Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
5 mars 2019
Ce samedi matin, le pavé de la place du Vieux est orné d’une forte réflexion tracée à la peinture blanche : « Répression de la liberté = Dictature » et près de la boîte à lettres dans laquelle je glisse un livre vendu est écrit au feutre noir : « Révolution française l’Elysée va brûler Macron au cimetière ».
Quand je croise, rue du Général-Leclerc, sur la voie de bus Teor, le défilé des Gilets Jaunes, ils sont très peu nombreux et mixés avec de la Cégété. A leur tête, au mégaphone, une Hennepéha dont le slogan est le même depuis au moins une décennie : « Les jeunes dans la galère/Les vieux dans la misère/On n’en veut pas/De cette société-là ». Derrière elle, des Jaunes crient « Tout le monde déteste la police ahou ahou ahou ».
Quand je les recroise l’après-midi, à l’angle des rues Armand-Carrel et Martainville, les Gilets sont pur jaune. Ils atteignent peut-être le millier et sont paisibles.
Ce n’est que plus tard, apprends-je par le fil d’actualité de Paris Normandie, que ça tourne à la barricade enflammée, rue de la Jeanne. Mon Crédit Agricole est attaqué. Les panneaux de bois censés le protéger sont arrachés.
*
A part le Hennepéha, plus personne n’emploie l’expression être dans la galère.
Quand je croise, rue du Général-Leclerc, sur la voie de bus Teor, le défilé des Gilets Jaunes, ils sont très peu nombreux et mixés avec de la Cégété. A leur tête, au mégaphone, une Hennepéha dont le slogan est le même depuis au moins une décennie : « Les jeunes dans la galère/Les vieux dans la misère/On n’en veut pas/De cette société-là ». Derrière elle, des Jaunes crient « Tout le monde déteste la police ahou ahou ahou ».
Quand je les recroise l’après-midi, à l’angle des rues Armand-Carrel et Martainville, les Gilets sont pur jaune. Ils atteignent peut-être le millier et sont paisibles.
Ce n’est que plus tard, apprends-je par le fil d’actualité de Paris Normandie, que ça tourne à la barricade enflammée, rue de la Jeanne. Mon Crédit Agricole est attaqué. Les panneaux de bois censés le protéger sont arrachés.
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A part le Hennepéha, plus personne n’emploie l’expression être dans la galère.
4 mars 2019
Ce samedi, je suis le troisième à attendre neuf heures devant la porte de la grande salle de rez-de-chaussée de la Halle aux Toiles où vingt mille livres d’occasion sont à vendre au profit du groupe rouennais d’Amnesty International.
Un peu avant l’heure dite, nous sommes invités à entrer. Je me dirige droit sur les tables Littérature et Sciences Humaines lesquelles sont particulièrement mal éclairées. Cette salle aurait besoin d’une réfection complète.
Cinq livres de poche pour trois euros, les autres entre un et trois, la plupart à deux, je remplis peu à peu mon sac. Au cours de ma déambulation, je rencontre et salue des têtes connues, que des personnes sympathiques. Par extraordinaire, les antipathiques ne sont pas là. Les membres de l’organisation non gouvernementale doivent supporter une taquinerie répétitive : « Vous êtes des Gilets Jaunes ? ». Un jour, on choisit une couleur de chasuble, et bien plus tard on en subit les conséquences.
Après avoir payé vingt euros pour mon butin, dont Ciné journal de Serge Daney (préface de Gilles Deleuze) édité par les Cahiers du cinéma et le Biblos Gallimard regroupant L’Origine, La Cave, Le Souffle, Le Froid et Un enfant de Thomas Bernhard, j’indique aux dames présentes à la caisse que j’ai des livres à donner. Leur enthousiasme est modéré. « S’il n’y en a pas trop », me dit l’une.
Je ne me laisse pas décourager. Un peu après midi, un sac au bout de chaque bras, je contourne la Cathédrale, saluant en chemin une fille autant jolie qu’élégante qui partage la vie d’un qui a de la chance.
-Mettez ça là-bas derrière le pilier, me dit la dame à chasuble jaune à qui je m’adresse.
Je fais évidemment un second tour de salle et rentre avec trois livres pour cinq euros cinquante, dont Le pays de la littérature (Des Serments de Strasbourg à l’enterrement de Sartre) de Pierre Lepape (Seuil).
*
Rue de la Champmeslé, deux filles sortant d’une boutique avec un paquet.
L’une à l’autre :
-Ça nous a coûté cher pour un cadeau de grand-mère.
*
Rue de la Tour de Beurre, sur un mur, à la peinture rouge : « Dieue pour l’amour du ciel ».
Un peu avant l’heure dite, nous sommes invités à entrer. Je me dirige droit sur les tables Littérature et Sciences Humaines lesquelles sont particulièrement mal éclairées. Cette salle aurait besoin d’une réfection complète.
Cinq livres de poche pour trois euros, les autres entre un et trois, la plupart à deux, je remplis peu à peu mon sac. Au cours de ma déambulation, je rencontre et salue des têtes connues, que des personnes sympathiques. Par extraordinaire, les antipathiques ne sont pas là. Les membres de l’organisation non gouvernementale doivent supporter une taquinerie répétitive : « Vous êtes des Gilets Jaunes ? ». Un jour, on choisit une couleur de chasuble, et bien plus tard on en subit les conséquences.
Après avoir payé vingt euros pour mon butin, dont Ciné journal de Serge Daney (préface de Gilles Deleuze) édité par les Cahiers du cinéma et le Biblos Gallimard regroupant L’Origine, La Cave, Le Souffle, Le Froid et Un enfant de Thomas Bernhard, j’indique aux dames présentes à la caisse que j’ai des livres à donner. Leur enthousiasme est modéré. « S’il n’y en a pas trop », me dit l’une.
Je ne me laisse pas décourager. Un peu après midi, un sac au bout de chaque bras, je contourne la Cathédrale, saluant en chemin une fille autant jolie qu’élégante qui partage la vie d’un qui a de la chance.
-Mettez ça là-bas derrière le pilier, me dit la dame à chasuble jaune à qui je m’adresse.
Je fais évidemment un second tour de salle et rentre avec trois livres pour cinq euros cinquante, dont Le pays de la littérature (Des Serments de Strasbourg à l’enterrement de Sartre) de Pierre Lepape (Seuil).
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Rue de la Champmeslé, deux filles sortant d’une boutique avec un paquet.
L’une à l’autre :
-Ça nous a coûté cher pour un cadeau de grand-mère.
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Rue de la Tour de Beurre, sur un mur, à la peinture rouge : « Dieue pour l’amour du ciel ».
2 mars 2019
Quand, un peu avant quatorze heures, j’arrive devant le cinq de la rue Legouvé où depuis deux mille six est installée Les Douches la Galerie dans d'anciennes douches publiques (une inscription en béton en témoigne), c’est pour découvrir qu’une dizaine de personnes m’ont précédé pour attendre l’ouverture de l’exposition Vivian Maier The Color Work. Moi qui m’y rêvais seul, c’est raté.
A l’heure précise, l’une appuie sur la sonnette. La porte s’ouvre et nous voici en troupeau dans l’escalier. Je laisse mon sac à dos à la jolie fille qui veille sur le lieu puis je tente de voir les photos de celle dont le travail fut découvert par hasard deux ans avant sa mort, sans qu’elle le sache. Ces images très colorées ont été prises à Chicago dans les années soixante-dix. Vivian Maier y était nourrice à domicile, métier qu’elle exerça pendant quarante ans.
Cette photographe de rue amateure, née en mil neuf cent vingt-six à New York de mère française et de père d'origine autrichienne, morte en deux mille neuf à Chicago, a pris durant sa vie plus de cent cinquante mille images, principalement de personnes et d'architecture à New York, Chicago, Los Angeles, ainsi que dans le vaste monde où elle a voyagé, n'ayant d’ailleurs pas fait développer un grand nombre de négatifs.
En deux mille sept, Vivian Maier est hospitalisée et ne peut plus payer la location du box qu'elle utilise pour stocker une partie de ses biens, dont ses photos et pellicules. Tout est vendu aux enchères.
Un certain John Maloof, agent immobilier de vingt-cinq ans, achète pour quatre cents dollars trente mille négatifs, des dizaines de rouleaux de pellicule et quelques tirages. Un an plus tard, il commence à les vendre sur eBay. Un professeur d'art lui fait prendre conscience de leur importance. Il reprend contact avec la maison de ventes aux enchères pour connaître le nom des acheteurs des autres lots. Il les leur rachète et acquiert au total plus de cent mille négatifs. Il interroge aussi sur cette mystérieuse photographe qu’il a pu découvrir sur ses autoportraits. On lui dit que les cartons appartenaient à une dame âgée et malade dont on ne connaît pas le nom.
En deux mille neuf, John Maloof découvre dans un carton l’enveloppe d’un laboratoire de photographie portant le nom de Vivian Maier écrit au crayon. Il tape Vivian Maier sur Gougueule et trouve un avis de décès paru quelques jours plus tôt dans le Chicago Tribune. Vivian Maier vient de mourir à l’âge de quatre-vingt-trois ans. Les frères Gensburg, qu'elle a élevés de 1956 à 1972 et qui se sont occupés d’elle dans les dernières années de sa vie ont fait publier cette notice nécrologique : « Vivian Maier, originaire de France et fière de l'être, résidente à Chicago depuis ces cinquante dernières années, est morte en paix lundi. Seconde mère de John, Lane et Matthew. Cet esprit libre apporta une touche de magie dans leur vie et dans celles de tous ceux qui l'ont connue. Toujours prête à donner un conseil, un avis ou à tendre une main secourable. Critique de film et photographe extraordinaire. Une personne vraiment unique, qui nous manquera énormément et dont nous nous souviendrons toujours de la longue et formidable vie. »
L’histoire des photos de Vivian Maier m’intéresse davantage que les photos de Vivian Maier qui cependant me plaisent. Ce qui me déplaît, c’est la présence de celles et ceux que je côtoie, dont un trio de femmes de cinquante ans qui commentent à voix haute, en qui je devine des institutrices. Dans une seconde salle sont montrées des photos plus anciennes en noir et blanc datant des années cinquante, prises essentiellement à New York.
Je récupère mon sac, descends l’escalier, retrouve la rue de Lancry où un Péhemmu offre quatre tables de trottoir au soleil. Je m’installe à l’une pour un moment et y ai presque trop chaud. En face est un institut de beauté nommé Soins du Monde. Les deux employées qui en sortent pour fumer lui font une contre-publicité. Le café ne me coûte qu’un euro quatre-vingts.
Il fait encore un peu jour lorsque je descends du train. Finies les journées de marteau-piqueur et de ciel bleu. Les trous sont creusés et la pluie annoncée.
*
Vivian Maier était une adepte de l’autoportrait en ombre.
*
Un livre à un euro que je n’ai pas rapporté de Paris mais dont le titre m’a ravi : Famille et autres supplices.
A l’heure précise, l’une appuie sur la sonnette. La porte s’ouvre et nous voici en troupeau dans l’escalier. Je laisse mon sac à dos à la jolie fille qui veille sur le lieu puis je tente de voir les photos de celle dont le travail fut découvert par hasard deux ans avant sa mort, sans qu’elle le sache. Ces images très colorées ont été prises à Chicago dans les années soixante-dix. Vivian Maier y était nourrice à domicile, métier qu’elle exerça pendant quarante ans.
Cette photographe de rue amateure, née en mil neuf cent vingt-six à New York de mère française et de père d'origine autrichienne, morte en deux mille neuf à Chicago, a pris durant sa vie plus de cent cinquante mille images, principalement de personnes et d'architecture à New York, Chicago, Los Angeles, ainsi que dans le vaste monde où elle a voyagé, n'ayant d’ailleurs pas fait développer un grand nombre de négatifs.
En deux mille sept, Vivian Maier est hospitalisée et ne peut plus payer la location du box qu'elle utilise pour stocker une partie de ses biens, dont ses photos et pellicules. Tout est vendu aux enchères.
Un certain John Maloof, agent immobilier de vingt-cinq ans, achète pour quatre cents dollars trente mille négatifs, des dizaines de rouleaux de pellicule et quelques tirages. Un an plus tard, il commence à les vendre sur eBay. Un professeur d'art lui fait prendre conscience de leur importance. Il reprend contact avec la maison de ventes aux enchères pour connaître le nom des acheteurs des autres lots. Il les leur rachète et acquiert au total plus de cent mille négatifs. Il interroge aussi sur cette mystérieuse photographe qu’il a pu découvrir sur ses autoportraits. On lui dit que les cartons appartenaient à une dame âgée et malade dont on ne connaît pas le nom.
En deux mille neuf, John Maloof découvre dans un carton l’enveloppe d’un laboratoire de photographie portant le nom de Vivian Maier écrit au crayon. Il tape Vivian Maier sur Gougueule et trouve un avis de décès paru quelques jours plus tôt dans le Chicago Tribune. Vivian Maier vient de mourir à l’âge de quatre-vingt-trois ans. Les frères Gensburg, qu'elle a élevés de 1956 à 1972 et qui se sont occupés d’elle dans les dernières années de sa vie ont fait publier cette notice nécrologique : « Vivian Maier, originaire de France et fière de l'être, résidente à Chicago depuis ces cinquante dernières années, est morte en paix lundi. Seconde mère de John, Lane et Matthew. Cet esprit libre apporta une touche de magie dans leur vie et dans celles de tous ceux qui l'ont connue. Toujours prête à donner un conseil, un avis ou à tendre une main secourable. Critique de film et photographe extraordinaire. Une personne vraiment unique, qui nous manquera énormément et dont nous nous souviendrons toujours de la longue et formidable vie. »
L’histoire des photos de Vivian Maier m’intéresse davantage que les photos de Vivian Maier qui cependant me plaisent. Ce qui me déplaît, c’est la présence de celles et ceux que je côtoie, dont un trio de femmes de cinquante ans qui commentent à voix haute, en qui je devine des institutrices. Dans une seconde salle sont montrées des photos plus anciennes en noir et blanc datant des années cinquante, prises essentiellement à New York.
Je récupère mon sac, descends l’escalier, retrouve la rue de Lancry où un Péhemmu offre quatre tables de trottoir au soleil. Je m’installe à l’une pour un moment et y ai presque trop chaud. En face est un institut de beauté nommé Soins du Monde. Les deux employées qui en sortent pour fumer lui font une contre-publicité. Le café ne me coûte qu’un euro quatre-vingts.
Il fait encore un peu jour lorsque je descends du train. Finies les journées de marteau-piqueur et de ciel bleu. Les trous sont creusés et la pluie annoncée.
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Vivian Maier était une adepte de l’autoportrait en ombre.
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Un livre à un euro que je n’ai pas rapporté de Paris mais dont le titre m’a ravi : Famille et autres supplices.
1er mars 2019
Ce mercredi, j’attends le sept heures cinquante-neuf face à une Mylène Farmer qui décolle vers son prochain spectacle parisien, une image qui me rappelle le jour où, il y a pas mal d’années, je la vis bondir en chair et en os juste devant moi hors d’une voiture de luxe et en direction d’une porte d’immeuble cossu vite tirée derrière elle. Cela se passait dans une rue située au-dessus du Jardin du Luxembourg.
Trois personnes seulement descendent de la voiture six à l’arrivée du train. Cela s’explique par la présence d’un groupe et se traduit dans la bouche de chaque voyageur monté avec moi par un « Ah mince, y a des gamins ». Une classe de collège va à la capitale. Je m’assois dans l’autre moitié de la voiture. Cette distance n’est pas suffisante pour deux filles qui vont voir plus loin car, dit l’une, elles n’ont pas leurs écouteurs. Je crains pourtant qu’elles soient de celles qui contribueront à la reproduction de l’espèce dans quelques années, faisant profiter leur entourage des braillements du fruit de leurs entrailles.
Après mon habituel passage au Book-Off de Ledru-Rollin, où je paie un euro un exemplaire dédicacé « A mon unique amour pour ses 20 ans » par un certain Nils de la réédition deux mille un par Buchet/Chastel de La rage de vivre de Milton Mezz Mezzrow (aidé de Bernard Wolfe), puis au marché d’Aligre et chez Emmaüs où l’on a remis de l’ordre dans les livres de poche et où on n’accepte plus les dépôts de matelas à cause des punaises de lit, je vais à pied et à l’ombre vers la place de la République. Il est temps de retirer mon pull.
Au bout du boulevard du Temple, juste avant le Dezajet, la terrasse du Chai d’Adrien m’attire par sa disposition surélevée et son ensoleillement. On y sert une formule à treize euros cinquante. La cuisine est sans garantie et le service purement professionnel. Je commande un quart de côtes-du-rhône à sept euros cinquante que je bois avec la terrine de poisson et le suprême de poulet au chorizo, ce dernier se résumant à quelques miettes.
Un homme à ample chevelure blanche vêtu de noir sort du Déjazet, sans doute son directeur. Il raccompagne sur le trottoir une jeune fille à qui il dit qu’il est parti de rien. Le faiseur de théâtre de Thomas Bernhard, avec André Marcon, est à l’affiche pendant trois mois chaque soir du lundi au samedi, un spectacle recommandé par Le Figaroscope et Télérama Sortir : « Une comédie jubilatoire radicalement désespérée et parfaitement comique ». J’imagine la tête de l’auteur s’il avait dû lire cela. Ma voisine me demande si je peux lui passer le sel et le poivre. Notre relation en reste là et l’ombre me gagne.
Ayant à faire rue Legouvé, je traverse la place de la République, prends un petit bout du boulevard de Magenta puis tourne à droite rue de Lancry. A son extrémité, beaucoup profitent du soleil au bord du canal Saint-Martin dans lequel flottent un tas de cochonneries. Je me joins à eux et, en attendant quatorze heures, y lis par coïncidence Faubourgs de Paris d’Eugène Dabit, l’auteur de L’Hôtel du Nord. Les souvenirs de l’écrivain populiste sont d’un intérêt moyen.
Trois personnes seulement descendent de la voiture six à l’arrivée du train. Cela s’explique par la présence d’un groupe et se traduit dans la bouche de chaque voyageur monté avec moi par un « Ah mince, y a des gamins ». Une classe de collège va à la capitale. Je m’assois dans l’autre moitié de la voiture. Cette distance n’est pas suffisante pour deux filles qui vont voir plus loin car, dit l’une, elles n’ont pas leurs écouteurs. Je crains pourtant qu’elles soient de celles qui contribueront à la reproduction de l’espèce dans quelques années, faisant profiter leur entourage des braillements du fruit de leurs entrailles.
Après mon habituel passage au Book-Off de Ledru-Rollin, où je paie un euro un exemplaire dédicacé « A mon unique amour pour ses 20 ans » par un certain Nils de la réédition deux mille un par Buchet/Chastel de La rage de vivre de Milton Mezz Mezzrow (aidé de Bernard Wolfe), puis au marché d’Aligre et chez Emmaüs où l’on a remis de l’ordre dans les livres de poche et où on n’accepte plus les dépôts de matelas à cause des punaises de lit, je vais à pied et à l’ombre vers la place de la République. Il est temps de retirer mon pull.
Au bout du boulevard du Temple, juste avant le Dezajet, la terrasse du Chai d’Adrien m’attire par sa disposition surélevée et son ensoleillement. On y sert une formule à treize euros cinquante. La cuisine est sans garantie et le service purement professionnel. Je commande un quart de côtes-du-rhône à sept euros cinquante que je bois avec la terrine de poisson et le suprême de poulet au chorizo, ce dernier se résumant à quelques miettes.
Un homme à ample chevelure blanche vêtu de noir sort du Déjazet, sans doute son directeur. Il raccompagne sur le trottoir une jeune fille à qui il dit qu’il est parti de rien. Le faiseur de théâtre de Thomas Bernhard, avec André Marcon, est à l’affiche pendant trois mois chaque soir du lundi au samedi, un spectacle recommandé par Le Figaroscope et Télérama Sortir : « Une comédie jubilatoire radicalement désespérée et parfaitement comique ». J’imagine la tête de l’auteur s’il avait dû lire cela. Ma voisine me demande si je peux lui passer le sel et le poivre. Notre relation en reste là et l’ombre me gagne.
Ayant à faire rue Legouvé, je traverse la place de la République, prends un petit bout du boulevard de Magenta puis tourne à droite rue de Lancry. A son extrémité, beaucoup profitent du soleil au bord du canal Saint-Martin dans lequel flottent un tas de cochonneries. Je me joins à eux et, en attendant quatorze heures, y lis par coïncidence Faubourgs de Paris d’Eugène Dabit, l’auteur de L’Hôtel du Nord. Les souvenirs de l’écrivain populiste sont d’un intérêt moyen.
28 février 2019
« Les voyages forment la paresse », m’explique l’automate de la gare de Rouen alors que je fuis les travaux de ma ruelle pour la deuxième journée consécutive. Le mien ne me coûte que quatre euros et me mènera au deux tiers de la ligne qui va jusqu’à Dieppe, à Auffay, bourgade dont, lors de passages précédents, j’ai repéré l’Hôtel Restaurant du Chemin de Fer à la façade de briques orangées.
Dans son jargon, la Senecefe affiche un incident technique : « Le train 13103 est supprimé. Par conséquent, sa réutilisation, le train 13114 à destination de Paris partira avec un retard de 15mn environ ».
Le train venant de Paris est lui aussi en retard pour une raison inconnue. Celui où je suis assis, qui devait partir à dix heures douze, l’attend pour assurer la correspondance.
-Y part dans quel sens ? Par là ou par là ? Parce que j’aime pas le mauvais sens, me demande le gentillet de service.
Je ne juge pas utile de lui expliquer qu’il n’y a pas de mauvais sens. Nous partons à dix heures vingt. La campagne est autant ensoleillée que la ville de Rouen mais on n’y voit pas de voile de pollution à l’horizon. Il y a des gars qui travaillent dans les jardins et qui regardent passer le train et puis à Clères, le même qu’hier qui fait du bois (comme certains disent).
Dès mon arrivée à Auffay je vais réserver une table dans l’établissement qui porte sur son autre façade le nom d’Hôtel Restaurant de la Vallée de la Scie. La patronne est diserte et me conseille d’arriver à midi moins le quart pour être servi avant les ouvriers qui sont toujours pressés.
Je fais le tour de ce bourg cauchois où le spationaute Thomas Pesquet fut collégien et dont l’attrait principal est constitué par deux jaquemarts sonneurs de cloches sur la façade de la collégiale. Las, celle-ci est en travaux et eux invisibles.
Comme il était prévisible, le salon de coiffure s’appelle Créa Tif. Un dépôt vente fait mieux, qui se nomme Auffay Stival des Prix.
A l’heure dite, j’entre à l’Hôtel Restaurant de la Vallée de la Scie où l’on m’a réservé la petite table qui donne sur la place. La formule entrée plat est à quatorze euros quatre-vingt-dix et tout est fait avec des produit frais, me promet-on. Je commande un quart de merlot à quatre euros. Mon entrée est une bouchée à la reine assez quelconque.
-Je peux vous envoyer le reste ? me demande la serveuse d’une façon imagée.
Le reste est une énorme portion de parmentier de bœuf. Elle est fort bonne. J’ai presque terminé lorsque arrivent quatre ouvriers puis sept agriculteurs.
-Même plus moyen de nettoyer la cour de sa ferme avec le Round Up, c’est vraiment n’importe quoi, déclare l’un des paysans,
-T’as toujours ta chienne ? demande un autre à un troisième
-Non, je m’en suis débarrassée, elle chassait pas.
Je suis bien content de ne pas devoir les côtoyer plus longtemps.
Après avoir fait la petite promenade du bord de la Scie, je trouve place au soleil à l'une des trois tables de trottoir du Péhemmu Les Jacquemarts et y termine la lecture du Journal de guerre de Georges Sadoul en buvant des cafés à un euro vingt. Quand les jeunes mâles locaux viennent se ravitailler en cigarettes, ils se saluent de façon agressive après avoir laissé la voiture dans le passage. Les rares filles se font discrètes et sont suivies du regard.
-Elle était sympa, la tite contrôleuse, déclare un vieux qui arrive par le train.
-A la Poste, y a la queue jusqu’au trottoir, se plaint un autre.
-A chaque fois que tu touches des sous, c’est le PMU toi, bouge-toi le cul d’ici, s’emporte un couple envers un ascendant
Je ne passerais pas ma vie à Auffay, d’où je reviens par le train de seize heures dix-neuf avec dans mon sac La condition littéraire (la double vie des écrivains) de Bernard Lahire (Editions La Découverte) trouvé dans la boîte à livres du jardin public.
Dans son jargon, la Senecefe affiche un incident technique : « Le train 13103 est supprimé. Par conséquent, sa réutilisation, le train 13114 à destination de Paris partira avec un retard de 15mn environ ».
Le train venant de Paris est lui aussi en retard pour une raison inconnue. Celui où je suis assis, qui devait partir à dix heures douze, l’attend pour assurer la correspondance.
-Y part dans quel sens ? Par là ou par là ? Parce que j’aime pas le mauvais sens, me demande le gentillet de service.
Je ne juge pas utile de lui expliquer qu’il n’y a pas de mauvais sens. Nous partons à dix heures vingt. La campagne est autant ensoleillée que la ville de Rouen mais on n’y voit pas de voile de pollution à l’horizon. Il y a des gars qui travaillent dans les jardins et qui regardent passer le train et puis à Clères, le même qu’hier qui fait du bois (comme certains disent).
Dès mon arrivée à Auffay je vais réserver une table dans l’établissement qui porte sur son autre façade le nom d’Hôtel Restaurant de la Vallée de la Scie. La patronne est diserte et me conseille d’arriver à midi moins le quart pour être servi avant les ouvriers qui sont toujours pressés.
Je fais le tour de ce bourg cauchois où le spationaute Thomas Pesquet fut collégien et dont l’attrait principal est constitué par deux jaquemarts sonneurs de cloches sur la façade de la collégiale. Las, celle-ci est en travaux et eux invisibles.
Comme il était prévisible, le salon de coiffure s’appelle Créa Tif. Un dépôt vente fait mieux, qui se nomme Auffay Stival des Prix.
A l’heure dite, j’entre à l’Hôtel Restaurant de la Vallée de la Scie où l’on m’a réservé la petite table qui donne sur la place. La formule entrée plat est à quatorze euros quatre-vingt-dix et tout est fait avec des produit frais, me promet-on. Je commande un quart de merlot à quatre euros. Mon entrée est une bouchée à la reine assez quelconque.
-Je peux vous envoyer le reste ? me demande la serveuse d’une façon imagée.
Le reste est une énorme portion de parmentier de bœuf. Elle est fort bonne. J’ai presque terminé lorsque arrivent quatre ouvriers puis sept agriculteurs.
-Même plus moyen de nettoyer la cour de sa ferme avec le Round Up, c’est vraiment n’importe quoi, déclare l’un des paysans,
-T’as toujours ta chienne ? demande un autre à un troisième
-Non, je m’en suis débarrassée, elle chassait pas.
Je suis bien content de ne pas devoir les côtoyer plus longtemps.
Après avoir fait la petite promenade du bord de la Scie, je trouve place au soleil à l'une des trois tables de trottoir du Péhemmu Les Jacquemarts et y termine la lecture du Journal de guerre de Georges Sadoul en buvant des cafés à un euro vingt. Quand les jeunes mâles locaux viennent se ravitailler en cigarettes, ils se saluent de façon agressive après avoir laissé la voiture dans le passage. Les rares filles se font discrètes et sont suivies du regard.
-Elle était sympa, la tite contrôleuse, déclare un vieux qui arrive par le train.
-A la Poste, y a la queue jusqu’au trottoir, se plaint un autre.
-A chaque fois que tu touches des sous, c’est le PMU toi, bouge-toi le cul d’ici, s’emporte un couple envers un ascendant
Je ne passerais pas ma vie à Auffay, d’où je reviens par le train de seize heures dix-neuf avec dans mon sac La condition littéraire (la double vie des écrivains) de Bernard Lahire (Editions La Découverte) trouvé dans la boîte à livres du jardin public.
26 février 2019
Les ouvriers arrivent quand, sous un déjà beau soleil, je prends le chemin de la gare. A l’intérieur de celle-ci le Playboy Communiste, pour une fois sans sa couverture, fait le spectacle, effrayant qui ne le connaît pas. « C’était un homme tout à fait normal et puis il a pris du cannabis et ça lui a grillé le cerveau, faut pas fumer », dit une vieille bourgeoise à deux branlotins qui se fichent d’elle derrière son dos. Comme d’autres de leur espèce, ils tirent la tronche car les vacances sont finies, alors que moi je m’imagine y partir en montant dans le neuf heures douze pour Dieppe.
Le port de pêche y est quasiment vide. Hormis deux bateaux qui déchargent, tous les autres sont en mer. Il n’en est pas de même dans le port de plaisance dont les bateaux sont presque toujours inutilisés. Au Tout Va Bien, tout va bien, on se réjouit du beau temps, « si ça pouvait continuer comme ça jusqu’à l’été ! ». J’y poursuis ma lecture des atrocités racontées par Georges Sadoul dans son Journal de guerre en écoutant Louis Armstrong chanter What a Wonderful World.
-T’es toujours avec ta petite copine ? demande une femme à l’un des serveurs.
-Bah non, ça a duré un an et demi.
-C’est mieux que rien.
-Rien, ça aurait été mieux.
A midi, je déjeune au New Haven dont les tables de terrasse ont l’avantage de ne pas faire face au soleil bas qui me ferait mal aux yeux. Il fait si bon que je peux enlever ma veste. J’opte pour le foie de lotte, les moules à la normande et la mousse au chocolat. Avant treize heures, un panneau indique complet tant pour l’extérieur que pour l’intérieur. Avec le quart de sauvignon, cela fait vingt-deux euros quatre-vingt-dix.
Après avoir été saluer la mer, je prends le café à l’une des deux tables au soleil du Brazza.
-On devrait être en hiver, là, en plus, dit une fille à sa mère.
-On est en hiver, lui répond sa génitrice.
Le pont levant est levé quand je retourne à la gare. Il laisse passer le bleu Horizon qui va décharger sa pêche. Je rentre par le train de seize heures en longeant la Scie sinueuse et constate à l’arrivée que ma venelle est pleine de trous.
Le port de pêche y est quasiment vide. Hormis deux bateaux qui déchargent, tous les autres sont en mer. Il n’en est pas de même dans le port de plaisance dont les bateaux sont presque toujours inutilisés. Au Tout Va Bien, tout va bien, on se réjouit du beau temps, « si ça pouvait continuer comme ça jusqu’à l’été ! ». J’y poursuis ma lecture des atrocités racontées par Georges Sadoul dans son Journal de guerre en écoutant Louis Armstrong chanter What a Wonderful World.
-T’es toujours avec ta petite copine ? demande une femme à l’un des serveurs.
-Bah non, ça a duré un an et demi.
-C’est mieux que rien.
-Rien, ça aurait été mieux.
A midi, je déjeune au New Haven dont les tables de terrasse ont l’avantage de ne pas faire face au soleil bas qui me ferait mal aux yeux. Il fait si bon que je peux enlever ma veste. J’opte pour le foie de lotte, les moules à la normande et la mousse au chocolat. Avant treize heures, un panneau indique complet tant pour l’extérieur que pour l’intérieur. Avec le quart de sauvignon, cela fait vingt-deux euros quatre-vingt-dix.
Après avoir été saluer la mer, je prends le café à l’une des deux tables au soleil du Brazza.
-On devrait être en hiver, là, en plus, dit une fille à sa mère.
-On est en hiver, lui répond sa génitrice.
Le pont levant est levé quand je retourne à la gare. Il laisse passer le bleu Horizon qui va décharger sa pêche. Je rentre par le train de seize heures en longeant la Scie sinueuse et constate à l’arrivée que ma venelle est pleine de trous.
25 février 2019
« Après plusieurs week-ends de fermeture, votre agence de Rouen Jeanne d'Arc sera ouverte samedi 23 février. Pour information, l'extérieur de l'agence sera protégé par des panneaux de bois. », m’a écrit dans la semaine mon Crédit Agricole qui reprend un peu courage face aux Gilets Jaunes.
Je croise ceux-ci vers midi et demi qui descendent la rue des Carmes en ordre dispersé alors que je rejoins Le Sacre dont la terrasse est toujours au soleil. Mon café bu, j’y lis le Journal de guerre de Georges Sadoul près de deux tablées de jeunes Italien(ne)s.
Vers quatorze heures, je retrouve les Jaunes en rangs serrés sur la voie du bus Teor rue du Général-Leclerc. Ils poussent des Ahou Ahou Ahou, crient qu’ils sont Gilets Jaunes dès fois qu’avec ce temps printanier on les confonde avec des jonquilles ambulantes, font claquer des gros pétards, sont accompagnés de motards qui font vrombir ce qu’ils ont entre les cuisses.
« Ça les occupe », déclare le seul qui s’exprime sur leur passage. Cette récurrence hebdomadaire est désormais vécue par le plus grand nombre comme un évènement désagréable auquel on ne peut se soustraire mais qui ne vous empêche plus de vivre. Le fatalisme a remplacé l’inquiétude.
Pour ma part, ce mouvement jaune rouge brun me fait de plus en plus penser à une secte dont les adeptes vêtus de chasubles (parmi lesquels des apôtres, des convertis, des plus ou moins excommuniés) pratiquent chaque samedi rites et pèlerinages, dénonçant le diable « Macron démission » et espérant le messie Ric.
*
Bien dans l’esprit des Gilets Jaunes, ce Jean-Michel Blanquer, Ministre de l’Education Nationale, qui décrète la présence obligatoire du drapeau tricolore et des paroles de La Marseillaise dans chaque salle de classe.
Je croise ceux-ci vers midi et demi qui descendent la rue des Carmes en ordre dispersé alors que je rejoins Le Sacre dont la terrasse est toujours au soleil. Mon café bu, j’y lis le Journal de guerre de Georges Sadoul près de deux tablées de jeunes Italien(ne)s.
Vers quatorze heures, je retrouve les Jaunes en rangs serrés sur la voie du bus Teor rue du Général-Leclerc. Ils poussent des Ahou Ahou Ahou, crient qu’ils sont Gilets Jaunes dès fois qu’avec ce temps printanier on les confonde avec des jonquilles ambulantes, font claquer des gros pétards, sont accompagnés de motards qui font vrombir ce qu’ils ont entre les cuisses.
« Ça les occupe », déclare le seul qui s’exprime sur leur passage. Cette récurrence hebdomadaire est désormais vécue par le plus grand nombre comme un évènement désagréable auquel on ne peut se soustraire mais qui ne vous empêche plus de vivre. Le fatalisme a remplacé l’inquiétude.
Pour ma part, ce mouvement jaune rouge brun me fait de plus en plus penser à une secte dont les adeptes vêtus de chasubles (parmi lesquels des apôtres, des convertis, des plus ou moins excommuniés) pratiquent chaque samedi rites et pèlerinages, dénonçant le diable « Macron démission » et espérant le messie Ric.
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Bien dans l’esprit des Gilets Jaunes, ce Jean-Michel Blanquer, Ministre de l’Education Nationale, qui décrète la présence obligatoire du drapeau tricolore et des paroles de La Marseillaise dans chaque salle de classe.
23 février 2019
Après la rue Saint-Nicolas il y a un mois ou deux, c’est depuis deux ou trois semaines rue Saint-Romain travodurézodo. Les ouvriers s’affairent, des Blancs et des Noirs, ces derniers souvent au fond des trous. Ce vendredi, on en est au repavage.
Dès lundi, le marteau-piqueur de l’entreprise engagée par la Métropole Rouen Normandie va s’attaquer à la ruelle allant d’une rue à l’autre. Sous mes fenêtres, une œuvre abstraite réalisée à la bombe me promet bien du plaisir.
Il s’agit de « répondre à la réglementation relative à la teneur maximale en plomb autorisée dans l’eau potable » en procédant « au remplacement du branchement et de la canalisation en plomb desservant votre habitation ». Ravi d’apprendre que depuis presque vingt ans je bois de l’eau au plomb.
Cette intervention ne concerne que le branchement collectif de la copropriété. Il n’est pas question de changer les tuyaux allant ensuite vers chaque appartement. Sont-ils eux aussi en plomb ?
Le chef de travaux veille au dialogue avec les résidents. Je n’aurai pas l’occasion de le voir beaucoup, je vais aller voir ailleurs si j’y suis.
*
Qui dit travodurézodo dit avidarédo, j’en suis à trois et d’autres sont prévus, toujours le matin à partir de huit heures et demie, c’est à dire bien après que j’ai pris ma douche.
*
Le goéland ne « piaille » pas : il « pleure » ou il « raille », me fait remarquer un fidèle lecteur à qui je réponds que mes goélands ne sont ni pleureurs ni railleurs, ce sont des oiseaux littéraires, et ceux-ci piaillent, comme il a déjà été constaté: Dans les buissons piaillaient les moineaux (Musset, Histoire du merle blanc). ... un geai piaillait dans une cage (Moselly, Terres lorraines).
Je tire ces citations du site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales qui définit ainsi le verbe piailler : « pousser des petits cris aigus, fréquents et désagréables » et en donne un autre emploi assez réjouissant par Roger Martin du Gard dans Les Thibault : La marmaille piaillait au fond des logements.
Dès lundi, le marteau-piqueur de l’entreprise engagée par la Métropole Rouen Normandie va s’attaquer à la ruelle allant d’une rue à l’autre. Sous mes fenêtres, une œuvre abstraite réalisée à la bombe me promet bien du plaisir.
Il s’agit de « répondre à la réglementation relative à la teneur maximale en plomb autorisée dans l’eau potable » en procédant « au remplacement du branchement et de la canalisation en plomb desservant votre habitation ». Ravi d’apprendre que depuis presque vingt ans je bois de l’eau au plomb.
Cette intervention ne concerne que le branchement collectif de la copropriété. Il n’est pas question de changer les tuyaux allant ensuite vers chaque appartement. Sont-ils eux aussi en plomb ?
Le chef de travaux veille au dialogue avec les résidents. Je n’aurai pas l’occasion de le voir beaucoup, je vais aller voir ailleurs si j’y suis.
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Qui dit travodurézodo dit avidarédo, j’en suis à trois et d’autres sont prévus, toujours le matin à partir de huit heures et demie, c’est à dire bien après que j’ai pris ma douche.
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Le goéland ne « piaille » pas : il « pleure » ou il « raille », me fait remarquer un fidèle lecteur à qui je réponds que mes goélands ne sont ni pleureurs ni railleurs, ce sont des oiseaux littéraires, et ceux-ci piaillent, comme il a déjà été constaté: Dans les buissons piaillaient les moineaux (Musset, Histoire du merle blanc). ... un geai piaillait dans une cage (Moselly, Terres lorraines).
Je tire ces citations du site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales qui définit ainsi le verbe piailler : « pousser des petits cris aigus, fréquents et désagréables » et en donne un autre emploi assez réjouissant par Roger Martin du Gard dans Les Thibault : La marmaille piaillait au fond des logements.
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