Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
4 avril 2022
Rochefort, ville chargée d’Histoire, est mon étape dominicale. Je descends du car Neuf devant sa belle Gare située place Françoise-Dorléac. Par la rue Henri-Laborit (il fut ici médecin à l’Hôpital de la Marine, tout comme Victor Segalen), je rejoins l’ancienne Ecole de Médecine Navale, un bâtiment devenu privé dont je fais une photo à travers les grilles. Après le cours d’Ablois, j’arrive à l’endroit où se tient chaque premier dimanche du mois une brocante de professionnels à laquelle s’adjoignent des particuliers. J’aperçois quelques livres mais il y a trop de monde pour que j’aie envie d’en faire le tour.
Une rue perpendiculaire (elles le sont quasiment toutes les unes aux autres) me permet de rejoindre le bord de la Charente où devrait être amarrée l’Hermione mais celle-ci, gravement atteinte par un champignon, est en cure au Pays Basque. Un périscope géant se montre un peu là. Longeant cette paisible rivière, j’arrive à la Corderie Royale qu’il est impossible de faire entrer dans une seule photo.
Dans un beau bâtiment à proximité d’icelle, qui autrefois accueillait les soldats surveillant l’Arsenal est un restaurant nommé Les Longitudes et comme il est midi et qu’il y a de petites tables dehors sous les arcades, je demande à occuper l’une d’elles au grand étonnement du personnel qui trouve qu’il fait froid. Il y a pourtant un peu de soleil. Et une belle vue sur l’entrée de la Corderie, la Charente, les familles du dimanche et une tour penchée. Je mange là un burgueur basique à douze euros cinquante, accompagné d’un quart de bordeaux rouge à cinq euros, et le fait suivre d’un café à un euro quatre-vingts.
Après ce repas sommaire, je continue le long de la Charente, passe à côté de la Médiathèque Erik Orsenna (un honneur que je juge immérité) et arrive au port de plaisance. Les nuages se faisant de plus en plus présents, je regagne le centre de la ville par le plus court chemin, dédaignant la maison de Pierre Loti, un auteur qui ne m’a jamais enthousiasmé.
Un autochtone m’apprend que des cafés, j’en trouverai près de l’Hôtel de Ville. En effet, deux grosses brasseries se font face sur la place dont les jets d’eau sont absents, Colbert et Les Demoiselles (celle-ci datant du film de Jacques Demy).
Pour une raison de lumière, je choisis Colbert. La bourgeoisie locale est en plein repas, mais on me laisse occuper une table pour un café à un euro soixante. Je reste longtemps, au chaud, à lire Victor Hugo, dans cette ville synonyme pour lui de malheur, puis, avec dix minutes d’avance, je vais attendre le car du retour à l’arrêt Roy Bry, pas loin de la brocante qui remballe avant l’heure.
*
Moyennant finances, on peut visiter la Corderie Royale en long et en large, surtout en long : trois cent soixante-quatorze mètres.
*
On trouve aussi à Rochefort le Conservatoire du Bégonia (il en abrite la plus grande collection au monde).
Le bégonia doit son nom à Michel Bégon. Grand intendant de Colbert et assainisseur de Rochefort, il finança l’expédition du père Plumier qui rapporta d’Amérique cette nouvelle plante. Une information que j’aurai vite oubliée.
*
Outre Pierre Loti, qui donne son nom à un collège (est-ce bien raisonnable ?), sont nés à Rochefort Maurice Merleau-Ponty et Dominique Aury (cette circonstance est-elle responsable de son goût pour le masochisme ?). Maurice Renard y est mort, banalement, d’une congestion pulmonaire.
Une rue perpendiculaire (elles le sont quasiment toutes les unes aux autres) me permet de rejoindre le bord de la Charente où devrait être amarrée l’Hermione mais celle-ci, gravement atteinte par un champignon, est en cure au Pays Basque. Un périscope géant se montre un peu là. Longeant cette paisible rivière, j’arrive à la Corderie Royale qu’il est impossible de faire entrer dans une seule photo.
Dans un beau bâtiment à proximité d’icelle, qui autrefois accueillait les soldats surveillant l’Arsenal est un restaurant nommé Les Longitudes et comme il est midi et qu’il y a de petites tables dehors sous les arcades, je demande à occuper l’une d’elles au grand étonnement du personnel qui trouve qu’il fait froid. Il y a pourtant un peu de soleil. Et une belle vue sur l’entrée de la Corderie, la Charente, les familles du dimanche et une tour penchée. Je mange là un burgueur basique à douze euros cinquante, accompagné d’un quart de bordeaux rouge à cinq euros, et le fait suivre d’un café à un euro quatre-vingts.
Après ce repas sommaire, je continue le long de la Charente, passe à côté de la Médiathèque Erik Orsenna (un honneur que je juge immérité) et arrive au port de plaisance. Les nuages se faisant de plus en plus présents, je regagne le centre de la ville par le plus court chemin, dédaignant la maison de Pierre Loti, un auteur qui ne m’a jamais enthousiasmé.
Un autochtone m’apprend que des cafés, j’en trouverai près de l’Hôtel de Ville. En effet, deux grosses brasseries se font face sur la place dont les jets d’eau sont absents, Colbert et Les Demoiselles (celle-ci datant du film de Jacques Demy).
Pour une raison de lumière, je choisis Colbert. La bourgeoisie locale est en plein repas, mais on me laisse occuper une table pour un café à un euro soixante. Je reste longtemps, au chaud, à lire Victor Hugo, dans cette ville synonyme pour lui de malheur, puis, avec dix minutes d’avance, je vais attendre le car du retour à l’arrêt Roy Bry, pas loin de la brocante qui remballe avant l’heure.
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Moyennant finances, on peut visiter la Corderie Royale en long et en large, surtout en long : trois cent soixante-quatorze mètres.
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On trouve aussi à Rochefort le Conservatoire du Bégonia (il en abrite la plus grande collection au monde).
Le bégonia doit son nom à Michel Bégon. Grand intendant de Colbert et assainisseur de Rochefort, il finança l’expédition du père Plumier qui rapporta d’Amérique cette nouvelle plante. Une information que j’aurai vite oubliée.
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Outre Pierre Loti, qui donne son nom à un collège (est-ce bien raisonnable ?), sont nés à Rochefort Maurice Merleau-Ponty et Dominique Aury (cette circonstance est-elle responsable de son goût pour le masochisme ?). Maurice Renard y est mort, banalement, d’une congestion pulmonaire.
3 avril 2022
A la hauteur de la plage de la Concurrence et perpendiculairement à celle-ci s’étend un vaste espace plus ou moins naturel qui remonte jusqu’à une gare secondaire. Cette sorte de coulée verte rochelaise s’appelle le Parc Charruyer et est malheureusement traversé dans sa largeur par des routes à voitures. J’y entre ce samedi matin, à l’abri du vent et sous un ciel bleu.
Je croise d’abord quelques animaux, dont des poules de Marans et un baudet du Poitou qui a envie d’être mon ami. Je caresse son nez blanc avant de voir l’écriteau qui annonce que ça mord. Il braie quand je m’éloigne pour longer une petite rivière dont j’ignore le nom. Près d’icelle sont les locaux de la Boule Rochelaise et du Palet Rochelais, ainsi qu’une statue d’un très ancien Maire, Pierre Doriole. Les garde-fous des ponts sont en béton imitation bois. Ils me rappellent ceux du jardin public de Louviers, un des rares lieux de sortie familiale lorsque j’étais enfant.
Avant d’atteindre la gare, je reviens sur mes pas puis, à partir de la Concurrence, suis le bord de la mer jusqu’à la tour de la Chaîne et le cours des Dames connu pour ses restaurants de piètre qualité. Un échappe à la mauvaise réputation, un italien nommé La Storia, où je réserve une table pour le déjeuner avant d’aller lire au Bistro du Gabut orienté plein sud et à l’abri du vent.
A midi je prends place sous l’auvent de La Storia où il fait presque froid. La serveuse qui apporte mon quart de vin rouge charentais me trouve courageux.
-Je vous sers votre vin ? me demande-t-elle
-Si vous me le proposez, allez-y.
-Vous voulez m’exploiter jusqu’au bout, c’est ça ? Je ferais comme vous.
Le reste du personnel est masculin et également jeune et sympathique. Je commande une pizza nommée La Truffée composée de crème de champignons truffée et échalotes, fior di latte, champignons frais, speck (jambon italien), burrata, noix torréfiées et huile de truffe. Elle a belle allure et est fort bonne. Pour dessert, ce sera le tiramisu di Sabrina, l’authentique (biscuit au café, mascarpone, amaretto). Celui-ci est bon sans être remarquable.
Les tables sous l’auvent sont maintenant toutes occupées. Près de moi sont quatre garçons et deux filles. Il est question de commander des pizzas. Qui est pour ? « Moi je suis chaud », dit l’une des filles. Aucune fille ne fera l’accord au féminin dans ce cas. Pour ma part, j’ai moins froid quand je quitte cette bonne adresse après avoir réglé vingt-sept euros cinquante.
Sur le Cours des Dames sont installées les guérîtes où l’on vend les billets pour les excursions en mer. Constatant que pour aller à l’Ile d’Aix, c’est trente euros si l’on veut y rester plus que quelques heures, alors que l’on doit déjà se fader le tour de Fort Boyard (vu à la télé) et subir le baratin d’un commentateur durant toute la traversée, je renonce à mon idée d’employer ce moyen pour revoir cette délicieuse petite île dont il me restera un souvenir lointain et confus.
*
Le baudet du Poitou, très brun, très poilu, un mètre cinquante, quatre cent cinquante kilos, a failli disparaître. Il n’en restait que quarante-quatre en mil neuf cent soixante-dix-sept. Ils sont maintenant deux mille quatre cent quarante.
*
Ce baudet du Poitou me fait penser, malgré moi, à ce baudet de Poutou. Ce qui n’est pas gentil. « Si l’Otan avait été dissolu », l’entends-je dire à la télé dans l’après-midi.
Je croise d’abord quelques animaux, dont des poules de Marans et un baudet du Poitou qui a envie d’être mon ami. Je caresse son nez blanc avant de voir l’écriteau qui annonce que ça mord. Il braie quand je m’éloigne pour longer une petite rivière dont j’ignore le nom. Près d’icelle sont les locaux de la Boule Rochelaise et du Palet Rochelais, ainsi qu’une statue d’un très ancien Maire, Pierre Doriole. Les garde-fous des ponts sont en béton imitation bois. Ils me rappellent ceux du jardin public de Louviers, un des rares lieux de sortie familiale lorsque j’étais enfant.
Avant d’atteindre la gare, je reviens sur mes pas puis, à partir de la Concurrence, suis le bord de la mer jusqu’à la tour de la Chaîne et le cours des Dames connu pour ses restaurants de piètre qualité. Un échappe à la mauvaise réputation, un italien nommé La Storia, où je réserve une table pour le déjeuner avant d’aller lire au Bistro du Gabut orienté plein sud et à l’abri du vent.
A midi je prends place sous l’auvent de La Storia où il fait presque froid. La serveuse qui apporte mon quart de vin rouge charentais me trouve courageux.
-Je vous sers votre vin ? me demande-t-elle
-Si vous me le proposez, allez-y.
-Vous voulez m’exploiter jusqu’au bout, c’est ça ? Je ferais comme vous.
Le reste du personnel est masculin et également jeune et sympathique. Je commande une pizza nommée La Truffée composée de crème de champignons truffée et échalotes, fior di latte, champignons frais, speck (jambon italien), burrata, noix torréfiées et huile de truffe. Elle a belle allure et est fort bonne. Pour dessert, ce sera le tiramisu di Sabrina, l’authentique (biscuit au café, mascarpone, amaretto). Celui-ci est bon sans être remarquable.
Les tables sous l’auvent sont maintenant toutes occupées. Près de moi sont quatre garçons et deux filles. Il est question de commander des pizzas. Qui est pour ? « Moi je suis chaud », dit l’une des filles. Aucune fille ne fera l’accord au féminin dans ce cas. Pour ma part, j’ai moins froid quand je quitte cette bonne adresse après avoir réglé vingt-sept euros cinquante.
Sur le Cours des Dames sont installées les guérîtes où l’on vend les billets pour les excursions en mer. Constatant que pour aller à l’Ile d’Aix, c’est trente euros si l’on veut y rester plus que quelques heures, alors que l’on doit déjà se fader le tour de Fort Boyard (vu à la télé) et subir le baratin d’un commentateur durant toute la traversée, je renonce à mon idée d’employer ce moyen pour revoir cette délicieuse petite île dont il me restera un souvenir lointain et confus.
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Le baudet du Poitou, très brun, très poilu, un mètre cinquante, quatre cent cinquante kilos, a failli disparaître. Il n’en restait que quarante-quatre en mil neuf cent soixante-dix-sept. Ils sont maintenant deux mille quatre cent quarante.
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Ce baudet du Poitou me fait penser, malgré moi, à ce baudet de Poutou. Ce qui n’est pas gentil. « Si l’Otan avait été dissolu », l’entends-je dire à la télé dans l’après-midi.
2 avril 2022
La briocherie Sicard, ce premier avril, n’a pas loupé le début de la haute saison en passant son petit-déjeuner « détente » de quatre euros cinquante à cinq euros trente, une augmentation de dix-huit pour cent, que l’on m’annonce une fois la commande posée sur le plateau, bien obligé d’obtempérer.
Sorti de là, je me dirige vers la Gare et attends cette fois le car numéro Quatre. Il conduit à Surgères. Son terminus est Place du Château. C’est précisément celui-ci qui m’attire dans cette petite ville de l’intérieur que j’ai traversée avec le Tégévé.
Le ciel est bleu à l’arrivée mais il fait frais. Je suis seul pour découvrir le mur d’enceinte et les bâtiments construits à l’intérieur à des époques ultérieures et différentes, dont le logis seigneurial de la famille de La Rochefoucauld qui abrite aujourd’hui la Mairie et l’église Notre-Dame dont la façade émerveillait Prosper Mérimée.
Quand arrive un groupe de retraités masqués en visite guidée, il est temps de repasser le pont-levis qui ne peut plus être relevé. Les quelques rues piétonnières de ce bourg austère sont en gros travaux. Je vais jusqu’à la Halle du Marché puis prends la fuite devant le bruit de la pilonneuse.
En bas du Château coule la Gères, petite rivière qui donne son nom à Surgères. Un chemin champêtre permet de la suivre un moment. Ce que je fais, puis le vent froid soufflant de plus en plus fort, je reviens en ville et entre au Victor Hugo, place de l’Europe (cette adresse lui aurait plu), pour me réchauffer d’un café à un euro quarante, mais je ne peux y rester pour lire Choses vues car ce troquet est étroit et très fréquenté par les locaux. J’y crains le Covid.
Je passe au restaurant Le Manuel, face au Château, et obtiens de la sympathique patronne de venir y déjeuner dès midi moins le quart afin d’être sûr d’attraper le car de treize heures pour La Rochelle. En attendant, malgré le froid, sur un muret un peu abrité, je lis Hugo dans le parc du Château.
A l’heure dite, je pousse la porte de ce restaurant au mobilier démodé et à la décoration désuète. On y propose un menu du jour à treize euros cinquante. C’est d’autant plus méritoire qu’il n’y a aucune concurrence. J’opte pour le hareng pommes tièdes, la brandade de morue et la tarte au citron maison. La liaison avec la cuisine se fait par le biais d’un passe-plat dans lequel la patronne et son serveur passent la tête pour donner leurs ordres. Peu à peu, la salle se remplit de couples ou de duos qui ont l’air eux aussi d’être des années soixante-dix ou quatre-vingt. Avec le quart de vin blanc et le café, mon addition ne s’élève qu’à dix-huit euros.
Evidemment je suis en avance sous l’abribus et je me pèle en attendant le Quatre.
*
Prosper Mérimée, de passage à Surgères : Bien que blasé, j’ai trouvé à m’extasier devant son église ; je ne trouve rien de plus beau que sa façade.
*
Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
« Ronsard me célébrait du temps que j'étais belle ! »
Ce sonnet fut écrit pour Hélène de Fonsèque, fille du baron de Surgères.
Vous serez au foyer une vieille accroupie,
Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain :
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie.
*
Ces noms de lieu qui vous font rêver quand vous les lisez sur un horaire de car et qui sont ceux de villages sans âme. Exemple, entre Surgères et La Rochelle : Aigrefeuille d’Aunis.
*
Ouverture de la haute saison, L’Amiral Café et le Bistro du Gabut ont installé leurs extensions de terrasses de l’autre côté du quai Georges-Simenon, juste au-dessus des bateaux, des tables qui restent inoccupées en raison d’une température de basse saison.
Sorti de là, je me dirige vers la Gare et attends cette fois le car numéro Quatre. Il conduit à Surgères. Son terminus est Place du Château. C’est précisément celui-ci qui m’attire dans cette petite ville de l’intérieur que j’ai traversée avec le Tégévé.
Le ciel est bleu à l’arrivée mais il fait frais. Je suis seul pour découvrir le mur d’enceinte et les bâtiments construits à l’intérieur à des époques ultérieures et différentes, dont le logis seigneurial de la famille de La Rochefoucauld qui abrite aujourd’hui la Mairie et l’église Notre-Dame dont la façade émerveillait Prosper Mérimée.
Quand arrive un groupe de retraités masqués en visite guidée, il est temps de repasser le pont-levis qui ne peut plus être relevé. Les quelques rues piétonnières de ce bourg austère sont en gros travaux. Je vais jusqu’à la Halle du Marché puis prends la fuite devant le bruit de la pilonneuse.
En bas du Château coule la Gères, petite rivière qui donne son nom à Surgères. Un chemin champêtre permet de la suivre un moment. Ce que je fais, puis le vent froid soufflant de plus en plus fort, je reviens en ville et entre au Victor Hugo, place de l’Europe (cette adresse lui aurait plu), pour me réchauffer d’un café à un euro quarante, mais je ne peux y rester pour lire Choses vues car ce troquet est étroit et très fréquenté par les locaux. J’y crains le Covid.
Je passe au restaurant Le Manuel, face au Château, et obtiens de la sympathique patronne de venir y déjeuner dès midi moins le quart afin d’être sûr d’attraper le car de treize heures pour La Rochelle. En attendant, malgré le froid, sur un muret un peu abrité, je lis Hugo dans le parc du Château.
A l’heure dite, je pousse la porte de ce restaurant au mobilier démodé et à la décoration désuète. On y propose un menu du jour à treize euros cinquante. C’est d’autant plus méritoire qu’il n’y a aucune concurrence. J’opte pour le hareng pommes tièdes, la brandade de morue et la tarte au citron maison. La liaison avec la cuisine se fait par le biais d’un passe-plat dans lequel la patronne et son serveur passent la tête pour donner leurs ordres. Peu à peu, la salle se remplit de couples ou de duos qui ont l’air eux aussi d’être des années soixante-dix ou quatre-vingt. Avec le quart de vin blanc et le café, mon addition ne s’élève qu’à dix-huit euros.
Evidemment je suis en avance sous l’abribus et je me pèle en attendant le Quatre.
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Prosper Mérimée, de passage à Surgères : Bien que blasé, j’ai trouvé à m’extasier devant son église ; je ne trouve rien de plus beau que sa façade.
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Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
« Ronsard me célébrait du temps que j'étais belle ! »
Ce sonnet fut écrit pour Hélène de Fonsèque, fille du baron de Surgères.
Vous serez au foyer une vieille accroupie,
Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain :
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie.
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Ces noms de lieu qui vous font rêver quand vous les lisez sur un horaire de car et qui sont ceux de villages sans âme. Exemple, entre Surgères et La Rochelle : Aigrefeuille d’Aunis.
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Ouverture de la haute saison, L’Amiral Café et le Bistro du Gabut ont installé leurs extensions de terrasses de l’autre côté du quai Georges-Simenon, juste au-dessus des bateaux, des tables qui restent inoccupées en raison d’une température de basse saison.
1er avril 2022
Ce jeudi, dès que le soleil pointe un peu ses rayons, je décide de faire le tour du Bassin des Chalutiers, entièrement visible de ma fenêtre et rebaptisé sur le plan distribué à l’Office du Tourisme, Bassin des Grands Yachts, puisqu’il est devenu le lieu de garage des plus grands bateaux de plaisance depuis la mise en service du port de Chef de Baie pour les pêcheurs, loin du centre de la Rochelle.
De ma fenêtre ouverte, je fais une première photo avec en arrière-plan l’Aquarium puis descendu sur le quai Georges Simenon, je marche vers ce bâtiment plein d’animaux marins où je n’ai pas envie d’entrer. Après le parvis Eric Tabarly le quai longe d’anciens hangars reconvertis en lieu culturel et conduit au Musée Maritime dont l’architecture m’évoque une chenille colorée. Une partie de ce Musée est à flot sous forme de bateaux d’un autre temps.
Je traverse le bassin par une passerelle dont la partie centrale peut se lever afin de laisser passer les grands yachts, puis je reviens par le quai d’en face qui mène au pont-levant du Gabut et voilà le circuit accompli.
Les tables du Bistro du Gabut sont au soleil quand j’y prends place et un café verre d’eau. Pour démentir mon propos de la veille, on y parle réchauffement climatique et montée des eaux. Un client vient de voir le Maire qui parle là derrière. Il a mis sa cravate rouge. Y a des caméras et tout le bordel. « C’est pour un exercice de submersion », explique le patron qui est bien renseigné. Une partie de La Rochelle est menacée par la montée des eaux prévue dans quelques décennies et au moins la moitié de l’Ile de Ré doit être noyée, celle où prolifèrent les célébrités.
Trois employés des espaces verts arrivent pour nettoyer le pied de l’arbre qui fait le coin de la terrasse. Pour quatre mètres carrés à désherber, ils utilisent un coupe herbe à fil et une souffleuse. Le calme revenu, je retrouve Victor Hugo.
Il fait un peu trop frais pour déjeuner dehors près de la Gare, aussi est-ce à l’intérieur de L’Ardoise que je me présente à midi pile. Je fais bien car de nombreuses tables sont réservées. Ce restaurant mal situé est apprécié pour son menu du jour qui en est vraiment un, pas comme les plats du jour de certains restos du Gabut qui sont en réalité des plats de tous les jours : filet de merlu ou faux filet.
La décoration intérieure de L’Ardoise est agréable et le jeune couple qui le tient est chaleureux, tout comme leur petite serveuse. Aujourd’hui, c’est œuf mollet florentine, lasagnes de poisson salade verte et charlotte au citron et morceaux de fraise, à quoi j’ajoute un quart de vin blanc charentais. La sono diffuse les tubes anglo-saxons des années cinquante et soixante. Une musique tout à fait appropriée. La Sweet Little Sixteen à queue de cheval qui me demande si tout va bien pourrait s’appeler Peggy Sue.
A l’issue de ce bon moment, je prends le café sous le soleil au Bistro du Gabut. Quand apparaissent les nuages gris et que les premières gouttes tombent, j’apprécie de résider au-dessus du bar.
*
Pendant ce temps-là Macron n’était pas loin, apprends-je sitôt rentré. A Fouras, un lieu où j’envisageais d’aller en train pour ensuite rejoindre la pointe de la Fumée et prendre le bac pour l’Ile d’Aix, mais hormis l’été aucun transport collectif ne fait la liaison entre la gare et l’embarcadère, distants de huit kilomètres. Il m’a fallu renoncer.
Si je l’avais pu, cela aurait été en ce mois de mars, pendant la basse saison, où le bateau est à dix euros. Dès le premier avril, début officiel de la haute saison, il passe à quinze euros.
*
Il n’y a pas de moyenne saison à La Rochelle et ses environs.
De ma fenêtre ouverte, je fais une première photo avec en arrière-plan l’Aquarium puis descendu sur le quai Georges Simenon, je marche vers ce bâtiment plein d’animaux marins où je n’ai pas envie d’entrer. Après le parvis Eric Tabarly le quai longe d’anciens hangars reconvertis en lieu culturel et conduit au Musée Maritime dont l’architecture m’évoque une chenille colorée. Une partie de ce Musée est à flot sous forme de bateaux d’un autre temps.
Je traverse le bassin par une passerelle dont la partie centrale peut se lever afin de laisser passer les grands yachts, puis je reviens par le quai d’en face qui mène au pont-levant du Gabut et voilà le circuit accompli.
Les tables du Bistro du Gabut sont au soleil quand j’y prends place et un café verre d’eau. Pour démentir mon propos de la veille, on y parle réchauffement climatique et montée des eaux. Un client vient de voir le Maire qui parle là derrière. Il a mis sa cravate rouge. Y a des caméras et tout le bordel. « C’est pour un exercice de submersion », explique le patron qui est bien renseigné. Une partie de La Rochelle est menacée par la montée des eaux prévue dans quelques décennies et au moins la moitié de l’Ile de Ré doit être noyée, celle où prolifèrent les célébrités.
Trois employés des espaces verts arrivent pour nettoyer le pied de l’arbre qui fait le coin de la terrasse. Pour quatre mètres carrés à désherber, ils utilisent un coupe herbe à fil et une souffleuse. Le calme revenu, je retrouve Victor Hugo.
Il fait un peu trop frais pour déjeuner dehors près de la Gare, aussi est-ce à l’intérieur de L’Ardoise que je me présente à midi pile. Je fais bien car de nombreuses tables sont réservées. Ce restaurant mal situé est apprécié pour son menu du jour qui en est vraiment un, pas comme les plats du jour de certains restos du Gabut qui sont en réalité des plats de tous les jours : filet de merlu ou faux filet.
La décoration intérieure de L’Ardoise est agréable et le jeune couple qui le tient est chaleureux, tout comme leur petite serveuse. Aujourd’hui, c’est œuf mollet florentine, lasagnes de poisson salade verte et charlotte au citron et morceaux de fraise, à quoi j’ajoute un quart de vin blanc charentais. La sono diffuse les tubes anglo-saxons des années cinquante et soixante. Une musique tout à fait appropriée. La Sweet Little Sixteen à queue de cheval qui me demande si tout va bien pourrait s’appeler Peggy Sue.
A l’issue de ce bon moment, je prends le café sous le soleil au Bistro du Gabut. Quand apparaissent les nuages gris et que les premières gouttes tombent, j’apprécie de résider au-dessus du bar.
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Pendant ce temps-là Macron n’était pas loin, apprends-je sitôt rentré. A Fouras, un lieu où j’envisageais d’aller en train pour ensuite rejoindre la pointe de la Fumée et prendre le bac pour l’Ile d’Aix, mais hormis l’été aucun transport collectif ne fait la liaison entre la gare et l’embarcadère, distants de huit kilomètres. Il m’a fallu renoncer.
Si je l’avais pu, cela aurait été en ce mois de mars, pendant la basse saison, où le bateau est à dix euros. Dès le premier avril, début officiel de la haute saison, il passe à quinze euros.
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Il n’y a pas de moyenne saison à La Rochelle et ses environs.
© 2014 Michel Perdrial - Design: Bureau l’Imprimante