Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
15 juillet 2022
C’est avec un train Nomad parti à sept heures quatorze et qui mettra deux heures et sept minutes pour faire Rouen Paris (et il en sera ainsi tout l’été pour cause des travaux d’Eole entre Mantes et Paris) que je rejoins la capitale ce mercredi où il fait trop chaud. Nous passons par l’itinéraire bis, celui de Conflans-Sainte-Honorine.
Dans la voiture Cinq, désormais réservée aux navetteurs mais que je squatte car ils ne sont pas là (en vacances ou partant plus tôt ou prenant leur voiture), la température est maîtrisée. A l’arrivée à Saint-Lazare, le chef de bord est fier d’annoncer trois minutes d’avance. Il parle aussi de quarante degrés à l’extérieur. Il exagère. Néanmoins, la température est déjà trop haute, pour moi et pour beaucoup.
Quand je rejoins le métro Trois, je le découvre à l’arrêt et bondé. Un incident sur la ligne retarde son départ. Je préfère rebrousser jusqu’à la ligne Quatorze que je quitte à la Gare de Lyon. Pédestrement et à l’ombre, je rejoins le carrefour Ledru-Rollin Faubourg-Saint-Antoine. Il est dix heures quand je bois un café au comptoir du Faubourg. Plus de serveuse, le patron est débordé bien que la clientèle soit maigre.
Quelques pas et j’entre chez Book-Off qui bénéficie de la climatisation. Je trouve mon bonheur parmi les livres à un euro : L’année 15 (Journal de guerre) de Giani Stuparich (Verdier), Carnets de voyages à Gargilesse de George Sand (Christian Pirot), Lettres de Julie de Lespinasse (La Petite Vermillon), Journal des années noires de Jean Guéhenno (Folio), Mémoires de Charles d’Agoult (Le Temps retrouvé), Journal de ce qui s’est passé à la tour du Temple (Le Temps retrouvé) et L’Art de choisir sa maîtresse et autres conseils indispensables de Benjamin Franklin (Livre de Poche). Un couple d’hommes sud-américains cherche le sien dans les quarante-cinq tours à un euro pièce. Ils en explorent le court rayon durant une heure et demie et me précèdent à la caisse. Ils en ont pour soixante-sept euros.
Quelques pas de plus et me voici au Péhemmu chinois où je peux m’installer à l’une des deux tables situées près du ventilateur. Adaptant mon menu au temps qu’il fait, je déjeune d’une salade bretonne à neuf euros (bretonne car avec du thon, venu d’on ne sait où). Je l’accompagne d’une carafe d’eau de Paris.
Après ce sobre repas, je descends sous terre. Un rame de métro de la ligne Huit m’emmène jusqu’à Opéra d’où je rejoins pédestrement et à l’ombre le jardin du Palais Royal. J’y partage un banc avec des pique-niqueuses. Ma lecture du jour est Rue du Bac (Salut aux années Blondin) de Denis Lalanne (La Petite Vermillon). Ce livre me déçoit. Il y est beaucoup trop question de sport et de l’auteur, pas assez d’Antoine Blondin.
Vers quatorze heures trente, par le court passage du Beaujolais puis la rue des Petits-Champs et le passage Choiseul, je rejoins le Book-Off de Quatre Septembre, lui aussi climatisé. Comme souvent, j’y trouve moins mon bonheur à un euro. Quand même puis-je mettre dans mon panier La fée Dum-Dum et autres contes parisiens d’Octave Mirbeau (Arcadia Editions), Les souvenirs m’observent de Tomas Tranströmer (Le Castor Astral), Dévotion de Patti Smith (Gallimard) et Les Enervés de Jumièges de Dominique Bussillet (Editions Cahiers du Temps).
La bouffée de chaleur qui me saute dessus quand je sors me rappelle New York où plusieurs fois j’ai cru mourir en passant subitement de la fraîcheur à la touffeur. Au Bistrot d’Edmond, le serveur du comptoir avec mon café m’offre un pichet d’eau.
Mon train de retour doit arriver à Rouen, comme d’habitude, vers dix-neuf heures mais pour cela il part à seize heures quarante-deux. Là encore je voyage dans une voiture Cinq quasi désertée où je termine en diagonale le décevant Lalanne tout en ayant un œil sur le paysage. Peu avant Mantes Station, une sorte de Cathédrale au loin m’intrigue, jamais remarquée jusqu’à alors.
C’est la Collégiale de Mantes-la-Jolie, apprends-je arrivé chez moi. Je découvre aussi que depuis dix-neuf heures, suite à un problème technique, tous les trains pour la Normandie sont bloqués à Saint-Lazare et ne pourront partir avant vingt-deux heures. Je l’ai échappé belle (comme on dit).
*
Peint sur l’un des bancs du Palais Royal : « Un secret a toujours la forme d’une oreille ». Ce mercredi, la chaleur étouffe les conversations. Rien ne tombe dans mon oreille. Je me rattrape avec les yeux, les filles étant à moitié déshabillées.
Dans la voiture Cinq, désormais réservée aux navetteurs mais que je squatte car ils ne sont pas là (en vacances ou partant plus tôt ou prenant leur voiture), la température est maîtrisée. A l’arrivée à Saint-Lazare, le chef de bord est fier d’annoncer trois minutes d’avance. Il parle aussi de quarante degrés à l’extérieur. Il exagère. Néanmoins, la température est déjà trop haute, pour moi et pour beaucoup.
Quand je rejoins le métro Trois, je le découvre à l’arrêt et bondé. Un incident sur la ligne retarde son départ. Je préfère rebrousser jusqu’à la ligne Quatorze que je quitte à la Gare de Lyon. Pédestrement et à l’ombre, je rejoins le carrefour Ledru-Rollin Faubourg-Saint-Antoine. Il est dix heures quand je bois un café au comptoir du Faubourg. Plus de serveuse, le patron est débordé bien que la clientèle soit maigre.
Quelques pas et j’entre chez Book-Off qui bénéficie de la climatisation. Je trouve mon bonheur parmi les livres à un euro : L’année 15 (Journal de guerre) de Giani Stuparich (Verdier), Carnets de voyages à Gargilesse de George Sand (Christian Pirot), Lettres de Julie de Lespinasse (La Petite Vermillon), Journal des années noires de Jean Guéhenno (Folio), Mémoires de Charles d’Agoult (Le Temps retrouvé), Journal de ce qui s’est passé à la tour du Temple (Le Temps retrouvé) et L’Art de choisir sa maîtresse et autres conseils indispensables de Benjamin Franklin (Livre de Poche). Un couple d’hommes sud-américains cherche le sien dans les quarante-cinq tours à un euro pièce. Ils en explorent le court rayon durant une heure et demie et me précèdent à la caisse. Ils en ont pour soixante-sept euros.
Quelques pas de plus et me voici au Péhemmu chinois où je peux m’installer à l’une des deux tables situées près du ventilateur. Adaptant mon menu au temps qu’il fait, je déjeune d’une salade bretonne à neuf euros (bretonne car avec du thon, venu d’on ne sait où). Je l’accompagne d’une carafe d’eau de Paris.
Après ce sobre repas, je descends sous terre. Un rame de métro de la ligne Huit m’emmène jusqu’à Opéra d’où je rejoins pédestrement et à l’ombre le jardin du Palais Royal. J’y partage un banc avec des pique-niqueuses. Ma lecture du jour est Rue du Bac (Salut aux années Blondin) de Denis Lalanne (La Petite Vermillon). Ce livre me déçoit. Il y est beaucoup trop question de sport et de l’auteur, pas assez d’Antoine Blondin.
Vers quatorze heures trente, par le court passage du Beaujolais puis la rue des Petits-Champs et le passage Choiseul, je rejoins le Book-Off de Quatre Septembre, lui aussi climatisé. Comme souvent, j’y trouve moins mon bonheur à un euro. Quand même puis-je mettre dans mon panier La fée Dum-Dum et autres contes parisiens d’Octave Mirbeau (Arcadia Editions), Les souvenirs m’observent de Tomas Tranströmer (Le Castor Astral), Dévotion de Patti Smith (Gallimard) et Les Enervés de Jumièges de Dominique Bussillet (Editions Cahiers du Temps).
La bouffée de chaleur qui me saute dessus quand je sors me rappelle New York où plusieurs fois j’ai cru mourir en passant subitement de la fraîcheur à la touffeur. Au Bistrot d’Edmond, le serveur du comptoir avec mon café m’offre un pichet d’eau.
Mon train de retour doit arriver à Rouen, comme d’habitude, vers dix-neuf heures mais pour cela il part à seize heures quarante-deux. Là encore je voyage dans une voiture Cinq quasi désertée où je termine en diagonale le décevant Lalanne tout en ayant un œil sur le paysage. Peu avant Mantes Station, une sorte de Cathédrale au loin m’intrigue, jamais remarquée jusqu’à alors.
C’est la Collégiale de Mantes-la-Jolie, apprends-je arrivé chez moi. Je découvre aussi que depuis dix-neuf heures, suite à un problème technique, tous les trains pour la Normandie sont bloqués à Saint-Lazare et ne pourront partir avant vingt-deux heures. Je l’ai échappé belle (comme on dit).
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Peint sur l’un des bancs du Palais Royal : « Un secret a toujours la forme d’une oreille ». Ce mercredi, la chaleur étouffe les conversations. Rien ne tombe dans mon oreille. Je me rattrape avec les yeux, les filles étant à moitié déshabillées.
12 juillet 2022
Durant mon absence, InkOj, devenu pour l’occasion artiste municipal, a créé, à la demande de la Mairie, une signalétique colorée sur la chaussée de la rue de la Jeanne. Il s’agit d’apprendre à l’automobiliste qu’il circule dans une zone Trente où le piéton est prioritaire partout quand il traverse, ce qui était déjà le cas quand on avait dans cette rue des passages zébrés classiques.
Après plusieurs jours d’utilisation, je constate que le désir des conducteurs de me laisser passer est moindre qu’avant (et pour les bicyclistes, n’en parlons pas).
Par ailleurs, la plupart des piétons hésitent plus qu’avant à traverser lorsqu’arrive une voiture.
Pour ma part, je me lance hardiment sur l’œuvre d’art.
*
Il est quatorze heures dix ce lundi quand je demande si je peux m’asseoir à une table à l’ombre en terrasse au Zèbre à Pois, rue de la Champmeslé.
-C’est pour déjeuner ? me demande le patron.
-Non, pour boire un café ?
-Je vous préviens, y aura de l’attente.
-Mais je peux m’installer ?
-Oui mais je vous préviens, y aura de l’attente.
-Si vous ne voulez pas me servir, dites-le carrément.
-Vous pouvez vous asseoir mais je m’occupe de la brasserie.
Il n’y a que quelques mangeurs et ils terminent leur repas. Je ramasse mes affaires.
-Merci pour votre visite.
-Et pour la publicité que je vais vous faire.
Après plusieurs jours d’utilisation, je constate que le désir des conducteurs de me laisser passer est moindre qu’avant (et pour les bicyclistes, n’en parlons pas).
Par ailleurs, la plupart des piétons hésitent plus qu’avant à traverser lorsqu’arrive une voiture.
Pour ma part, je me lance hardiment sur l’œuvre d’art.
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Il est quatorze heures dix ce lundi quand je demande si je peux m’asseoir à une table à l’ombre en terrasse au Zèbre à Pois, rue de la Champmeslé.
-C’est pour déjeuner ? me demande le patron.
-Non, pour boire un café ?
-Je vous préviens, y aura de l’attente.
-Mais je peux m’installer ?
-Oui mais je vous préviens, y aura de l’attente.
-Si vous ne voulez pas me servir, dites-le carrément.
-Vous pouvez vous asseoir mais je m’occupe de la brasserie.
Il n’y a que quelques mangeurs et ils terminent leur repas. Je ramasse mes affaires.
-Merci pour votre visite.
-Et pour la publicité que je vais vous faire.
11 juillet 2022
Retrouvailles avec le Marché des Emmurées ce samedi matin, après avoir passé le pont qui mène vers chez les pauvres. Surprise, les deux tiers des vendeurs sont absents. En ce qui concerne les marchands de fruits et légumes, au lieu des quatre ou cinq habituels, il n’y en a qu’un, de qui je n’ai jamais été le client.
Comparé à ce que je payais avant mon escapade finistérienne, pommes de terre, carottes et oignons ont augmenté de cinquante pour cent, mais cela reste moins onéreux qu’aux marchés du dimanche à Rouen ou à Brest.
-Ils sont tous partis en vacances en même temps ? demandé-je à celui à qui je paie.
-Non, c’est la fête, alors y sont pas venus.
-L’Aïd, précise une acheteuse.
« Ah d’accord », leur dis-je. Est-ce pour ça que la nuit dernière j’ai été réveillé par un feu d’artifice ? Amateur sans aucun doute, mais qui a duré plusieurs minutes. J’entendais le bruit de chaque fusée avant l’explosion. Après je ne savais plus si c’était un rêve ou la réalité.
L’après-midi, j’évite Le Sacre pour mon café lecture car là aussi c’est la fête, celle des huit ans de l’équipe actuelle. Je m’installe à la terrasse latérale du Flo’s où souffle un petit vent bienvenu et y achève Mémoires parallèles de Gwenn-Aël Bolloré qui fut patron des Papeteries de l’Odet et des Editions de la Table Ronde. Il y raconte sa vie à travers ses rencontres, le plus souvent celles d’auteur(e)s qu’il a publiés, de droite ou d’extrême-droite mais pas toujours, ainsi croise-t-on, entre autres, Roger Nimier mais aussi Boris Vian, Antoine Blondin mais aussi Léo Ferré.
*
Mémoires parallèles de Gwenn-Aël Bolloré a été publié chez Jean Piccolec, autre Breton, franchement d’extrême-droite. L’auteur, aujourd’hui décédé, et son éditeur, toujours vivant, auraient dû vérifier le chapitre consacré à Anaïs Nin. On y lit que le mari de l’écrivaine était Jean Hugo et son amant Arthur Miller.
Comparé à ce que je payais avant mon escapade finistérienne, pommes de terre, carottes et oignons ont augmenté de cinquante pour cent, mais cela reste moins onéreux qu’aux marchés du dimanche à Rouen ou à Brest.
-Ils sont tous partis en vacances en même temps ? demandé-je à celui à qui je paie.
-Non, c’est la fête, alors y sont pas venus.
-L’Aïd, précise une acheteuse.
« Ah d’accord », leur dis-je. Est-ce pour ça que la nuit dernière j’ai été réveillé par un feu d’artifice ? Amateur sans aucun doute, mais qui a duré plusieurs minutes. J’entendais le bruit de chaque fusée avant l’explosion. Après je ne savais plus si c’était un rêve ou la réalité.
L’après-midi, j’évite Le Sacre pour mon café lecture car là aussi c’est la fête, celle des huit ans de l’équipe actuelle. Je m’installe à la terrasse latérale du Flo’s où souffle un petit vent bienvenu et y achève Mémoires parallèles de Gwenn-Aël Bolloré qui fut patron des Papeteries de l’Odet et des Editions de la Table Ronde. Il y raconte sa vie à travers ses rencontres, le plus souvent celles d’auteur(e)s qu’il a publiés, de droite ou d’extrême-droite mais pas toujours, ainsi croise-t-on, entre autres, Roger Nimier mais aussi Boris Vian, Antoine Blondin mais aussi Léo Ferré.
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Mémoires parallèles de Gwenn-Aël Bolloré a été publié chez Jean Piccolec, autre Breton, franchement d’extrême-droite. L’auteur, aujourd’hui décédé, et son éditeur, toujours vivant, auraient dû vérifier le chapitre consacré à Anaïs Nin. On y lit que le mari de l’écrivaine était Jean Hugo et son amant Arthur Miller.
8 juillet 2022
Quoi de plus saoulant que le retour à la vie quotidienne quand cela se conjugue avec un tas de soucis à régler.
Mon ordinateur de bureau reste à la date d'un certain jour du mois de mai, ce qui m’empêche de l’utiliser pour aller sur Internet.
Mon ordinateur portatif est à bout de souffle, sa batterie ne tient plus la charge.
Mon compte Effe Bé est bloqué depuis le seize juin, ce qui m’empêche par ricochet de me connecter au site d’Air Bibi, et aucun moyen de le débloquer quand on n’a pas de téléphone portatif.
Le tuyau anti débordement de l’évier de ma cuisine est décroché, ce qui conduit à des débordements.
Le revêtement de sol de cette cuisine américaine se désagrège.
Le retard de ménage devient phénoménal.
Il va bien falloir que je fasse le nécessaire. C’était quand même plus simple de vivre au temps d’avant l’omniprésence de l’informatique. Encore plus au temps où l’on avait des domestiques.
*
« Je n’ai pas besoin d’être député pour être entendu. Je suis le tribun du peuple : deux fois de suite j’ai eu le vote de plus de 7 millions de gens. » (Mélenchon ce vendredi dans Libération)
Symptomatique à plus d’un titre, notamment l’emploi du mot « gens ».
Mon ordinateur de bureau reste à la date d'un certain jour du mois de mai, ce qui m’empêche de l’utiliser pour aller sur Internet.
Mon ordinateur portatif est à bout de souffle, sa batterie ne tient plus la charge.
Mon compte Effe Bé est bloqué depuis le seize juin, ce qui m’empêche par ricochet de me connecter au site d’Air Bibi, et aucun moyen de le débloquer quand on n’a pas de téléphone portatif.
Le tuyau anti débordement de l’évier de ma cuisine est décroché, ce qui conduit à des débordements.
Le revêtement de sol de cette cuisine américaine se désagrège.
Le retard de ménage devient phénoménal.
Il va bien falloir que je fasse le nécessaire. C’était quand même plus simple de vivre au temps d’avant l’omniprésence de l’informatique. Encore plus au temps où l’on avait des domestiques.
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« Je n’ai pas besoin d’être député pour être entendu. Je suis le tribun du peuple : deux fois de suite j’ai eu le vote de plus de 7 millions de gens. » (Mélenchon ce vendredi dans Libération)
Symptomatique à plus d’un titre, notamment l’emploi du mot « gens ».
7 juillet 2022
De retour au U Express de l’Hôtel de Ville ce mercredi matin, je constate que les prix ont continué d’augmenter pendant mon absence (le stèque haché vaut maintenant le double d’il y a quelques mois) et que les rayons sont maigrement fournis. Je trouve quand même de quoi assurer ma survie.
L’après-midi je passe de la terrasse du Son du Cor à celle du Sacre où je dois me mettre à l’ombre. Il fait presque trop chaud en Normandie. Je suis peut-être fait pour le climat brestois, bien que j’en aie rapporté une toux persistante. Ce glandage me permet de lire Avec Bas Jan Ader en diagonale, car la façon qu’a Thomas Giraud d’évoquer en le tutoyant la vie de l’artiste de la chute et sa mort dans ce qui fut sa dernière performance, la traversée de l’Atlantique sur un petit bateau pas fait pour ça, ne me convainc pas.
En ville, de nouveaux commerces et restaurants ont ouvert et l’Hôtel d’Angleterre a fermé pour proxénétisme. Je ne pense pas avoir manqué grand-chose. Quand même, je regrette de ne pas avoir été là pour la traversée de la Seine du funambule Nathan Paulin sur son fil reliant la Cathédrale à la Tour des Archives. J’aime faire le badaud à ce genre d’exploit et ça m’aurait intéressé d’assister aux préparatifs, de savoir comment on fait pour attacher le fil aux deux extrémités.
Maintenant vont commencer les routinières Terrasses du Jeudi du mois de juillet. Le programme de ces concerts gratuits ne me poussera pas à y assister.
*
Entendu dans la rue :
« Un enfant ça coûte de l’argent, et avec tout ce qui se passe là, comment ça augmente… »
L’après-midi je passe de la terrasse du Son du Cor à celle du Sacre où je dois me mettre à l’ombre. Il fait presque trop chaud en Normandie. Je suis peut-être fait pour le climat brestois, bien que j’en aie rapporté une toux persistante. Ce glandage me permet de lire Avec Bas Jan Ader en diagonale, car la façon qu’a Thomas Giraud d’évoquer en le tutoyant la vie de l’artiste de la chute et sa mort dans ce qui fut sa dernière performance, la traversée de l’Atlantique sur un petit bateau pas fait pour ça, ne me convainc pas.
En ville, de nouveaux commerces et restaurants ont ouvert et l’Hôtel d’Angleterre a fermé pour proxénétisme. Je ne pense pas avoir manqué grand-chose. Quand même, je regrette de ne pas avoir été là pour la traversée de la Seine du funambule Nathan Paulin sur son fil reliant la Cathédrale à la Tour des Archives. J’aime faire le badaud à ce genre d’exploit et ça m’aurait intéressé d’assister aux préparatifs, de savoir comment on fait pour attacher le fil aux deux extrémités.
Maintenant vont commencer les routinières Terrasses du Jeudi du mois de juillet. Le programme de ces concerts gratuits ne me poussera pas à y assister.
*
Entendu dans la rue :
« Un enfant ça coûte de l’argent, et avec tout ce qui se passe là, comment ça augmente… »
6 juillet 2022
Une seule serviette de bain (et c’est un bien grand mot pour une si petite chose) à mon arrivée dans le studio Air Bibi de la rue Saint-Saëns à Brest. Quand je suis allé le signaler à la conciergerie qui le gère (elle est à la même adresse), une fille style pimbêche m’a répondu péremptoirement : « On fournit une seule serviette par personne ». « Pour trois semaines ? » « Ben oui ». Un de ses collègues, moins stupide, est allé m’en chercher une deuxième, grande et moelleuse.
Je l’utilise pour la dernière fois ce mardi matin, laisse la clé du studio Air Bibi sur la table comme demandé et tire la porte derrière moi puis ma valise de même. La distance à parcourir jusqu’à la Gare est minime. J’ai le temps de boire un allongé à un euro soixante-dix dans ce qui tient lieu de buffet avant de m’installer en voiture Cinq place Quinze.
Car il me faut ce jour quitter Brest / La rade, le port, ce qu'il en reste / Le vent dans l'avenue Jean Jaurès.
« Le départ de votre Tégévé va partir », nous annonce une cheffe de bord moyennement réveillée. Il est sept heures dix-huit lorsqu’il s’ébroue. Par la vitre, je peux revoir Moulin Blanc (son port sa plage) puis l’Elorn jusqu’à Landerneau.
Ce sont ensuite Morlaix, Guingamp, Saint-Brieuc, villes de l’an dernier. A Rennes, cela se gâte. Le Tégévé de Quimper qui doit s’accoupler avec le nôtre est retardé à cause d’un animal heurté par un autre train. Le retard annoncé est de vingt-cinq minutes. J’ai à peine le temps de me dire Animal on est mal, que ce retard est ramené à quinze minutes, le temps qu'il me faut pour achever ma relecture de Lettres à sa femme du Marquis de Sade.
Quand les deux trains n’en forment plus qu’un, nous filons à grande vitesse.
Comme j’ai prévu de la marge entre ce Brest Paris et le Paris Rouen, j’ai l’esprit tranquille quand je vais de Montparnasse à Saint-Lazare avec le métro Treize. J’ai même le temps de boire un café à un euro trente au comptoir de La Ville d’Argentan avant de prendre place dans le train Nomad de douze heures quarante. Il est peu fréquenté et ne rencontre pas de problème jusqu’à Rouen.
Arrivé chez moi peu après quatorze heures vingt, mon premier geste est de remettre l’électricité et le second d’aller chercher un kébab au Djurdjura, salade tomate oignon, sauce blanche, désormais à cinq euros quatre-vingts.
*
Aperçu du Tégévé, un Café des Abattoirs. Moins glamour que le Café de la Plage.
*
A la Gare Saint-Lazare, une Gilet Rouge interrogée par un voyageur, quinquagénaire élégant. « Je ne peux pas vous dire, je m’occupe des lignes normandes, pas de la banlieue », lui répond-elle. « Conflans-Sainte-Honorine, ça n’est pas la banlieue », s’insurge-t-il.
Je l’utilise pour la dernière fois ce mardi matin, laisse la clé du studio Air Bibi sur la table comme demandé et tire la porte derrière moi puis ma valise de même. La distance à parcourir jusqu’à la Gare est minime. J’ai le temps de boire un allongé à un euro soixante-dix dans ce qui tient lieu de buffet avant de m’installer en voiture Cinq place Quinze.
Car il me faut ce jour quitter Brest / La rade, le port, ce qu'il en reste / Le vent dans l'avenue Jean Jaurès.
« Le départ de votre Tégévé va partir », nous annonce une cheffe de bord moyennement réveillée. Il est sept heures dix-huit lorsqu’il s’ébroue. Par la vitre, je peux revoir Moulin Blanc (son port sa plage) puis l’Elorn jusqu’à Landerneau.
Ce sont ensuite Morlaix, Guingamp, Saint-Brieuc, villes de l’an dernier. A Rennes, cela se gâte. Le Tégévé de Quimper qui doit s’accoupler avec le nôtre est retardé à cause d’un animal heurté par un autre train. Le retard annoncé est de vingt-cinq minutes. J’ai à peine le temps de me dire Animal on est mal, que ce retard est ramené à quinze minutes, le temps qu'il me faut pour achever ma relecture de Lettres à sa femme du Marquis de Sade.
Quand les deux trains n’en forment plus qu’un, nous filons à grande vitesse.
Comme j’ai prévu de la marge entre ce Brest Paris et le Paris Rouen, j’ai l’esprit tranquille quand je vais de Montparnasse à Saint-Lazare avec le métro Treize. J’ai même le temps de boire un café à un euro trente au comptoir de La Ville d’Argentan avant de prendre place dans le train Nomad de douze heures quarante. Il est peu fréquenté et ne rencontre pas de problème jusqu’à Rouen.
Arrivé chez moi peu après quatorze heures vingt, mon premier geste est de remettre l’électricité et le second d’aller chercher un kébab au Djurdjura, salade tomate oignon, sauce blanche, désormais à cinq euros quatre-vingts.
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Aperçu du Tégévé, un Café des Abattoirs. Moins glamour que le Café de la Plage.
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A la Gare Saint-Lazare, une Gilet Rouge interrogée par un voyageur, quinquagénaire élégant. « Je ne peux pas vous dire, je m’occupe des lignes normandes, pas de la banlieue », lui répond-elle. « Conflans-Sainte-Honorine, ça n’est pas la banlieue », s’insurge-t-il.
5 juillet 2022
Ce lundi est mon dernier jour dans le Finistère. Je prends le car BreizhGo numéro Onze qui va au Conquet pour encore une fois en descendre au Trez-Hir (commune de Plougonvelin) et marcher par le Géherre Trente-Quatre jusqu’à Trégana-Plage (commune de Locmaria-Plouzané). Plougonvelin se réjouit à l’avance d’accueillir fin juillet la Tournée des Années 80 dont la locomotive est Lio (tombée bien bas). Locmaria-Plouzané affiche qu’elle cherche un boulanger.
Moins de chiens cette fois sur le chemin et quelques randonneurs en éclaireurs de tous ceux qui vont débouler sur la côte après la fermeture des écoles. Parmi les oiseaux qui chantent se fait remarquer un coq peu matinal. Je prends mon temps car je sais L’Albatros fermé le lundi. Il ne me faut arriver au Café de la Plage qu’après son ouverture : dix heures.
Je réussis parfaitement, réserve une dernière fois la table d’angle à la terrasse de l’étage puis bois un café à la terrasse du bas où je lis ensuite longuement Lettres à sa femme du Marquis de Sade.
Il fait à demi beau pour mon dernier repas finistérien. Après le buffet d’entrées, c’est une blanquette de poulet avec des frites maison. Un plat que je savoure l’œil sur le large. D’ici je vois bien la Pointe de Pen Hir et les Tas de Pois au bout de la Presqu’île de Crozon et au loin j’aperçois la Pointe du Raz, un peu voilée. En dessert, je choisis une salade de melon.
J’ai le temps d’un café en bas avant l’arrivée du car de retour conduit par le chauffeur du matin. « Alors la balade a été belle ? » me demande-t-il.
Arrivé à Brest, comme je dispose de deux tickets BreizhGo me donnant droit à un trajet d’une heure chez Bibus, je descends la rue de Siam en tram et m’offre un nouveau tour de manège avec le Téléphérique qui a retrouvé la santé. A l’arrivée aux Capucins, j’en repars immédiatement dans une cabine occupée par un Ehpad en promenade, un très vieux et des très vieilles, dont une centenaire, deux en fauteuil et une grincheuse qui crie qu’on lui a piqué ses sous. Elles et lui sont assis et ne voient pas grand-chose mais sont quand même contents. Les monitrices sont deux filles pas très futées qui jurent avoir le vertige. En cette charmante compagnie, je regarde de là-haut l’Arsenal, le Château et le Port de Commerce pour la dernière fois.
*
Brest (sous toutes ses coutures), Le Conquet, Plouzané (plage Sainte-Anne), Plougastel, Saint-Renan, Plougonvelin (Le Trez-Hir), Locmaria-Plouzané (Trégana-Plage), Landerneau, Plougerneau, Landéda (Aber Wrac’h), Porspoder, Ploudalmézeau (Portsall), Plounéour-Brignogan-Plages, Lampaul-Plouarzel, Camaret-sur-Mer, Lesneven, Le Faou, Le Folgoët, Hôpital-Camfrout, Logonna-Daoulas, Daoulas, Crozon (Morgat).
*
Les autres vont arriver. Il est temps de rentrer.
Moins de chiens cette fois sur le chemin et quelques randonneurs en éclaireurs de tous ceux qui vont débouler sur la côte après la fermeture des écoles. Parmi les oiseaux qui chantent se fait remarquer un coq peu matinal. Je prends mon temps car je sais L’Albatros fermé le lundi. Il ne me faut arriver au Café de la Plage qu’après son ouverture : dix heures.
Je réussis parfaitement, réserve une dernière fois la table d’angle à la terrasse de l’étage puis bois un café à la terrasse du bas où je lis ensuite longuement Lettres à sa femme du Marquis de Sade.
Il fait à demi beau pour mon dernier repas finistérien. Après le buffet d’entrées, c’est une blanquette de poulet avec des frites maison. Un plat que je savoure l’œil sur le large. D’ici je vois bien la Pointe de Pen Hir et les Tas de Pois au bout de la Presqu’île de Crozon et au loin j’aperçois la Pointe du Raz, un peu voilée. En dessert, je choisis une salade de melon.
J’ai le temps d’un café en bas avant l’arrivée du car de retour conduit par le chauffeur du matin. « Alors la balade a été belle ? » me demande-t-il.
Arrivé à Brest, comme je dispose de deux tickets BreizhGo me donnant droit à un trajet d’une heure chez Bibus, je descends la rue de Siam en tram et m’offre un nouveau tour de manège avec le Téléphérique qui a retrouvé la santé. A l’arrivée aux Capucins, j’en repars immédiatement dans une cabine occupée par un Ehpad en promenade, un très vieux et des très vieilles, dont une centenaire, deux en fauteuil et une grincheuse qui crie qu’on lui a piqué ses sous. Elles et lui sont assis et ne voient pas grand-chose mais sont quand même contents. Les monitrices sont deux filles pas très futées qui jurent avoir le vertige. En cette charmante compagnie, je regarde de là-haut l’Arsenal, le Château et le Port de Commerce pour la dernière fois.
*
Brest (sous toutes ses coutures), Le Conquet, Plouzané (plage Sainte-Anne), Plougastel, Saint-Renan, Plougonvelin (Le Trez-Hir), Locmaria-Plouzané (Trégana-Plage), Landerneau, Plougerneau, Landéda (Aber Wrac’h), Porspoder, Ploudalmézeau (Portsall), Plounéour-Brignogan-Plages, Lampaul-Plouarzel, Camaret-sur-Mer, Lesneven, Le Faou, Le Folgoët, Hôpital-Camfrout, Logonna-Daoulas, Daoulas, Crozon (Morgat).
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Les autres vont arriver. Il est temps de rentrer.
4 juillet 2022
Ce dimanche matin à Brest, des victimes du folklore local attendent, écroulés, le passage du premier tram dans quarante-sept minutes. D’autres préfèrent descendre la rue de Siam d’un pied incertain, en grappes, les mains dans les poches, disant c’est dommage qu’il n’y ait pas un café ouvert on aurait pu prendre un café.
Un café ouvert, il y en a un mais peu visible, caché par un barnum du marché, le Café de l’Océan, plus connu sous le nom de Chez Alain. Lequel Alain a remis son masque pour protéger ses soixante-dix-sept ans. La clientèle est moitié café croissant, moitié en train de cuver. « Bonne soirée », dit l’une en partant ; il est huit heures, encore trente minutes avant le premier tram. Une très ancienne beauté tente de se hisser sur un tabouret, n’y arrive pas, renonce.
-Elle est où ta femme ? demande l’un à Alain.
-Ma femme, elle est avec son amant.
-Et tu voudrais bien qu’elle ne revienne pas.
Avant que n’arrive cette harpie, je quitte ce café pittoresque dont je ne connais pas d’équivalent ailleurs et monte dans le tram avec mon dernier billet BreizhGo trafiqué. J’en descends à l’arrêt Capucins. A partir de là, c’est mon adieu pédestre à Brest : Capucins, Téléphérique, Recouvrance, Arsenal, Pont, Château et me voici arrivé au Port de Commerce.
A la terrasse couverte de La Presqu’île, je commande un café qui m’est apporté par la petite serveuse en alternance dont l’attitude si sage contraste sacrément avec celle de la partie imbibée de la clientèle. Un beau deux-mâts quitte le Port. Un dragueur non alcoolisé déclare à la fille avec qui il est arrivé : « J’aime bien le petit matin avec toi » ; il est dix heures et quart.
Le ciel reste gris. A midi je déjeune encore une fois chez Cocorico. Là aussi, le personnel a remis le masque, mais pas le patron. Arrivent de jeunes embiérés, un quatuor composé de deux couples. Ce sont les filles que l’on entend, tonitruantes et vulgaires, les garçons eux sont amortis. Un serveur vient leur dire qu’il va y avoir des familles et qu’il va falloir faire moins de bruit, puis on leur sert les pintes commandées. Je choisis encore une fois la terrine de poisson et la saucisse de Molène, avec de l’eau, pour quinze euros.
Le café, je vais le prendre à La Presqu’île. Il est treize heures trente. Le dragueur et la fille sont toujours à la même table. « Je vais t’offrir un ticket à gratter, lui dit-il, et si tu gagnes tu garderas tout pour toi ».
Une dernière fois je remonte la rampe. Une femme de ménage s’occupe du logement Air Bibi voisin du mien. Les trois bruyants ne seront restés à Brest que le temps de se piquer la ruche.
*
Dans les cafés de cette ville, on ignore la loi qui interdit de servir de l’alcool à des personnes qui arrivent manifestement ivres.
*
A Brest, le réseau Bibus est géré par la Régie Autonome des Transports Parisiens. En fin de semaine, il vaut mieux laisser passer le premier tram et monter dans le suivant.
*
La mère de la fille d’en face ne sort jamais, sauf pour fumer sur son balcon.
Un café ouvert, il y en a un mais peu visible, caché par un barnum du marché, le Café de l’Océan, plus connu sous le nom de Chez Alain. Lequel Alain a remis son masque pour protéger ses soixante-dix-sept ans. La clientèle est moitié café croissant, moitié en train de cuver. « Bonne soirée », dit l’une en partant ; il est huit heures, encore trente minutes avant le premier tram. Une très ancienne beauté tente de se hisser sur un tabouret, n’y arrive pas, renonce.
-Elle est où ta femme ? demande l’un à Alain.
-Ma femme, elle est avec son amant.
-Et tu voudrais bien qu’elle ne revienne pas.
Avant que n’arrive cette harpie, je quitte ce café pittoresque dont je ne connais pas d’équivalent ailleurs et monte dans le tram avec mon dernier billet BreizhGo trafiqué. J’en descends à l’arrêt Capucins. A partir de là, c’est mon adieu pédestre à Brest : Capucins, Téléphérique, Recouvrance, Arsenal, Pont, Château et me voici arrivé au Port de Commerce.
A la terrasse couverte de La Presqu’île, je commande un café qui m’est apporté par la petite serveuse en alternance dont l’attitude si sage contraste sacrément avec celle de la partie imbibée de la clientèle. Un beau deux-mâts quitte le Port. Un dragueur non alcoolisé déclare à la fille avec qui il est arrivé : « J’aime bien le petit matin avec toi » ; il est dix heures et quart.
Le ciel reste gris. A midi je déjeune encore une fois chez Cocorico. Là aussi, le personnel a remis le masque, mais pas le patron. Arrivent de jeunes embiérés, un quatuor composé de deux couples. Ce sont les filles que l’on entend, tonitruantes et vulgaires, les garçons eux sont amortis. Un serveur vient leur dire qu’il va y avoir des familles et qu’il va falloir faire moins de bruit, puis on leur sert les pintes commandées. Je choisis encore une fois la terrine de poisson et la saucisse de Molène, avec de l’eau, pour quinze euros.
Le café, je vais le prendre à La Presqu’île. Il est treize heures trente. Le dragueur et la fille sont toujours à la même table. « Je vais t’offrir un ticket à gratter, lui dit-il, et si tu gagnes tu garderas tout pour toi ».
Une dernière fois je remonte la rampe. Une femme de ménage s’occupe du logement Air Bibi voisin du mien. Les trois bruyants ne seront restés à Brest que le temps de se piquer la ruche.
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Dans les cafés de cette ville, on ignore la loi qui interdit de servir de l’alcool à des personnes qui arrivent manifestement ivres.
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A Brest, le réseau Bibus est géré par la Régie Autonome des Transports Parisiens. En fin de semaine, il vaut mieux laisser passer le premier tram et monter dans le suivant.
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La mère de la fille d’en face ne sort jamais, sauf pour fumer sur son balcon.
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