Le Journal de Michel Perdrial
Le Journal de Michel Perdrial



Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.







Rss

De Cherbourg à Tourlaville et retour

14 mars 2016


Le ouiquennede, on ne prend le petit-déjeuner qu’à partir de huit heures à l’Appart’City Hôtel de Cherbourg. Les ouvriers venus de l’Est sont remplacés par trois couples de touristes d’âge divers qui le découvrent en chuchotant. Je préfèrerais qu’ils parlent suffisamment fort pour couvrir le son de la télé qui veut faire croire que quatre branlotines ne se connaissant pas étaient en mesure de commettre un attentat au Casino de Paris. Le seul travailleur présent est celui qui déjeune debout en trois minutes sans enlever sa veste ni son sac à dos, peut-être est-ce cela le petit déjeuner Express à cinq euros quatre-vingt-dix qui ne donne droit qu’à un café, un jus d’orange et deux mini viennoiseries. Celui à volonté se nomme Easy et coûte neuf euros quatre-vingt-dix.
-C’est aujourd’hui que va être fait le ménage hebdomadaire de votre appartement auquel vous avez droit, m’annonce un employée dans l’ascenseur.
Ce samedi, je prends le bus Zéphir numéro Cinq, direction Les Flamands, commune de Tourlaville. Ce nom, Les Flamands, me fait imaginer ce qu’on appelle une cité et effectivement. Je demande à l’homme lourdement chargé de courses qui descend en même temps que moi comment trouver la mer. Il suffit de passer sous un immeuble.
De petits bateaux sont amarrés dans ce que je nommerai un port de pauvres. Il est enjambé par une route express de couleur bleue sur laquelle filent bruyamment voitures et camions. On a vue sur une île couverte d’un fort qui se nomme Pelée et qu’on ne visite pas. Ce n’est pas un endroit qui donne envie de s’attarder.
Je décide de rentrer à Cherbourg pédestrement en longeant la mer, ce qui est possible au début mais pas longtemps. Je me heurte à la station d’épuration des Mielles, récente et inodore. Un panneau m’alarme : « Danger atmosphère explosive ». Je n’ose le photographier craignant qu’en appuyant sur le déclencheur, je fasse sauter tout le bazar et moi itou. Je file jusqu’au bout de la voie qui se nomme « rue de la Pyrotechnie » (humour local).
J’arrive aux Constructions Navales de Normandie et m’apparaissent des bateaux en devenir, simples structures de métal rouillé aussi hautes que le pavillon d’à côté, puis c’est la Gare Maritime où attendent les ferries pour la Grande-Bretagne et l’Irlande, une ville dans la ville qu’il me faut contourner en longeant la grand-route, barbelés, policiers, douaniers.
Je passe enfin à proximité de la Cité de la Mer où l’on doit trouver autant de moutard(e)s que de poisson(ne)s et suis enfin à l’avant-port. Je franchis le pont tournant et me voici en ville, comme on dit, où je me récompense d’un café à celui de l’Etoile. De là, j’assiste à l’occupation primordiale des Cherbourgeois(e)s le samedi matin : faire ses courses au marché et en magasin, je n’ai pas encore vu autant de monde grouillant dans les rues.
Fuyant cette foule, je me réfugie chez Emmaüs face au bar La Taupe fermé depuis longtemps. J’y trouve pour trois euros le livre qu’il me fallait : Intérieur de Thomas Clerc (L’Arbalète Gallimard) puis vais déjeuner à la Brasserie du Commerce d’un excellent stèque haché sauce roquefort accompagné d’un quart de corbières Château Fontarèche.
J’en ai heureusement presque terminé quand arrive un couple de quinquagénaires :
-Ça te va là, Minette ?
Il ressemble au chef actuel de la Cégété, bien que sans moustache et avec davantage de ventre. Elle veut un apéritif sans alcool.
-On a des coquetèles de jus de fruits, suggère la serveuse.
-C’est détox, commente Minette
-Vous avez ça ici, lui montre la serveuse sur la carte.
-Elle a pas ses lunettes, elle va rien voir, dit Cégété.
Je vais commencer la visite de l’appartement de Thomas Clerc sur un banc du port puis, pris par cette lecture mais ayant un peu frais, la poursuis au Café de l’Etoile. Il n’y a plus grand monde dans les rues.
-Quand il fait beau comme ça, les gens, y vont sur la côte, commente un serveur, confirmant que Cherbourg n’est pas une ville de bord de mer.
J’en suis à mon deuxième café, et dans la salle de bains de Thomas Clerc, quand je vois arriver, et s’asseoir à proximité, Minette et Cégété. Pour elle, ce sera un thé.
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A Cherbourg, quand on monte dans le bus, on montre bien haut sa carte d’abonné au chauffeur
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A Cherbourg, le mendiant s’assoit au milieu de la rue piétonnière, regardant droit dans les yeux ceux qui viennent vers lui, ignorant ceux qui arrivent dans son dos.
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A Cherbourg, pas loin de la Mairie, se trouve une statue de Napoléon le Premier sur son cheval, la même qu’à Rouen.