Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
29 septembre 2020
Pour une raison que j’ignore, la ouifi de mon logement temporaire est capricieuse. Elle se coupe la nuit ou le jour en mon absence. Ce lundi matin, je dois encore relancer la box Orange. Quand ça repart, je trouve enfin dans ma messagerie Yahou le mail que j’attendais, celui de la demande d’excuse de David Bobée. Je passe un certain temps à écrire ma réponse, puis le jour à peine levé, je vais m’oxygéner.
Le temps est aussi gris qu’hier mais sans vent, ce qui change tout. Je décide de longer la côte vers le nord par le Géherre jusqu’à Tréveneuc avec pour lieu d’arrivée un restaurant nommé Le Crapaud Rouge dont je n’ai pas réussi à savoir s’il est ouvert ou non.
Je pars presque en face de chez moi, du Centre des Congrès. Dès le début, ce chemin m’enchante tant par lui-même que par ce qu’il permet de voir. Toute une côte rocheuse et découpée qui est ce que je préfère de la Bretagne. Les photos que j’en fais ne rendent pas toute cette beauté. Marchant sur un sentier qui parfois n’a que la largeur d’un homme, je songe à mes deux amoureuses d’antan avec lesquelles j’ai fait de semblables balades bretonnes. Je songe aussi à celle avec qui j’ai passé une demi-journée à Paimpol et qui m’a précédé sur ce chemin. Tout ce que je vois elle l’a vu, s’émerveillant des mêmes endroits. Où s’est-elle réveillée ce matin.
A un moment le sentier s’est effondré dans la mer ce qui oblige à un détour par la rue des Embruns puis quand je le retrouve cela devient encore plus beau. Après la pointe de Romeur, je suis en vue de l’ilot de la grève de Saint-Marc (encore plus petit que l’île de la Comtesse). Cette grève sert de port d’échouage à de petits bateaux. Là, le chemin passe près de l’élégante chapelle Saint-Marc puis descend vers des viviers où hélas on ne peut manger sur place.
Il me faudrait encore faire le tour de la pointe du Bec de Vir pour atteindre mon but, mais cela monte suffisamment pour que je préfère prendre un raccourci moins éprouvant. Il me mène directement à la plage de Port Goret. Le Crapaud Rouge est là, spécialisé dans le rhum et la moule. Fermeture annuelle, lis-je sur sa porte.
Quoi faire sinon revenir sur mes pas. Il est dix heures. Je suis bon marcheur ce jour. Le chemin du retour me paraît plus facile que celui de l’aller. Quand même, j’ai hâte de voir le bout de la queue de Saint-Quay. Il apparait soudain sous forme de sémaphore. Ensuite cela va plus vite que je ne l’aurais cru. A onze heures, je m’installe à une table de bord de mer du Café de la Plage pour un café verre d’eau Léautaud.
C’est là que je déjeune, du fameux menu à dix-neuf euros, certain de ne pas être déçu. Aujourd’hui, c’est : tartare de lieu maquereau et chou-fleur, merlu au beurre pommes de terre et artichauts comme un risotto et brownie et fruits exotiques. Alors que les habitués mangent à l’intérieur, me tiennent compagnie dehors deux couples allemands (pas ensemble).
A l’issue, je rentre dans mon chez moi provisoire pour publier mon texte de la veille puis ressors au premier soleil. Je passe à l’Office de Tourisme chercher une carte de la côte entre Saint-Quay et Saint-Brieuc et un plan de cette dernière. « Vous êtes de quel département? ». Quand j’en sors, j’enlève mon masque. Arrive à ce moment une voiture de la Police Municipale. Je pensais qu’il n’y en avait pas à Saint-Quay, d’où ma décontraction. Ces municipaux ne s’arrêtent pas pour me sermonner. Ils auraient beaucoup à faire. Presque personne ne se soumet à l’obligation affichée. Nous sommes si peu. On s’évite facilement.
Avant que les nuages ne reviennent, je prends un nouveau café en terrasse au Café de la Plage et dépasse la page mille de ma lecture. Cette plage est celle du Casino. Une grosse femme blonde en maillot fait des allers retours les pieds dans l’eau. Un homme fait de même sur le sable muni d’un détecteur de métaux.
*
Le début de ma réponse aux excuses présentées par David Bobée (elles sont sincères, il ne cherche pas à fuir sa responsabilité, comprend que je puisse être en colère, s’offre à m’aider en cas de plainte et me demande si je veux qu’il présente aussi ses excuses sur le réseau social) :
« Je prends acte de vos excuses et je les accepte. Je les attendais. Je trouvais qu’elles tardaient. J’en étais hier soir à contacter des gens de théâtre pour qu’ils me communiquent votre mail afin de vous les demander. »
Je lui parle ensuite de précédents destinataires de ce type de message qui ne me connaissait pas davantage que lui mais n’y ont pas cru, puis des conséquences qu’a eu pour moi sa publication.
« Alors oui, je vous demande de publier sur votre page FB un « statut » où vous expliquerez votre erreur (je ne vous demande pas d’excuses publiques) et les conséquences de ce genre d’action un peu rapide, pour ne pas dire irréfléchie (vous n’avez pas à donner mon nom, mais vous le pouvez si vous le souhaitez). Il n’est pas nécessaire que cela reste en ligne plus d’une journée, supprimez le après, je ne tiens pas à vous humilier. D’ailleurs je n’ai pas de colère contre vous. Cette histoire m’a juste consterné. »
Ma conclusion :
« Enfin sachez que je ne vais pas garder de rancune particulière contre vous. Je vous souhaite donc une bonne journée. »
Dans un second message, il m’écrit qu’il fera ce que je lui ai demandé et m’explique le retard par ses nombreuses activités du moment, compliquées par le Covid.
Le temps est aussi gris qu’hier mais sans vent, ce qui change tout. Je décide de longer la côte vers le nord par le Géherre jusqu’à Tréveneuc avec pour lieu d’arrivée un restaurant nommé Le Crapaud Rouge dont je n’ai pas réussi à savoir s’il est ouvert ou non.
Je pars presque en face de chez moi, du Centre des Congrès. Dès le début, ce chemin m’enchante tant par lui-même que par ce qu’il permet de voir. Toute une côte rocheuse et découpée qui est ce que je préfère de la Bretagne. Les photos que j’en fais ne rendent pas toute cette beauté. Marchant sur un sentier qui parfois n’a que la largeur d’un homme, je songe à mes deux amoureuses d’antan avec lesquelles j’ai fait de semblables balades bretonnes. Je songe aussi à celle avec qui j’ai passé une demi-journée à Paimpol et qui m’a précédé sur ce chemin. Tout ce que je vois elle l’a vu, s’émerveillant des mêmes endroits. Où s’est-elle réveillée ce matin.
A un moment le sentier s’est effondré dans la mer ce qui oblige à un détour par la rue des Embruns puis quand je le retrouve cela devient encore plus beau. Après la pointe de Romeur, je suis en vue de l’ilot de la grève de Saint-Marc (encore plus petit que l’île de la Comtesse). Cette grève sert de port d’échouage à de petits bateaux. Là, le chemin passe près de l’élégante chapelle Saint-Marc puis descend vers des viviers où hélas on ne peut manger sur place.
Il me faudrait encore faire le tour de la pointe du Bec de Vir pour atteindre mon but, mais cela monte suffisamment pour que je préfère prendre un raccourci moins éprouvant. Il me mène directement à la plage de Port Goret. Le Crapaud Rouge est là, spécialisé dans le rhum et la moule. Fermeture annuelle, lis-je sur sa porte.
Quoi faire sinon revenir sur mes pas. Il est dix heures. Je suis bon marcheur ce jour. Le chemin du retour me paraît plus facile que celui de l’aller. Quand même, j’ai hâte de voir le bout de la queue de Saint-Quay. Il apparait soudain sous forme de sémaphore. Ensuite cela va plus vite que je ne l’aurais cru. A onze heures, je m’installe à une table de bord de mer du Café de la Plage pour un café verre d’eau Léautaud.
C’est là que je déjeune, du fameux menu à dix-neuf euros, certain de ne pas être déçu. Aujourd’hui, c’est : tartare de lieu maquereau et chou-fleur, merlu au beurre pommes de terre et artichauts comme un risotto et brownie et fruits exotiques. Alors que les habitués mangent à l’intérieur, me tiennent compagnie dehors deux couples allemands (pas ensemble).
A l’issue, je rentre dans mon chez moi provisoire pour publier mon texte de la veille puis ressors au premier soleil. Je passe à l’Office de Tourisme chercher une carte de la côte entre Saint-Quay et Saint-Brieuc et un plan de cette dernière. « Vous êtes de quel département? ». Quand j’en sors, j’enlève mon masque. Arrive à ce moment une voiture de la Police Municipale. Je pensais qu’il n’y en avait pas à Saint-Quay, d’où ma décontraction. Ces municipaux ne s’arrêtent pas pour me sermonner. Ils auraient beaucoup à faire. Presque personne ne se soumet à l’obligation affichée. Nous sommes si peu. On s’évite facilement.
Avant que les nuages ne reviennent, je prends un nouveau café en terrasse au Café de la Plage et dépasse la page mille de ma lecture. Cette plage est celle du Casino. Une grosse femme blonde en maillot fait des allers retours les pieds dans l’eau. Un homme fait de même sur le sable muni d’un détecteur de métaux.
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Le début de ma réponse aux excuses présentées par David Bobée (elles sont sincères, il ne cherche pas à fuir sa responsabilité, comprend que je puisse être en colère, s’offre à m’aider en cas de plainte et me demande si je veux qu’il présente aussi ses excuses sur le réseau social) :
« Je prends acte de vos excuses et je les accepte. Je les attendais. Je trouvais qu’elles tardaient. J’en étais hier soir à contacter des gens de théâtre pour qu’ils me communiquent votre mail afin de vous les demander. »
Je lui parle ensuite de précédents destinataires de ce type de message qui ne me connaissait pas davantage que lui mais n’y ont pas cru, puis des conséquences qu’a eu pour moi sa publication.
« Alors oui, je vous demande de publier sur votre page FB un « statut » où vous expliquerez votre erreur (je ne vous demande pas d’excuses publiques) et les conséquences de ce genre d’action un peu rapide, pour ne pas dire irréfléchie (vous n’avez pas à donner mon nom, mais vous le pouvez si vous le souhaitez). Il n’est pas nécessaire que cela reste en ligne plus d’une journée, supprimez le après, je ne tiens pas à vous humilier. D’ailleurs je n’ai pas de colère contre vous. Cette histoire m’a juste consterné. »
Ma conclusion :
« Enfin sachez que je ne vais pas garder de rancune particulière contre vous. Je vous souhaite donc une bonne journée. »
Dans un second message, il m’écrit qu’il fera ce que je lui ai demandé et m’explique le retard par ses nombreuses activités du moment, compliquées par le Covid.
28 septembre 2020
Un ciel complètement gris et un vent froid contre lequel je n’ai pour me protéger qu’un pull, une écharpe et ma veste d’été, c’est ce que je découvre en quittant ce dimanche vers huit heures et quart le grand appartement de fille où je loge provisoirement à Saint-Quay.
Sitôt mon croissant et mon pain au chocolat achetés, je les mange en marchant sur le chemin côtier (direction le port comme hier) où je suis vite repéré par un goéland que j’envoie bouler.
A l’arrivée, je choisis L’Ecume pour mon premier café du matin, un bar tabac où je reste le moins longtemps possible car les gars du pays y bougent sans masque. Quand même on n’y sert pas au comptoir, ce qui n’est pas le cas partout.
Mon envie ce jour est de faire le tour des deux ports contigus de Saint-Quay : l’ancien, d’échouage, Le Portrieux, et le nouveau, en eau profonde, Port d’Armor, qui a forme d’énorme pince et n’a aucun charme. Le premier ne reçoit que des petits voiliers et est envahi par les algues vertes. Le second reçoit les gros voiliers d’un côté et les bateaux de pêche de l’autre.
De ce dernier, je n’explore que le quai de la Pierre Alien dans le prolongement des gros restaurants, là où sont amarrés les bateaux de pêche. L’entrée est interdite au public mais comme une barrière est entrouverte et que c’est dimanche donc personne je m’y glisse pour photographier les bateaux qui semblent abandonnés là par les pêcheurs.
Le temps est toujours désagréable quand je retourne du côté du Portrieux. L’épicerie Votre Marché est ouverte, ce qui me permet d’acheter dentifrice et thé vert puis je vais boire un deuxième café à la terrasse du Poisson Rouge, laquelle est suffisamment abritée pour que j’y reste à lire la Correspondance de Léautaud. J’approche de la millième page. C’est un bon compagnon de voyage. Entre sociopathes, on se comprend.
C’est à ce même endroit que je déjeune, commandant dès midi moins le quart six huitres et un verre de muscadet puis à midi, heure officielle d’ouverture de la crêperie, une petite bouteille de cidre, une complète puis une caramel beurre salée (toutes deux fort bonnes). J’apprécie le calme du patron de cette maison. J’aime sa neutralité, il se contente d’enregistrer les demandes, ne fait aucune proposition, aucun commentaire. Sa femme l’aide au service et, invisible à l’intérieur, un crêpier ou une crêpière opère avec rapidité.
Le temps s’améliorant je vais sur un banc jaune lire Léautaud tout en regardant l’eau monter dans le port d’échouage. Elle masque peu à peu les algues vertes sauf à la frontière avec la plage. Personne n’aurait idée de se baigner ici.
En revanche, en rentrant par le Géherre, j’aperçois deux jeunes nageuses qui affrontent les vagues, plage de la Comtesse, douze ans quinze ans, autant que je puisse en juger de la hauteur où je suis. La plus audacieuse est la plus jeune. La mer monte encore mais pas assez pour entourer l’île. Plus question d’être seul sur le sentier, des familles sont de sortie mais point trop. Je n’ose imaginer l’été ici.
*
Un dix onze ans sur le port : « Hey Grand-Pa, bien vrai, dès qu’on connaît la voile, on peut aller naviguer, y a pas besoin de permis. » J’aime beaucoup ce « bien vrai ».
*
Dans le quartier du Portrieux : un troquet nommé Le Bon Dieu Sans Confession. Il n’ouvre qu’à dix heures, clientèle locale peu soucieuse du Covid.
*
Sur le sentier côtier : une maison nommée Belle Harbour (humour quinocéen).
*
Saint-Quay s’est toujours appelé Saint-Quay, ne devenant officiellement Saint-Quay-Portrieux qu’en mil neuf cent vingt et un (pour ne plus être confondu avec Saint-Quay-Perros).
Sitôt mon croissant et mon pain au chocolat achetés, je les mange en marchant sur le chemin côtier (direction le port comme hier) où je suis vite repéré par un goéland que j’envoie bouler.
A l’arrivée, je choisis L’Ecume pour mon premier café du matin, un bar tabac où je reste le moins longtemps possible car les gars du pays y bougent sans masque. Quand même on n’y sert pas au comptoir, ce qui n’est pas le cas partout.
Mon envie ce jour est de faire le tour des deux ports contigus de Saint-Quay : l’ancien, d’échouage, Le Portrieux, et le nouveau, en eau profonde, Port d’Armor, qui a forme d’énorme pince et n’a aucun charme. Le premier ne reçoit que des petits voiliers et est envahi par les algues vertes. Le second reçoit les gros voiliers d’un côté et les bateaux de pêche de l’autre.
De ce dernier, je n’explore que le quai de la Pierre Alien dans le prolongement des gros restaurants, là où sont amarrés les bateaux de pêche. L’entrée est interdite au public mais comme une barrière est entrouverte et que c’est dimanche donc personne je m’y glisse pour photographier les bateaux qui semblent abandonnés là par les pêcheurs.
Le temps est toujours désagréable quand je retourne du côté du Portrieux. L’épicerie Votre Marché est ouverte, ce qui me permet d’acheter dentifrice et thé vert puis je vais boire un deuxième café à la terrasse du Poisson Rouge, laquelle est suffisamment abritée pour que j’y reste à lire la Correspondance de Léautaud. J’approche de la millième page. C’est un bon compagnon de voyage. Entre sociopathes, on se comprend.
C’est à ce même endroit que je déjeune, commandant dès midi moins le quart six huitres et un verre de muscadet puis à midi, heure officielle d’ouverture de la crêperie, une petite bouteille de cidre, une complète puis une caramel beurre salée (toutes deux fort bonnes). J’apprécie le calme du patron de cette maison. J’aime sa neutralité, il se contente d’enregistrer les demandes, ne fait aucune proposition, aucun commentaire. Sa femme l’aide au service et, invisible à l’intérieur, un crêpier ou une crêpière opère avec rapidité.
Le temps s’améliorant je vais sur un banc jaune lire Léautaud tout en regardant l’eau monter dans le port d’échouage. Elle masque peu à peu les algues vertes sauf à la frontière avec la plage. Personne n’aurait idée de se baigner ici.
En revanche, en rentrant par le Géherre, j’aperçois deux jeunes nageuses qui affrontent les vagues, plage de la Comtesse, douze ans quinze ans, autant que je puisse en juger de la hauteur où je suis. La plus audacieuse est la plus jeune. La mer monte encore mais pas assez pour entourer l’île. Plus question d’être seul sur le sentier, des familles sont de sortie mais point trop. Je n’ose imaginer l’été ici.
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Un dix onze ans sur le port : « Hey Grand-Pa, bien vrai, dès qu’on connaît la voile, on peut aller naviguer, y a pas besoin de permis. » J’aime beaucoup ce « bien vrai ».
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Dans le quartier du Portrieux : un troquet nommé Le Bon Dieu Sans Confession. Il n’ouvre qu’à dix heures, clientèle locale peu soucieuse du Covid.
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Sur le sentier côtier : une maison nommée Belle Harbour (humour quinocéen).
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Saint-Quay s’est toujours appelé Saint-Quay, ne devenant officiellement Saint-Quay-Portrieux qu’en mil neuf cent vingt et un (pour ne plus être confondu avec Saint-Quay-Perros).
27 septembre 2020
Quand je sors ce samedi matin après une première bonne nuit à Saint-Quay-Portrieux, qu’il convient d’appeler Saint-Quay, le temps est encore tourmenté. Je me rends au Fournil du Casino, en ressors avec croissant et pain au chocolat puis entre au Péhemmu Le Mustang afin d’y boire un café en les mangeant. Deux constatations : les viennoiseries d’ici sont loin de valoir celles du Fournil du Martray à Paimpol, la clientèle et le patron au masque sous le menton du Mustang me déplaisent suffisamment pour que je n’y remette pas le pied.
Le pied, je le mets sur le Géherre Trente-Quatre à hauteur du Kasino avec pour objectif de rejoindre le port. En chemin, je fais quelques photos, notamment de la piscine d’eau de mer et une du sémaphore avant que je découvre entre les avertissements « Défense d’entrer » un « Défense de photographier ».
Profitant de la marée basse, je traverse l’une des plages afin de visiter l’île de la Comtesse. Sur cet ilot dont je fais le tour ne sont présents que quelques murs en ruine, mais il permet de voir encore plus au large la mer toujours remuante.
De retour sur la plage, je remonte l’imposant escalier qui se tient exactement sous une ébouriffante construction que l’ami d’Orléans, qui a séjourné ici cet été, nomme une turquerie. Il s’agit aujourd’hui de l’Hôtel Ker Moor.
Arrivé au port sans avoir croisé personne, je trouve Le Poisson Rouge ouvert et au soleil. J’y bois un café en lisant Léautaud et songe à y déjeuner mais comme il n’est pas possible de réserver une table, je vais voir ce qu’affichent les gros restaurants qui en saison doivent être remplis de monde. Celui nommé Les Plaisanciers propose son menu du jour le samedi et a de nombreuses tables à l’extérieur, certes mouillées mais avec un peu d’insistance, j’obtiens de la patronne qu’elle me laisse déjeuner dehors et envoie une serveuse éponger.
Il fait bon, bien que venteux à la terrasse des Plaisanciers. Pour l’entrée, il faut aller se servir à un buffet où tout le monde utilise les mêmes couverts sans se désinfecter les mains. On a le choix entre une petite ou une grande assiette. J’emplis la mienne de bulots, de bouquets et de mayonnaise maison. Dès que je commence à manger deux goélands viennent mendier à mes pieds, puis des moineaux s’en mêlent dont l’un fonce directement sur mon pain. Pendant ce temps, des arrivants inspirés par mon mauvais exemple demandent à s’installer à l’extérieur. Pour suivre (comme on dit dans le métier), c’est un poulet pommes écrasées assez industriel et une quelconque mousse au chocolat. Avec deux petites bouteilles de cidre et le café (seulement à un euro trente), j’atteins les vingt euros.
Après avoir lu un peu sur l’un des bancs du port, je rentre par les rues intérieures de Saint-Quay, passant par le derrière de l’Hôtel Ker Moor. Le premier prix pour une chambre avec vue sur la mer et l’île de la Comtesse est de cent dix euros, ce qui est à la fois beaucoup et pas trop.
*
Au tournant du dix-neuvième siècle, l’île appartenait à la comtesse Tranchant des Thuilais qui a laissé le souvenir d’une femme irascible et vindicative. Elle devint ensuite la propriété du parfumeur Rimmel, puis d’un qualifié d’original qui y fit transporter de la terre végétale et y aménagea des murs pour en faire un jardin botanique. Ensuite à l’abandon, la ville de Saint-Quay la racheta.
*
Autre comtesse, celle de Calan, et son époux, haut fonctionnaire de France au Maroc. Ce sont eux qui, séduits par les lieux, firent construire face à l’île, une demeure où ils exprimèrent leur goût pour l’architecture mauresque. Ce qui est devenu l’Hôtel Ker Moor.
*
Moineaux et goélands, ces oiseaux n’ont aucune dignité, on dirait des humains.
*
Par exemple David Bobée, Directeur du Centre Dramatique National de Normandie-Rouen, qui a retiré comme un péteux sa publication diffamatoire sans me faire la moindre excuse. Dans l’un de ses commentaires, il me reprochait de ne pas apprécier son travail. J’ai dû voir quelques-unes de ses mises en scène, à l’Opéra de Rouen peut-être, je ne me souviens pas d’en avoir dit du mal. En revanche, j’ai écrit et je maintiens que je n’aime pas sa programmation dans ses différents théâtres. De même qu’on ne fait pas de bonne littérature avec des bons sentiments, on ne fait pas de bon théâtre avec des bons sentiments, on fait des spectacles pour cours d’éducation civique.
Le pied, je le mets sur le Géherre Trente-Quatre à hauteur du Kasino avec pour objectif de rejoindre le port. En chemin, je fais quelques photos, notamment de la piscine d’eau de mer et une du sémaphore avant que je découvre entre les avertissements « Défense d’entrer » un « Défense de photographier ».
Profitant de la marée basse, je traverse l’une des plages afin de visiter l’île de la Comtesse. Sur cet ilot dont je fais le tour ne sont présents que quelques murs en ruine, mais il permet de voir encore plus au large la mer toujours remuante.
De retour sur la plage, je remonte l’imposant escalier qui se tient exactement sous une ébouriffante construction que l’ami d’Orléans, qui a séjourné ici cet été, nomme une turquerie. Il s’agit aujourd’hui de l’Hôtel Ker Moor.
Arrivé au port sans avoir croisé personne, je trouve Le Poisson Rouge ouvert et au soleil. J’y bois un café en lisant Léautaud et songe à y déjeuner mais comme il n’est pas possible de réserver une table, je vais voir ce qu’affichent les gros restaurants qui en saison doivent être remplis de monde. Celui nommé Les Plaisanciers propose son menu du jour le samedi et a de nombreuses tables à l’extérieur, certes mouillées mais avec un peu d’insistance, j’obtiens de la patronne qu’elle me laisse déjeuner dehors et envoie une serveuse éponger.
Il fait bon, bien que venteux à la terrasse des Plaisanciers. Pour l’entrée, il faut aller se servir à un buffet où tout le monde utilise les mêmes couverts sans se désinfecter les mains. On a le choix entre une petite ou une grande assiette. J’emplis la mienne de bulots, de bouquets et de mayonnaise maison. Dès que je commence à manger deux goélands viennent mendier à mes pieds, puis des moineaux s’en mêlent dont l’un fonce directement sur mon pain. Pendant ce temps, des arrivants inspirés par mon mauvais exemple demandent à s’installer à l’extérieur. Pour suivre (comme on dit dans le métier), c’est un poulet pommes écrasées assez industriel et une quelconque mousse au chocolat. Avec deux petites bouteilles de cidre et le café (seulement à un euro trente), j’atteins les vingt euros.
Après avoir lu un peu sur l’un des bancs du port, je rentre par les rues intérieures de Saint-Quay, passant par le derrière de l’Hôtel Ker Moor. Le premier prix pour une chambre avec vue sur la mer et l’île de la Comtesse est de cent dix euros, ce qui est à la fois beaucoup et pas trop.
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Au tournant du dix-neuvième siècle, l’île appartenait à la comtesse Tranchant des Thuilais qui a laissé le souvenir d’une femme irascible et vindicative. Elle devint ensuite la propriété du parfumeur Rimmel, puis d’un qualifié d’original qui y fit transporter de la terre végétale et y aménagea des murs pour en faire un jardin botanique. Ensuite à l’abandon, la ville de Saint-Quay la racheta.
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Autre comtesse, celle de Calan, et son époux, haut fonctionnaire de France au Maroc. Ce sont eux qui, séduits par les lieux, firent construire face à l’île, une demeure où ils exprimèrent leur goût pour l’architecture mauresque. Ce qui est devenu l’Hôtel Ker Moor.
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Moineaux et goélands, ces oiseaux n’ont aucune dignité, on dirait des humains.
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Par exemple David Bobée, Directeur du Centre Dramatique National de Normandie-Rouen, qui a retiré comme un péteux sa publication diffamatoire sans me faire la moindre excuse. Dans l’un de ses commentaires, il me reprochait de ne pas apprécier son travail. J’ai dû voir quelques-unes de ses mises en scène, à l’Opéra de Rouen peut-être, je ne me souviens pas d’en avoir dit du mal. En revanche, j’ai écrit et je maintiens que je n’aime pas sa programmation dans ses différents théâtres. De même qu’on ne fait pas de bonne littérature avec des bons sentiments, on ne fait pas de bon théâtre avec des bons sentiments, on fait des spectacles pour cours d’éducation civique.
26 septembre 2020
J’ai vraiment fait la connaissance de Marie-Andrée Malleville, dite MAM, quand elle tenait une galerie d’art contemporain rue Damiette. En ce temps-là, elle me disait quand j’écrivais sur ses expos que je n’étais pas assez méchant, comme si c’était ma raison d’être de faire le mauvais avec ceux dont je parlais des activités publiques. Plus tard, je l’ai davantage fréquentée lorsqu’elle était la Reine des Abeilles à l’Ubi, lieu artistique mutualisé où j’allais pour prendre des cafés et écrire. Toujours, j’ai su qu’elle se fichait pas mal de ces écritures, parfois elle me trouvait marrant, ne s’attachant qu’à l’aspect superficiel des choses, n’étant attentive que lorsque ça parlait d’elle ou de son essaim. Grâce à sa réaction quand David Bobée a rendu public un texte crapuleux signé d’un autre par mon nom et à l’échange entre elle et moi qui a suivi sur la messagerie du réseau social Effe Bé, je sais exactement ce que pense de moi cette nouvelle Maire Adjointe à la Culture de la Ville de Rouen.
MAM : « Non tu n’es pas raciste ni homophobe mais on peut t’imaginer pousser l’aigreur jusque-là...désolée de penser cela. Tu as le potentiel à pousser le bouchon trop loin. J’y ai cru. Et les autres aussi. »
Moi-même : « Et qu'est-ce que vous faites maintenant pour rattraper le coup? »
MAM : « Je n’ai pas à rattraper le coup Michel! tu te positionnes depuis des années comme un provocateur et quelqu’un qui ne craint pas d'éloigner les uns et les autres sans songer à ce que cela provoque sur eux et avant tout, à l'image que ça construit de ta personne. Quelqu’un s'en joue manifestement. Et un vpn ce n’est pas compliqué à passer au-delà, la police a un service spécialisé. » (allusion au moyen qu’utilise l’usurpateur)
Moi-même : « La plainte déposée est aux oubliettes. Je te remercie de ne pas te sentir concernée quand Bobée jette mon nom à la vindicte populaire, ses milliers d'ami(e)s me prennent désormais pour une ordure. »
MAM : « Tu t’en fous non, que les gens te détestent? Je suis honnête Michel, ce qui se passe ici, tu en as semé les graines. Mais sois assuré que chaque personne concernée saura que tu n’es ni raciste ni homophobe, juste un brun sociopathe. D’où la méprise. Et sinon, trouver l’identité de la personne qui te pourrit la vie, ça doit pas être bien dur. »
Voilà. On notera le « ce qui se passe ici, tu en as semé les graines. » Toutes proportions gardées, c’est ce qu’on entend dire certains des journalistes et caricaturistes de Charlie Hebdo.
*
Un brun sociopathe, effectivement je suis brun. Enfin, de moins en moins. Disons maintenant un gris sociopathe.
MAM : « Non tu n’es pas raciste ni homophobe mais on peut t’imaginer pousser l’aigreur jusque-là...désolée de penser cela. Tu as le potentiel à pousser le bouchon trop loin. J’y ai cru. Et les autres aussi. »
Moi-même : « Et qu'est-ce que vous faites maintenant pour rattraper le coup? »
MAM : « Je n’ai pas à rattraper le coup Michel! tu te positionnes depuis des années comme un provocateur et quelqu’un qui ne craint pas d'éloigner les uns et les autres sans songer à ce que cela provoque sur eux et avant tout, à l'image que ça construit de ta personne. Quelqu’un s'en joue manifestement. Et un vpn ce n’est pas compliqué à passer au-delà, la police a un service spécialisé. » (allusion au moyen qu’utilise l’usurpateur)
Moi-même : « La plainte déposée est aux oubliettes. Je te remercie de ne pas te sentir concernée quand Bobée jette mon nom à la vindicte populaire, ses milliers d'ami(e)s me prennent désormais pour une ordure. »
MAM : « Tu t’en fous non, que les gens te détestent? Je suis honnête Michel, ce qui se passe ici, tu en as semé les graines. Mais sois assuré que chaque personne concernée saura que tu n’es ni raciste ni homophobe, juste un brun sociopathe. D’où la méprise. Et sinon, trouver l’identité de la personne qui te pourrit la vie, ça doit pas être bien dur. »
Voilà. On notera le « ce qui se passe ici, tu en as semé les graines. » Toutes proportions gardées, c’est ce qu’on entend dire certains des journalistes et caricaturistes de Charlie Hebdo.
*
Un brun sociopathe, effectivement je suis brun. Enfin, de moins en moins. Disons maintenant un gris sociopathe.
26 septembre 2020
Une dernière nuit agitée dans mon studio paimpolais de la rue Eugène Hélary, rafales de vent, violentes averses, lesquelles me réveillent plusieurs fois. Je me demande ce que subit celle qui espère marcher jusqu’à Brest, dont la tente, m’a-t-elle dit, est loin d’être étanche.
Au lever du jour ce n’est guère mieux, impossible de tenir un parapluie ouvert et je n’ai aucun vêtement de pluie. Cela me conduit à filer dès que je repère une éclaircie, sans pouvoir dire au revoir à mon sympathique logeur.
Je réussis à atteindre la Gare sans être rattrapé par une averse. Etant bien en avance sur le car BreizhGo Un que je dois prendre à neuf heures quarante, je l’attends au café d’en face, Le Nelson, où un habitué de comptoir a une discussion de circonstance avec le patron : « Déjà l’automne et bientôt la fin du mois ».
Nous sommes cinq au départ dans le car qui va à Saint-Brieuc. Il longe la côte mais trop en retrait pour que l’on puisse voir la mer. Elle apparait de nouveau où je descends en compagnie de deux autres, à l’arrêt Kasino de Saint-Quay-Portrieux.
Mon nouveau logement Air Bibi n’est qu’à cent mètres, mais celle qui me le loue travaille. Elle fera cependant le nécessaire pour m’en donner les clés à midi quarante-cinq au lieu de dix-sept heures.
Je traverse la rue et entre au Kasino pour me diriger du côté bar restaurant. J’y prends un café avec vue sur la plage du Casino. Consultant le ticket, je pense un instant qu’il va me coûter dix euros trente, mais il s’agit de l’heure. Son prix n’est que d’un euro soixante. Confortablement assis dans un fauteuil, regardant rouler les vagues, écoutant la radio interne (on y entend Bashung chanter Gaby et des messages destinés à vous attirer devant les machines à sous), je lis Léautaud qui à soixante-dix ans, pendant l’Occupation, vient de se faire virer du Mercure de France.
A l’heure dite, devant la résidence où j’attends, se gare une petite voiture blanche d’où sort la jeune femme que j’espérais. Nous montons au deuxième étage et faisons rapidement le tour de son appartement, grand et confortable, d’où l’on verrait la mer si, de l’autre côté de la rue, un autre immeuble, beaucoup plus haut et forcément plus ancien, ne la cachait.
Elle repartie, je ressors à la recherche d’un restaurant qu’avec l’aide d’un jeune homme je trouve à proximité. Il a nom Café de la Plage, un peu chic un peu bobo. Impossible ce vendredi de manger en terrasse, s’il ne pleut plus il fait froid, mais les tables à l’intérieur son peu nombreuses et éloignées les unes des autres. L’un des deux patrons m’en donne une pour quatre avec vue sur les flots énervés. Le menu à dix-neuf euros est à choix unique : variations de carottes sur saumon gravelax, beignets d’églefin patate douce et sauce curry, ananas rôti. Tout est vraiment bien cuisiné.
Il fait un peu meilleur quand je sors. Je me mets à la recherche du Crédit Agricole et d’une pharmacie. Le premier est vite trouvé avec l’aide du hasard. La seconde l’est grâce à un parcours fléché qui me mène près du port.
Je vais voir ce dernier ensuite et m’arrête à une terrasse de bord de mer abritée du vent et ensoleillée, celle du où je prends le café (un euro trente !) puis lis un peu Léautaud.
Pour rentrer j’emprunte le sentier de Grande Randonnée Trente-Quatre, lequel offre bien des points de vue remarquables.
*
Ici aussi le masque est obligatoire, mais on semble s’en affranchir plus facilement qu’à Paimpol
*
Merveilleuse machine à laver de ce nouvel appartement qui lorsqu’elle en a terminé joue La Truite de Schubert.
*
Une autre pour laquelle j’ai l’occasion de m’inquiéter ce vendredi, celle qui travaille à Paris près de la place de la Bastille quand j’apprends qu’un nouvel attentat a eu lieu rue Nicolas Appert. Je lui envoie un message, elle me raconte sa journée stressante ponctuée de passages d’ambulance sirènes hurlantes.
*
Ce jour, je suis victime d'une usurpation d'identité dans un mail envoyé à David Bobée, Directeur du Centre Dramatique National de Normandie-Rouen. D’autres avant lui ont reçu ce genre de délire raciste et homophobe signé de mon nom. A la différence de David Bobée, ils ont été assez malins pour s’interroger et m’interroger : « C’est bien vous qui m’avez envoyé ça ? » Lui a publié le texte reçu sur sa page Effe Bé jetant mon nom à la vindicte populaire. Il a beaucoup d’ami(e)s, d’où un déversement d’insultes et de menaces, l’un propose de m’inviter à une soirée Covid.
La plupart de ces agresseurs me sont inconnus mais je trouve là Claude Taleb, ancien élu écologiste, et pire deux que je connais personnellement Marie-Andrée Malleville, désormais Maire Adjointe à la Culture de la Ville de Rouen et Arnaud Caquelard qui écrit « La tristesse et l'aigreur font de gros dégâts. Comment lutter contre..? ».
Au lever du jour ce n’est guère mieux, impossible de tenir un parapluie ouvert et je n’ai aucun vêtement de pluie. Cela me conduit à filer dès que je repère une éclaircie, sans pouvoir dire au revoir à mon sympathique logeur.
Je réussis à atteindre la Gare sans être rattrapé par une averse. Etant bien en avance sur le car BreizhGo Un que je dois prendre à neuf heures quarante, je l’attends au café d’en face, Le Nelson, où un habitué de comptoir a une discussion de circonstance avec le patron : « Déjà l’automne et bientôt la fin du mois ».
Nous sommes cinq au départ dans le car qui va à Saint-Brieuc. Il longe la côte mais trop en retrait pour que l’on puisse voir la mer. Elle apparait de nouveau où je descends en compagnie de deux autres, à l’arrêt Kasino de Saint-Quay-Portrieux.
Mon nouveau logement Air Bibi n’est qu’à cent mètres, mais celle qui me le loue travaille. Elle fera cependant le nécessaire pour m’en donner les clés à midi quarante-cinq au lieu de dix-sept heures.
Je traverse la rue et entre au Kasino pour me diriger du côté bar restaurant. J’y prends un café avec vue sur la plage du Casino. Consultant le ticket, je pense un instant qu’il va me coûter dix euros trente, mais il s’agit de l’heure. Son prix n’est que d’un euro soixante. Confortablement assis dans un fauteuil, regardant rouler les vagues, écoutant la radio interne (on y entend Bashung chanter Gaby et des messages destinés à vous attirer devant les machines à sous), je lis Léautaud qui à soixante-dix ans, pendant l’Occupation, vient de se faire virer du Mercure de France.
A l’heure dite, devant la résidence où j’attends, se gare une petite voiture blanche d’où sort la jeune femme que j’espérais. Nous montons au deuxième étage et faisons rapidement le tour de son appartement, grand et confortable, d’où l’on verrait la mer si, de l’autre côté de la rue, un autre immeuble, beaucoup plus haut et forcément plus ancien, ne la cachait.
Elle repartie, je ressors à la recherche d’un restaurant qu’avec l’aide d’un jeune homme je trouve à proximité. Il a nom Café de la Plage, un peu chic un peu bobo. Impossible ce vendredi de manger en terrasse, s’il ne pleut plus il fait froid, mais les tables à l’intérieur son peu nombreuses et éloignées les unes des autres. L’un des deux patrons m’en donne une pour quatre avec vue sur les flots énervés. Le menu à dix-neuf euros est à choix unique : variations de carottes sur saumon gravelax, beignets d’églefin patate douce et sauce curry, ananas rôti. Tout est vraiment bien cuisiné.
Il fait un peu meilleur quand je sors. Je me mets à la recherche du Crédit Agricole et d’une pharmacie. Le premier est vite trouvé avec l’aide du hasard. La seconde l’est grâce à un parcours fléché qui me mène près du port.
Je vais voir ce dernier ensuite et m’arrête à une terrasse de bord de mer abritée du vent et ensoleillée, celle du où je prends le café (un euro trente !) puis lis un peu Léautaud.
Pour rentrer j’emprunte le sentier de Grande Randonnée Trente-Quatre, lequel offre bien des points de vue remarquables.
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Ici aussi le masque est obligatoire, mais on semble s’en affranchir plus facilement qu’à Paimpol
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Merveilleuse machine à laver de ce nouvel appartement qui lorsqu’elle en a terminé joue La Truite de Schubert.
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Une autre pour laquelle j’ai l’occasion de m’inquiéter ce vendredi, celle qui travaille à Paris près de la place de la Bastille quand j’apprends qu’un nouvel attentat a eu lieu rue Nicolas Appert. Je lui envoie un message, elle me raconte sa journée stressante ponctuée de passages d’ambulance sirènes hurlantes.
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Ce jour, je suis victime d'une usurpation d'identité dans un mail envoyé à David Bobée, Directeur du Centre Dramatique National de Normandie-Rouen. D’autres avant lui ont reçu ce genre de délire raciste et homophobe signé de mon nom. A la différence de David Bobée, ils ont été assez malins pour s’interroger et m’interroger : « C’est bien vous qui m’avez envoyé ça ? » Lui a publié le texte reçu sur sa page Effe Bé jetant mon nom à la vindicte populaire. Il a beaucoup d’ami(e)s, d’où un déversement d’insultes et de menaces, l’un propose de m’inviter à une soirée Covid.
La plupart de ces agresseurs me sont inconnus mais je trouve là Claude Taleb, ancien élu écologiste, et pire deux que je connais personnellement Marie-Andrée Malleville, désormais Maire Adjointe à la Culture de la Ville de Rouen et Arnaud Caquelard qui écrit « La tristesse et l'aigreur font de gros dégâts. Comment lutter contre..? ».
25 septembre 2020
Au lever du jour, ce jeudi, c’est la fraîcheur qui me surprend. Pas question après le petit-déjeuner de m’attarder à L’Epoque pour lire. Cependant il ne pleut plus. Aussi fais-je un dernier tour de port profitant des écluses fermées de la marée basse pour passer directement du quai du Platier au quai Pierre Loti. Un peu plus loin est un cimetière de bateaux. Ces ruines maritimes m’enchantent.
Pendant ce temps, le soleil s’impose. Cela me permet de retourner m’asseoir à la terrasse de L’Epoque. « Ça roule », me dit la serveuse à tic verbal quand je lui commande un café verre d’eau. J’ouvre la Correspondance de Léautaud et je reste là tant qu’il fait bon, c’est à dire jusqu’à ce que le vent commence à souffler.
Rentré à mon logis provisoire, je constate que dans les villes en alerte maximale, on se révolte, avec un discours argumenté du côté du Maire Adjoint à Marseille, avec une formule expéditive du côté de la Maire à Aix-en-Provence : « Moi je dis : ferme-la, Véran ! ».
Le vent souffle encore lorsque je choisis pour mon dernier déjeuner paimpolais la même terrasse que pour le premier, celle du Bistrot Gourmand. Cette fois à l’une des tables sous l’arcade. Je n’y suis pas dérangé. La serveuse me trouve courageux. Il est vrai qu’il caille. Bretagne, il va falloir te ressaisir.
En mangeant mon fish and chips sauce tartare, je me demande comment se débrouille celle qui marche en solitaire. « Je ne m’entêterai pas si le temps devient trop mauvais », m’a-t-elle dit. Je suppose qu’il lui faudra plus de deux jours de pluie, de vent et de froid avant de se décider à rentrer, par covoiturage ou autostop, à Cherrueix où l’attend son camion aménagé.
En dessert, je commande la crêpe à la frangipane que j’avais beaucoup aimée lors de mon deuxième repas ici. Elle me déçoit. Il en est de cette crêpe comme de beaucoup d’autres choses : la seconde fois, c’est moins bien que la première.
*
Une saison peut en cacher une autre. C’est bien la saison de la moule de bouchot. Si elle n’est plus servie au Bistrot Gourmand, c’est que ce n’est plus la saison (des vacances d’été).
*
Une femme à L’Epoque : « Je ne sais pas si ça vaut le coup de travailler quand on voit tout ce qui se passe. »
Pendant ce temps, le soleil s’impose. Cela me permet de retourner m’asseoir à la terrasse de L’Epoque. « Ça roule », me dit la serveuse à tic verbal quand je lui commande un café verre d’eau. J’ouvre la Correspondance de Léautaud et je reste là tant qu’il fait bon, c’est à dire jusqu’à ce que le vent commence à souffler.
Rentré à mon logis provisoire, je constate que dans les villes en alerte maximale, on se révolte, avec un discours argumenté du côté du Maire Adjoint à Marseille, avec une formule expéditive du côté de la Maire à Aix-en-Provence : « Moi je dis : ferme-la, Véran ! ».
Le vent souffle encore lorsque je choisis pour mon dernier déjeuner paimpolais la même terrasse que pour le premier, celle du Bistrot Gourmand. Cette fois à l’une des tables sous l’arcade. Je n’y suis pas dérangé. La serveuse me trouve courageux. Il est vrai qu’il caille. Bretagne, il va falloir te ressaisir.
En mangeant mon fish and chips sauce tartare, je me demande comment se débrouille celle qui marche en solitaire. « Je ne m’entêterai pas si le temps devient trop mauvais », m’a-t-elle dit. Je suppose qu’il lui faudra plus de deux jours de pluie, de vent et de froid avant de se décider à rentrer, par covoiturage ou autostop, à Cherrueix où l’attend son camion aménagé.
En dessert, je commande la crêpe à la frangipane que j’avais beaucoup aimée lors de mon deuxième repas ici. Elle me déçoit. Il en est de cette crêpe comme de beaucoup d’autres choses : la seconde fois, c’est moins bien que la première.
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Une saison peut en cacher une autre. C’est bien la saison de la moule de bouchot. Si elle n’est plus servie au Bistrot Gourmand, c’est que ce n’est plus la saison (des vacances d’été).
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Une femme à L’Epoque : « Je ne sais pas si ça vaut le coup de travailler quand on voit tout ce qui se passe. »
24 septembre 2020
Ce pain géant qui trône chaque matin près de la caisse du Fournil du Martray, je demande enfin à la boulangère, en achetant croissant et pain au chocolat, comment il s’appelle : un pain d’épeautre. « Il est vendu à la coupe », me dit-elle.
A L’Epoque, après avoir pris mon petit-déjeuner, je lis la Correspondance de Léautaud près de deux photographes. L’un d’eux est celui qui opérait sous les deux arbres magnifiques lors de mon premier passage à la pointe de Guilden et dont le sujet était une famille qui s’efforçait de donner la meilleure image d’elle-même.
Je ne pense pas qu’il m’ait reconnu. Il discute avec son semblable et concurrent de choses du métier. L’autre vante un spot près de chez lui où il fait chaque jour une photographie du même paysage. Il espère la neige pour cet hiver afin de conclure et d’en faire un livre. Ce sont gens à prétentions artistiques qui pour vivre ont chaque samedi les mariages.
Soudain, ce qui devait arriver arrive : une drache s’abat sur le port. J’ai une pensée pour celle dont j’ai fait la connaissance sous les deux arbres magnifiques lors de mon second passage à la pointe de Guilden et qui marche le long de la mer avec son lourd sac à dos et son gros bâton, espérant qu’elle trouve un abri. Cette pluie finit par cesser mais désormais il fait frais.
A midi je renonce à déjeuner sur le port, préférant être en retrait sur la place du Martray où je prends place à la terrasse un peu abritée du vent de la crêperie Morel. Je délaisse sa spécialité pour son plat du jour : un filet mignon sauce au cidre avec des frites. Je l’accompagne de cidre et le fais suivre d’un gâteau au chocolat.
Le café, comme à l’accoutumée, je le prends à L’Epoque où je poursuis la lecture de Léautaud. Vers quatorze heures trente, c’est le retour de l’averse. Paimpol sous la pluie est presque désert. Le masque n’en demeure pas moins obligatoire.
*
Le seul endroit où j’entends parler breton, c’est à la télévision régionale, aux informations du soir. L’un des sujets est en cette langue, sous-titré en français. Le reste est en français. L’autre soir, j’y ai revu (pas vu depuis longtemps) Gilles Servat, soixante-quinze ans, terriblement vieilli, le visage amaigri, interprétant une nouvelle chanson assez insignifiante.
*
Et pendant ce temps, là d’où je viens, une conférence municipale à l’intitulé bouffon : « Faire de Rouen une Capitale Européenne de la culture résiliente », Rouen en zone « alerte renforcée » annonce le Ministre de la Santé, en attendant l’« alerte maximale », en attendant un nouvel emprisonnement de ses habitant(e)s.
A L’Epoque, après avoir pris mon petit-déjeuner, je lis la Correspondance de Léautaud près de deux photographes. L’un d’eux est celui qui opérait sous les deux arbres magnifiques lors de mon premier passage à la pointe de Guilden et dont le sujet était une famille qui s’efforçait de donner la meilleure image d’elle-même.
Je ne pense pas qu’il m’ait reconnu. Il discute avec son semblable et concurrent de choses du métier. L’autre vante un spot près de chez lui où il fait chaque jour une photographie du même paysage. Il espère la neige pour cet hiver afin de conclure et d’en faire un livre. Ce sont gens à prétentions artistiques qui pour vivre ont chaque samedi les mariages.
Soudain, ce qui devait arriver arrive : une drache s’abat sur le port. J’ai une pensée pour celle dont j’ai fait la connaissance sous les deux arbres magnifiques lors de mon second passage à la pointe de Guilden et qui marche le long de la mer avec son lourd sac à dos et son gros bâton, espérant qu’elle trouve un abri. Cette pluie finit par cesser mais désormais il fait frais.
A midi je renonce à déjeuner sur le port, préférant être en retrait sur la place du Martray où je prends place à la terrasse un peu abritée du vent de la crêperie Morel. Je délaisse sa spécialité pour son plat du jour : un filet mignon sauce au cidre avec des frites. Je l’accompagne de cidre et le fais suivre d’un gâteau au chocolat.
Le café, comme à l’accoutumée, je le prends à L’Epoque où je poursuis la lecture de Léautaud. Vers quatorze heures trente, c’est le retour de l’averse. Paimpol sous la pluie est presque désert. Le masque n’en demeure pas moins obligatoire.
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Le seul endroit où j’entends parler breton, c’est à la télévision régionale, aux informations du soir. L’un des sujets est en cette langue, sous-titré en français. Le reste est en français. L’autre soir, j’y ai revu (pas vu depuis longtemps) Gilles Servat, soixante-quinze ans, terriblement vieilli, le visage amaigri, interprétant une nouvelle chanson assez insignifiante.
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Et pendant ce temps, là d’où je viens, une conférence municipale à l’intitulé bouffon : « Faire de Rouen une Capitale Européenne de la culture résiliente », Rouen en zone « alerte renforcée » annonce le Ministre de la Santé, en attendant l’« alerte maximale », en attendant un nouvel emprisonnement de ses habitant(e)s.
23 septembre 2020
De la pluie, du vent et une baisse des températures, telles sont les menaces de la météo pour les jours à venir. Cela m’amène, après mon habituel petit-déjeuner à L’Epoque, à faire de nouveau le tour de la pointe de Guilben, cette fois dans l’autre sens, départ côté sud retour côté nord.
Je suis seul sur le chemin côtier de l’aller pour admirer les flots sur laquelle la brume se lève lentement. Peu avant l’extrême pointe, là où une sorte d’isthme permet de voir la mer des deux côtés, là où sont les deux arbres magnifiques, j’ai l’attention attirée par un bruit de plastique. Je pense à celui de la voile d’un bateau qui se trouverait à proximité mais suis détrompé quand je découvre sous l’un des arbres, en train de plier une toile de tente, une jeune femme qui me semble aussi fraîche que si elle sortait de sa salle de bain.
-Vous avez dormi là, ce devait être bien, lui dis-je
-Oui le calme absolu, à part les oiseaux ce matin qui m’ont réveillée.
Je souhaite une bonne journée à cette aventurière qui n’en a pas l’air et poursuis jusqu’à l’extrême pointe. Cela m’est l’occasion de découvrir sur la butte une petite maison que je n’avais pas vue l’autre fois. Je la photographie puis redescends vers l’isthme. La jolie campeuse a déjà disparu.
Côté nord, le chemin est plus ardu. Je prends garde où je mets le pied, croisant quelques coureuses et un coureur ainsi qu’une promeneuse de chien. A l’approche de Paimpol, j’aperçois devant moi la jeune porteuse de sac à dos. Un gros bâton à la main, elle ne sait si elle doit aller à gauche et à droite.
-Je vois que vous hésitez sur le chemin à suivre.
Elle a hâte de prendre un café sur le port. C’est aussi mon projet. Je lui propose d’y aller ensemble, puis que nous le prenions ensemble. Elle me raconte sa longue marche commencée fin août à Cherrueix, interrompue le temps d’aller à une manifestation à Paris, reprise là où elle l’avait laissée et qu’elle espère poursuivre jusqu’à Brest si le temps, celui de la météo, ne lui est pas contraire. Elle me parle aussi de son engagement dans les mouvements sociaux et puis me raconte des choses plus intimes sur sa vie qui, depuis l’âge de ses douze ans, n’a pas été des plus tranquilles.
Nous prenons ce café à la terrasse du Bistrot Gourmand. Elle a ensuite le projet de prendre une douche quelque part. Il y a un bâtiment pour les marins dans le port mais je le crois réservé à ceux-ci. « Il y aurait une solution, lui dis-je, c’est que vous preniez cette douche chez moi. Je ne sais pas si mon logeur sera ravi de voir que j’amène quelqu’un dans son studio mais je paie donc je peux faire que je veux. Vous auriez le temps de vous doucher avant que j’aille déjeuner au restaurant. »
Elle accepte avec plaisir. Mon logeur ne montre pas le nez quand nous traversons la cour. Je lui passe une serviette que je n’ai pas utilisée et elle tire derrière elle la porte coulissante qui n’a pas de fermeture. Pendant ce temps, je m’occupe sur mon ordinateur. C’est une situation étrange, car bien sûr je ne peux m’empêcher de l’imaginer nue de l’autre côté de la cloison.
Quand elle reparait, pimpante, elle me dit qu’il était question qu’une personne la rejoigne aujourd’hui mais qu’elle ne sait pas si ça va se faire.
-Si j’osais, lui dis-je, je vous dirais de venir au restaurant avec moi.
-Mais je n’ai pas l’argent pour ça, me répond-elle.
-Je voulais dire : vous inviter au restaurant.
-Vous n’avez pas des intentions ?, me demande-t-elle.
-Non, c’est juste que ça me ferait plaisir.
-En tout bien tout honneur alors ?
-Je déteste cette expression, mais oui.
Un peu après midi nous sommes tous deux installés Chez Tonton Guy pour le menu du jour. Elle opte pour le poisson et moi pour le poulet. Pendant ce repas notre discussion ne décroît pas et désormais on se tutoie. « Je serais déjà loin si on ne s’était pas rencontré », constate-t-elle. « Pour moi, lui dis-je, cela n’a changé en rien ce que je voulais faire, sauf que je le fais à deux et c’est plus agréable. »
Puisqu’elle est encore à Paimpol, il lui faudrait une laverie pour sa lessive. On la trouve près du port et avant qu’elle se consacre à cette obligation, nous prenons le café à L’Epoque. La personne dont elle surveille les messages sur son vieux téléphone signale finalement son arrivée. Cette laverie est sur le chemin de mon studio. Nous nous en rapprochons ensemble.
-C’est rare que je passe un aussi long moment avec quelqu’un, lui dis-je.
-C’est flatteur pour moi, me dit-elle.
-Et réciproquement.
Nous nous quittons près du Terre Neuvas.
-Bon qu’est-ce qu’on fait, me dit-elle, on s’embrasse malgré le Covid ?
-Allons-y, lui dis-je, si je suis malade, je saurai à qui je le dois.
*
En fin d’après-midi, je croise mon logeur dans la cour. Il me dit avoir marché vingt-deux kilomètres de Pontrieux, où il a laissé sa voiture chez une amie, jusqu’à Paimpol en passant par Lézardrieux.
-Vous connaissez ?, me demande-t-il.
-Oui j’y suis allé mais en car. J’ai vu la maison qu’y avait Brassens.
-Je l’ai connu Brassens, j’avais un bistrot à Paimpol, il venait chez moi tôt le matin, parfois il arrivait avant moi, quand il venait faire ses courses.
-Tout seul ?
-Oui mais il retrouvait là des copains, un directeur d’école, d’autres, celui de la tante Jeanne, parce que la tante Jeanne, c’était pas sa tante à lui, c’était celle de ce copain qui est mort il n’y a pas longtemps. C’était vers la fin de sa vie. Il était déjà malade mais bon il prenait une Pelforth brune, si tôt le matin, alors…
*
Ce n’est que peu avant de nous quitter que cette jolie marcheuse et moi-même avons échangé nos noms. Chaque jour elle raconte son voyage dans un petit cahier. Chaque jour je raconte le mien et le rend public. Sur le réseau social Effe Bé, elle a tant d’homonymes que je ne suis pas sûr de la retrouver. Elle, le pourra facilement, si elle en a envie. Avoir de ses nouvelles m’intéresserait.
Je suis seul sur le chemin côtier de l’aller pour admirer les flots sur laquelle la brume se lève lentement. Peu avant l’extrême pointe, là où une sorte d’isthme permet de voir la mer des deux côtés, là où sont les deux arbres magnifiques, j’ai l’attention attirée par un bruit de plastique. Je pense à celui de la voile d’un bateau qui se trouverait à proximité mais suis détrompé quand je découvre sous l’un des arbres, en train de plier une toile de tente, une jeune femme qui me semble aussi fraîche que si elle sortait de sa salle de bain.
-Vous avez dormi là, ce devait être bien, lui dis-je
-Oui le calme absolu, à part les oiseaux ce matin qui m’ont réveillée.
Je souhaite une bonne journée à cette aventurière qui n’en a pas l’air et poursuis jusqu’à l’extrême pointe. Cela m’est l’occasion de découvrir sur la butte une petite maison que je n’avais pas vue l’autre fois. Je la photographie puis redescends vers l’isthme. La jolie campeuse a déjà disparu.
Côté nord, le chemin est plus ardu. Je prends garde où je mets le pied, croisant quelques coureuses et un coureur ainsi qu’une promeneuse de chien. A l’approche de Paimpol, j’aperçois devant moi la jeune porteuse de sac à dos. Un gros bâton à la main, elle ne sait si elle doit aller à gauche et à droite.
-Je vois que vous hésitez sur le chemin à suivre.
Elle a hâte de prendre un café sur le port. C’est aussi mon projet. Je lui propose d’y aller ensemble, puis que nous le prenions ensemble. Elle me raconte sa longue marche commencée fin août à Cherrueix, interrompue le temps d’aller à une manifestation à Paris, reprise là où elle l’avait laissée et qu’elle espère poursuivre jusqu’à Brest si le temps, celui de la météo, ne lui est pas contraire. Elle me parle aussi de son engagement dans les mouvements sociaux et puis me raconte des choses plus intimes sur sa vie qui, depuis l’âge de ses douze ans, n’a pas été des plus tranquilles.
Nous prenons ce café à la terrasse du Bistrot Gourmand. Elle a ensuite le projet de prendre une douche quelque part. Il y a un bâtiment pour les marins dans le port mais je le crois réservé à ceux-ci. « Il y aurait une solution, lui dis-je, c’est que vous preniez cette douche chez moi. Je ne sais pas si mon logeur sera ravi de voir que j’amène quelqu’un dans son studio mais je paie donc je peux faire que je veux. Vous auriez le temps de vous doucher avant que j’aille déjeuner au restaurant. »
Elle accepte avec plaisir. Mon logeur ne montre pas le nez quand nous traversons la cour. Je lui passe une serviette que je n’ai pas utilisée et elle tire derrière elle la porte coulissante qui n’a pas de fermeture. Pendant ce temps, je m’occupe sur mon ordinateur. C’est une situation étrange, car bien sûr je ne peux m’empêcher de l’imaginer nue de l’autre côté de la cloison.
Quand elle reparait, pimpante, elle me dit qu’il était question qu’une personne la rejoigne aujourd’hui mais qu’elle ne sait pas si ça va se faire.
-Si j’osais, lui dis-je, je vous dirais de venir au restaurant avec moi.
-Mais je n’ai pas l’argent pour ça, me répond-elle.
-Je voulais dire : vous inviter au restaurant.
-Vous n’avez pas des intentions ?, me demande-t-elle.
-Non, c’est juste que ça me ferait plaisir.
-En tout bien tout honneur alors ?
-Je déteste cette expression, mais oui.
Un peu après midi nous sommes tous deux installés Chez Tonton Guy pour le menu du jour. Elle opte pour le poisson et moi pour le poulet. Pendant ce repas notre discussion ne décroît pas et désormais on se tutoie. « Je serais déjà loin si on ne s’était pas rencontré », constate-t-elle. « Pour moi, lui dis-je, cela n’a changé en rien ce que je voulais faire, sauf que je le fais à deux et c’est plus agréable. »
Puisqu’elle est encore à Paimpol, il lui faudrait une laverie pour sa lessive. On la trouve près du port et avant qu’elle se consacre à cette obligation, nous prenons le café à L’Epoque. La personne dont elle surveille les messages sur son vieux téléphone signale finalement son arrivée. Cette laverie est sur le chemin de mon studio. Nous nous en rapprochons ensemble.
-C’est rare que je passe un aussi long moment avec quelqu’un, lui dis-je.
-C’est flatteur pour moi, me dit-elle.
-Et réciproquement.
Nous nous quittons près du Terre Neuvas.
-Bon qu’est-ce qu’on fait, me dit-elle, on s’embrasse malgré le Covid ?
-Allons-y, lui dis-je, si je suis malade, je saurai à qui je le dois.
*
En fin d’après-midi, je croise mon logeur dans la cour. Il me dit avoir marché vingt-deux kilomètres de Pontrieux, où il a laissé sa voiture chez une amie, jusqu’à Paimpol en passant par Lézardrieux.
-Vous connaissez ?, me demande-t-il.
-Oui j’y suis allé mais en car. J’ai vu la maison qu’y avait Brassens.
-Je l’ai connu Brassens, j’avais un bistrot à Paimpol, il venait chez moi tôt le matin, parfois il arrivait avant moi, quand il venait faire ses courses.
-Tout seul ?
-Oui mais il retrouvait là des copains, un directeur d’école, d’autres, celui de la tante Jeanne, parce que la tante Jeanne, c’était pas sa tante à lui, c’était celle de ce copain qui est mort il n’y a pas longtemps. C’était vers la fin de sa vie. Il était déjà malade mais bon il prenait une Pelforth brune, si tôt le matin, alors…
*
Ce n’est que peu avant de nous quitter que cette jolie marcheuse et moi-même avons échangé nos noms. Chaque jour elle raconte son voyage dans un petit cahier. Chaque jour je raconte le mien et le rend public. Sur le réseau social Effe Bé, elle a tant d’homonymes que je ne suis pas sûr de la retrouver. Elle, le pourra facilement, si elle en a envie. Avoir de ses nouvelles m’intéresserait.
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