Deux vigiles balaises, l’un à l’extérieur, l’autre à l’intérieur, m’accueillent ce dimanche vers huit heures dix au Lycée Camille Saint-Saëns dans lequel se situe mon bureau de vote. Je dis également bonjour à des élu(e)s que je ne connais pas et aux assesseurs. Je présente mes cartes d’électeur et d’identité. Je prends une enveloppe et suis invité à faire de même pour les deux bulletins disponibles. « J’ai déjà ce qu’il faut », réponds-je.
Car pas question que je touche à celui marqué Le Pen. C’est pour voter contre elle que je suis ici. Caché par le rideau de l’isoloir, je glisse mon bulletin Macron dans l’enveloppe. Je ne pouvais laisser faire ce sale boulot à d’autres sans y participer moi-même, et il n’y a qu’une façon de voter contre Le Pen, voter Macron. C’est mathématique, si on ne vote pas pour celui qui est potentiellement en tête, on donne une chance à celle qui est derrière de passer devant. Et donc voter blanc, voter nul, ne pas voter, c’est voter Le Pen.
Ce n’est pas l’affluence à Camille Saint-Saëns. Seule une jeune femme me précède et personne ne me suit. Le chef du bureau Quarante et Un vérifie une nouvelle fois mes papiers et à son signal je laisse tomber Macron dans l’urne. « A voté. »
Il me reste à émarger.
-J’espère que j’ai signé dans la bonne colonne, dis-je à celle qui avec une règle évidée m’indique où.
-Oui regardez, deuxième tour. Vous n’êtes pas venu la dernière fois ?
-Non
-Ça se voit.
-Je suis content que ça se voie.
*
Le dimanche, depuis un an, le Son du Cor ouvre à onze heures car commençant à midi il se trouvait submergé par les retours du marché pressés de manger leurs achats avec une bière, un coca ou un verre de vin. Personnellement, je n’en fais l’ouverture ce jour, comme les autres, que pour boire un café et lire.
Depuis mon retour de La Rochelle, je lis Lettres familiales de Juliette Drouet (Presses Universitaires de Rouen et du Havre). Ce qui est une façon de prolonger mon compagnonnage avec celui qu’elle désigne par ses initiales et appelle son grand ami ou son grand homme.
En fait de famille, elle n’a qu’une sœur, le mari de celle-ci et leur fils, lesquels résident au numéro sept de la rue de la Voûte à Brest.
A la table voisine est un groupe d’ami(e)s dont l’une ne cesse de répéter « On est bien, là » comme si elle voulait s’en convaincre.
*
Vers treize heures, je suis de retour à la Halle aux Toiles et furète une dernière fois dans le stock de livres du Secours Pop. J’en trouve encore pour me plaire : Les excentriques anglais d’Edith Sitwell (Le Promeneur), Lettres à Voltaire de Madame du Deffand (Rivages Poche) et Les bonnes manières de Jonathan Swift (Editions du Griot) qui sous ce titre regroupe Instructions aux domestiques, Méditation sur un balai, Lettre à une très jeune personne sur son mariage, Modeste proposition pour empêcher les enfants des pauvres en Irlande d’être à charge à leurs parents… et Résolutions pour l’époque où je deviendrai vieux.
*
Vingt heures, Macron est réélu avec cinquante-huit pour cent. Pas sur son programme. Par défaut.
Beaucoup, qui, comme moi, ont voté contre leurs idées vont se dire on aurait pu se passer de moi. Oui mais, je me répète, quand il y a un sale boulot à faire, on ne s’en exonère pas.
Car pas question que je touche à celui marqué Le Pen. C’est pour voter contre elle que je suis ici. Caché par le rideau de l’isoloir, je glisse mon bulletin Macron dans l’enveloppe. Je ne pouvais laisser faire ce sale boulot à d’autres sans y participer moi-même, et il n’y a qu’une façon de voter contre Le Pen, voter Macron. C’est mathématique, si on ne vote pas pour celui qui est potentiellement en tête, on donne une chance à celle qui est derrière de passer devant. Et donc voter blanc, voter nul, ne pas voter, c’est voter Le Pen.
Ce n’est pas l’affluence à Camille Saint-Saëns. Seule une jeune femme me précède et personne ne me suit. Le chef du bureau Quarante et Un vérifie une nouvelle fois mes papiers et à son signal je laisse tomber Macron dans l’urne. « A voté. »
Il me reste à émarger.
-J’espère que j’ai signé dans la bonne colonne, dis-je à celle qui avec une règle évidée m’indique où.
-Oui regardez, deuxième tour. Vous n’êtes pas venu la dernière fois ?
-Non
-Ça se voit.
-Je suis content que ça se voie.
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Le dimanche, depuis un an, le Son du Cor ouvre à onze heures car commençant à midi il se trouvait submergé par les retours du marché pressés de manger leurs achats avec une bière, un coca ou un verre de vin. Personnellement, je n’en fais l’ouverture ce jour, comme les autres, que pour boire un café et lire.
Depuis mon retour de La Rochelle, je lis Lettres familiales de Juliette Drouet (Presses Universitaires de Rouen et du Havre). Ce qui est une façon de prolonger mon compagnonnage avec celui qu’elle désigne par ses initiales et appelle son grand ami ou son grand homme.
En fait de famille, elle n’a qu’une sœur, le mari de celle-ci et leur fils, lesquels résident au numéro sept de la rue de la Voûte à Brest.
A la table voisine est un groupe d’ami(e)s dont l’une ne cesse de répéter « On est bien, là » comme si elle voulait s’en convaincre.
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Vers treize heures, je suis de retour à la Halle aux Toiles et furète une dernière fois dans le stock de livres du Secours Pop. J’en trouve encore pour me plaire : Les excentriques anglais d’Edith Sitwell (Le Promeneur), Lettres à Voltaire de Madame du Deffand (Rivages Poche) et Les bonnes manières de Jonathan Swift (Editions du Griot) qui sous ce titre regroupe Instructions aux domestiques, Méditation sur un balai, Lettre à une très jeune personne sur son mariage, Modeste proposition pour empêcher les enfants des pauvres en Irlande d’être à charge à leurs parents… et Résolutions pour l’époque où je deviendrai vieux.
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Vingt heures, Macron est réélu avec cinquante-huit pour cent. Pas sur son programme. Par défaut.
Beaucoup, qui, comme moi, ont voté contre leurs idées vont se dire on aurait pu se passer de moi. Oui mais, je me répète, quand il y a un sale boulot à faire, on ne s’en exonère pas.