Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
14 octobre 2021
Réveillé seulement à six heures et demie ce mercredi matin, je suis obligé de reporter à un autre jour ce que j’avais prévu et en remplacement de dernière heure monte dans le train Zou de sept heures cinquante-neuf pour Grasse dont je descends à Cros-de-Cagnes, commune de Cagnes-sur-Mer.
C’est le quartier des pêcheurs italiens. Ils disposent d’un petit port où l’on s’active de bon matin. Son autre atout touristique est une croquignolesque église jaune avec toiture en chapeau de fée construite par les pêcheurs eux-mêmes et qui semble être un élément de décor pour film.
Cros-de-Cagnes dispose d’une promenade permettant de marcher le long de l’interminable plage de galets. Elle est hélas jouxtée par une deux fois deux voies à forte circulation, elle-même bordée d’un certain nombre de brasseries et de restaurants.
C’est à la brasserie Lou Lamparo que je prends un café verre d’eau à un euro soixante. J’y lis Goncourt en attendant qu’ouvre l’Office du Tourisme.
L’aimable jeune femme qui me reçoit n’a que moi comme client. Je profite de cette situation pour lui demander des renseignements et des documents sur tout ce qu’il me tente encore de voir entre Cannes et Menton et dans l’arrière-pays avant de devoir rentrer à Rouen.
Cela fait, je traverse une nouvelle fois la deux fois deux voies et m’installe sur un banc pour reprendre ma lecture face à la vaste mer dans laquelle un petit bateau de pêche tire son filet. Régulièrement, des avions descendent au-dessus d’icelle pour se poser à l’Aéroport de Nice.
A midi je choisis de déjeuner à la brasserie L’Azur pour son plat du jour : un foie de veau persillé et sa purée. Il est excellent et a suffisamment de succès pour qu’à midi vingt il n’y en ait plus. Mes voisins de table se trouvent mieux ici qu’à Nice. Avec le quart de vin blanc et le tiramisu que je choisis pour dessert, j’en ai pour vingt euros quatre-vingt-dix. Je les règle à Giovanni en le remerciant.
Je retourne lire au bord de la plage jusqu’à ce que passe le bus Zou numéro Deux Cent Dix-Sept dont le terminus est le Parc Phoenix près de l’Aéroport. Arrivé là, je grimpe dans le Tram Deux et en descends à Durandy. Cette station est enterrée si profondément qu’il faut trois longs escalators pour s’en extraire.
Presque en face est Le Relax où je n’ai plus besoin de commander mon café verre d’eau.
*
Qui parle italien est peut-être français.
Qui parle français est peut-être italien.
*
Une Japonaise avec un ticheurte « Self Service Only ».
C’est le quartier des pêcheurs italiens. Ils disposent d’un petit port où l’on s’active de bon matin. Son autre atout touristique est une croquignolesque église jaune avec toiture en chapeau de fée construite par les pêcheurs eux-mêmes et qui semble être un élément de décor pour film.
Cros-de-Cagnes dispose d’une promenade permettant de marcher le long de l’interminable plage de galets. Elle est hélas jouxtée par une deux fois deux voies à forte circulation, elle-même bordée d’un certain nombre de brasseries et de restaurants.
C’est à la brasserie Lou Lamparo que je prends un café verre d’eau à un euro soixante. J’y lis Goncourt en attendant qu’ouvre l’Office du Tourisme.
L’aimable jeune femme qui me reçoit n’a que moi comme client. Je profite de cette situation pour lui demander des renseignements et des documents sur tout ce qu’il me tente encore de voir entre Cannes et Menton et dans l’arrière-pays avant de devoir rentrer à Rouen.
Cela fait, je traverse une nouvelle fois la deux fois deux voies et m’installe sur un banc pour reprendre ma lecture face à la vaste mer dans laquelle un petit bateau de pêche tire son filet. Régulièrement, des avions descendent au-dessus d’icelle pour se poser à l’Aéroport de Nice.
A midi je choisis de déjeuner à la brasserie L’Azur pour son plat du jour : un foie de veau persillé et sa purée. Il est excellent et a suffisamment de succès pour qu’à midi vingt il n’y en ait plus. Mes voisins de table se trouvent mieux ici qu’à Nice. Avec le quart de vin blanc et le tiramisu que je choisis pour dessert, j’en ai pour vingt euros quatre-vingt-dix. Je les règle à Giovanni en le remerciant.
Je retourne lire au bord de la plage jusqu’à ce que passe le bus Zou numéro Deux Cent Dix-Sept dont le terminus est le Parc Phoenix près de l’Aéroport. Arrivé là, je grimpe dans le Tram Deux et en descends à Durandy. Cette station est enterrée si profondément qu’il faut trois longs escalators pour s’en extraire.
Presque en face est Le Relax où je n’ai plus besoin de commander mon café verre d’eau.
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Qui parle italien est peut-être français.
Qui parle français est peut-être italien.
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Une Japonaise avec un ticheurte « Self Service Only ».
13 octobre 2021
Après mon excès de la veille, j’opte pour une journée sans effort physique. Aussi, avec mon habituel train Zou terminus Vintimille, je me rends cette fois à Eze-sur-Mer, c’est-à-dire dans la partie basse d’Eze, d’où part le chemin de Nietzsche.
A l’arrivée je cherche un sentier longeant la mer avec l’intention de marcher un peu puis de me poser sur un banc face à elle. Or il n’y en a pas. On ne peut que descendre à de petites plages qui ne disposent pas de quoi s’asseoir. Que faire ?
Un bus Cent arrive de Monaco et va vers Nice, je le prends. Ce m’est l’occasion de circuler sur la basse corniche, laquelle domine néanmoins Beaulieu et Villefranche.
Le terminus niçois est à Port Lympia. J’y boirais bien un café mais aucun bar n’est du côté ensoleillé, aussi je rejoins la terrasse du Nomad et y lis le Journal d’Edmond de Goncourt jusqu’à ce que l’ombre me rattrape.
Le soleil est toujours présent sur le quai des Etats-Unis. Je prends la rue Droite pour le rejoindre. Au croisement avec une autre ruelle de la Vieille Ville, un jeune homme veut me faite attendre au prétexte que l’on tourne une série pour France Deux. Je refuse de lui obéir.
Face à la Baie des Anges, je m’installe sur un banc blanc, ôte ma veste et reprends ma lecture. Certain(e)s se baignent, bien que ce ne soit plus la chaleur. D’autres se contentent d’aller et venir sur la promenade.
Me trotte dans la tête l’idée que parmi les femmes que je vois passer pourrait se trouver la Niçoise avec qui, au temps béni du Minitel, j’ai échangé des missives érotico-pornographiques. Elle était fort jolie et mariée, m’avait envoyé des photos d’elle, dont une où elle se faisait bronzer sur le pont d’un bateau, nue. Si longtemps après, je suis sûr que je ne la reconnaîtrais pas. Et c’est tant mieux.
*
A midi je déjeune à dix-neuf euros au Nomad dont le cuisinier ne sait plus où donner de la spatule. Un groupe de douze, constitué de stagiaires quadragénaires, s’est installé en terrasse, alors que les autres jours nous n’étions que moins de cinq à déjeuner.
*
En descendant vers Port Lympia avec le bus Cent on passe près du Palais où Maurice Maeterlinck résidait et devant le Monument Maeterlinck qui donne son nom à un arrêt que la voix féminine enregistrée prononce Maeterlingue. Dans ce coin se trouve aussi une rue Jean-Lorrain. Le Nouvel Ordre Moral n’a pas encore songé à la débaptiser.
*
Un drôle d’individu que ce Lorrain ! note Edmond de Goncourt le mercredi trois juin mil huit cent quatre-vingt-onze, racontant une bagarre générale par lui déclenchée dans un cabaret.
Lorrain contait que Sarah Bernhardt ne jouissait que depuis une dizaine d’années, à la suite d’une opération de Lannelongue qui avait doté la sécheresse de sa vulve de l’humidité d’une glande. écrit-il le dimanche vingt et un juin suivant.
A l’arrivée je cherche un sentier longeant la mer avec l’intention de marcher un peu puis de me poser sur un banc face à elle. Or il n’y en a pas. On ne peut que descendre à de petites plages qui ne disposent pas de quoi s’asseoir. Que faire ?
Un bus Cent arrive de Monaco et va vers Nice, je le prends. Ce m’est l’occasion de circuler sur la basse corniche, laquelle domine néanmoins Beaulieu et Villefranche.
Le terminus niçois est à Port Lympia. J’y boirais bien un café mais aucun bar n’est du côté ensoleillé, aussi je rejoins la terrasse du Nomad et y lis le Journal d’Edmond de Goncourt jusqu’à ce que l’ombre me rattrape.
Le soleil est toujours présent sur le quai des Etats-Unis. Je prends la rue Droite pour le rejoindre. Au croisement avec une autre ruelle de la Vieille Ville, un jeune homme veut me faite attendre au prétexte que l’on tourne une série pour France Deux. Je refuse de lui obéir.
Face à la Baie des Anges, je m’installe sur un banc blanc, ôte ma veste et reprends ma lecture. Certain(e)s se baignent, bien que ce ne soit plus la chaleur. D’autres se contentent d’aller et venir sur la promenade.
Me trotte dans la tête l’idée que parmi les femmes que je vois passer pourrait se trouver la Niçoise avec qui, au temps béni du Minitel, j’ai échangé des missives érotico-pornographiques. Elle était fort jolie et mariée, m’avait envoyé des photos d’elle, dont une où elle se faisait bronzer sur le pont d’un bateau, nue. Si longtemps après, je suis sûr que je ne la reconnaîtrais pas. Et c’est tant mieux.
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A midi je déjeune à dix-neuf euros au Nomad dont le cuisinier ne sait plus où donner de la spatule. Un groupe de douze, constitué de stagiaires quadragénaires, s’est installé en terrasse, alors que les autres jours nous n’étions que moins de cinq à déjeuner.
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En descendant vers Port Lympia avec le bus Cent on passe près du Palais où Maurice Maeterlinck résidait et devant le Monument Maeterlinck qui donne son nom à un arrêt que la voix féminine enregistrée prononce Maeterlingue. Dans ce coin se trouve aussi une rue Jean-Lorrain. Le Nouvel Ordre Moral n’a pas encore songé à la débaptiser.
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Un drôle d’individu que ce Lorrain ! note Edmond de Goncourt le mercredi trois juin mil huit cent quatre-vingt-onze, racontant une bagarre générale par lui déclenchée dans un cabaret.
Lorrain contait que Sarah Bernhardt ne jouissait que depuis une dizaine d’années, à la suite d’une opération de Lannelongue qui avait doté la sécheresse de sa vulve de l’humidité d’une glande. écrit-il le dimanche vingt et un juin suivant.
12 octobre 2021
Ce lundi matin, les nuages disparus, je prends le tram Un dans l’autre sens et en descends à Vauban. Une autochtone m’aide à trouver la Gare Routière et à neuf heures je monte dans le bus Cent Douze dont le terminus est le Casino de Monte-Carlo. Il est arrivé à Tchekhov en villégiature à Nice de prendre un moyen de locomotion pour aller y jouer. Je n’ai pas ce vice. J’ai pour objectif Eze que l’on atteint après une demi-heure de trajet sur la moyenne corniche avec une vue plongeante sur la rade de Villefranche et le Cap Ferrat.
Eze, village perché, est fort réputé. De l’arrêt de bus je découvre l’église sur le piton rocheux. Je passe à l’Office du Tourisme et me renseigne sur où trouver la tombe d’un ancien résident. Le cimetière est à côté de l’église. Deux hommes en sortent. L’un d’eux, sans que je leur demande quoi que ce soit, me confirme l’endroit. « La plaque y est », précise-t-il. Effectivement, et ce n’est pas celle que j’ai vue en photo, sans doute volée et remplacée. « Laissez-moi dormir / J’étais fait pour ça », l’épitaphe est tirée d’une de ses chansons. Au-dessus, le nom de celui qui se repose avec sa femme Evelyn : Francis Blanche.
Je parcours ensuite l’embrouillamini de ruelles tortueuses d’Eze. A son sommet sont les ruines du Château entourées d’un jardin exotique payant. Impossible de voir la mer de tout en haut sans payer. Ailleurs dans le village, on ne peut pas non plus. Des propriétés privées l’empêchent.
Je redescends et face à l’arrêt de bus, m’assois à une table au soleil au Restaurant Hôtel La Villa d’Eze. Le café y coûte deux euros trente. J’y suis à mon aise (comment l’éviter ?) pour lire Edmond jusqu’à midi, puis j’y déjeune de penne au saumon à quinze euros cinquante avec une carafe d’eau.
Sitôt terminé ce repas succinct, je rejoins le point d’arrivée du « Chemin Frederic Nietzsche ». Ce sentier part du bord de mer et serpente sur la pente raide jusqu'au village perché. Nietzsche, logeant à la fin de sa vie à Nice, malade, l’aurait fréquenté, y réfléchissant à la troisième partie d'Ainsi parlait Zarathoustra.
Je choisis de le descendre (quarante-cinq minutes, m’a dit la jeune femme de l’Office du Tourisme ). Bien vite, je me rends compte que même dans ce sens ce n’est pas de la tarte. Chaque pas est une difficulté. Je dois me méfier de toutes les pierres avec mes vieux pieds, spécialement de celles qui brillent. Je croise quelques jeunes qui montent, et aussi une courageuse vieille marcheuse à bâtons. Des qui descendent comme moi me dépassent. Je vois la mer au loin, au bord de laquelle est l’arrivée. Elle me semble toujours aussi loin. Je m’épuise. Je ne peux que continuer, dégoulinant de sueur, n’ayant même plus la force de prendre des photos de ce chemin de croix philosophique. Enfin j’atteins le plan incliné bétonné qui annonce l’issue. Je regarde ma montre. Pour parcourir les deux mille cent vingt mètres au dénivelé de quatre cent vingt-neuf mètres, j’ai mis soixante-quinze minutes.
Lessivé, je trouve à m’asseoir à la terrasse de La Vieille Maison et y bois un café grand verre d’eau puis un diabolo menthe (quatre euros cinquante pour le tout). Un peu remis, la Gare d’Eze-sur-Mer étant à deux pas, je rentre à Nice.
Cette descente du chemin de Nietzsche, ce sera ma dernière folie.
*
Le Francis, rondouillard comme il l’était, quelle idée de venir habiter à Eze.
Eze, village perché, est fort réputé. De l’arrêt de bus je découvre l’église sur le piton rocheux. Je passe à l’Office du Tourisme et me renseigne sur où trouver la tombe d’un ancien résident. Le cimetière est à côté de l’église. Deux hommes en sortent. L’un d’eux, sans que je leur demande quoi que ce soit, me confirme l’endroit. « La plaque y est », précise-t-il. Effectivement, et ce n’est pas celle que j’ai vue en photo, sans doute volée et remplacée. « Laissez-moi dormir / J’étais fait pour ça », l’épitaphe est tirée d’une de ses chansons. Au-dessus, le nom de celui qui se repose avec sa femme Evelyn : Francis Blanche.
Je parcours ensuite l’embrouillamini de ruelles tortueuses d’Eze. A son sommet sont les ruines du Château entourées d’un jardin exotique payant. Impossible de voir la mer de tout en haut sans payer. Ailleurs dans le village, on ne peut pas non plus. Des propriétés privées l’empêchent.
Je redescends et face à l’arrêt de bus, m’assois à une table au soleil au Restaurant Hôtel La Villa d’Eze. Le café y coûte deux euros trente. J’y suis à mon aise (comment l’éviter ?) pour lire Edmond jusqu’à midi, puis j’y déjeune de penne au saumon à quinze euros cinquante avec une carafe d’eau.
Sitôt terminé ce repas succinct, je rejoins le point d’arrivée du « Chemin Frederic Nietzsche ». Ce sentier part du bord de mer et serpente sur la pente raide jusqu'au village perché. Nietzsche, logeant à la fin de sa vie à Nice, malade, l’aurait fréquenté, y réfléchissant à la troisième partie d'Ainsi parlait Zarathoustra.
Je choisis de le descendre (quarante-cinq minutes, m’a dit la jeune femme de l’Office du Tourisme ). Bien vite, je me rends compte que même dans ce sens ce n’est pas de la tarte. Chaque pas est une difficulté. Je dois me méfier de toutes les pierres avec mes vieux pieds, spécialement de celles qui brillent. Je croise quelques jeunes qui montent, et aussi une courageuse vieille marcheuse à bâtons. Des qui descendent comme moi me dépassent. Je vois la mer au loin, au bord de laquelle est l’arrivée. Elle me semble toujours aussi loin. Je m’épuise. Je ne peux que continuer, dégoulinant de sueur, n’ayant même plus la force de prendre des photos de ce chemin de croix philosophique. Enfin j’atteins le plan incliné bétonné qui annonce l’issue. Je regarde ma montre. Pour parcourir les deux mille cent vingt mètres au dénivelé de quatre cent vingt-neuf mètres, j’ai mis soixante-quinze minutes.
Lessivé, je trouve à m’asseoir à la terrasse de La Vieille Maison et y bois un café grand verre d’eau puis un diabolo menthe (quatre euros cinquante pour le tout). Un peu remis, la Gare d’Eze-sur-Mer étant à deux pas, je rentre à Nice.
Cette descente du chemin de Nietzsche, ce sera ma dernière folie.
*
Le Francis, rondouillard comme il l’était, quelle idée de venir habiter à Eze.
11 octobre 2021
Ma mésaventure ne me dissuade pas de retourner à Antibes ce dimanche par le même train Zou matinal. A l’arrivée, suivant le conseil que m’a donné la veille l’aimable employée de l’Office de Tourisme de cette ville, je rejoins la Gare Routière par la passerelle qui enjambe les voies. Cette fois, il ne s’agit pas de prendre le bus Deux Cent mais le bus Deux qui va presque jusqu’à l’extrémité du Cap d’Antibes.
Il est déjà là mais sa conductrice est du genre à faire attendre sur le trottoir qui veut monter. Jusqu’à ce qu’il soit presque l’heure du départ, elle fait mumuse avec son smartphone. Quand elle se décide à ouvrir la porte, je la salue froidement, fais biper ma carte SudAzur et vais m’asseoir à ma place préférée, juste après la porte de sortie. Un autre passager fait la moitié du trajet. Je descends au terminus, Eden Roc, hôtel de luxe et parfum Dior, à la pointe du Graillon.
Mon projet est d’atteindre pédestrement Juan-les-Pins par la route côtière. Elle ne laisse pas grand place aux piétons mais n’est à cette heure empruntée que par les bicyclistes du dimanche, solo, duo ou troupeau, des hommes.
Les villas de riches qui minent ce Cap d’Antibes sont de ce côté assez quelconques. Je m’en désintéresse, regardant vers la mer. Bientôt je suis au port de l’Olivette où sont tirés sur les galets de jolis petits bateaux. L’un a pour nom « La Vie en Rose » et c’est aussi sa couleur. Après la plage des Ondes, j’arrive au port du Crouton pour bateaux de pauvres puis à celui nommé Gallice pour bateaux de riches. Enfin je touche la ville de Juan-les-Pins.
J’évite de marcher sur les empreintes des mains du jazz et trouve le bien nommé Café de la Plage pour boire un café verre d’eau presque les pieds dans l’eau. Celui-ci est à deux euros dix. Un vent frisquet balaie la promenade. Malgré cette difficulté, je lis là un moment, tout en ayant un œil sur qui passe et au loin sur Cannes, les iles de Lérins et la chaîne de l’Esterel.
Ce vent frais m’interdit de chercher un restaurant acceptable près de la mer. Je le regrette d’autant moins que les immeubles du front de mer sont d’une laideur comparable à ceux de La Baule. Je me rapproche de la Gare et découvre à proximité d’icelle l’Indian Palace qui propose un buffet à volonté.
C’est là que je m’installe dans une salle dont la baie vitrée est ouverte, après avoir dû montrer mon passe sanitaire à une jeune femme timide qui m’intimide. Je lui commande en sus un nan au fromage et un quart de vin blanc. Tout cela est bon. Malheureusement pour la maison, je suis toujours le seul client vers treize heures vingt quand j’achève mon repas.
La jolie jeune femme (peut-être tamoule si j’en juge par une affiche politique derrière la caisse) me demande si je peux payer mes vingt euros quarante en argent.
-La carte, ça fait moins pour moi.
J’obtempère et la remercie puis attrape le train Zou de treize heures trente-deux. Cette fois, tout va bien pour le retour.
*
Au bout du Cap d’Antibes : l’anse de Faux Argent, connue aussi sous le nom de baie des Milliardaires.
*
Un boulanger n’a pas pu résister. Il a nommé son affaire Juan-les-Pains.
Il est déjà là mais sa conductrice est du genre à faire attendre sur le trottoir qui veut monter. Jusqu’à ce qu’il soit presque l’heure du départ, elle fait mumuse avec son smartphone. Quand elle se décide à ouvrir la porte, je la salue froidement, fais biper ma carte SudAzur et vais m’asseoir à ma place préférée, juste après la porte de sortie. Un autre passager fait la moitié du trajet. Je descends au terminus, Eden Roc, hôtel de luxe et parfum Dior, à la pointe du Graillon.
Mon projet est d’atteindre pédestrement Juan-les-Pins par la route côtière. Elle ne laisse pas grand place aux piétons mais n’est à cette heure empruntée que par les bicyclistes du dimanche, solo, duo ou troupeau, des hommes.
Les villas de riches qui minent ce Cap d’Antibes sont de ce côté assez quelconques. Je m’en désintéresse, regardant vers la mer. Bientôt je suis au port de l’Olivette où sont tirés sur les galets de jolis petits bateaux. L’un a pour nom « La Vie en Rose » et c’est aussi sa couleur. Après la plage des Ondes, j’arrive au port du Crouton pour bateaux de pauvres puis à celui nommé Gallice pour bateaux de riches. Enfin je touche la ville de Juan-les-Pins.
J’évite de marcher sur les empreintes des mains du jazz et trouve le bien nommé Café de la Plage pour boire un café verre d’eau presque les pieds dans l’eau. Celui-ci est à deux euros dix. Un vent frisquet balaie la promenade. Malgré cette difficulté, je lis là un moment, tout en ayant un œil sur qui passe et au loin sur Cannes, les iles de Lérins et la chaîne de l’Esterel.
Ce vent frais m’interdit de chercher un restaurant acceptable près de la mer. Je le regrette d’autant moins que les immeubles du front de mer sont d’une laideur comparable à ceux de La Baule. Je me rapproche de la Gare et découvre à proximité d’icelle l’Indian Palace qui propose un buffet à volonté.
C’est là que je m’installe dans une salle dont la baie vitrée est ouverte, après avoir dû montrer mon passe sanitaire à une jeune femme timide qui m’intimide. Je lui commande en sus un nan au fromage et un quart de vin blanc. Tout cela est bon. Malheureusement pour la maison, je suis toujours le seul client vers treize heures vingt quand j’achève mon repas.
La jolie jeune femme (peut-être tamoule si j’en juge par une affiche politique derrière la caisse) me demande si je peux payer mes vingt euros quarante en argent.
-La carte, ça fait moins pour moi.
J’obtempère et la remercie puis attrape le train Zou de treize heures trente-deux. Cette fois, tout va bien pour le retour.
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Au bout du Cap d’Antibes : l’anse de Faux Argent, connue aussi sous le nom de baie des Milliardaires.
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Un boulanger n’a pas pu résister. Il a nommé son affaire Juan-les-Pains.
10 octobre 2021
Ce samedi à sept heures, l’homme du Garibaldi étant à la bourre, c’est Le Sauveur qui m’accueille avec mes deux pains au chocolat. Quand je demande les toilettes au couple d’authentiques Niçois qui tiennent ce troquet, on me confie une clé accrochée à une boîte de conserve qui doit ouvrir la première porte noire dans la rue à droite. C’est sous un escalier et je dois m’y plier.
Le tram Un m’emmène à la Gare de Nice Ville. J’y prends le train Zou de sept heures cinquante-neuf pour Cannes La Bocca et en descends à Antibes. Il n’y a pas long à marcher pour atteindre le Port Vauban où logent de luxueux bateaux, avec en arrière-plan le Fort Carré.
De là, je trouve l’entrée du rempart pour pénétrer dans la vieille ville. Je découvre le marché couvert puis celui de la brocante, place Nationale, où n’est présent qu’un bouquiniste à quatre-vingt-quinze pour cent de daube.
Je vais ensuite à mon gré dans les rues étroites végétalisées aux maisons monochromes blanc cassé et aboutis au Musée Picasso, situé dans l’ancien Château Grimaldi, et à la Cathédrale.
L’heure étant venue d’un café lecture, je m’installe à la terrasse du Café Milo au coin de la place Nationale. Toute la population passe par là en route vers le marché, dont le dingue de service, un quinquagénaire au propos répétitif : « Mon chien, il est mort dans la rue et maintenant, y a des enfants dans les rues, y vont crever. »
A midi je choisis de déjeuner à l’une des grandes terrasses de la place Nationale, celle du Caméo qui propose une formule plat dessert boisson à treize euros cinquante. J’opte pour l’assiette cannibale (carpaccio tartare frites salade), le quart de vin rouge et la glace passion vanille. C’est bien.
Revenu à mon point d’entrée dans la vieille ville, la Porte Marine, je cherche et trouve la maison face à la mer d’où Nicolas de Staël s’est jeté dans le vide. Une plaque en russe et en français indique pudiquement « Le Peintre Nicolas de Staël 1914-1955 Habita Cette Maison Où il mourut le 16 Mars 1955 ».
Le Fort Carré me paraissant trop loin pour mes pieds, je décide de rentrer. Le train Zou de treize heures trente-cinq n’arrive pas. Un message annonce qu’il y a eu « un accident de personne » à la Gare de Golfe-Juan. Peu après le train qui dans l’autre sens doit aller à Marseille est retenu en gare. Je demande à mon voisin de quai s’il y a des bus pour Nice. Oui derrière la Gare, le bus Deux Cent. Il pense que le train suivant va arriver. Je lui explique que non, et qu’il y en a au moins pour deux heures et demie.
Je suis l’un des premiers à avoir compris ce qui nous attend et donc l’un des premiers à l’arrêt du bus où me rejoint bientôt celui à qui j’ai parlé. « Vous aviez raison, me dit-il, l’autre train est supprimé. » Bientôt d’autres se joignent à nous.
Le bus Deux Cent arrive à moitié plein. Je réussis à m’y asseoir. Beaucoup seront debout. Le chauffeur vire une dame en rose qui est montée sans payer puis nous partons dans cette boîte de sardine.
Mon jeune voisin était à la Gare de Golfe-Juan. Il a vu une femme basculer devant le train, sans doute un suicide. Il m’explique que ce bus s’arrête à l’entrée de Nice, qu’il faudra ensuite prendre le tram Deux.
C’est un trajet très éprouvant à cause du monde et des embouteillages. Je suis soulagé quand enfin je monte dans le tram Deux. Celui-ci circule sous terre en centre-ville mais on ne l’appelle pas métro comme à Rouen. J’en sors à Durandy, face au Relax fermé le samedi après-midi, et mets la clé dans la serrure à quinze heures trente, après deux heures de rude épreuve.
*
Comment être à Antibes sons avoir en tête l’Avanie et Framboise de Boby Lapointe Ça ne me mettait pas à l'aise / De la savoir Antibaise / Moi qui serais plutôt pour !
Le tram Un m’emmène à la Gare de Nice Ville. J’y prends le train Zou de sept heures cinquante-neuf pour Cannes La Bocca et en descends à Antibes. Il n’y a pas long à marcher pour atteindre le Port Vauban où logent de luxueux bateaux, avec en arrière-plan le Fort Carré.
De là, je trouve l’entrée du rempart pour pénétrer dans la vieille ville. Je découvre le marché couvert puis celui de la brocante, place Nationale, où n’est présent qu’un bouquiniste à quatre-vingt-quinze pour cent de daube.
Je vais ensuite à mon gré dans les rues étroites végétalisées aux maisons monochromes blanc cassé et aboutis au Musée Picasso, situé dans l’ancien Château Grimaldi, et à la Cathédrale.
L’heure étant venue d’un café lecture, je m’installe à la terrasse du Café Milo au coin de la place Nationale. Toute la population passe par là en route vers le marché, dont le dingue de service, un quinquagénaire au propos répétitif : « Mon chien, il est mort dans la rue et maintenant, y a des enfants dans les rues, y vont crever. »
A midi je choisis de déjeuner à l’une des grandes terrasses de la place Nationale, celle du Caméo qui propose une formule plat dessert boisson à treize euros cinquante. J’opte pour l’assiette cannibale (carpaccio tartare frites salade), le quart de vin rouge et la glace passion vanille. C’est bien.
Revenu à mon point d’entrée dans la vieille ville, la Porte Marine, je cherche et trouve la maison face à la mer d’où Nicolas de Staël s’est jeté dans le vide. Une plaque en russe et en français indique pudiquement « Le Peintre Nicolas de Staël 1914-1955 Habita Cette Maison Où il mourut le 16 Mars 1955 ».
Le Fort Carré me paraissant trop loin pour mes pieds, je décide de rentrer. Le train Zou de treize heures trente-cinq n’arrive pas. Un message annonce qu’il y a eu « un accident de personne » à la Gare de Golfe-Juan. Peu après le train qui dans l’autre sens doit aller à Marseille est retenu en gare. Je demande à mon voisin de quai s’il y a des bus pour Nice. Oui derrière la Gare, le bus Deux Cent. Il pense que le train suivant va arriver. Je lui explique que non, et qu’il y en a au moins pour deux heures et demie.
Je suis l’un des premiers à avoir compris ce qui nous attend et donc l’un des premiers à l’arrêt du bus où me rejoint bientôt celui à qui j’ai parlé. « Vous aviez raison, me dit-il, l’autre train est supprimé. » Bientôt d’autres se joignent à nous.
Le bus Deux Cent arrive à moitié plein. Je réussis à m’y asseoir. Beaucoup seront debout. Le chauffeur vire une dame en rose qui est montée sans payer puis nous partons dans cette boîte de sardine.
Mon jeune voisin était à la Gare de Golfe-Juan. Il a vu une femme basculer devant le train, sans doute un suicide. Il m’explique que ce bus s’arrête à l’entrée de Nice, qu’il faudra ensuite prendre le tram Deux.
C’est un trajet très éprouvant à cause du monde et des embouteillages. Je suis soulagé quand enfin je monte dans le tram Deux. Celui-ci circule sous terre en centre-ville mais on ne l’appelle pas métro comme à Rouen. J’en sors à Durandy, face au Relax fermé le samedi après-midi, et mets la clé dans la serrure à quinze heures trente, après deux heures de rude épreuve.
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Comment être à Antibes sons avoir en tête l’Avanie et Framboise de Boby Lapointe Ça ne me mettait pas à l'aise / De la savoir Antibaise / Moi qui serais plutôt pour !
9 octobre 2021
Même train Zou qu’hier matin ce vendredi, toujours chargé de travailleurs travailleuses, d’où je descends juste avant Monaco, à Cap d’Ail, un lieu qu’Anton Tchekhov lors de ses séjours niçois aimait fréquenter.
Nous ne sommes que deux à quitter le train en cet endroit. Je contourne la Gare désaffectée et trouve le raccourci passant sous les voies. Il ressemble un peu à la rue Obscure de Villefranche-sur-Mer, en plus glauque, et débouche au bord de la Méditerranée.
Cap d’Ail dispose d’un sentier de douanier, certes bétonné. « Danger passage interdit par mer houleuse » est-il écrit en rouge à son entrée. Aujourd’hui, tout est calme ; des sportifs et sportives en profitent. J’opte pour la direction de la Pointe des Douaniers et bien que des nuages moutonneux parsèment le ciel, je peux bientôt ôter ma veste. Cette côte découpée est pleine de charme, de même que le relief montagneux où sont accrochées des habitations luxueuses ou non, beaucoup construites après le passage de Tchekhov.
De la Pointe des Douaniers j’ai vue d’un côté sur la rade de Villefranche où stagne un de ces horribles bateaux de croisière et de l’autre sur les moches immeubles de Monaco. Un hélicoptère décolle de la Principauté. Le Prince peut-être, s’ennuyant sans sa femme exilée en Afrique du Sud.
Mon but étant atteint, je fais le chemin dans l’autre sens et m’installe face à la mer à une table en pierre sur laquelle je peux poser le Journal de Goncourt. Edmond est à Rouen, où il pleut et vente, pour l’inauguration du monument Flaubert.
Tout près est un restaurant où je n’ai pas envie d’aller. Pas davantage je ne veux grimper jusqu’au centre du bourg car je dois ménager mon cœur. Je rentre donc par le même train qu’hier. Il passe ici à onze heures une. J’arrive un peu avant midi au Nomad où c’est le jour de l’aïoli de cabillaud.
-Je vous apporte la tarte aux framboises tout de suite si vous voulez, plaisante le jeune patron.
Son aïoli est excellent. Je lui en fais compliment. Avec mon dessert et le quart de vin blanc, cela fait vingt-deux euros tout rond.
-C’est la pire des choses pour moi un client qui s’en va parce qu’il attend trop, me dit-il, ça veut dire que je ne fais pas bien mon travail.
Ça m’ennuie qu’il prenne la chose comme cela. Je lui dis qu’il est normal que sa serveuse étant en congé il ne puisse pas faire à lui seul la cuisine et le service. Sa jeune femme l’aide un peu mais elle s’occupe aussi de leur enfançon.
*
Cap d’Ail a son volcan, éteint depuis longtemps.
*
Un panneau explicatif sur l’une des demeures majestueuses de Cap d’Ail lui impute un « style éclectique ».
*
Mon essai comparatif toilettes publiques :
Monaco : gratuites, spacieuses, immaculées.
Cap d’Ail : gratuites, immondes, nauséabondes.
Nous ne sommes que deux à quitter le train en cet endroit. Je contourne la Gare désaffectée et trouve le raccourci passant sous les voies. Il ressemble un peu à la rue Obscure de Villefranche-sur-Mer, en plus glauque, et débouche au bord de la Méditerranée.
Cap d’Ail dispose d’un sentier de douanier, certes bétonné. « Danger passage interdit par mer houleuse » est-il écrit en rouge à son entrée. Aujourd’hui, tout est calme ; des sportifs et sportives en profitent. J’opte pour la direction de la Pointe des Douaniers et bien que des nuages moutonneux parsèment le ciel, je peux bientôt ôter ma veste. Cette côte découpée est pleine de charme, de même que le relief montagneux où sont accrochées des habitations luxueuses ou non, beaucoup construites après le passage de Tchekhov.
De la Pointe des Douaniers j’ai vue d’un côté sur la rade de Villefranche où stagne un de ces horribles bateaux de croisière et de l’autre sur les moches immeubles de Monaco. Un hélicoptère décolle de la Principauté. Le Prince peut-être, s’ennuyant sans sa femme exilée en Afrique du Sud.
Mon but étant atteint, je fais le chemin dans l’autre sens et m’installe face à la mer à une table en pierre sur laquelle je peux poser le Journal de Goncourt. Edmond est à Rouen, où il pleut et vente, pour l’inauguration du monument Flaubert.
Tout près est un restaurant où je n’ai pas envie d’aller. Pas davantage je ne veux grimper jusqu’au centre du bourg car je dois ménager mon cœur. Je rentre donc par le même train qu’hier. Il passe ici à onze heures une. J’arrive un peu avant midi au Nomad où c’est le jour de l’aïoli de cabillaud.
-Je vous apporte la tarte aux framboises tout de suite si vous voulez, plaisante le jeune patron.
Son aïoli est excellent. Je lui en fais compliment. Avec mon dessert et le quart de vin blanc, cela fait vingt-deux euros tout rond.
-C’est la pire des choses pour moi un client qui s’en va parce qu’il attend trop, me dit-il, ça veut dire que je ne fais pas bien mon travail.
Ça m’ennuie qu’il prenne la chose comme cela. Je lui dis qu’il est normal que sa serveuse étant en congé il ne puisse pas faire à lui seul la cuisine et le service. Sa jeune femme l’aide un peu mais elle s’occupe aussi de leur enfançon.
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Cap d’Ail a son volcan, éteint depuis longtemps.
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Un panneau explicatif sur l’une des demeures majestueuses de Cap d’Ail lui impute un « style éclectique ».
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Mon essai comparatif toilettes publiques :
Monaco : gratuites, spacieuses, immaculées.
Cap d’Ail : gratuites, immondes, nauséabondes.
8 octobre 2021
En train Zou direction Vintimille ce jeudi matin avec descente au deuxième arrêt, juste avant la presqu’île du Cap Ferrat, à Villefranche-sur-Mer qui fait face au soleil levant. Elle en est toute dorée.
Je longe les maisons colorées et étagées du dix-septième siècle, atteins le Port de la Santé où j’assiste au départ d’un des rares bateaux de pêche, passe devant la chapelle Jean Cocteau, continue à côtoyer la mer sous la Citadelle et arrive au Port Royal de la Darse.
A hauteur de la Capitainerie, je fais demi-tour et grimpe jusqu’à la Citadelle que je découvre en sérieux travaux. Derrière elle se trouve la vieille ville aux ruelles très pentues dominées par l’église Saint-Michel. Je vais dans ce dédale au gré de mon inspiration. Elle me mène à la bien nommée rue Obscure, qui datant du treizième siècle bénéficie aujourd’hui de l’éclairage public en plein jour.
De cette rue je redescends jusqu’au Port de la Santé où se concentrent les restaurants. Installé près du bord de l’eau azurée au Lou Bantry, je bois un café à un euro quatre-vingts puis lis Edmond cependant qu’un pêcheur que l’on pourrait croire payé par l’Office de Tourisme jette du pain dans l’eau, lance sa ligne et remonte des poissons nommés castagnoles. L’un d’eux atterrit sous ma table. D’un léger coup de pied, l’homme le remet à l’eau. « Trop petit », me dit-il.
Le soleil tape rudement sur ces terrasses car il est bas, rendant les parasols inefficaces. Comme de plus les plats proposés pour midi sont basiques et chers, je ne reste pas pour le déjeuner.
Je monte dans le train Zou d’onze heures quatorze et suis un peu avant midi à Nice au Nomad dont la terrasse est toujours à l’ombre. Le plat à dix euros est une entrecôte gnocchi di patate que j’accompagne d’un quart de vin rouge. Ce jour, la serveuse est absente. Le cuisinier qui doit tout faire est vite dépassé. Lassé d’attendre mon dessert, je m’en passe. Cela fait quatorze euros tout rond.
*
Du beau monde à Villefranche-sur-Mer, notamment dans le domaine de la pop. Keith Richards y a vécu en mil neuf cent soixante et onze avec sa fiancée Anita Pallenberg à la villa Nellcôte où les Stones enregistrèrent l'album Exile on Main Street. Tina Turner y a séjourné. Bono itou. Elton John y possède une résidence.
Je longe les maisons colorées et étagées du dix-septième siècle, atteins le Port de la Santé où j’assiste au départ d’un des rares bateaux de pêche, passe devant la chapelle Jean Cocteau, continue à côtoyer la mer sous la Citadelle et arrive au Port Royal de la Darse.
A hauteur de la Capitainerie, je fais demi-tour et grimpe jusqu’à la Citadelle que je découvre en sérieux travaux. Derrière elle se trouve la vieille ville aux ruelles très pentues dominées par l’église Saint-Michel. Je vais dans ce dédale au gré de mon inspiration. Elle me mène à la bien nommée rue Obscure, qui datant du treizième siècle bénéficie aujourd’hui de l’éclairage public en plein jour.
De cette rue je redescends jusqu’au Port de la Santé où se concentrent les restaurants. Installé près du bord de l’eau azurée au Lou Bantry, je bois un café à un euro quatre-vingts puis lis Edmond cependant qu’un pêcheur que l’on pourrait croire payé par l’Office de Tourisme jette du pain dans l’eau, lance sa ligne et remonte des poissons nommés castagnoles. L’un d’eux atterrit sous ma table. D’un léger coup de pied, l’homme le remet à l’eau. « Trop petit », me dit-il.
Le soleil tape rudement sur ces terrasses car il est bas, rendant les parasols inefficaces. Comme de plus les plats proposés pour midi sont basiques et chers, je ne reste pas pour le déjeuner.
Je monte dans le train Zou d’onze heures quatorze et suis un peu avant midi à Nice au Nomad dont la terrasse est toujours à l’ombre. Le plat à dix euros est une entrecôte gnocchi di patate que j’accompagne d’un quart de vin rouge. Ce jour, la serveuse est absente. Le cuisinier qui doit tout faire est vite dépassé. Lassé d’attendre mon dessert, je m’en passe. Cela fait quatorze euros tout rond.
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Du beau monde à Villefranche-sur-Mer, notamment dans le domaine de la pop. Keith Richards y a vécu en mil neuf cent soixante et onze avec sa fiancée Anita Pallenberg à la villa Nellcôte où les Stones enregistrèrent l'album Exile on Main Street. Tina Turner y a séjourné. Bono itou. Elton John y possède une résidence.
7 octobre 2021
Ce mercredi je peux prendre le bus Quinze dont le point de départ est la Promenade des Arts, pas loin du Garibaldi où comme souvent j’ai petit-déjeuné. Son point d’arrivée est le port de Saint-Jean-Cap-Ferrat. Le trajet est spectaculaire : vue sur la Baie des Anges, sur Villefranche-sur-Mer, sur le phare à l’extrémité de la presqu’île, sur la Baie des Fourmis.
Après une courte visite du port dans lequel sont amarrés de nombreux bateaux de luxe et de rares bateaux de pêcheurs, le tour de la presqu’île apparaissant au-dessus de mes forces, je me contente de celui de la pointe Saint-Hospice par un sentier de pavages scellés par du béton. On est juste au-dessus de la mer et comme souffle un peu de vent, celle-ci est vivante, m’offrant le bruit caractéristique des vagues qui se brisent sur les rochers. Une grimpette me permet de voir de près la chapelle Saint-Hospice actuellement en travaux. Elle est jouxtée d’une gigantesque Vierge en bronze, d’un cimetière marin et d’un cimetière militaire belge (des soldats atteints par les gaz de combat envoyés ici pour guérir et qui y sont morts).
Mon périple achevé (de la plage des Fossettes à la plage de la Paloma), je passe devant l’église Saint-Jean-Baptiste puis prends un café à deux euros à La Civette, un bar cigarier salon de thé fréquenté surtout par des Anglo-Saxons ne manquant pas de moyens financiers. L‘endroit se veut chic mais venue de l’intérieur se fait entendre une radio vulgaire. Elle ne m’empêche pas de poursuivre ma relecture du Journal d’Edmond de Goncourt.
A midi j’ai une table sur le port tout près des bateaux, au Léo Léa, où l’on me demande un passe sanitaire que j’avais presque oublié. Je déjeune d’un tartare classique accompagné de frites fraîches à volonté qui sont loin de valoir celles que l’on peut manger à l’autre extrémité de la France. J’accompagne cela d’un verre de vin rouge bio et fais suivre d’un « café plaisir » (café, brochettes de fruits, glace au coulis de mangue). Alors que tous les présents cherchent l’ombre, une sexagénaire exige le soleil pour sa vieille mère. S’il s’agissait de hâter la fin de sa génitrice, elle n’agirait pas autrement. Son monologue confirme mes soupçons : « Je ne t’ai pas volé d’argent, c’est vrai mon affectation ce n’est pas super carré, mais je me suis aperçue que tu avais donné dix mille euros à mon frère, la seule chose que je te demande de déclarer à l’avocate c’est oui je suis cent pour cent d’accord avec le plan financier. »
L’ancêtre n’a pas dit un mot mais elle est encore vivante quand, après avoir payé mes vingt-trois euros cinquante, je quitte cet endroit sympathique et très fréquenté dont le patron est un peu rude avec son personnel et très aimable avec la clientèle.
Après un ultime tour de port, un bus Quinze étant près à partir je choisis de le prendre et bénéficie à nouveau des vues spectaculaires de son trajet. A l’arrivée, je n’ai qu’une centaine de mètres à faire pour aller lire au Nomad.
*
« Château Saint Jean, Propriété Privée, Chien Très Méchant », lis-je sur un écriteau. Une autre de ces maisons de riches est nommée Demi Paradis. On espère le double pour après la mort.
*
« C’est en regardant une carte de France que Jean Tenenbaum tomba sur Saint-Jean-Cap-Ferrat et décréta aussitôt qu’il s’appellerait désormais Jean Ferrat », signale Ouiquipédia.
Après une courte visite du port dans lequel sont amarrés de nombreux bateaux de luxe et de rares bateaux de pêcheurs, le tour de la presqu’île apparaissant au-dessus de mes forces, je me contente de celui de la pointe Saint-Hospice par un sentier de pavages scellés par du béton. On est juste au-dessus de la mer et comme souffle un peu de vent, celle-ci est vivante, m’offrant le bruit caractéristique des vagues qui se brisent sur les rochers. Une grimpette me permet de voir de près la chapelle Saint-Hospice actuellement en travaux. Elle est jouxtée d’une gigantesque Vierge en bronze, d’un cimetière marin et d’un cimetière militaire belge (des soldats atteints par les gaz de combat envoyés ici pour guérir et qui y sont morts).
Mon périple achevé (de la plage des Fossettes à la plage de la Paloma), je passe devant l’église Saint-Jean-Baptiste puis prends un café à deux euros à La Civette, un bar cigarier salon de thé fréquenté surtout par des Anglo-Saxons ne manquant pas de moyens financiers. L‘endroit se veut chic mais venue de l’intérieur se fait entendre une radio vulgaire. Elle ne m’empêche pas de poursuivre ma relecture du Journal d’Edmond de Goncourt.
A midi j’ai une table sur le port tout près des bateaux, au Léo Léa, où l’on me demande un passe sanitaire que j’avais presque oublié. Je déjeune d’un tartare classique accompagné de frites fraîches à volonté qui sont loin de valoir celles que l’on peut manger à l’autre extrémité de la France. J’accompagne cela d’un verre de vin rouge bio et fais suivre d’un « café plaisir » (café, brochettes de fruits, glace au coulis de mangue). Alors que tous les présents cherchent l’ombre, une sexagénaire exige le soleil pour sa vieille mère. S’il s’agissait de hâter la fin de sa génitrice, elle n’agirait pas autrement. Son monologue confirme mes soupçons : « Je ne t’ai pas volé d’argent, c’est vrai mon affectation ce n’est pas super carré, mais je me suis aperçue que tu avais donné dix mille euros à mon frère, la seule chose que je te demande de déclarer à l’avocate c’est oui je suis cent pour cent d’accord avec le plan financier. »
L’ancêtre n’a pas dit un mot mais elle est encore vivante quand, après avoir payé mes vingt-trois euros cinquante, je quitte cet endroit sympathique et très fréquenté dont le patron est un peu rude avec son personnel et très aimable avec la clientèle.
Après un ultime tour de port, un bus Quinze étant près à partir je choisis de le prendre et bénéficie à nouveau des vues spectaculaires de son trajet. A l’arrivée, je n’ai qu’une centaine de mètres à faire pour aller lire au Nomad.
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« Château Saint Jean, Propriété Privée, Chien Très Méchant », lis-je sur un écriteau. Une autre de ces maisons de riches est nommée Demi Paradis. On espère le double pour après la mort.
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« C’est en regardant une carte de France que Jean Tenenbaum tomba sur Saint-Jean-Cap-Ferrat et décréta aussitôt qu’il s’appellerait désormais Jean Ferrat », signale Ouiquipédia.
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