mouvement génère des applaudissements qui sont déplorés par celles et ceux qui savent que ça ne se fait pas, et même le deuxième, ce qui entraîne des chut ! indignés. Leo Hussain se démène et à l’issue on peut dire, au sens propre, qu’il a mouillé sa chemise. Sa sortie de scène est néanmoins en petite foulée.
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Contrebassistes : plus petits lorsqu’ils sont sans leur instrument.
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Arrivée d’une lettre circulaire avec mes quatre prénoms sur l’enveloppe. La Droite locale fait la chasse aux abstentionnistes et tente de me convaincre d’aller voter pour ses candidat(e)s au deuxième tour des départementales car elle est le recours « pour celles et ceux qui refusent la politique politicienne ». De quoi se gausser.
Parmi ces quatre chantres de la libre entreprise, deux sont à l’abri dans la Fonction Publique Territoriale.
30 mars 2015
La suite, au Théâtre des Deux Rives ce jeudi soir, c’est Sons Songs Sonnets (de Shakespeare) par Pablo Elcoq. Le public est le même, moins les classes lycéennes et plus des nouveaux venus qui ne font pas beaucoup baisser la moyenne d’âge.
Pendant que le monde s’installe, Pablo Elcoq est déjà sur scène, entouré d’instruments, dans la pénombre et en costume blanc. Je connais sa musique et ses capacités vocales depuis une déjà lointaine représentation du Baiser de la femme araignée par la compagnie Le Chat Foin de Yann Dacosta à Mont-Saint-Aignan.
Le plus souvent assis, passant de la guitare à l’accordéon, de la basse aux percussions, jouant aussi du sampleur et de la boucle enregistrée, Pablo Elcoq offre sa version chantée d’une sélection des Sonnets de William Shakespeare. Musicalement, cela va voir du côté du blues et est mâtiné d’« influences rock, folk, soul, parfois même un peu tzigane » (comme il l’a écrit lui-même dans la note d’intention).
Grâce à une traduction française, via une voix enregistrée qui descend sur le public ou dite par l’artiste lui-même, chacun peut se retrouver dans les soucis humains qu’évoquent les poèmes de Shakespeare (faiblesse, amour, pouvoir, médiocrité, temps qui passe, solitude, perspective de la mort) tout en jouissant de ce que sait faire des textes originaux celui qui les interprète avec sa voix capable de passer dans la même phase musicale de l’aigu à la basse éraillée.
Cela mérite beaucoup d’applaudissements à la fin. Pablo Elcoq dit quelques mots pour expliquer que son spectacle n’est pas celui qu il aurait dû être ; son scénographe et créateur de vidéos et lumières, Thierry Vareille, étant brutalement décédé.
Après avoir descendu la rue Louis-Ricard, je passe à proximité du O'Kallaghan's où, devant un écran qui diffuse du foute, s’agglutine un public plus nombreux et plus jeune qu’au Théâtre des Deux Rives. Entendre des filles crier dans la nuit « Penalty ! Penalty ! » a quelque chose de désolant.
Pendant que le monde s’installe, Pablo Elcoq est déjà sur scène, entouré d’instruments, dans la pénombre et en costume blanc. Je connais sa musique et ses capacités vocales depuis une déjà lointaine représentation du Baiser de la femme araignée par la compagnie Le Chat Foin de Yann Dacosta à Mont-Saint-Aignan.
Le plus souvent assis, passant de la guitare à l’accordéon, de la basse aux percussions, jouant aussi du sampleur et de la boucle enregistrée, Pablo Elcoq offre sa version chantée d’une sélection des Sonnets de William Shakespeare. Musicalement, cela va voir du côté du blues et est mâtiné d’« influences rock, folk, soul, parfois même un peu tzigane » (comme il l’a écrit lui-même dans la note d’intention).
Grâce à une traduction française, via une voix enregistrée qui descend sur le public ou dite par l’artiste lui-même, chacun peut se retrouver dans les soucis humains qu’évoquent les poèmes de Shakespeare (faiblesse, amour, pouvoir, médiocrité, temps qui passe, solitude, perspective de la mort) tout en jouissant de ce que sait faire des textes originaux celui qui les interprète avec sa voix capable de passer dans la même phase musicale de l’aigu à la basse éraillée.
Cela mérite beaucoup d’applaudissements à la fin. Pablo Elcoq dit quelques mots pour expliquer que son spectacle n’est pas celui qu il aurait dû être ; son scénographe et créateur de vidéos et lumières, Thierry Vareille, étant brutalement décédé.
Après avoir descendu la rue Louis-Ricard, je passe à proximité du O'Kallaghan's où, devant un écran qui diffuse du foute, s’agglutine un public plus nombreux et plus jeune qu’au Théâtre des Deux Rives. Entendre des filles crier dans la nuit « Penalty ! Penalty ! » a quelque chose de désolant.
28 mars 2015
Jeudi soir, je grimpe la rue Louis-Ricard jusqu’au Théâtre des Deux Rives pour voir jouer Loveless, pièce qui est l’aboutissement d’un stage d’une douzaine de jours au Centre Dramatique National de Haute-Normandie, bâtie par Yann Dacosta et Anne Buffet d’après Une vie de putain, recueil de témoignages de prostituées recueillis par Claude Jaguet pendant leur occupation de l’église Saint-Nizier à Lyon en mil neuf cent soixante-quinze. Le sujet m’intéresse.
J’ai un vague souvenir de cette occupation d’église lyonnaise qui fit suite à des persécutions policières et s’acheva par des brutalités policières. Je suivais ça dans Libération auquel j’étais abonné. Je me rappelle surtout de la suite du mouvement avec Grisélidis Réal.
La salle, dans laquelle règne une lumière rouge, est bientôt partagée entre un public de plus de cinquante ans dont beaucoup d’enseignant(e)s et un public de classes de lycéen(ne)s. On trouve aussi là des gens du métier venus voir leurs camarades, six comédien(ne)s jouant les filles dans un décor d’église en chantier. Entre deux scènes sont diffusés des documents visuels et sonores d’époque. On peut aussi entendre de la bonne musique des seventies et une intervention de Ruwen Ogien, philosophe, comme quoi aux yeux de la société, une relation sexuelle ne peut se suffire à elle-même, elle a toujours besoin d’une justification, dont la plus noble est l’amour.
Les prostituées relayées par les comédien(ne)s narrent leurs expériences personnelles souvent difficiles et pourquoi elles ont commencé à faire ça et pourquoi elles continuent, cela donne des choses du genre : « Les hommes sont tous des cochons, alors autant en profiter si des crétins sont prêts à payer pour baiser, en échange d’un maximum de leur argent donnons-leur le moins possible. », loin de l’empathie qu’avait pour ses clients Grisélidis.
Du moins, cette pièce a-t-elle le mérite de parler de la prostitution d’une autre manière que l’actuelle, puisqu’au temps de la revendication a succédé le temps de l’interdiction ou a minima de la pénalisation des clients, sur laquelle actuellement nombre de membres du Sénat de toutes opinions politiques semblent d’accord, y compris certains issus de partis politiques pour lesquels il m’est arrivé de voter, une raison de plus pour désormais pratiquer l’abstinence (électorale).
Après, et en attendant la suite, je prends un verre de vin rouge au bar. Apercevant la fille rousse qui l’an dernier travaillait avec une autre dans le sous-sol de l’Ubi à une adaptation théâtrale du livre de Grisélidis Réal Le noir est une couleur, je lui demande où ça en est. Elles ont trouvé un nouveau lieu et elles continuent, me dit-elle, quelque chose sera peut-être visible en mai.
J’ai un vague souvenir de cette occupation d’église lyonnaise qui fit suite à des persécutions policières et s’acheva par des brutalités policières. Je suivais ça dans Libération auquel j’étais abonné. Je me rappelle surtout de la suite du mouvement avec Grisélidis Réal.
La salle, dans laquelle règne une lumière rouge, est bientôt partagée entre un public de plus de cinquante ans dont beaucoup d’enseignant(e)s et un public de classes de lycéen(ne)s. On trouve aussi là des gens du métier venus voir leurs camarades, six comédien(ne)s jouant les filles dans un décor d’église en chantier. Entre deux scènes sont diffusés des documents visuels et sonores d’époque. On peut aussi entendre de la bonne musique des seventies et une intervention de Ruwen Ogien, philosophe, comme quoi aux yeux de la société, une relation sexuelle ne peut se suffire à elle-même, elle a toujours besoin d’une justification, dont la plus noble est l’amour.
Les prostituées relayées par les comédien(ne)s narrent leurs expériences personnelles souvent difficiles et pourquoi elles ont commencé à faire ça et pourquoi elles continuent, cela donne des choses du genre : « Les hommes sont tous des cochons, alors autant en profiter si des crétins sont prêts à payer pour baiser, en échange d’un maximum de leur argent donnons-leur le moins possible. », loin de l’empathie qu’avait pour ses clients Grisélidis.
Du moins, cette pièce a-t-elle le mérite de parler de la prostitution d’une autre manière que l’actuelle, puisqu’au temps de la revendication a succédé le temps de l’interdiction ou a minima de la pénalisation des clients, sur laquelle actuellement nombre de membres du Sénat de toutes opinions politiques semblent d’accord, y compris certains issus de partis politiques pour lesquels il m’est arrivé de voter, une raison de plus pour désormais pratiquer l’abstinence (électorale).
Après, et en attendant la suite, je prends un verre de vin rouge au bar. Apercevant la fille rousse qui l’an dernier travaillait avec une autre dans le sous-sol de l’Ubi à une adaptation théâtrale du livre de Grisélidis Réal Le noir est une couleur, je lui demande où ça en est. Elles ont trouvé un nouveau lieu et elles continuent, me dit-elle, quelque chose sera peut-être visible en mai.
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