Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
15 avril 2022
Retour à l’Ile de Ré ce jeudi matin, et pas loin du bord, car dès le pont franchi, je demande l’arrêt au chauffeur du car. Me voici dans la commune de Rivedoux Plage au meilleur endroit pour faire une photo du pont qui a tout dans la courbure.
Passé par sous la route qui délivre son incessant lot d’arrivants, je marche sur l’une des plus belles plages de l’île, les pieds sur le sable mouillé, pendant un kilomètre et demi, avant d’arriver aux maisons blanches qui font face à une mer à marée basse dans laquelle travaillent des éleveurs d’huîtres au loin, là-bas avec leurs tracteurs et leur bateaux à fond plat. L’une de ces maisons accueille un Musée de la Sardine, petit comme ce poisson.
De temps en temps, l’un des tracteurs remonte avec dans sa remorque des pochons d’huîtres que je n’aurai pas l’occasion de goûter. Après être arrivé au port où sont couchés quelques bateaux, j’entre dans les rues intérieures, me perds, suis remis dans le droit chemin par une habitante et arrive dans la rue principale. Elle est malheureusement dépourvue de cafés. Quant aux restaurants pour midi, aucun ne m’attire.
Aussi, après avoir terminé Choses vues sur un banc face à la mer lointaine, je rentre avec le car d’onze heures sept et déjeune en mon logis provisoire. Quand je descends prendre le café à L’Echo je trouve des parasols déployés au-dessus de la terrasse. Il fait chaud en effet, mais je choisis une table où cuire au soleil.
Rentré, j’assiste à l’arrivée du jour dans le Bassin des Chalutiers, celle d’un deux-mâts ancien qui est mis à quai à l’aide d’un canot pneumatique poussant sur son flanc, ce qui manque un peu de romantisme.
*
La coiffeuse de Rivedoux n’a pas su résister, son salon s’appelle Ré Créatif.
*
Quand je veux rentrer sans passer par les quais du Gabut, aux heures où trop de monde va et vient, je passe par une rue intérieure qui a pour nom : rue de l’Aimable Nanette. Je ne désespère pas de croiser cette personne avant la fin de mon séjour.
Passé par sous la route qui délivre son incessant lot d’arrivants, je marche sur l’une des plus belles plages de l’île, les pieds sur le sable mouillé, pendant un kilomètre et demi, avant d’arriver aux maisons blanches qui font face à une mer à marée basse dans laquelle travaillent des éleveurs d’huîtres au loin, là-bas avec leurs tracteurs et leur bateaux à fond plat. L’une de ces maisons accueille un Musée de la Sardine, petit comme ce poisson.
De temps en temps, l’un des tracteurs remonte avec dans sa remorque des pochons d’huîtres que je n’aurai pas l’occasion de goûter. Après être arrivé au port où sont couchés quelques bateaux, j’entre dans les rues intérieures, me perds, suis remis dans le droit chemin par une habitante et arrive dans la rue principale. Elle est malheureusement dépourvue de cafés. Quant aux restaurants pour midi, aucun ne m’attire.
Aussi, après avoir terminé Choses vues sur un banc face à la mer lointaine, je rentre avec le car d’onze heures sept et déjeune en mon logis provisoire. Quand je descends prendre le café à L’Echo je trouve des parasols déployés au-dessus de la terrasse. Il fait chaud en effet, mais je choisis une table où cuire au soleil.
Rentré, j’assiste à l’arrivée du jour dans le Bassin des Chalutiers, celle d’un deux-mâts ancien qui est mis à quai à l’aide d’un canot pneumatique poussant sur son flanc, ce qui manque un peu de romantisme.
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La coiffeuse de Rivedoux n’a pas su résister, son salon s’appelle Ré Créatif.
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Quand je veux rentrer sans passer par les quais du Gabut, aux heures où trop de monde va et vient, je passe par une rue intérieure qui a pour nom : rue de l’Aimable Nanette. Je ne désespère pas de croiser cette personne avant la fin de mon séjour.
14 avril 2022
Ce mercredi, peu avant huit heures, je marche vers la Gare de La Rochelle (un éloge de la symétrie) quand je découvre la vitre de la porte d’un loueur de voitures pulvérisée et sur le bureau plus d’ordinateur. Je rebrousse pour avertir le bar un peu plus bas. Deux policiers en sortent, ils sont déjà au courant.
Huit minutes du train pris avec ma carte de bus et me voici à Châtelaillon-Plage. Cette petite station balnéaire est suffisamment agréable pour être vue une deuxième fois. Face à sa Gare sont deux hôtels, un pimpant, un défunt, que je photographie.
Je longe à nouveau le bord de mer en direction du port. La plage est en émoi. Des engins en remontent le sable. Des restaurants ouverts depuis le premier avril en privatisent une partie avec des terrasses à bronzer. Des tentes blanches ont été installées en prévision d’un festival du cerf-volant ce samedi.
Néanmoins à cette heure matutinale, c’est on ne peut plus tranquille. D’autant que la marée est basse. Les quelques bateaux du port sont en manque d’eau. Cet océan, je le constate encore une fois, ne sent pas la mer ; il est inodore.
Revenu sur mes pas, je prends la perpendiculaire rue du Marché où sur deux cents mètres l’on trouve tous les commerces nécessaires. Il y a même une librairie, nommée Le Chat Qui Lit, dont la vitrine est surtout occupée par des livres pour enfants. Un peu plus loin est le marché couvert qui donne son nom à cette rue piétonnière. Il est aussi petit que mignon. En face est le Café du Centre où se retrouvent en terrasse les autochtones après les courses. Je m’y assois au soleil pour un café à un euro cinquante.
Je suis bien là pour lire Choses vues tout en écoutant les conversations. « Moi je dis souvent à mes patients, on aura le temps de maigrir entre quatre planches », dit l’un. « Une fois j’en ai eu tellement marre qu’il me demande de l’arrêter à cent mètres du collège que je me suis garée devant et lui ai crié Au revoir mon bébé, tu n’as pas oublié ton goûter ? », dit une autre.
Je vais poursuivre ma lecture face à la mer qui a encore reculé puis à midi je rejoins, dans la rue parallèle, le restaurant L’Effet Mer dont le menu du jour est toujours à seize euros, café inclus. Je choisis une table en terrasse, face de la Mairie (un autre éloge de la symétrie, autrefois se trouvaient dans l’aile droite l’Ecole des Filles et dans l’aile gauche l’Ecole des Garçons).
Cette fois, j’opte pour le buffet d’entrées chaudes (nems, samossas et autres) puis sur le conseil de la serveuse je choisis le bar entier. C’est effectivement un vrai poisson qui m’arrive, dont la tête et la queue dépassent de l’assiette. Je me sens un peu cruel, mais j’aime le manger avec du citron, accompagné qu’il est de petites pommes de terre et de poireaux confits. Mon dessert est celui du moment : une tarte ananas et noix de coco. Trois couples mangent aussi dehors, qui ne vont pas très bien. Un merlou dans les arbres fait tout ce qu’il peut pour les dérider, mais je crois que je suis le seul à l’entendre. Il m’en rappelle d’autres, écoutés à deux.
Sitôt le café bu, je rejoins la Gare où je n’ai que dix minutes à attendre avant qu’arrive le train du retour. A quatorze heures, je m’installe à la terrasse du Bistro du Gabut pour un autre café. On s’y réjouit de l’approche d’un ouiquennede de Pâques avec beau temps assuré. J’apprends qu’il y aura concert deux soirs de suite, ambiance assurée pour le voisin que je suis.
*
Je me souviens de Michel Bouquet, mort ce jour à quatre-vingt-seize ans, dans Le Roi se meurt à Paris au Théâtre de l’Atelier il y a bien longtemps. Celle qui me tenait la main à cette époque m’avait amené là. Il semblait déjà tellement vieux qu’on aurait pu croire qu’il allait mourir avant la fin de la pièce.
Huit minutes du train pris avec ma carte de bus et me voici à Châtelaillon-Plage. Cette petite station balnéaire est suffisamment agréable pour être vue une deuxième fois. Face à sa Gare sont deux hôtels, un pimpant, un défunt, que je photographie.
Je longe à nouveau le bord de mer en direction du port. La plage est en émoi. Des engins en remontent le sable. Des restaurants ouverts depuis le premier avril en privatisent une partie avec des terrasses à bronzer. Des tentes blanches ont été installées en prévision d’un festival du cerf-volant ce samedi.
Néanmoins à cette heure matutinale, c’est on ne peut plus tranquille. D’autant que la marée est basse. Les quelques bateaux du port sont en manque d’eau. Cet océan, je le constate encore une fois, ne sent pas la mer ; il est inodore.
Revenu sur mes pas, je prends la perpendiculaire rue du Marché où sur deux cents mètres l’on trouve tous les commerces nécessaires. Il y a même une librairie, nommée Le Chat Qui Lit, dont la vitrine est surtout occupée par des livres pour enfants. Un peu plus loin est le marché couvert qui donne son nom à cette rue piétonnière. Il est aussi petit que mignon. En face est le Café du Centre où se retrouvent en terrasse les autochtones après les courses. Je m’y assois au soleil pour un café à un euro cinquante.
Je suis bien là pour lire Choses vues tout en écoutant les conversations. « Moi je dis souvent à mes patients, on aura le temps de maigrir entre quatre planches », dit l’un. « Une fois j’en ai eu tellement marre qu’il me demande de l’arrêter à cent mètres du collège que je me suis garée devant et lui ai crié Au revoir mon bébé, tu n’as pas oublié ton goûter ? », dit une autre.
Je vais poursuivre ma lecture face à la mer qui a encore reculé puis à midi je rejoins, dans la rue parallèle, le restaurant L’Effet Mer dont le menu du jour est toujours à seize euros, café inclus. Je choisis une table en terrasse, face de la Mairie (un autre éloge de la symétrie, autrefois se trouvaient dans l’aile droite l’Ecole des Filles et dans l’aile gauche l’Ecole des Garçons).
Cette fois, j’opte pour le buffet d’entrées chaudes (nems, samossas et autres) puis sur le conseil de la serveuse je choisis le bar entier. C’est effectivement un vrai poisson qui m’arrive, dont la tête et la queue dépassent de l’assiette. Je me sens un peu cruel, mais j’aime le manger avec du citron, accompagné qu’il est de petites pommes de terre et de poireaux confits. Mon dessert est celui du moment : une tarte ananas et noix de coco. Trois couples mangent aussi dehors, qui ne vont pas très bien. Un merlou dans les arbres fait tout ce qu’il peut pour les dérider, mais je crois que je suis le seul à l’entendre. Il m’en rappelle d’autres, écoutés à deux.
Sitôt le café bu, je rejoins la Gare où je n’ai que dix minutes à attendre avant qu’arrive le train du retour. A quatorze heures, je m’installe à la terrasse du Bistro du Gabut pour un autre café. On s’y réjouit de l’approche d’un ouiquennede de Pâques avec beau temps assuré. J’apprends qu’il y aura concert deux soirs de suite, ambiance assurée pour le voisin que je suis.
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Je me souviens de Michel Bouquet, mort ce jour à quatre-vingt-seize ans, dans Le Roi se meurt à Paris au Théâtre de l’Atelier il y a bien longtemps. Celle qui me tenait la main à cette époque m’avait amené là. Il semblait déjà tellement vieux qu’on aurait pu croire qu’il allait mourir avant la fin de la pièce.
13 avril 2022
Ce mardi matin, avant que n’arrivent les pluies éparses annoncées, j’innove en m’enfonçant dans le centre de La Rochelle par la rue Saint-Nicolas où se trouvent deux immeubles en déshérence qui servent de support à des artistes de rue. J’arrive sur la place de la Fourche aux jolies lignes et dotée d’un arbre vigoureux. Je passe derrière l’église Saint-Sauveur puis me laisse aspirer par les arcades de différentes rues et constate encore une fois que tous les chemins mènent au marché. Celui-ci a lieu sept jours sur sept. Je le frôle et je sais déjà que l’étape suivante sera la place de Verdun où passent la plupart des bus et des cars, autre point d’attraction. S’y trouve aussi un carrousel, à l’arrêt à cette heure. A côté, c’est le Café de la Paix où j’entre évidemment.
Je commande un café verre d’eau à un serveur jamais vu qui grommelle quand je lui suggère de nettoyer ma table.
Pendant que je poursuis la lecture de Choses vues, je constate, à voir des essuie-glaces en action, que la pluie s’est mise à tomber. Il mouille encore un peu quand je sors pour rejoindre par les arcades le Vieux Port. Le tour de celui-ci fait, me voici dans mon studio temporaire d’où je ne ressors que pour déjeuner japonais chez Cuisine Yuri (comme il est écrit sur ses facturettes) ou Cusine Yuri (comme il est écrit sur sa carte).
A tout instant, j’ai la vie du port sous ma fenêtre d’où je peux surveiller le mouvement des grands yachts : « Bon maintenant que je suis entré, où donc je trouve une place pour me garer? »
*
Il y a celles et ceux qui voulaient voter Roussel, Jadot ou Hidalgo mais qui ont choisi Mélenchon parce qu’il était le seul de gauche à pouvoir être qualifié au second tour, d’où des scores catastrophiques pour les trois cités.
Il y a celles et ceux qui voulaient voter Pécresse mais qui ont eu peur d’un second tour Le Pen Mélenchon et ont donc voté Macron, d’où le naufrage de la susnommée.
Il y a celles et ceux qui voulaient voter Zorglub mais qui ont craint un second tour Macron Mélenchon et ont donc choisi Le Pen, d’où le résultat minable de l’olibrius.
Bref, des quantités d’électrices et d’électeurs n’ont pas voté pour le candidat de leur choix mais pour un autre par tactique.
Et au second tour il s’agira d’éviter la pire et sera élu quelqu’un dont seule une minorité veut.
Depuis que je suis en âge de voter, je suis hostile à l’élection du Président de la République au suffrage universel.
Je commande un café verre d’eau à un serveur jamais vu qui grommelle quand je lui suggère de nettoyer ma table.
Pendant que je poursuis la lecture de Choses vues, je constate, à voir des essuie-glaces en action, que la pluie s’est mise à tomber. Il mouille encore un peu quand je sors pour rejoindre par les arcades le Vieux Port. Le tour de celui-ci fait, me voici dans mon studio temporaire d’où je ne ressors que pour déjeuner japonais chez Cuisine Yuri (comme il est écrit sur ses facturettes) ou Cusine Yuri (comme il est écrit sur sa carte).
A tout instant, j’ai la vie du port sous ma fenêtre d’où je peux surveiller le mouvement des grands yachts : « Bon maintenant que je suis entré, où donc je trouve une place pour me garer? »
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Il y a celles et ceux qui voulaient voter Roussel, Jadot ou Hidalgo mais qui ont choisi Mélenchon parce qu’il était le seul de gauche à pouvoir être qualifié au second tour, d’où des scores catastrophiques pour les trois cités.
Il y a celles et ceux qui voulaient voter Pécresse mais qui ont eu peur d’un second tour Le Pen Mélenchon et ont donc voté Macron, d’où le naufrage de la susnommée.
Il y a celles et ceux qui voulaient voter Zorglub mais qui ont craint un second tour Macron Mélenchon et ont donc choisi Le Pen, d’où le résultat minable de l’olibrius.
Bref, des quantités d’électrices et d’électeurs n’ont pas voté pour le candidat de leur choix mais pour un autre par tactique.
Et au second tour il s’agira d’éviter la pire et sera élu quelqu’un dont seule une minorité veut.
Depuis que je suis en âge de voter, je suis hostile à l’élection du Président de la République au suffrage universel.
12 avril 2022
Ce lundi, à l’arrêt des cars, je retrouve le jeune homme qui attendait en même temps que moi, samedi matin, celui pour l’Ile de Ré qui n’arrivait pas. Je lui demande s’il a fini par passer. « Ils ont changé l’heure sans prévenir personne », me répond-il, ce qui lui posera problème chaque samedi.
Au moins les autres jours ce sept heures quarante-cinq est maintenu. Durant le trajet un autre jeune homme, assis derrière moi, est au téléphone avec une jeune femme. Il se plaint de sa supérieure qui lui laisse faire tout le boulot « pendant qu’elle, a s’touche la chatte ».
Je descends au terminus à Saint-Martin-de-Ré que j’ai envie de revoir avec l’objectif de monter dans la tour clocher de l'église pour découvrir l’île de haut, ce qui est possible à partir de dix heures moyennant deux euros vingt.
Il fait frais dans les rues de Saint-Martin, le soleil est là mais le vent est désagréable. A l’heure indiquée, je suis devant la petite porte rouge qui permet d’accéder en haut du clocher. Arrive un homme dans une camionnette blanche.
-Ça ne va pas être possible avant dix heures et quart, me dit-il, j’ai des cartons à décharger.
-Si ça doit ouvrir à dix heures et quart, il faut en informer les visiteurs, lui réponds-je.
-Si vous n’êtes pas content, allez vous plaindre au Maire, ça lui donnera peut-être l’idée d’embaucher quelqu’un pour m’aider.
C’est la première fois depuis mon arrivée en Charente-Maritime que je me trouve en présence d’un mal aimable. J’abandonne mon projet et redescends dans le port.
Après avoir fait le tour de l’ilot central, je cherche où m’asseoir en terrasse malgré le vent déplaisant. Au Lever du Soleil, bien que des cendriers s’envolent, j’arrive à m’abriter un peu pour boire un café à deux euros dix mais impossible de lire Choses vues alors je m’intéresse aux choses visibles.
Une zone est en vacances de Pâques et ça se voit. Le bourg est empli de familles. Certaines vont à pied, d’autres à bicyclettes louées. Vers onze heures, il y en a partout. C’est aussi énervant que le vent. Je me décide à prendre le car de retour plus tôt que prévu.
A treize heures, je suis de retour à La Rochelle où il fait chaud en l’absence de vent. J’achète de quoi me nourrir chez Carrefour City et le mange en mon logis provisoire puis je vais bronzer en terrasse à L’Echo où le café bu, je lis Victor Hugo. Celui-ci a maintenant mon âge :
26 février 1873
J’ai aujourd’hui soixante et onze ans.
Petite fête intime, avec bouquets, pour célébrer mon anniversaire et l’avancement que j’obtiens de ma décrépitude.
*
Opération Sentinelle dans le quartier du Gabut où pour la première fois je vois passer quatre soldats en arme, le visage camouflé sauf les yeux.
*
C’est Alexandre Vialatte, me remet en tête un fidèle lecteur, qui a écrit L'homme n'est que poussière, c'est dire l'importance du plumeau. Ce L’homme n’est que poussière, d’où l’importance du plumeau écrit à la craie sur un muret de Port Neuf et attribué à Pierre Desproges est donc fautif mais je ne vais pas refaire les sept kilomètres pour aller corriger. Quant à ma mémoire défaillante, c’est incurable.
*
Ce même lecteur m’a également rappelé à l’ordre après mon passage à Rochefort pour avoir qualifié la Charente de paisible rivière. Paisible elle l’est, mais c’est un fleuve.
Au moins les autres jours ce sept heures quarante-cinq est maintenu. Durant le trajet un autre jeune homme, assis derrière moi, est au téléphone avec une jeune femme. Il se plaint de sa supérieure qui lui laisse faire tout le boulot « pendant qu’elle, a s’touche la chatte ».
Je descends au terminus à Saint-Martin-de-Ré que j’ai envie de revoir avec l’objectif de monter dans la tour clocher de l'église pour découvrir l’île de haut, ce qui est possible à partir de dix heures moyennant deux euros vingt.
Il fait frais dans les rues de Saint-Martin, le soleil est là mais le vent est désagréable. A l’heure indiquée, je suis devant la petite porte rouge qui permet d’accéder en haut du clocher. Arrive un homme dans une camionnette blanche.
-Ça ne va pas être possible avant dix heures et quart, me dit-il, j’ai des cartons à décharger.
-Si ça doit ouvrir à dix heures et quart, il faut en informer les visiteurs, lui réponds-je.
-Si vous n’êtes pas content, allez vous plaindre au Maire, ça lui donnera peut-être l’idée d’embaucher quelqu’un pour m’aider.
C’est la première fois depuis mon arrivée en Charente-Maritime que je me trouve en présence d’un mal aimable. J’abandonne mon projet et redescends dans le port.
Après avoir fait le tour de l’ilot central, je cherche où m’asseoir en terrasse malgré le vent déplaisant. Au Lever du Soleil, bien que des cendriers s’envolent, j’arrive à m’abriter un peu pour boire un café à deux euros dix mais impossible de lire Choses vues alors je m’intéresse aux choses visibles.
Une zone est en vacances de Pâques et ça se voit. Le bourg est empli de familles. Certaines vont à pied, d’autres à bicyclettes louées. Vers onze heures, il y en a partout. C’est aussi énervant que le vent. Je me décide à prendre le car de retour plus tôt que prévu.
A treize heures, je suis de retour à La Rochelle où il fait chaud en l’absence de vent. J’achète de quoi me nourrir chez Carrefour City et le mange en mon logis provisoire puis je vais bronzer en terrasse à L’Echo où le café bu, je lis Victor Hugo. Celui-ci a maintenant mon âge :
26 février 1873
J’ai aujourd’hui soixante et onze ans.
Petite fête intime, avec bouquets, pour célébrer mon anniversaire et l’avancement que j’obtiens de ma décrépitude.
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Opération Sentinelle dans le quartier du Gabut où pour la première fois je vois passer quatre soldats en arme, le visage camouflé sauf les yeux.
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C’est Alexandre Vialatte, me remet en tête un fidèle lecteur, qui a écrit L'homme n'est que poussière, c'est dire l'importance du plumeau. Ce L’homme n’est que poussière, d’où l’importance du plumeau écrit à la craie sur un muret de Port Neuf et attribué à Pierre Desproges est donc fautif mais je ne vais pas refaire les sept kilomètres pour aller corriger. Quant à ma mémoire défaillante, c’est incurable.
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Ce même lecteur m’a également rappelé à l’ordre après mon passage à Rochefort pour avoir qualifié la Charente de paisible rivière. Paisible elle l’est, mais c’est un fleuve.
11 avril 2022
Ce dimanche matin de premier tour d’Election Présidentielle, je longe la mer jusqu’à la plage de la Concurrence et au-delà. Arrivé à l’endroit où il faut contourner des propriétés privées, où je m’étais arrêté précédemment, cette fois je poursuis.
Quand je retrouve le bord de rivage, je suis dans le quartier de Port Neuf qui porte bien son nom. Une haute digue en béton a été construite pour le protéger des risques de submersion marine, comme il est écrit sur des pancartes.
Cette digue mène à un petit port dans lequel gisent quelques voiliers (c’est marée basse). Près de celui-ci est une Ecole de Voile devant laquelle une jeunesse désespère « Y a personne, on n’a pas les clés ». Un peu plus loin est une station d’épuration non odorante. Dans son bassin nagent des goélands. Sur son mur, cette mise en garde : « Pêche aux coquillages interdite pour raisons sanitaires ». Une autre inscription, à la craie, sur un muret près du port, donne la parole à Pierre Desproges : L’homme n’est que poussière, d’où l’importance du plumeau. Au large, on distingue le Phare du Bout du Monde.
La haute digue en béton s’arrête là. Pour continuer, il faudrait contourner une nouvelle fois des propriétés privées et on finirait par trouver le chemin côtier qui aboutit à Chef de Baie. Je fais demi-tour. Un marquage au sol indique la Concurrence à deux kilomètres et demi. Il faut en ajouter au moins un pour atteindre le Vieux Port. Je constate que je peux encore marcher sans pause pendant sept kilomètres.
Quand j’arrive cours des Dames, un bicycliste stoppe près de deux quidams. Tous trois se félicitent d’avoir voté Zorglub. Quai Duperré, je m’arrête pour retenir une table en terrasse à l’un des trois meilleurs restaurants de burgueurs de la ville, The Famous Pub. « On ne fait pas de réservation à l’extérieur, me dit le patron, mais si vous arrivez à midi, je vous trouverai une place. »
Repassé de l’autre côté du port par la petite passerelle, je m’installe à la terrasse du Bistro du Gabut et y lis Choses vues. Derrière moi, deux autochtones se confient leur vote. L’un et l’autre ont choisi Zorglub.
A midi, tout se passe comme annoncé. J’ai même la meilleure table de la petite terrasse. Elle permet de voir à la fois les deux Tours et la Grosse Horloge tout en se chauffant le dos au soleil. C’est l’occasion de constater une fois encore à quel point cette ville est belle.
J’opte pour le double burguer à dix-neuf euros qui porte le nom de la maison : bun aux grains de sésame de boulanger, sauce curry, cheddar fondu, steak haché de bœuf français, galette de pommes de terre, tomate et compote d’oignons. Un autre, à un euro de moins, me tentait aussi à cause de son nom : le Tête de Lard. J’ajoute à ma commande un demi-pichet de vin du Luberon à onze euros. J’ai à ma droite une tablée de huit vingtenaires dont tous les garçons ont le crâne rasé. Leur conversation m’apprend que ce sont des militaires. Les filles présentes sont les copines de certains. Elles ne disent pas un mot. Je repars sans savoir pour qui ils ont voté (s’ils ont voté) et bien content de mon repas du jour.
Je prends le café à la terrasse de L’Echo puis me remets à la lecture de Victor Hugo. C’est grâce à lui que je peux mettre en musique mon abstention :
« Je ne vote pas écolo
C’est la faute à Rousseau ».
*
Je dois ajouter que ce grand nigaud de Jadot m’aurait également détourné de lui quand il a annoncé vouloir réduire la durée des vacances des enseignant(e)s avec ce raisonnement aberrant :
En France, les élèves n’ont pas d’aussi bons résultats que ceux d’autres pays.
En France, les enseignants ont plus de vacances que ceux d’autres pays.
Donc réduisons la durée des vacances et les résultats s’amélioreront.
*
A dix-sept heures cinquante-six La Tribune de Genève publie le premier sondage réalisé à la sortie des urnes : Macron et Le Pen à vingt-quatre pour cent, Mélenchon à dix-neuf. Tout semble se passer comme prévu.
Quand je retrouve le bord de rivage, je suis dans le quartier de Port Neuf qui porte bien son nom. Une haute digue en béton a été construite pour le protéger des risques de submersion marine, comme il est écrit sur des pancartes.
Cette digue mène à un petit port dans lequel gisent quelques voiliers (c’est marée basse). Près de celui-ci est une Ecole de Voile devant laquelle une jeunesse désespère « Y a personne, on n’a pas les clés ». Un peu plus loin est une station d’épuration non odorante. Dans son bassin nagent des goélands. Sur son mur, cette mise en garde : « Pêche aux coquillages interdite pour raisons sanitaires ». Une autre inscription, à la craie, sur un muret près du port, donne la parole à Pierre Desproges : L’homme n’est que poussière, d’où l’importance du plumeau. Au large, on distingue le Phare du Bout du Monde.
La haute digue en béton s’arrête là. Pour continuer, il faudrait contourner une nouvelle fois des propriétés privées et on finirait par trouver le chemin côtier qui aboutit à Chef de Baie. Je fais demi-tour. Un marquage au sol indique la Concurrence à deux kilomètres et demi. Il faut en ajouter au moins un pour atteindre le Vieux Port. Je constate que je peux encore marcher sans pause pendant sept kilomètres.
Quand j’arrive cours des Dames, un bicycliste stoppe près de deux quidams. Tous trois se félicitent d’avoir voté Zorglub. Quai Duperré, je m’arrête pour retenir une table en terrasse à l’un des trois meilleurs restaurants de burgueurs de la ville, The Famous Pub. « On ne fait pas de réservation à l’extérieur, me dit le patron, mais si vous arrivez à midi, je vous trouverai une place. »
Repassé de l’autre côté du port par la petite passerelle, je m’installe à la terrasse du Bistro du Gabut et y lis Choses vues. Derrière moi, deux autochtones se confient leur vote. L’un et l’autre ont choisi Zorglub.
A midi, tout se passe comme annoncé. J’ai même la meilleure table de la petite terrasse. Elle permet de voir à la fois les deux Tours et la Grosse Horloge tout en se chauffant le dos au soleil. C’est l’occasion de constater une fois encore à quel point cette ville est belle.
J’opte pour le double burguer à dix-neuf euros qui porte le nom de la maison : bun aux grains de sésame de boulanger, sauce curry, cheddar fondu, steak haché de bœuf français, galette de pommes de terre, tomate et compote d’oignons. Un autre, à un euro de moins, me tentait aussi à cause de son nom : le Tête de Lard. J’ajoute à ma commande un demi-pichet de vin du Luberon à onze euros. J’ai à ma droite une tablée de huit vingtenaires dont tous les garçons ont le crâne rasé. Leur conversation m’apprend que ce sont des militaires. Les filles présentes sont les copines de certains. Elles ne disent pas un mot. Je repars sans savoir pour qui ils ont voté (s’ils ont voté) et bien content de mon repas du jour.
Je prends le café à la terrasse de L’Echo puis me remets à la lecture de Victor Hugo. C’est grâce à lui que je peux mettre en musique mon abstention :
« Je ne vote pas écolo
C’est la faute à Rousseau ».
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Je dois ajouter que ce grand nigaud de Jadot m’aurait également détourné de lui quand il a annoncé vouloir réduire la durée des vacances des enseignant(e)s avec ce raisonnement aberrant :
En France, les élèves n’ont pas d’aussi bons résultats que ceux d’autres pays.
En France, les enseignants ont plus de vacances que ceux d’autres pays.
Donc réduisons la durée des vacances et les résultats s’amélioreront.
*
A dix-sept heures cinquante-six La Tribune de Genève publie le premier sondage réalisé à la sortie des urnes : Macron et Le Pen à vingt-quatre pour cent, Mélenchon à dix-neuf. Tout semble se passer comme prévu.
10 avril 2022
Retour du beau temps ce samedi matin, parfait pour aller dans l’Ile de Ré, oui mais le car qui y mène n’est toujours pas là à huit heures dix, alors qu’il devrait être parti depuis vingt-cinq minutes. Deux autres l’attendent. Elle et lui vont là-bas pour travailler. Impossible de joindre Transports Nouvelle Aquitaine, ils sont sur répondeur. Je décide de changer mes plans et souhaite bon courage à mes compagnons d’infortune. La Gare est à côté. Un train, que je prends sans souci avec ma carte de bus, part pour Rochefort, duquel je vais descendre à Angoulins-sur-Mer.
Pas trace de cette mer quand il s’arrête à la halte ferroviaire. Je me renseigne auprès du premier coureur venu.
-Si vous suivez ce chemin, vous allez la trouver, me répond-il.
Ce chemin est goudronné et utilisable par les piétions et les bicyclistes. Je comprends bientôt, à voir les marais qui m’entourent, où ne sont visibles que des huîtrières et un fumoir à poissons, qu’elle est plus loin qu’on pourrait le penser.
Au bout d’une demi-heure de marche, elle se fait d’abord entendre puis apparaît derrière la digue qui domine la plage. A l’extrémité sont des cabanes à carrelets vers lesquelles je vais. Ensuite commence un étroit sentier sur une falaise décrite comme très dangereuse par un panneau.
On peut ainsi rejoindre La Rochelle que j’aperçois au loin mais je préfère retourner sur la digue et m’asseoir au premier banc, devant le Cercle Nautique d’Angoulins où s’active une jeunesse désireuse d’aller sur l’eau. J’y lis Hugo un moment puis vais demander au restaurant Les Viviers si je peux y venir pour seulement manger des huîtres.
-Oui à midi, me répond un garçon efféminé.
Je trouve un autre banc face à l’Ile d’Aix, que l’on voit bien maintenant que le soleil monte dans le ciel bleu, et reprends ma lecture jusqu’à ce qu’il soit l’heure de retourner aux Viviers.
A une table d’extérieur ensoleillée qui donne sur de lointains hangars et des plans d’eau, je m’offre six huîtres et un verre de chardonnay pour la somme rondelette de quinze euros trente.
Avant le retour vers la halte ferroviaire, je m’assois sur un troisième banc à la hauteur du second restaurant du lieu, nommé La Madrague, où certains déjeunent à deux pas de la mer mais sans la voir, cachée qu’elle est derrière la digue. « Vous êtes déjà bien bronzé », me dit une femme dont je regarde la fille. « Et qu’est-ce que vous lisez de beau ? »
De retour à La Rochelle, j’achète mon dessert dans une boulangerie ouverte depuis le premier avril sur le port, pour la saison et de peu de choix, un gâteau au chocolat à deux euros quatre-vingts. Je le mange dans mon logis puis vais prendre le café à L’Echo à une table fort éloignée de l’intérieur de l’établissement où est diffusé un match de rugby qui excite les locaux, La Rochelle Bordeaux.
*
Dix heures quinze, le moment où à Angoulins-sur-Mer apparaissent les premiers marcheurs à bâtons. Si c’est un couple, l’homme est devant et la femme suit. Comme chez les bicyclistes.
*
Au Centre Nautique, conseil d’une fille à un garçon : « Des fois, faut que tu mettes les doigts dedans pour faire revenir le taquet ».
*
Ces chiens ou ces enfants qui viennent vous renifler lorsque vous lisez sur un banc public ; leurs parents, car ils le sont aussi de leurs animaux (viens voir papa), considèrent tous qu’il va de soi que vous devez en être flatté. Tout mouvement d’humeur de votre part est suivi d’un « Vous inquiétez pas, il n’est pas méchant ». Si vous leur répondez « Encore heureux ! » et « Libre à vous d’en avoir, mais n’en faites pas profitez les autres », vous avez droit à « Vous n’allez pas en mourir » et un peu plus loin, quand ils pensent que vous n’entendez pas, à « Quel connard ! ».
Pas trace de cette mer quand il s’arrête à la halte ferroviaire. Je me renseigne auprès du premier coureur venu.
-Si vous suivez ce chemin, vous allez la trouver, me répond-il.
Ce chemin est goudronné et utilisable par les piétions et les bicyclistes. Je comprends bientôt, à voir les marais qui m’entourent, où ne sont visibles que des huîtrières et un fumoir à poissons, qu’elle est plus loin qu’on pourrait le penser.
Au bout d’une demi-heure de marche, elle se fait d’abord entendre puis apparaît derrière la digue qui domine la plage. A l’extrémité sont des cabanes à carrelets vers lesquelles je vais. Ensuite commence un étroit sentier sur une falaise décrite comme très dangereuse par un panneau.
On peut ainsi rejoindre La Rochelle que j’aperçois au loin mais je préfère retourner sur la digue et m’asseoir au premier banc, devant le Cercle Nautique d’Angoulins où s’active une jeunesse désireuse d’aller sur l’eau. J’y lis Hugo un moment puis vais demander au restaurant Les Viviers si je peux y venir pour seulement manger des huîtres.
-Oui à midi, me répond un garçon efféminé.
Je trouve un autre banc face à l’Ile d’Aix, que l’on voit bien maintenant que le soleil monte dans le ciel bleu, et reprends ma lecture jusqu’à ce qu’il soit l’heure de retourner aux Viviers.
A une table d’extérieur ensoleillée qui donne sur de lointains hangars et des plans d’eau, je m’offre six huîtres et un verre de chardonnay pour la somme rondelette de quinze euros trente.
Avant le retour vers la halte ferroviaire, je m’assois sur un troisième banc à la hauteur du second restaurant du lieu, nommé La Madrague, où certains déjeunent à deux pas de la mer mais sans la voir, cachée qu’elle est derrière la digue. « Vous êtes déjà bien bronzé », me dit une femme dont je regarde la fille. « Et qu’est-ce que vous lisez de beau ? »
De retour à La Rochelle, j’achète mon dessert dans une boulangerie ouverte depuis le premier avril sur le port, pour la saison et de peu de choix, un gâteau au chocolat à deux euros quatre-vingts. Je le mange dans mon logis puis vais prendre le café à L’Echo à une table fort éloignée de l’intérieur de l’établissement où est diffusé un match de rugby qui excite les locaux, La Rochelle Bordeaux.
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Dix heures quinze, le moment où à Angoulins-sur-Mer apparaissent les premiers marcheurs à bâtons. Si c’est un couple, l’homme est devant et la femme suit. Comme chez les bicyclistes.
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Au Centre Nautique, conseil d’une fille à un garçon : « Des fois, faut que tu mettes les doigts dedans pour faire revenir le taquet ».
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Ces chiens ou ces enfants qui viennent vous renifler lorsque vous lisez sur un banc public ; leurs parents, car ils le sont aussi de leurs animaux (viens voir papa), considèrent tous qu’il va de soi que vous devez en être flatté. Tout mouvement d’humeur de votre part est suivi d’un « Vous inquiétez pas, il n’est pas méchant ». Si vous leur répondez « Encore heureux ! » et « Libre à vous d’en avoir, mais n’en faites pas profitez les autres », vous avez droit à « Vous n’allez pas en mourir » et un peu plus loin, quand ils pensent que vous n’entendez pas, à « Quel connard ! ».
9 avril 2022
Ce vendredi, jour de l’arrivée officielle de la tempête Diego, les cafés sous ma fenêtre ne se donnent même pas la peine d’ouvrir.
Quand je mets le pied dehors, je constate avec plaisir que si ça souffle, il ne pleut plus. Cela me permet d’arriver en bon état au Café de la Paix. J’y lis tranquillement Choses vues, bien que l’on diffuse une radio désolante dans cet endroit chic dont Bourvil était aussi un familier.
Chic, il l’est uniquement par son décor. Le midi, il fait brasserie, et pas des meilleures (je vois passer la livraison de conserves). Chaque matin, avec le « pop » retentissant qui garantit le geste d’un professionnel, l’un des garçons débouche un nombre incroyable de bouteilles.
Il ne pleut pas davantage à midi lorsque le vent me pousse au restaurant japonais Cusine Yuri. A son menu à volonté, j’ajoute le supplément sashimis à cinq euros.
A partir de quatorze heures, Diego y va à fond. Plus personne ne rôde autour du Bassin des Chalutiers.
Cafés fermés, quais déserts, cela me donne une image de La Rochelle pendant le premier confinement.
*
Plus que deux jours avant le premier tour de cette Election Présidentielle que je boude. Macron et Le Pen seront les deux qualifiés. Mélenchon aura une nouvelle fois du mal à accepter le résultat, lui qui rêve de battre Macron au deuxième tour grâce à l’apport des voix d’extrême-droite. Pour un avenir à la vénézuélienne, votez Mélenchon. C’est ce que feront certains de ma connaissance, mais moins fièrement qu’il y a cinq ans. Pécresse (otage de Ciotti) et Hidalgo (otage d’elle-même) vont retourner s’occuper de Paris et de l’Ile de France (leur autre point commun : parler faux à la tribune). Roussel va retourner chez le coiffeur dont il fait la pub sur ses affiches (il a droit à une coupe gratuite). Poutou et Arthaud vont retourner aux batailles perdues d’avance (« on lâche rien »). Zorglub, dont l’initiale est peinte sur les chars de cette ordure de Poutine dont il est un admirateur, va continuer à grenouiller. Dupont-Aignan, « le complotiste des villes », et Lassalle, « le complotiste des champs », comme les nomme si bien Renaud Dély, vont crier à l’élection volée. Jadot va se faire déconstruire par Sandrine Rousseau.
Quand je mets le pied dehors, je constate avec plaisir que si ça souffle, il ne pleut plus. Cela me permet d’arriver en bon état au Café de la Paix. J’y lis tranquillement Choses vues, bien que l’on diffuse une radio désolante dans cet endroit chic dont Bourvil était aussi un familier.
Chic, il l’est uniquement par son décor. Le midi, il fait brasserie, et pas des meilleures (je vois passer la livraison de conserves). Chaque matin, avec le « pop » retentissant qui garantit le geste d’un professionnel, l’un des garçons débouche un nombre incroyable de bouteilles.
Il ne pleut pas davantage à midi lorsque le vent me pousse au restaurant japonais Cusine Yuri. A son menu à volonté, j’ajoute le supplément sashimis à cinq euros.
A partir de quatorze heures, Diego y va à fond. Plus personne ne rôde autour du Bassin des Chalutiers.
Cafés fermés, quais déserts, cela me donne une image de La Rochelle pendant le premier confinement.
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Plus que deux jours avant le premier tour de cette Election Présidentielle que je boude. Macron et Le Pen seront les deux qualifiés. Mélenchon aura une nouvelle fois du mal à accepter le résultat, lui qui rêve de battre Macron au deuxième tour grâce à l’apport des voix d’extrême-droite. Pour un avenir à la vénézuélienne, votez Mélenchon. C’est ce que feront certains de ma connaissance, mais moins fièrement qu’il y a cinq ans. Pécresse (otage de Ciotti) et Hidalgo (otage d’elle-même) vont retourner s’occuper de Paris et de l’Ile de France (leur autre point commun : parler faux à la tribune). Roussel va retourner chez le coiffeur dont il fait la pub sur ses affiches (il a droit à une coupe gratuite). Poutou et Arthaud vont retourner aux batailles perdues d’avance (« on lâche rien »). Zorglub, dont l’initiale est peinte sur les chars de cette ordure de Poutine dont il est un admirateur, va continuer à grenouiller. Dupont-Aignan, « le complotiste des villes », et Lassalle, « le complotiste des champs », comme les nomme si bien Renaud Dély, vont crier à l’élection volée. Jadot va se faire déconstruire par Sandrine Rousseau.
8 avril 2020
S’il n’y avait que la pluie ou s’il n’y avait que le vent, mais il y a les deux ce jeudi matin, raison pour laquelle L’Amiral Café, Le Bistro du Gabut et les autres n’ont même pas essayé d’installer leurs terrasses, ni de baisser les auvents électriques.
Courageusement, je prends la petite passerelle qui permet d’arriver plus vite quai Duperré. Celui-ci est tellement balayé par le vent que sur sa voie cyclable les quelques bicyclistes ayant décidé de sortir marchent à côté de leur machine. Ensuite, heureusement, la rue est à arcades de la Grosse Horloge au Café de la Paix.
C’est très bien trempé que je pousse la porte de cet établissement dont j’ai appris qu’avant la période café militaire cela avait été une chapelle d’hôpital, d’où sa forme. Après un café à un euro quatre-vingts (son prix doit varier en fonction de l’heure), je me plonge dans Choses vues.
Quand mon voisin qui travaille chez Bouygues Télécom (c’est écrit sur son vêtement) s’apprête à partir, il se renseigne sur ce que je lis. « Choses vues ». « Pardon ? » « Choses vues de Victor Hugo. « Ah, connais pas, mais c’est bizarre, je viens de finir Quatrevingt-treize. Depuis qu’on m’oblige plus à le lire, je trouve ça très bien. » A voir ses cheveux blancs, cela doit faire quarante ans qu’il n’est pas obligé.
Quand je reviens vers mon domicile temporaire, c’est pire côté pluie et vent. Je dois me battre contre un mur invisible pour avancer dans le port et j’arrive complètement draché. Pas même le temps de sécher avant de ressortir pour le déjeuner.
J’opte pour L’Ardoise. Au menu du jour figurent en entrée une tarte tomates oignons moutarde et en plat un sot-l’y-laisse de dinde riz au pesto de roquette. « C’est quoi précisément le sot-l’y-laisse ? » demandé-je à la petite serveuse, fille de la maison. « Ah, bonne question », me dit-elle. « Maman, c’est quoi le sot-l’y-laisse ? ». « Mais on te l’a dit tout à l’heure », répond son père. J’apprends que c’est la partie la plus charnue de la dinde. C'est joliment dit. En dessert est proposée une mousse de fruits qui ne demande pas d’explication.
-Vous travaillez dans le coin ? me demande l’agréable mère de l’agréable écervelée quand je paie.
-Non, je suis en vacances.
-Ah ce n’est pas le meilleur temps pour ça, me répond-elle, et demain ce sera pire.
Je sais, on attend un certain Diego.
*
Avec Hugo, j’en suis à la Guerre de Soixante-Dix quand, dans Paris assiégé, il mange les animaux du Jardin des Plantes. Il est applaudi à tous les coins de rues. La foule crie « Vive Victor Hugo ». Dans le même temps, chaque jour, il porte secours, comme il dit, à des femmes jeunes ou moins jeunes de qui il exige des contreparties. Souvent il ne s’agit que de regarder, parfois c’est davantage. Ces privautés sont notées de manière codée et ont été déchiffrées par Henri Guillemin.
Deux échantillons :
Secours à Marie Chauffour, ouvrière sans travail. Entorse, 5 frs.
Mlle Rousseil. Toussaint. Parfait.
Entorse, Toussaint, dans les deux cas des seins nus.
Le vingt-six novembre mil huit cent soixante-dix, l’écrivain, alors âgé de soixante-huit ans, fait les comptes :
Récapitulation des sommes données par moi depuis le 5 septembre, en petites sommes de 5, 10 et 15 frs., tant au pavillon de Rohan que rue Frochot : 3 265 frs.
Cela en fait des secours.
Courageusement, je prends la petite passerelle qui permet d’arriver plus vite quai Duperré. Celui-ci est tellement balayé par le vent que sur sa voie cyclable les quelques bicyclistes ayant décidé de sortir marchent à côté de leur machine. Ensuite, heureusement, la rue est à arcades de la Grosse Horloge au Café de la Paix.
C’est très bien trempé que je pousse la porte de cet établissement dont j’ai appris qu’avant la période café militaire cela avait été une chapelle d’hôpital, d’où sa forme. Après un café à un euro quatre-vingts (son prix doit varier en fonction de l’heure), je me plonge dans Choses vues.
Quand mon voisin qui travaille chez Bouygues Télécom (c’est écrit sur son vêtement) s’apprête à partir, il se renseigne sur ce que je lis. « Choses vues ». « Pardon ? » « Choses vues de Victor Hugo. « Ah, connais pas, mais c’est bizarre, je viens de finir Quatrevingt-treize. Depuis qu’on m’oblige plus à le lire, je trouve ça très bien. » A voir ses cheveux blancs, cela doit faire quarante ans qu’il n’est pas obligé.
Quand je reviens vers mon domicile temporaire, c’est pire côté pluie et vent. Je dois me battre contre un mur invisible pour avancer dans le port et j’arrive complètement draché. Pas même le temps de sécher avant de ressortir pour le déjeuner.
J’opte pour L’Ardoise. Au menu du jour figurent en entrée une tarte tomates oignons moutarde et en plat un sot-l’y-laisse de dinde riz au pesto de roquette. « C’est quoi précisément le sot-l’y-laisse ? » demandé-je à la petite serveuse, fille de la maison. « Ah, bonne question », me dit-elle. « Maman, c’est quoi le sot-l’y-laisse ? ». « Mais on te l’a dit tout à l’heure », répond son père. J’apprends que c’est la partie la plus charnue de la dinde. C'est joliment dit. En dessert est proposée une mousse de fruits qui ne demande pas d’explication.
-Vous travaillez dans le coin ? me demande l’agréable mère de l’agréable écervelée quand je paie.
-Non, je suis en vacances.
-Ah ce n’est pas le meilleur temps pour ça, me répond-elle, et demain ce sera pire.
Je sais, on attend un certain Diego.
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Avec Hugo, j’en suis à la Guerre de Soixante-Dix quand, dans Paris assiégé, il mange les animaux du Jardin des Plantes. Il est applaudi à tous les coins de rues. La foule crie « Vive Victor Hugo ». Dans le même temps, chaque jour, il porte secours, comme il dit, à des femmes jeunes ou moins jeunes de qui il exige des contreparties. Souvent il ne s’agit que de regarder, parfois c’est davantage. Ces privautés sont notées de manière codée et ont été déchiffrées par Henri Guillemin.
Deux échantillons :
Secours à Marie Chauffour, ouvrière sans travail. Entorse, 5 frs.
Mlle Rousseil. Toussaint. Parfait.
Entorse, Toussaint, dans les deux cas des seins nus.
Le vingt-six novembre mil huit cent soixante-dix, l’écrivain, alors âgé de soixante-huit ans, fait les comptes :
Récapitulation des sommes données par moi depuis le 5 septembre, en petites sommes de 5, 10 et 15 frs., tant au pavillon de Rohan que rue Frochot : 3 265 frs.
Cela en fait des secours.
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