Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
14 octobre 2020
Une grosse averse ce mardi matin au moment où je vais à la boulangerie. Elle me laisse peu d’espoir pour la suite et pourtant le ciel vire au bleu, ce qui me permet de parcourir une avant-dernière fois le bord de mer quinocéen, dont le sentier devient chaque jour plus gadouilleux. Lorsque j’arrive à la terrasse du Poisson Rouge, il fait doux sous les rayons jaunes. Même les autochtones assis aux tables voisines ne comprennent rien à ce temps.
-C’est pourtant simple, leur explique le patron. T’appuies sur soleil, tu as du soleil. T’appuies sur pluie, tu as de la pluie. C’est moi qui ai la télécommande.
Il doit avoir un compte à régler avec les deux promeneurs de chien qui se croisent une demi-heure plus tard sur le trottoir d’en face car une nouvelle drache les oblige à se replier à la maison. Dès que le ciel se remet plus au moins au bleu, je n’attends pas davantage pour mettre le cap sur le quartier du Kasino par les rues intérieures. Une jeune femme qui distribue des publicités pour une agence immobilière m’en propose un.
-Je ne suis pas d’ici, lui dis-je.
-Bah, justement, vous pourriez acheter un petit bien.
Des petits biens et des grands biens, j’en ai photographié au fil des jours, devant omettre l’une qui me plaît mais devant laquelle est toujours garé un scouteur.
Une file de pas jeunes s’est constituée devant la pharmacie. Serait-ce pour obtenir le vaccin contre la grippe ? Cette année, dès avant l’arrivée du coronavirus, j’étais décidé à le faire, contrairement aux années précédentes. Un courrier de ma mutuelle doit m’attendre à Rouen pour que je l’obtienne gratuitement en raison de mon âge. En restera-t-il quand je rentrerai. J’en doute.
A l’Office de Tourisme, j’obtiens un plan de la ville qui sera ma prochaine étape puis à midi je me rends au Café de la Plage. J’y trouve table à l’intérieur, près de la baie vitrée qui donne sur le large. Le soleil et les averses sont toujours en lutte, ce qui donne lieu à une succession d’arcs-en-ciel.
Le menu à dix-neuf euros ne m’enthousiasme pas cette fois mais je fais confiance au cuisinier pour me faire aimer ce qu’officiellement je n’aime pas. C’est ce qui arrive. J’apprécie l’entrée (carotte aubergine et magret fumé), le plat (églefin frit crème de pois cassé chou-fleur et chorizo) et même le dessert (riz au lait pomme caramel).
Vers treize heures quinze, alors que certains arrivent trempés, je me faufile dans une éclaircie pour retrouver le premier étage de la résidence qui m’accueille provisoirement. Chaque jour, j’ai envie que le bâtiment d’en face, dont l’architecture à coursives rappelle celle des bateaux de croisière qui polluent de leur laideur les ports du globe, lève l’ancre, mais ce n’est pas moi qui ai la télécommande.
*
Au Poisson Rouge hier matin, une vieille extravertie bruyante et une plus jeune discrète aux petits soins, qui se donnent des « ma chérie », qui s’embrassent, qui partent en se tenant par la taille. Tiens des lesbiennes qui n’ont pas peur de le montrer, me suis-je dit et se sont dit d’autres par des échanges de regard.
Ce mardi matin, elles sont de nouveau là et s’apprêtent à partir au moment où j’arrive. Quand la vieille va entrer dans le café crêperie pour payer, l’autre la rappelle « Maman, ton masque ».
*
Carton plein pour le restaurant du Kasino ce mardi midi, toutes les tables (de quatre) sont occupées par les membres d’un cleube du troisième âge. Tant de vieilles et de vieux sans masque dans un lieu clos pendant au moins une heure et demie, ça fait frémir.
-C’est pourtant simple, leur explique le patron. T’appuies sur soleil, tu as du soleil. T’appuies sur pluie, tu as de la pluie. C’est moi qui ai la télécommande.
Il doit avoir un compte à régler avec les deux promeneurs de chien qui se croisent une demi-heure plus tard sur le trottoir d’en face car une nouvelle drache les oblige à se replier à la maison. Dès que le ciel se remet plus au moins au bleu, je n’attends pas davantage pour mettre le cap sur le quartier du Kasino par les rues intérieures. Une jeune femme qui distribue des publicités pour une agence immobilière m’en propose un.
-Je ne suis pas d’ici, lui dis-je.
-Bah, justement, vous pourriez acheter un petit bien.
Des petits biens et des grands biens, j’en ai photographié au fil des jours, devant omettre l’une qui me plaît mais devant laquelle est toujours garé un scouteur.
Une file de pas jeunes s’est constituée devant la pharmacie. Serait-ce pour obtenir le vaccin contre la grippe ? Cette année, dès avant l’arrivée du coronavirus, j’étais décidé à le faire, contrairement aux années précédentes. Un courrier de ma mutuelle doit m’attendre à Rouen pour que je l’obtienne gratuitement en raison de mon âge. En restera-t-il quand je rentrerai. J’en doute.
A l’Office de Tourisme, j’obtiens un plan de la ville qui sera ma prochaine étape puis à midi je me rends au Café de la Plage. J’y trouve table à l’intérieur, près de la baie vitrée qui donne sur le large. Le soleil et les averses sont toujours en lutte, ce qui donne lieu à une succession d’arcs-en-ciel.
Le menu à dix-neuf euros ne m’enthousiasme pas cette fois mais je fais confiance au cuisinier pour me faire aimer ce qu’officiellement je n’aime pas. C’est ce qui arrive. J’apprécie l’entrée (carotte aubergine et magret fumé), le plat (églefin frit crème de pois cassé chou-fleur et chorizo) et même le dessert (riz au lait pomme caramel).
Vers treize heures quinze, alors que certains arrivent trempés, je me faufile dans une éclaircie pour retrouver le premier étage de la résidence qui m’accueille provisoirement. Chaque jour, j’ai envie que le bâtiment d’en face, dont l’architecture à coursives rappelle celle des bateaux de croisière qui polluent de leur laideur les ports du globe, lève l’ancre, mais ce n’est pas moi qui ai la télécommande.
*
Au Poisson Rouge hier matin, une vieille extravertie bruyante et une plus jeune discrète aux petits soins, qui se donnent des « ma chérie », qui s’embrassent, qui partent en se tenant par la taille. Tiens des lesbiennes qui n’ont pas peur de le montrer, me suis-je dit et se sont dit d’autres par des échanges de regard.
Ce mardi matin, elles sont de nouveau là et s’apprêtent à partir au moment où j’arrive. Quand la vieille va entrer dans le café crêperie pour payer, l’autre la rappelle « Maman, ton masque ».
*
Carton plein pour le restaurant du Kasino ce mardi midi, toutes les tables (de quatre) sont occupées par les membres d’un cleube du troisième âge. Tant de vieilles et de vieux sans masque dans un lieu clos pendant au moins une heure et demie, ça fait frémir.
13 octobre 2020
Ce lundi, à l’heure où se lève le jour, le ciel est enflammé au-dessus de Saint-Quay. Il est d’une beauté rare, que n’arrivent pas rendre totalement les photos que j’en fais. C’est au point qu’un automobiliste (comme on dit) arrête sa voiture et baisse sa vitre pour admirer. Cette féerie dure peu. Il fallait être là au bon moment. Quand je ressors de la boulangerie, tout a disparu.
Tout en mangeant mes viennoiseries, je parcours encore une fois, bientôt la dernière, le chemin côtier entre le Kasino et le port d’échouage. A l’arrivée, je m’assois (j’échoue) à ma table habituelle du Poisson rouge. Il fait frais mais quand même, relisant des lettres de Léautaud, je reste là une heure et demie.
Le lundi est le jour le plus animé dans ce coin de Saint-Quay en raison d’un marché qui se tient au bout du port, à la frontière avec Etables. A quoi s’ajoutent les échanges de vieilles choses à la ressourcerie d’à côté et, juste en-dessous, sur la plage, le cours de gym donné à une douzaine de femmes et à un homme par un cotche caricatural aidé d’une sono à musique dynamique (il faut savoir compter jusqu’à huit, toutes les séquences sont sur ce tempo).
Le temps est plutôt beau ce matin mais la pluie est annoncée pour l’après-midi. Quand je vais réserver une table aux Plaisanciers, je ne sais si je pourrai manger dehors ou non. Désormais la patronne connaît mon nom, si elle ne m’appelle pas encore par mon prénom, comme ce Louis dont elle me donnera la place à l’intérieur, s’il ne vient pas.
A midi moins le quart, je juge qu’il fait trop frais pour l’extérieur, mais Louis est là. J’ai droit à la table voisine dans ce bout de salle où pas trop de monde circule. Mon repas est habituel avec pour plat un stèque frites. Après avoir payé, je réserve la même table pour mercredi, dernier jour de mon séjour ici.
*
Au Poisson Rouge, un homme et deux femmes qui travaillent dans les activités nautiques pour enfants. Il est d’abord question des parents : « Les pires, c’est psychologue scolaire et assistante sociale » puis des enfants de moins de douze ans qui n’ont pas à porter le masque et du coup c’est la honte, t’as pas de masque ça veut dire : t’as pas douze ans, du coup ils en mettent un.
Passe un camion de pompiers qui suit un autre véhicule tirant un canot de sauvetage. Ces jeunes hommes partant en manœuvre sont six dans l’habitacle en deux rangs serrés, vitres fermées, sans qu’aucun ne porte de masque.
Tout en mangeant mes viennoiseries, je parcours encore une fois, bientôt la dernière, le chemin côtier entre le Kasino et le port d’échouage. A l’arrivée, je m’assois (j’échoue) à ma table habituelle du Poisson rouge. Il fait frais mais quand même, relisant des lettres de Léautaud, je reste là une heure et demie.
Le lundi est le jour le plus animé dans ce coin de Saint-Quay en raison d’un marché qui se tient au bout du port, à la frontière avec Etables. A quoi s’ajoutent les échanges de vieilles choses à la ressourcerie d’à côté et, juste en-dessous, sur la plage, le cours de gym donné à une douzaine de femmes et à un homme par un cotche caricatural aidé d’une sono à musique dynamique (il faut savoir compter jusqu’à huit, toutes les séquences sont sur ce tempo).
Le temps est plutôt beau ce matin mais la pluie est annoncée pour l’après-midi. Quand je vais réserver une table aux Plaisanciers, je ne sais si je pourrai manger dehors ou non. Désormais la patronne connaît mon nom, si elle ne m’appelle pas encore par mon prénom, comme ce Louis dont elle me donnera la place à l’intérieur, s’il ne vient pas.
A midi moins le quart, je juge qu’il fait trop frais pour l’extérieur, mais Louis est là. J’ai droit à la table voisine dans ce bout de salle où pas trop de monde circule. Mon repas est habituel avec pour plat un stèque frites. Après avoir payé, je réserve la même table pour mercredi, dernier jour de mon séjour ici.
*
Au Poisson Rouge, un homme et deux femmes qui travaillent dans les activités nautiques pour enfants. Il est d’abord question des parents : « Les pires, c’est psychologue scolaire et assistante sociale » puis des enfants de moins de douze ans qui n’ont pas à porter le masque et du coup c’est la honte, t’as pas de masque ça veut dire : t’as pas douze ans, du coup ils en mettent un.
Passe un camion de pompiers qui suit un autre véhicule tirant un canot de sauvetage. Ces jeunes hommes partant en manœuvre sont six dans l’habitacle en deux rangs serrés, vitres fermées, sans qu’aucun ne porte de masque.
12 octobre 2020
A Saint-Quay, comme ailleurs, le dimanche peut être un moment difficile à passer. Celui-ci, qui sera le dernier ici, est l’objet d’une lutte entre averses et éclaircies, à quoi se mêle le vent. Sorti acheter des crêpes au Fournil du Casino pour mon petit-déjeuner, je me presse sur le court chemin du retour afin d’arriver avant la drache.
Vers dix heures, profitant d’une éclaircie, je me rends en bord de mer passant par le devant du Centre des Congrès devenu inutile. J’explore des petits coins pas encore vus de près où se cachent des pêcheurs, puis, les averses revenant, rentre dans mon chez moi provisoire.
Point question d’aller vers les ports pour déjeuner ce jour, Les Plaisanciers c’est fermé, Le Poisson Rouge itou. A proximité, j’ai le choix entre Le Café de la Plage (sans menu le ouiquennede) et son voisin Les Cochons Flingueurs (qui n’en a jamais), mais les terrasses étant impossibles, je crains leur clientèle de ce jour particulier, familiale pour le premier, amicale pour le second, l’une et l’autre potentiellement dangereuses.
Aussi c’est du Bibistrot dont je pousse la porte, un restaurant que l’on voit à peine, place de la Plage. Un jeune homme m’y accueille et me dit de choisir l’une des trois tables pour deux dont il dispose. Il en est aussi une circulaire pour quatre et une rectangulaire pour six et c’est tout. Tables et fauteuils sont de bon aloi, mais il règne autour un désordre que je qualifierais de dépressif.
Je commande six huîtres « de chez Lulu » et un burgueur cajun au poulet, avec une carafe d’eau. Je mange seul avec de la musique américaine en fond sonore. Le jeune homme, désœuvré, lit le journal, celui de la veille, qu’il doit avoir déjà lu hier. Le repliant, il me demande d’où je viens. Je cherche en vain quoi lui demander qui n’ait pas à voir avec « C’est calme aujourd’hui », à quoi il répondrait « On a eu du monde hier ».
Un peu avant treize heures arrive de quoi occuper la table de six. Ce sont des clients particuliers venus avec un bouquet de fleurs pour le jeune homme qui s’adresse à eux en les appelant pépé mémé tonton tata. C’est comme une réception de famille du dimanche mais le repas sera payé. Je me sens encore plus intrus. Le burgueur cajun n’aura pas apaisé ma faim mais j’abrège en omettant le dessert. Sitôt mon café bu, je paie mes vingt-trois euros et je file.
Vers dix heures, profitant d’une éclaircie, je me rends en bord de mer passant par le devant du Centre des Congrès devenu inutile. J’explore des petits coins pas encore vus de près où se cachent des pêcheurs, puis, les averses revenant, rentre dans mon chez moi provisoire.
Point question d’aller vers les ports pour déjeuner ce jour, Les Plaisanciers c’est fermé, Le Poisson Rouge itou. A proximité, j’ai le choix entre Le Café de la Plage (sans menu le ouiquennede) et son voisin Les Cochons Flingueurs (qui n’en a jamais), mais les terrasses étant impossibles, je crains leur clientèle de ce jour particulier, familiale pour le premier, amicale pour le second, l’une et l’autre potentiellement dangereuses.
Aussi c’est du Bibistrot dont je pousse la porte, un restaurant que l’on voit à peine, place de la Plage. Un jeune homme m’y accueille et me dit de choisir l’une des trois tables pour deux dont il dispose. Il en est aussi une circulaire pour quatre et une rectangulaire pour six et c’est tout. Tables et fauteuils sont de bon aloi, mais il règne autour un désordre que je qualifierais de dépressif.
Je commande six huîtres « de chez Lulu » et un burgueur cajun au poulet, avec une carafe d’eau. Je mange seul avec de la musique américaine en fond sonore. Le jeune homme, désœuvré, lit le journal, celui de la veille, qu’il doit avoir déjà lu hier. Le repliant, il me demande d’où je viens. Je cherche en vain quoi lui demander qui n’ait pas à voir avec « C’est calme aujourd’hui », à quoi il répondrait « On a eu du monde hier ».
Un peu avant treize heures arrive de quoi occuper la table de six. Ce sont des clients particuliers venus avec un bouquet de fleurs pour le jeune homme qui s’adresse à eux en les appelant pépé mémé tonton tata. C’est comme une réception de famille du dimanche mais le repas sera payé. Je me sens encore plus intrus. Le burgueur cajun n’aura pas apaisé ma faim mais j’abrège en omettant le dessert. Sitôt mon café bu, je paie mes vingt-trois euros et je file.
11 octobre 2020
Paul Léautaud doit sa connaissance de la Bretagne à son amante, Anne Cayssac, qui possédait à Pornic une maison appelée Ker Miaou. De ma (re)lecture, en cet automne breton, de sa Correspondance établie par Marie Dormoy (son amante ultérieure), ce choix d’extraits des lettres écrites par Léautaud à celle qu’il surnommait le Fléau, un condensé d’histoire d’amour :
Quand tu seras à Pornic, tu te rappelleras combien je te trouvais jolie, nue, dans mes bras, devant la glace. « Champagne inutile, disais-tu. Nous bandons fort bien tous les deux. » Nous bandions en effet fort bien. Tu suçais la pine avec la même gourmandise que tu gobais un éclair (toi-même tu faisais le rapprochement) et quant à moi, tu sais bien ce que je te faisais. Rappelle-toi tes paroles : « J’ai un amant que je dégoûte, vraiment. Il me met sa langue dans le nez, dans la bouche, dans le cou, dans le cul. Vraiment, je le dégoûte. » Le jeudi vingt-six février mil neuf cent vingt-cinq
On ne me reprendra pas à aller à Pornic à cette époque. Les mioches qui braillent, les locataires qui font du bruit, le pullulement des gens de passage, grotesques dans leurs costumes de circonstance, les voisins avec leurs phonos, c’est hideux. Comme tourment, la propriétaire de Ker Miaou suffit. Le jeudi deux août mil neuf cent vingt-huit
Mais non, ma chère amie, il n’y a en ce moment à Pornic, qu’une plèbe commune. Les hommes sont vulgaires, avec ces visages d’imbéciles – je les ai vus ! – et les femmes, pour la plupart, mastoques. (…) Pornic deviendra hideux, infréquentable, si cela continue. Il va devenir une plage pour basse classe. Il n’y a qu’à voir déjà la vulgarité des gens qui s’y prélassent en ce moment. Paris le quatorze août mil neuf cent vingt-huit
Moi qui vous ai connue obtenant le sirop dans la bouche en trois minutes de travail, toute fière de l’avoir bien sucé – ou vous trémoussant à califourchon sur moi. Le visage ravissant à voir d’expression cochonne ! J’ai eu le meilleur. L’amateur peut venir : il n’aura plus tout ce que j’ai eu. Fontenay le vingt-cinq juin mil neuf cent trente-deux
Vous êtes une sotte. Vous aviez une occasion de vous faire bouffer le cul et sucer votre pine pendant quelques jours tranquillement et vous n’avez pas su la mettre à profit. Le quatre octobre mil neuf cent trente-deux
Et si vous croyez que c’est agréable de vous bouffer le con, avec les pointes de votre ceinture qui vous blessent le visage, et qui vous blessent encore le bas-ventre quand on fourre sa pine entre vos cuisses. Paris le cinq octobre mil neuf cent trente-deux
Près de 200 francs dépensés dans ce dernier voyage, si complètement inutile – et pourtant utile, d’un certain côté. Mon Dieu, je ne pleure pas, bien que vous avoir bouffé le con une seule fois, et avoir tiré un seul coup, tout habillé, et debout, et seulement entre vos cuisses, ce soit un peu cher. Paris le six octobre mil neuf cent trente-deux
Alors que rien que de vous écrire, je suis obligé de me déboutonner tant je bande. Vous me faites suer. Jamais je n’ai bouffé le con à une femme comme je bouffe le vôtre ni mis ma langue dans un trou du cul comme je la mets dans le vôtre. Et je m’empresse de dire que j’ai la contrepartie, car jamais femme ne m’a sucé la queue comme vous me la sucez, ni fait tirer de bons coups comme ceux que nous tirons ensemble, même après dix-huit ans de liaison, espèce de folle. Le huit octobre mil neuf cent trente-deux
*
Deux fois, à Pornic, je suis allé jusqu’à Ker Miaou, bien accompagné.
Quand tu seras à Pornic, tu te rappelleras combien je te trouvais jolie, nue, dans mes bras, devant la glace. « Champagne inutile, disais-tu. Nous bandons fort bien tous les deux. » Nous bandions en effet fort bien. Tu suçais la pine avec la même gourmandise que tu gobais un éclair (toi-même tu faisais le rapprochement) et quant à moi, tu sais bien ce que je te faisais. Rappelle-toi tes paroles : « J’ai un amant que je dégoûte, vraiment. Il me met sa langue dans le nez, dans la bouche, dans le cou, dans le cul. Vraiment, je le dégoûte. » Le jeudi vingt-six février mil neuf cent vingt-cinq
On ne me reprendra pas à aller à Pornic à cette époque. Les mioches qui braillent, les locataires qui font du bruit, le pullulement des gens de passage, grotesques dans leurs costumes de circonstance, les voisins avec leurs phonos, c’est hideux. Comme tourment, la propriétaire de Ker Miaou suffit. Le jeudi deux août mil neuf cent vingt-huit
Mais non, ma chère amie, il n’y a en ce moment à Pornic, qu’une plèbe commune. Les hommes sont vulgaires, avec ces visages d’imbéciles – je les ai vus ! – et les femmes, pour la plupart, mastoques. (…) Pornic deviendra hideux, infréquentable, si cela continue. Il va devenir une plage pour basse classe. Il n’y a qu’à voir déjà la vulgarité des gens qui s’y prélassent en ce moment. Paris le quatorze août mil neuf cent vingt-huit
Moi qui vous ai connue obtenant le sirop dans la bouche en trois minutes de travail, toute fière de l’avoir bien sucé – ou vous trémoussant à califourchon sur moi. Le visage ravissant à voir d’expression cochonne ! J’ai eu le meilleur. L’amateur peut venir : il n’aura plus tout ce que j’ai eu. Fontenay le vingt-cinq juin mil neuf cent trente-deux
Vous êtes une sotte. Vous aviez une occasion de vous faire bouffer le cul et sucer votre pine pendant quelques jours tranquillement et vous n’avez pas su la mettre à profit. Le quatre octobre mil neuf cent trente-deux
Et si vous croyez que c’est agréable de vous bouffer le con, avec les pointes de votre ceinture qui vous blessent le visage, et qui vous blessent encore le bas-ventre quand on fourre sa pine entre vos cuisses. Paris le cinq octobre mil neuf cent trente-deux
Près de 200 francs dépensés dans ce dernier voyage, si complètement inutile – et pourtant utile, d’un certain côté. Mon Dieu, je ne pleure pas, bien que vous avoir bouffé le con une seule fois, et avoir tiré un seul coup, tout habillé, et debout, et seulement entre vos cuisses, ce soit un peu cher. Paris le six octobre mil neuf cent trente-deux
Alors que rien que de vous écrire, je suis obligé de me déboutonner tant je bande. Vous me faites suer. Jamais je n’ai bouffé le con à une femme comme je bouffe le vôtre ni mis ma langue dans un trou du cul comme je la mets dans le vôtre. Et je m’empresse de dire que j’ai la contrepartie, car jamais femme ne m’a sucé la queue comme vous me la sucez, ni fait tirer de bons coups comme ceux que nous tirons ensemble, même après dix-huit ans de liaison, espèce de folle. Le huit octobre mil neuf cent trente-deux
*
Deux fois, à Pornic, je suis allé jusqu’à Ker Miaou, bien accompagné.
11 octobre 2020
Je n’ai pas encore tout vu de Saint-Quay, aussi, ce samedi, vers huit heures et demie, parti de la place d’Armes, je monte la rue de la Jeanne qui mène, et ce n’est pas tout près, au lieu-dit Kertugal, quartier ancien de la commune.
J’y trouve d’abord, construite grâce à la générosité de quelques particuliers en mil huit cent vingt-huit, la chapelle Notre-Dame de la Garde, que je n’attendais pas d’une telle taille, de forme ronde, unique en Bretagne, pratique pour tourner autour mais malheureusement fermée, puis, rue des Dolmens, le Parc des Druides, où s’amoncellent des pierres monumentales dans le plus grand désordre, enfin, au bout d’un court chemin de terre, le lavoir de Porcuro dont l’eau est totalement croupie.
Sous le nom des rues, une petite pancarte indique que le quartier est protégé par « Participation Citoyenne, en liaison directe avec la gendarmerie et la police municipale ». Je ne vois personne mais il ne serait pas étonnant que le jour et l’heure de mon passage figurent dans un cahier suivies de cette description : « Homme assez âgé, cheveux longs grisonnants, vêtu de noir, avec un sac à dos, regarde un peu partout comme s’il était en repérage ».
En allant tout droit je rejoins le Géherre Trente-Quatre par le chemin de Guerbineu. Cela me permet de revenir vers le Kasino en bénéficiant de la plus belle vue qui soit. Après la pointe de l’Isnain, je descends sur la plage où je vais à la rencontre des vagues pour la première fois depuis que je suis en Bretagne. De là, je fais une photo de la demeure rose saumon où a du résider une princesse de conte pour enfants. C’était il y a longtemps à en juger par la rouille de la chaîne qui ferme le portail.
De la plage du Casino, je passe à celle du Châtelet où je m’approche au plus près de la piscine d’eau de mer, n’osant toutefois pas en faire le tour sur son mur d’enceinte. Il y a deux ou trois jours, j’ai été pris d’un vertige dans la rue. Il ne faudrait pas que cela se reproduise dans des circonstances qui me mettraient en danger.
Je retrouve le chemin côtier près d’une construction étrange de forme phallique (il n'y a pas qu'à Binic). Peut-être l’été sert-elle de poste de gué à un surveillant de baignade. Quand j’arrive au Poisson Rouge, il est dix heures et demie. Cela fait deux heures que je marche.
Le temps semble vouloir se maintenir au plutôt beau. Aussi je réserve une table d’extérieur aux Plaisanciers. Et à midi, je n’y côtoie, à bonne distance, qu’un couple d’âge aussi certain que le mien. Elle et lui sont plus intéressés par leur smartphone que par ce qu’il y a dans leur assiette. Après le buffet d’entrées, je choisis les paupiettes de veau et la pomme fondante mascarpone caramel (la présence de la pomme y est symbolique).
Au retour, je tente un café à la terrasse du Café de la Plage, sans pouvoir y tenir longtemps. Bien qu’ensoleillée, avec vue sur la plage du Casino, sur la maison de la princesse, sur le laid Kasino et sur l’angle de mon logis provisoire, elle a un gros défaut, le vent y est chez lui.
*
Coureur à pied s’arrêtant devant deux connaissances féminines qui boivent un café au Poisson Rouge :
-Hey les filles, je fais rien de spécial ce soir, on boit l’apéro ensemble ?
-Ouais bah, on s’appelle, répond l’une.
Toujours plus facile de dire non au téléphone (et ça leur laisse le temps de trouver un alibi de refus).
*
Hors saison, j’ai l’impression que la confiserie Ker Suçons n’ouvre que les jours de tempête.
J’y trouve d’abord, construite grâce à la générosité de quelques particuliers en mil huit cent vingt-huit, la chapelle Notre-Dame de la Garde, que je n’attendais pas d’une telle taille, de forme ronde, unique en Bretagne, pratique pour tourner autour mais malheureusement fermée, puis, rue des Dolmens, le Parc des Druides, où s’amoncellent des pierres monumentales dans le plus grand désordre, enfin, au bout d’un court chemin de terre, le lavoir de Porcuro dont l’eau est totalement croupie.
Sous le nom des rues, une petite pancarte indique que le quartier est protégé par « Participation Citoyenne, en liaison directe avec la gendarmerie et la police municipale ». Je ne vois personne mais il ne serait pas étonnant que le jour et l’heure de mon passage figurent dans un cahier suivies de cette description : « Homme assez âgé, cheveux longs grisonnants, vêtu de noir, avec un sac à dos, regarde un peu partout comme s’il était en repérage ».
En allant tout droit je rejoins le Géherre Trente-Quatre par le chemin de Guerbineu. Cela me permet de revenir vers le Kasino en bénéficiant de la plus belle vue qui soit. Après la pointe de l’Isnain, je descends sur la plage où je vais à la rencontre des vagues pour la première fois depuis que je suis en Bretagne. De là, je fais une photo de la demeure rose saumon où a du résider une princesse de conte pour enfants. C’était il y a longtemps à en juger par la rouille de la chaîne qui ferme le portail.
De la plage du Casino, je passe à celle du Châtelet où je m’approche au plus près de la piscine d’eau de mer, n’osant toutefois pas en faire le tour sur son mur d’enceinte. Il y a deux ou trois jours, j’ai été pris d’un vertige dans la rue. Il ne faudrait pas que cela se reproduise dans des circonstances qui me mettraient en danger.
Je retrouve le chemin côtier près d’une construction étrange de forme phallique (il n'y a pas qu'à Binic). Peut-être l’été sert-elle de poste de gué à un surveillant de baignade. Quand j’arrive au Poisson Rouge, il est dix heures et demie. Cela fait deux heures que je marche.
Le temps semble vouloir se maintenir au plutôt beau. Aussi je réserve une table d’extérieur aux Plaisanciers. Et à midi, je n’y côtoie, à bonne distance, qu’un couple d’âge aussi certain que le mien. Elle et lui sont plus intéressés par leur smartphone que par ce qu’il y a dans leur assiette. Après le buffet d’entrées, je choisis les paupiettes de veau et la pomme fondante mascarpone caramel (la présence de la pomme y est symbolique).
Au retour, je tente un café à la terrasse du Café de la Plage, sans pouvoir y tenir longtemps. Bien qu’ensoleillée, avec vue sur la plage du Casino, sur la maison de la princesse, sur le laid Kasino et sur l’angle de mon logis provisoire, elle a un gros défaut, le vent y est chez lui.
*
Coureur à pied s’arrêtant devant deux connaissances féminines qui boivent un café au Poisson Rouge :
-Hey les filles, je fais rien de spécial ce soir, on boit l’apéro ensemble ?
-Ouais bah, on s’appelle, répond l’une.
Toujours plus facile de dire non au téléphone (et ça leur laisse le temps de trouver un alibi de refus).
*
Hors saison, j’ai l’impression que la confiserie Ker Suçons n’ouvre que les jours de tempête.
10 octobre 2020
Une belle journée est annoncée par toutes les météos, ce vendredi, de quoi prendre à nouveau le car BreizhGo pour Binic. A l’arrivée, je mets un peu de temps avant de trouver la boulangerie où le duo croissant pain au chocolat est dix centimes moins cher qu’à Saint-Quay. Je les mange face au soleil levant accompagnés d’un allongé à la terrasse du bar tabac Le Narval.
Cela fait, je contourne l’extrémité du port, passant ainsi côté sud, afin de pratiquer le Géherre Trente-Quatre en direction de Saint-Brieuc. Il commence pépère en longeant la belle plage de la Banche au bout de laquelle se trouve l’Hôtel de la Plage. Il faut le contourner, ainsi que les propriétés qui suivent, par une route montante, avant de retrouver un sentier prometteur un peu boueux (il a plu toute la nuit). En me retournant, je vois au loin Binic son église et son port.
J’approche de la pointe de Bréhin, m’apprend une pancarte. Elle n’est qu’à quinze minutes. Je progresse à bon pas jusqu’à ce que je trouve en travers un embrouillamini d’arbres chus lors de la tempête Alex. Impossible de contourner ce barrage, du moins quand on a mon âge.
Je rebrousse et trouve une large allée qui j’espère me ramènera vers la côte. Je suis détrompé par une autochtone à chien de poche. Cette allée va à Quéré, un hameau, d’où peut-être, me dit-elle, en allant sur ma gauche, je pourrai retrouver le chemin de Grande Randonnée.
De Quéré, une petite route me conduit à un sous hameau nommé Courtel d’où part un chemin agricole allant vers la mer, mais je me rends compte qu’elle n’est pas tout près et il me faudra revenir, aussi fais-je demi-tour sans attendre.
De retour à Binic, je réserve une des quatre tables de terrasse de L’Adresse puis prends un café au Chaland Qui Passe. On y écoute de la bonne musique des années soixante-dix. L’un s’y réjouit du généreux soleil : « On dirait la chaleur du corps d’une femme ». Le patron s’amuse avec son assistant Gougueule :
-Comment je m’appelle ?
-Vous vous appelez Ducon.
A midi pile, j’ai le choix de la table à L’Adresse. Le menu du jour lui est sans choix possible mais que m’importe, je suis à l’extérieur, au soleil, loin des autres, près du port, à la hauteur de la passerelle qui permet de le traverser. Une sono discrète fait chanter Black trombone à Serge Gainsbourg.
Bien que brasserie, on propose ici une cuisine élaborée. L’entrée, des raviolis ricotta aux épinards, est délicieuse. Le bourguignon pommes vapeur qui suit aussi, présenté dans une assiette qui a l’air d’avoir été moulée sur une vague. Le dessert, une marquise au chocolat crème anglaise, ne me déçoit pas. Avec le quart de vin rouge du moment, j’en ai pour vingt et un euros. Cette Adresse en est une bonne.
Sorti de table, je traverse la passerelle afin d’explorer le côté sud du port par le quai de Pordic et l’esplanade de l’Aber Vrac’h. On arrive ensuite à l’avant-port par le quai des Corsaires. La vue à bâbord est sur la ville et à tribord sur la plage à piscine d’eau de mer. Une grosse balise à bout rouge érigée sur l’esplanade montre que Binic est toujours à la pointe, s’agissant de l’érotisme.
C’est à la terrasse du Narval que j’attends le car BreizhGo du retour. Un homme en raconte une bien bonne à ses amis : « Il me demande des nouvelles de ma femme. Je lui donne et après je lui demande : Et la tienne ? Et il me répond : Oh ma chienne je ne l’ai pas amenée avec moi ce matin. »
*
Le jeune François Truffaut a passé plusieurs étés à Binic, dans la villa Ty Rosen, rue de l'Ic, que louait sa grand-mère, Geneviève de Monferrand. Il y a même séjourné pendant toute l'année scolaire Trente-Neuf Quarante.
Cela fait, je contourne l’extrémité du port, passant ainsi côté sud, afin de pratiquer le Géherre Trente-Quatre en direction de Saint-Brieuc. Il commence pépère en longeant la belle plage de la Banche au bout de laquelle se trouve l’Hôtel de la Plage. Il faut le contourner, ainsi que les propriétés qui suivent, par une route montante, avant de retrouver un sentier prometteur un peu boueux (il a plu toute la nuit). En me retournant, je vois au loin Binic son église et son port.
J’approche de la pointe de Bréhin, m’apprend une pancarte. Elle n’est qu’à quinze minutes. Je progresse à bon pas jusqu’à ce que je trouve en travers un embrouillamini d’arbres chus lors de la tempête Alex. Impossible de contourner ce barrage, du moins quand on a mon âge.
Je rebrousse et trouve une large allée qui j’espère me ramènera vers la côte. Je suis détrompé par une autochtone à chien de poche. Cette allée va à Quéré, un hameau, d’où peut-être, me dit-elle, en allant sur ma gauche, je pourrai retrouver le chemin de Grande Randonnée.
De Quéré, une petite route me conduit à un sous hameau nommé Courtel d’où part un chemin agricole allant vers la mer, mais je me rends compte qu’elle n’est pas tout près et il me faudra revenir, aussi fais-je demi-tour sans attendre.
De retour à Binic, je réserve une des quatre tables de terrasse de L’Adresse puis prends un café au Chaland Qui Passe. On y écoute de la bonne musique des années soixante-dix. L’un s’y réjouit du généreux soleil : « On dirait la chaleur du corps d’une femme ». Le patron s’amuse avec son assistant Gougueule :
-Comment je m’appelle ?
-Vous vous appelez Ducon.
A midi pile, j’ai le choix de la table à L’Adresse. Le menu du jour lui est sans choix possible mais que m’importe, je suis à l’extérieur, au soleil, loin des autres, près du port, à la hauteur de la passerelle qui permet de le traverser. Une sono discrète fait chanter Black trombone à Serge Gainsbourg.
Bien que brasserie, on propose ici une cuisine élaborée. L’entrée, des raviolis ricotta aux épinards, est délicieuse. Le bourguignon pommes vapeur qui suit aussi, présenté dans une assiette qui a l’air d’avoir été moulée sur une vague. Le dessert, une marquise au chocolat crème anglaise, ne me déçoit pas. Avec le quart de vin rouge du moment, j’en ai pour vingt et un euros. Cette Adresse en est une bonne.
Sorti de table, je traverse la passerelle afin d’explorer le côté sud du port par le quai de Pordic et l’esplanade de l’Aber Vrac’h. On arrive ensuite à l’avant-port par le quai des Corsaires. La vue à bâbord est sur la ville et à tribord sur la plage à piscine d’eau de mer. Une grosse balise à bout rouge érigée sur l’esplanade montre que Binic est toujours à la pointe, s’agissant de l’érotisme.
C’est à la terrasse du Narval que j’attends le car BreizhGo du retour. Un homme en raconte une bien bonne à ses amis : « Il me demande des nouvelles de ma femme. Je lui donne et après je lui demande : Et la tienne ? Et il me répond : Oh ma chienne je ne l’ai pas amenée avec moi ce matin. »
*
Le jeune François Truffaut a passé plusieurs étés à Binic, dans la villa Ty Rosen, rue de l'Ic, que louait sa grand-mère, Geneviève de Monferrand. Il y a même séjourné pendant toute l'année scolaire Trente-Neuf Quarante.
9 octobre 2020
Le temps annoncé incertain me conduit à rester à Saint-Quay ce jeudi. Dès le jour levé, je prends le sentier côtier, direction les ports. Ce chemin offre des beautés dont je ne suis pas rassasié. Malheureusement, l’éboulement à hauteur du sémaphore semble sérieux. Plus question de passer devant celui-ci. Le contourner par la route est désagréable.
Cela me permet néanmoins de voir le derrière de la turquerie. J’entre même dans ce qui est le parquigne de l’hôtel Ker Moor et fais des photos de cette bâtisse fantasmatique auquel est adjointe la partie contemporaine de l’hôtel, tristement fonctionnelle. Un homme à valise en sort à qui je demande si des chambres sont proposées dans le bâtiment d’inspiration mauresque. Il ne sait pas, me conseille d’aller demander à l’accueil où ils sont très gentils.
Encouragé par ce propos je m’y risque et pose la question à la femme qui trône derrière une vitre comme une employée de la Sécurité Sociale.
-Oh non non non, c’est privé ça, ça n’a rien à voir avec l’hôtel, me répond-elle d’un ton que je ne qualifierais pas d’aimable.
Comment le propriétaire de la turquerie a-t-il pu accepter la construction de ce moche hôtel qui lui est accolé ? Mon hypothèse est qu’il a des intérêts dans l’hôtellerie. Quoi qu’il en soit, je ne confondrai plus l’hôtel Ker Moor et la villa Kermor.
Rejoignant le sentier par la venelle de la Comtesse, je poursuis jusqu’à Port d’Armor. De l’un de ses bâtiments s’échappe un panache de vapeur d’eau. Ici fonctionnent des usines à poisson. Elles sont inapprochables.
Je longe ensuite le port d’échouage du Portrieux jusqu’au Poisson Rouge. Je suis le seul client en terrasse. Il y fait doux, suffisamment pour lire la Correspondance de Paul Léautaud, dont j’approche de la fin.
Quand je commence à avoir frais, je reprends la marche, décidé à aller voir le bout du bout de Saint-Quay, là où se trouve le chantier naval, à la frontière avec Etables. J’en traverse une partie, sans être sûr d’en avoir le droit, afin de rejoindre la digue qui, à son extrémité, fait face au phare situé sur la mâchoire inférieure du Port d’Armor. On ne peut pas aller plus loin. En me retournant, je distingue, au loin, dans la brume, la croix de la pointe de la Rognouse.
C’est dans ce Port d’Armor qu’à midi je déjeune une nouvelle fois au restaurant Les Plaisanciers qui devrait plutôt s’appeler Les Ouvriers tant ils constituent l’essentiel de sa clientèle. Le vent empêchant l’extérieur, je mange dans la terrasse fermée, pas rassuré par le nombre d’individus démasqués autour de moi. Après le buffet d’entrées, je choisis l’aile de raie aux câpres, la mousse au chocolat, un café, et je suis content quand je suis de nouveau dehors.
Le temps se maintenant, je prends un second café à la terrasse du Poisson Rouge, toujours épargnée par le vent. A ma droite est un couple de retraités mangeant des crêpes. Quand ils se lèvent pour partir, l’homme se tourne vers moi :
-Pardon monsieur, je peux pas résister : qu’est-ce que vous lisez avec autant de passion ?
-La Correspondance de Léautaud.
-Ah bah, ça m’étonne pas. Merci de m’avoir répondu.
Peut-être effectivement connaît-il, peut-être pas. Quoi qu’il en soit, un peu plus tard j’arrive à la fin, page mille deux cent vingt-sept. La dernière lettre de Léautaud est datée du onze janvier mil neuf cent cinquante-six, il meurt le vingt-six février.
*.
Il y a presque trois ans, en conclusion de mon texte intitulé « Pomme en concert à l’Hôtel de Région », j’écrivais Pomme serait l’invitée idéale de Remède à la mélancolie, l’émission d’Eva Bester sur France Inter, la seule émission de cette chaîne qui soit écoutable, le dimanche à dix heures, au moment où c’est la messe sur France Culture.
« merci! et j'adorerais aller à l'émission remède à la mélancolie sur france inter;) », me répondait-elle.
Ce sera chose faite ce dimanche.
Cela me permet néanmoins de voir le derrière de la turquerie. J’entre même dans ce qui est le parquigne de l’hôtel Ker Moor et fais des photos de cette bâtisse fantasmatique auquel est adjointe la partie contemporaine de l’hôtel, tristement fonctionnelle. Un homme à valise en sort à qui je demande si des chambres sont proposées dans le bâtiment d’inspiration mauresque. Il ne sait pas, me conseille d’aller demander à l’accueil où ils sont très gentils.
Encouragé par ce propos je m’y risque et pose la question à la femme qui trône derrière une vitre comme une employée de la Sécurité Sociale.
-Oh non non non, c’est privé ça, ça n’a rien à voir avec l’hôtel, me répond-elle d’un ton que je ne qualifierais pas d’aimable.
Comment le propriétaire de la turquerie a-t-il pu accepter la construction de ce moche hôtel qui lui est accolé ? Mon hypothèse est qu’il a des intérêts dans l’hôtellerie. Quoi qu’il en soit, je ne confondrai plus l’hôtel Ker Moor et la villa Kermor.
Rejoignant le sentier par la venelle de la Comtesse, je poursuis jusqu’à Port d’Armor. De l’un de ses bâtiments s’échappe un panache de vapeur d’eau. Ici fonctionnent des usines à poisson. Elles sont inapprochables.
Je longe ensuite le port d’échouage du Portrieux jusqu’au Poisson Rouge. Je suis le seul client en terrasse. Il y fait doux, suffisamment pour lire la Correspondance de Paul Léautaud, dont j’approche de la fin.
Quand je commence à avoir frais, je reprends la marche, décidé à aller voir le bout du bout de Saint-Quay, là où se trouve le chantier naval, à la frontière avec Etables. J’en traverse une partie, sans être sûr d’en avoir le droit, afin de rejoindre la digue qui, à son extrémité, fait face au phare situé sur la mâchoire inférieure du Port d’Armor. On ne peut pas aller plus loin. En me retournant, je distingue, au loin, dans la brume, la croix de la pointe de la Rognouse.
C’est dans ce Port d’Armor qu’à midi je déjeune une nouvelle fois au restaurant Les Plaisanciers qui devrait plutôt s’appeler Les Ouvriers tant ils constituent l’essentiel de sa clientèle. Le vent empêchant l’extérieur, je mange dans la terrasse fermée, pas rassuré par le nombre d’individus démasqués autour de moi. Après le buffet d’entrées, je choisis l’aile de raie aux câpres, la mousse au chocolat, un café, et je suis content quand je suis de nouveau dehors.
Le temps se maintenant, je prends un second café à la terrasse du Poisson Rouge, toujours épargnée par le vent. A ma droite est un couple de retraités mangeant des crêpes. Quand ils se lèvent pour partir, l’homme se tourne vers moi :
-Pardon monsieur, je peux pas résister : qu’est-ce que vous lisez avec autant de passion ?
-La Correspondance de Léautaud.
-Ah bah, ça m’étonne pas. Merci de m’avoir répondu.
Peut-être effectivement connaît-il, peut-être pas. Quoi qu’il en soit, un peu plus tard j’arrive à la fin, page mille deux cent vingt-sept. La dernière lettre de Léautaud est datée du onze janvier mil neuf cent cinquante-six, il meurt le vingt-six février.
*.
Il y a presque trois ans, en conclusion de mon texte intitulé « Pomme en concert à l’Hôtel de Région », j’écrivais Pomme serait l’invitée idéale de Remède à la mélancolie, l’émission d’Eva Bester sur France Inter, la seule émission de cette chaîne qui soit écoutable, le dimanche à dix heures, au moment où c’est la messe sur France Culture.
« merci! et j'adorerais aller à l'émission remède à la mélancolie sur france inter;) », me répondait-elle.
Ce sera chose faite ce dimanche.
8 octobre 2020
Point de collégienne pour s’asseoir à côté de moi ce mercredi à l’arrêt Casino du BreizhGo, mais un lycéen tout aussi poli. Et point de destination Saint-Brieuc, je descends à Binic, « le grain de beauté des Côtes-d'Armor ». Le jour n’a pas fini de se lever. Je lui laisse un peu de temps en buvant un allongé à la terrasse du bar tabac Le Narval, vue sur le port, un euro vingt.
Celui-ci bu, je parcours le côté nord du port de plaisance puis de l’avant-port, jusqu’au bout de la digue de Penthièvre où se trouvent le phare et un pêcheur. Je tente ensuite d’accéder à la plage par un tunnel un peu flippant mais l’inondation qui a touché Binic lors du passage d’Alex y a laissé une mare d’eau.
Le temps ayant l’air de se tenir, je décide de rejoindre le Géherre Trente-Quatre et d’y marcher en direction de Saint-Quay. On y accède par une succession de plans inclinés de la plus belle esthétique. Je longe d’abord la plage de l’Avant-Port puis me heurte à une barrière. Un éboulement oblige à un court détour par l’intérieur, ce qui me met en présence de beaux chevaux que leur propriétaire est en train de nourrir. Le sentier retrouvé, j’aperçois la pointe de la Rognouse où, tel un avertissement, est plantée une croix. Je l’ai bientôt atteinte.
De là est visible au loin le bout du port de Saint-Quay. Mon objectif n’est pas de rentrer à pied. Je fais demi-tour et alors qu’à aller je marchais seul, je dois maintenant compter avec des locaux munis ou non de chiens. Arrivé à l’avant-port, je réserve une table d’extérieur, sous la pergola, à la Cabane à Crabes, puis vais prendre un café Léautaud au Chaland Qui Passe (un euro quarante).
Les gens d’ici ont l’air plus stressés par le Covid que ceux de Saint-Quay et de Saint-Brieuc. On trouve même des sens uniques sur les trottoirs. Ce doit être une conséquence de la fréquentation d’été. Quant à moi, je ne suis pas tranquille, mais depuis que j’ai quitté Paimpol, je me passe du masque dans les rues, faisant toujours en sorte d’être à au moins deux mètres de quiconque.
A midi, je prends possession de ma table de bord de port à la Cabane à Crabes. Le menu Cabane propose six huîtres suivies soit d’un demi-crabe soit d’un crabe entier et du dessert du jour, première possibilité à dix-neuf euros, seconde à vingt-cinq. Pourquoi économiser six euros ?
Avant que l’animal me soit présenté, le serveur apporte l’outillage nécessaire et un seau en plastique noir qu’il pose au sol pour les déchets, puis il revient avec un gros maillet. Oh my God, qu’est-ce que je vais faire de ça ? C’est pour casser les pinces, me dit-il, mais vous pouvez aussi utiliser le casse-noix. Ouf.
Tout arrive ensemble, les six belles huîtres, le crabe dont il n’y a qu’à soulever le couvercle et les pommes de terre en robe des champs. Je me débrouille mieux que je ne pensais pour ces travaux manuels. A la table voisine est un couple ayant choisi une moitié pour lui et un entier pour elle. Cette dernière ne craint pas d’utiliser le maillet à grand bruit. A croire que toute sa vie, elle a assommé des taureaux. Le dessert est une profiterole à deux boules. Avec mon demi de chardonnay, cela fait un peu plus de trente-six euros.
Sorti de cette cabane, je prends le soleil sur l’un des bancs du promontoire qui domine l’avant-port d’où je vois une jeune femme qui nage dans l’eau calme. Quand elle se rhabille près des cabanes colorées de la plage, je constate malgré la distance qu’elle a de jolis petits seins.
Le café, je le bois au Narval où je tente ensuite de lire Léautaud malgré la présence d’une institutrice de maternelle qui raconte à son amie comment depuis trois semaines elle prépare son inspection. Cette intellectuelle rêve d’une chose : aller voir le concert des Enfoirés et répond à tout ce que lui dit sa copine par un assommant « Ouais ouais ouais ouais ouais ».
Alors que j’attends le BreizhGo du retour devant le Crédit Agricole, je me dis que cette fois, la Météo Agricole a vu juste : zéro millimètre de pluie ce mercredi à Binic, « le grain de beauté des Côtes-d'Armor ».
*
Nous sommes en mil neuf cent quatre-vingt-onze. Des publicitaires cherchent comment faire connaître Binic. Ils posent une carte des Côtes-d'Armor sur la table, et mettent un point à l'emplacement de la station. L'un d'eux a une illumination, il voit dans le département la robe de Bécassine avec un décolleté sur la baie de Saint-Brieuc. L'agence sollicite une jeune femme pour faire une photo. On lui peint la poitrine en bleu, on lui met une robe verte à liseré blanc et on lui place un morceau de buvard mâché sur le sein gauche, là où se situe Binic, en guise de grain de beauté, et voilà une affiche faite avec pour légende : « Binic, le grain de beauté des Côtes-d'Armor ».
Patrick Poivre (d’Arvor) qui présente le journal télévisé en parle et la montre, et bingo !
Il va de soi qu’une telle chose ne serait plus possible dans notre vertueux vingt et unième siècle.
Celui-ci bu, je parcours le côté nord du port de plaisance puis de l’avant-port, jusqu’au bout de la digue de Penthièvre où se trouvent le phare et un pêcheur. Je tente ensuite d’accéder à la plage par un tunnel un peu flippant mais l’inondation qui a touché Binic lors du passage d’Alex y a laissé une mare d’eau.
Le temps ayant l’air de se tenir, je décide de rejoindre le Géherre Trente-Quatre et d’y marcher en direction de Saint-Quay. On y accède par une succession de plans inclinés de la plus belle esthétique. Je longe d’abord la plage de l’Avant-Port puis me heurte à une barrière. Un éboulement oblige à un court détour par l’intérieur, ce qui me met en présence de beaux chevaux que leur propriétaire est en train de nourrir. Le sentier retrouvé, j’aperçois la pointe de la Rognouse où, tel un avertissement, est plantée une croix. Je l’ai bientôt atteinte.
De là est visible au loin le bout du port de Saint-Quay. Mon objectif n’est pas de rentrer à pied. Je fais demi-tour et alors qu’à aller je marchais seul, je dois maintenant compter avec des locaux munis ou non de chiens. Arrivé à l’avant-port, je réserve une table d’extérieur, sous la pergola, à la Cabane à Crabes, puis vais prendre un café Léautaud au Chaland Qui Passe (un euro quarante).
Les gens d’ici ont l’air plus stressés par le Covid que ceux de Saint-Quay et de Saint-Brieuc. On trouve même des sens uniques sur les trottoirs. Ce doit être une conséquence de la fréquentation d’été. Quant à moi, je ne suis pas tranquille, mais depuis que j’ai quitté Paimpol, je me passe du masque dans les rues, faisant toujours en sorte d’être à au moins deux mètres de quiconque.
A midi, je prends possession de ma table de bord de port à la Cabane à Crabes. Le menu Cabane propose six huîtres suivies soit d’un demi-crabe soit d’un crabe entier et du dessert du jour, première possibilité à dix-neuf euros, seconde à vingt-cinq. Pourquoi économiser six euros ?
Avant que l’animal me soit présenté, le serveur apporte l’outillage nécessaire et un seau en plastique noir qu’il pose au sol pour les déchets, puis il revient avec un gros maillet. Oh my God, qu’est-ce que je vais faire de ça ? C’est pour casser les pinces, me dit-il, mais vous pouvez aussi utiliser le casse-noix. Ouf.
Tout arrive ensemble, les six belles huîtres, le crabe dont il n’y a qu’à soulever le couvercle et les pommes de terre en robe des champs. Je me débrouille mieux que je ne pensais pour ces travaux manuels. A la table voisine est un couple ayant choisi une moitié pour lui et un entier pour elle. Cette dernière ne craint pas d’utiliser le maillet à grand bruit. A croire que toute sa vie, elle a assommé des taureaux. Le dessert est une profiterole à deux boules. Avec mon demi de chardonnay, cela fait un peu plus de trente-six euros.
Sorti de cette cabane, je prends le soleil sur l’un des bancs du promontoire qui domine l’avant-port d’où je vois une jeune femme qui nage dans l’eau calme. Quand elle se rhabille près des cabanes colorées de la plage, je constate malgré la distance qu’elle a de jolis petits seins.
Le café, je le bois au Narval où je tente ensuite de lire Léautaud malgré la présence d’une institutrice de maternelle qui raconte à son amie comment depuis trois semaines elle prépare son inspection. Cette intellectuelle rêve d’une chose : aller voir le concert des Enfoirés et répond à tout ce que lui dit sa copine par un assommant « Ouais ouais ouais ouais ouais ».
Alors que j’attends le BreizhGo du retour devant le Crédit Agricole, je me dis que cette fois, la Météo Agricole a vu juste : zéro millimètre de pluie ce mercredi à Binic, « le grain de beauté des Côtes-d'Armor ».
*
Nous sommes en mil neuf cent quatre-vingt-onze. Des publicitaires cherchent comment faire connaître Binic. Ils posent une carte des Côtes-d'Armor sur la table, et mettent un point à l'emplacement de la station. L'un d'eux a une illumination, il voit dans le département la robe de Bécassine avec un décolleté sur la baie de Saint-Brieuc. L'agence sollicite une jeune femme pour faire une photo. On lui peint la poitrine en bleu, on lui met une robe verte à liseré blanc et on lui place un morceau de buvard mâché sur le sein gauche, là où se situe Binic, en guise de grain de beauté, et voilà une affiche faite avec pour légende : « Binic, le grain de beauté des Côtes-d'Armor ».
Patrick Poivre (d’Arvor) qui présente le journal télévisé en parle et la montre, et bingo !
Il va de soi qu’une telle chose ne serait plus possible dans notre vertueux vingt et unième siècle.
© 2014 Michel Perdrial - Design: Bureau l’Imprimante