Ce samedi, à dix heures, je suis à la gare de Rouen pour accueillir celle qui vient me voir tirant derrière elle un chariot empli des livres que je n’ai pu rapporter de Paris quand j’étais chez elle pendant son voyage de travail à Pékin. S’y ajoute mon sac à dos qu’elle n’a pu faire réparer. Nous posons tout ça à la maison, passons par le marché et buvons une boisson chaude au soleil à la terrasse du Clos Saint-Marc en parlant de nos vies respectives et du monde tel qu’il va mal.
A midi, nous prenons l’apéritif au jardin où je réussis à renverser mon verre de pommeau avant même d’en avoir bu une goutte puis déjeunons de sa bonne cuisine dans un grand et long tintamarre de cloches de la Cathédrale dont la flèche fend un ciel d’un bleu estival (l’Archevêque Descubes y célèbre sa dernière messe).
Quand le moment est venu pour elle d’aller chez ses parents, je prends le métro afin d'aller une seconde fois au désherbage de la bibliothèque de Sotteville-lès-Rouen. J’y côtoie des jeunes acheteurs et acheteuses qui hier travaillaient et n’ont pu profiter de l’aubaine du premier jour mais les responsables ont remplacé les livres déjà vendus par d’autres tout aussi intéressants et je suis étonné encore une fois que cette bibliothèque, comme d’autres, juge bon de vendre des livres de fonds, qui ne sont plus édités, et manqueront un jour à un(e) étudiant(e). Mes deux sacs s’emplissent. S’y trouvent notamment Du fond de l’abîme (Journal du ghetto de Varsovie) de Hillel Seidman (Terre Humaine Plon), La Foire à L’Homme (Ecrits et dits dans les camps du système nazi de 1933 à 1945) de Michel Reynaud (Tirésias, deux volumes dans un coffret illustré par Robert Combas), Mes soldats de papier (Journal 1933-1941) de Victor Klemperer (Le Seuil), Le Livre idolâtre de Bruno Schulz (Denoël) et Les Cahiers noirs (Journal 1905-1922) de Marcel Sembat (Viviane Hamy).
Au moment de payer, la bibliothécaire apercevant ce dernier livre, m’annonce qu’elle ne peut me le laisser :
-Il y a quelqu’un qui me l’a demandé.
Je proteste :
-Ce n’est pas correct.
Elle cède :
-Bon, eh bien, tant pis, on le rachètera.
Je paie, remets mes livres dans mes sacs et ai droit à un « au revoir » glacial.
*
Ces Cahiers noirs, comme tous les livres désherbés porte le cachet « Supprimé de l’inventaire ». Il ne pouvait pas être remis en circulation sur les rayonnages de la bibliothèque. Il est donc probable qu’une connaissance de cette bibliothécaire lui avait demandé de le mettre de côté à son intention.
*
Autre livre désherbé : Les mots croisés de Georges Perec (P.O.L.), comprenant trois cent quarante-neuf grilles, acheté vingt-huit euros par cette bibliothèque, alors qu’évidemment aucun(e) abonné(e) ne pouvait prendre son crayon pour les faire.
*
L’Archevêque Descubes part à la retraite (comme on dit). Il restera dans la mémoire des Rouennais(e)s grâce à sa chute dans la Seine lors de l’Armada deux mille huit. Son successeur Lebrun a cinquante-huit ans. Première fois que l'Archevêque est plus jeune que moi. Pas rassurant.
A midi, nous prenons l’apéritif au jardin où je réussis à renverser mon verre de pommeau avant même d’en avoir bu une goutte puis déjeunons de sa bonne cuisine dans un grand et long tintamarre de cloches de la Cathédrale dont la flèche fend un ciel d’un bleu estival (l’Archevêque Descubes y célèbre sa dernière messe).
Quand le moment est venu pour elle d’aller chez ses parents, je prends le métro afin d'aller une seconde fois au désherbage de la bibliothèque de Sotteville-lès-Rouen. J’y côtoie des jeunes acheteurs et acheteuses qui hier travaillaient et n’ont pu profiter de l’aubaine du premier jour mais les responsables ont remplacé les livres déjà vendus par d’autres tout aussi intéressants et je suis étonné encore une fois que cette bibliothèque, comme d’autres, juge bon de vendre des livres de fonds, qui ne sont plus édités, et manqueront un jour à un(e) étudiant(e). Mes deux sacs s’emplissent. S’y trouvent notamment Du fond de l’abîme (Journal du ghetto de Varsovie) de Hillel Seidman (Terre Humaine Plon), La Foire à L’Homme (Ecrits et dits dans les camps du système nazi de 1933 à 1945) de Michel Reynaud (Tirésias, deux volumes dans un coffret illustré par Robert Combas), Mes soldats de papier (Journal 1933-1941) de Victor Klemperer (Le Seuil), Le Livre idolâtre de Bruno Schulz (Denoël) et Les Cahiers noirs (Journal 1905-1922) de Marcel Sembat (Viviane Hamy).
Au moment de payer, la bibliothécaire apercevant ce dernier livre, m’annonce qu’elle ne peut me le laisser :
-Il y a quelqu’un qui me l’a demandé.
Je proteste :
-Ce n’est pas correct.
Elle cède :
-Bon, eh bien, tant pis, on le rachètera.
Je paie, remets mes livres dans mes sacs et ai droit à un « au revoir » glacial.
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Ces Cahiers noirs, comme tous les livres désherbés porte le cachet « Supprimé de l’inventaire ». Il ne pouvait pas être remis en circulation sur les rayonnages de la bibliothèque. Il est donc probable qu’une connaissance de cette bibliothécaire lui avait demandé de le mettre de côté à son intention.
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Autre livre désherbé : Les mots croisés de Georges Perec (P.O.L.), comprenant trois cent quarante-neuf grilles, acheté vingt-huit euros par cette bibliothèque, alors qu’évidemment aucun(e) abonné(e) ne pouvait prendre son crayon pour les faire.
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L’Archevêque Descubes part à la retraite (comme on dit). Il restera dans la mémoire des Rouennais(e)s grâce à sa chute dans la Seine lors de l’Armada deux mille huit. Son successeur Lebrun a cinquante-huit ans. Première fois que l'Archevêque est plus jeune que moi. Pas rassurant.