Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
8 décembre 2016
Un concert de carillon de vingt heures à vingt et une heures mardi soir, une bonne nuit, et ce mercredi matin, par le train de huit heures douze, je quitte Rouen en pic de pollution pour Paris dans le même état. Avantage : dans la ville d’arrivée, les transports en commun sont gratuits.
Il n’y a pas pour autant plus de monde dans les métros Trois et Huit qui m’emmènent jusqu’au Café du Faubourg. Un café vite fait et j’entre chez Book-Off, passe au marché d’Aligre puis chez Emmaüs. Je suis une nouvelle fois chargé de livres lorsque pour rejoindre Chez Céleste je passe au bout de la rue Manuel-Valls. Celle-ci est gardée comme s’il était encore Premier Ministre.
Beignet bœuf et crevettes, sauté d’agneau, tel est mon choix du jour, avec un quart de vin du pays. Près de moi est installé un trio de trentenaires à barbe de deux jours. Ces porteurs de bonnets et de vestes en rôti de porc ne les retirent pas pour manger. Ce sont des passionnés de voile et ils entendent en vivre. Pour ce faire, ils organisent des expositions « grand public » avec des « bornes multimédia ». A une autre table sont installés trois vieilles et un vieux qui évoquent leurs implants dentaires et trouvent que c’est copieux.
Après avoir réglé dix-neuf euros cinquante, voulant aller au Quartier Latin, je rejoins la rue du Faubourg-Saint-Antoine par où passe le bus Quatre-Vingt-Six Visiblement, la circulation automobile est semblable à celles des mercredis précédents. Les voitures à plaque paire ayant moins de trois passagers sont nombreuses à circuler malgré l’interdiction. Des contrôles ont lieu à l’entrée de Paris mais dans la capitale, on fait ce qu’on veut. Le bus, lui, est chargé mais pas davantage que lorsqu’il est payant. C’est heureux car si la foule se précipitait dans le métro et le bus au prétexte qu’ils sont gratuits, ils ne pourraient plus fonctionner.
*
Impossible de retrouver le nom de l’homme à cheveux blancs qui était assis en face de moi dans le métro parisien l’autre semaine et que je revoyais plus jeune et brun au temps du premier Antoine de Caunes sur Canal Plus.
La lecture de la dernière livraison du Ramble Tamble de Philippe Dumez me le donne : Albert Algoud.
Il l’a vu attendre vainement le chaland chez Joseph Gibert où il était invité à dédicacer son énième livre sur Tintin.
Il n’y a pas pour autant plus de monde dans les métros Trois et Huit qui m’emmènent jusqu’au Café du Faubourg. Un café vite fait et j’entre chez Book-Off, passe au marché d’Aligre puis chez Emmaüs. Je suis une nouvelle fois chargé de livres lorsque pour rejoindre Chez Céleste je passe au bout de la rue Manuel-Valls. Celle-ci est gardée comme s’il était encore Premier Ministre.
Beignet bœuf et crevettes, sauté d’agneau, tel est mon choix du jour, avec un quart de vin du pays. Près de moi est installé un trio de trentenaires à barbe de deux jours. Ces porteurs de bonnets et de vestes en rôti de porc ne les retirent pas pour manger. Ce sont des passionnés de voile et ils entendent en vivre. Pour ce faire, ils organisent des expositions « grand public » avec des « bornes multimédia ». A une autre table sont installés trois vieilles et un vieux qui évoquent leurs implants dentaires et trouvent que c’est copieux.
Après avoir réglé dix-neuf euros cinquante, voulant aller au Quartier Latin, je rejoins la rue du Faubourg-Saint-Antoine par où passe le bus Quatre-Vingt-Six Visiblement, la circulation automobile est semblable à celles des mercredis précédents. Les voitures à plaque paire ayant moins de trois passagers sont nombreuses à circuler malgré l’interdiction. Des contrôles ont lieu à l’entrée de Paris mais dans la capitale, on fait ce qu’on veut. Le bus, lui, est chargé mais pas davantage que lorsqu’il est payant. C’est heureux car si la foule se précipitait dans le métro et le bus au prétexte qu’ils sont gratuits, ils ne pourraient plus fonctionner.
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Impossible de retrouver le nom de l’homme à cheveux blancs qui était assis en face de moi dans le métro parisien l’autre semaine et que je revoyais plus jeune et brun au temps du premier Antoine de Caunes sur Canal Plus.
La lecture de la dernière livraison du Ramble Tamble de Philippe Dumez me le donne : Albert Algoud.
Il l’a vu attendre vainement le chaland chez Joseph Gibert où il était invité à dédicacer son énième livre sur Tintin.
7 décembre 2016
Pour mon déjeuner dieppois, j’opte encore une fois pour L’Espérance. J’y mange près de marins dont l’un explique que sur un navire maintenant il suffit que le commandant parle français et que son second en ait des notions, le reste de l’équipage n’a pas besoin d’en connaître le moindre mot. Les décorations de Noël du comptoir datent d’une trentaine d’années. Quant à la cuisine, qui les fois précédentes m’avait plu, elle me déçoit, surtout le stèque haché petit et trop cuit comme dans un fast-foude. J’ai eu tort de déclarer à l’aimable patronne que c’était toujours bien ici. Cette fois, je paie sans mot dire.
Sorti de là, je remonte la Grande Rue où plusieurs appartements bourgeois sont à vendre puis prends le raidillon qui mène au belvédère en passant par derrière le Château Musée. Essoufflé, j’observe la ville de haut, la plage dont les galets ne sont foulés par personne et la piscine découverte dans laquelle deux nageurs font des allers et retours. Autrefois, quand j’étais bien accompagné, c’est là que je me garais, après avoir fait le détour de Pourville. Désormais, je n’ai plus de voiture, ni d’amoureuse.
Redescendu en ville, je poursuis la lecture du Journal de Thomas Mann au Café des Tribunaux. Des commerçants et des assureurs y terminent leur déjeuner (à mettre sur les frais de leur entreprise) en disant du mal de Manuel Valls et François Hollande.
Les travaux de la gare de Dieppe sont terminés. Malgré ça, elle a un air miséreux. Des lustres que le Buffet de la Gare est fermé. Je doute qu’un jour il soit de nouveau ouvert. Le seul train à quai est celui pour Rouen. Il part à seize heures pile et à seize heures cinq le contrôleur vérifie les billets. Si l’on veut se risquer à frauder, ce n’est pas sur cette ligne qu’il faut le faire.
Sorti de là, je remonte la Grande Rue où plusieurs appartements bourgeois sont à vendre puis prends le raidillon qui mène au belvédère en passant par derrière le Château Musée. Essoufflé, j’observe la ville de haut, la plage dont les galets ne sont foulés par personne et la piscine découverte dans laquelle deux nageurs font des allers et retours. Autrefois, quand j’étais bien accompagné, c’est là que je me garais, après avoir fait le détour de Pourville. Désormais, je n’ai plus de voiture, ni d’amoureuse.
Redescendu en ville, je poursuis la lecture du Journal de Thomas Mann au Café des Tribunaux. Des commerçants et des assureurs y terminent leur déjeuner (à mettre sur les frais de leur entreprise) en disant du mal de Manuel Valls et François Hollande.
Les travaux de la gare de Dieppe sont terminés. Malgré ça, elle a un air miséreux. Des lustres que le Buffet de la Gare est fermé. Je doute qu’un jour il soit de nouveau ouvert. Le seul train à quai est celui pour Rouen. Il part à seize heures pile et à seize heures cinq le contrôleur vérifie les billets. Si l’on veut se risquer à frauder, ce n’est pas sur cette ligne qu’il faut le faire.
6 décembre 2016
Beau temps annoncé ce lundi, une raison suffisante pour prendre le train de neuf heures onze qui mène à Dieppe à petite vitesse, bien que ronflant de tout son moteur. J’y partage une voiture avec la simplette déjà côtoyée qu’un éducateur doit attendre au bout du chemin de fer et des branlotin(e)s à valises parlant boîtes de thon, capotes et godemichés. Cette jeunesse excitée descend à Auffay (que peut-on bien aller faire à Auffay ?). A l’extérieur, c’est campagne et gelée blanche. Les cheminées fument horizontalement.
A l’arrivée, je vais me chauffer au soleil derrière la vitre du Tout Va Bien et y poursuis la lecture du Journal de Thomas Mann. Au comptoir on fait un triste constat : « Plus personne n’a de parole. » A l’extérieur ne passent que quelques autochtones. Les manèges de la fête foraine sont au repos.
Faisant le tour du port, je pousse jusqu’au Pollet. La bonne nouvelle ici, c’est que le pont tournant Colbert ne sera pas remplacé par un autre, bien moderne. Il vient d’être classé aux Monuments Historiques, comme on dit. Ce projet de destruction était une fâcheuse idée de Nicolas Mayer-Rossignol, Socialiste, quand il était Chef de la Région Haute-Normandie. J’ignore qu’elle était la position d’Hervé Morin, Centriste de Droite, désormais Duc de Normandie. Celui-ci s’est fait remarquer la semaine dernière en faisant faux bond aux proviseurs et intendants des cent cinquante-six lycées publics de Normandie convoqués par lui-même à Beuzeville (Eure). Il avait trop à faire avec la création de son nouveau parti politique Les Bâtisseurs, un nom qui fleure bon le scoutisme. Hamster Jovial pourrait être son surnom.
Gotlib est mort ce dimanche à l’âge de quatre-vingt-deux ans. Je me souviens avoir fait plusieurs fois le trajet Evreux Paris spécialement pour acheter à leur sortie les premiers numéros de L’Echo des Savanes qu’il fonda avec Bretécher et Mandryka. Ils s’arrachaient dans la capitale et étaient épuisés avant d’avoir la possibilité d’être distribués en province.
L’un après l’autre meurent ceux qui ont fait les années soixante-dix, une époque de moins en moins comprise et de plus en plus dénigrée. En témoigne la dernière polémique en cours, visant Bernardo Bertolucci et Marlon Brando, accusés par une actrice américaine d’avoir violé Maria Schneider en lui faisant subir la fictive et fameuse scène de sodomie « Passe-moi le beurre » dans Le Dernier Tango à Paris.
*
Au Tout Va Bien : « Avant les gamins, ils voulaient des camions de pompier, maintenant, on a deux neveux, c’est pas de la même famille, ils se connaissent pas, ils veulent des camions poubelle, je sais pas ce qu’ils ont, les mômes ! »
A l’arrivée, je vais me chauffer au soleil derrière la vitre du Tout Va Bien et y poursuis la lecture du Journal de Thomas Mann. Au comptoir on fait un triste constat : « Plus personne n’a de parole. » A l’extérieur ne passent que quelques autochtones. Les manèges de la fête foraine sont au repos.
Faisant le tour du port, je pousse jusqu’au Pollet. La bonne nouvelle ici, c’est que le pont tournant Colbert ne sera pas remplacé par un autre, bien moderne. Il vient d’être classé aux Monuments Historiques, comme on dit. Ce projet de destruction était une fâcheuse idée de Nicolas Mayer-Rossignol, Socialiste, quand il était Chef de la Région Haute-Normandie. J’ignore qu’elle était la position d’Hervé Morin, Centriste de Droite, désormais Duc de Normandie. Celui-ci s’est fait remarquer la semaine dernière en faisant faux bond aux proviseurs et intendants des cent cinquante-six lycées publics de Normandie convoqués par lui-même à Beuzeville (Eure). Il avait trop à faire avec la création de son nouveau parti politique Les Bâtisseurs, un nom qui fleure bon le scoutisme. Hamster Jovial pourrait être son surnom.
Gotlib est mort ce dimanche à l’âge de quatre-vingt-deux ans. Je me souviens avoir fait plusieurs fois le trajet Evreux Paris spécialement pour acheter à leur sortie les premiers numéros de L’Echo des Savanes qu’il fonda avec Bretécher et Mandryka. Ils s’arrachaient dans la capitale et étaient épuisés avant d’avoir la possibilité d’être distribués en province.
L’un après l’autre meurent ceux qui ont fait les années soixante-dix, une époque de moins en moins comprise et de plus en plus dénigrée. En témoigne la dernière polémique en cours, visant Bernardo Bertolucci et Marlon Brando, accusés par une actrice américaine d’avoir violé Maria Schneider en lui faisant subir la fictive et fameuse scène de sodomie « Passe-moi le beurre » dans Le Dernier Tango à Paris.
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Au Tout Va Bien : « Avant les gamins, ils voulaient des camions de pompier, maintenant, on a deux neveux, c’est pas de la même famille, ils se connaissent pas, ils veulent des camions poubelle, je sais pas ce qu’ils ont, les mômes ! »
5 décembre 2016
Lecture agréable que celle de la Correspondance (1946-1978) de Georges Perros avec Anne & Gérard Philipe, son ami de Conservatoire, qui ne lui tourne pas le dos lorsqu’il devient célèbre. Après la mort prématurée de l’acteur, l’échange épistolaire se poursuit avec Anne, sa veuve.
Le café présente un autre avantage. On y est seul, quoiqu’assisté. La vie est là, qui bouge, qui murmure, qui tisse ses mille et un réseaux. Cette situation retire tout romantisme, toute envie de cracher à la solitude, qui, bien portée, est le contraire de la sauvagerie. (Janvier mil neuf cent cinquante-trois)
On me demande souvent, dans les cafés où je vais boire un verre, où l’on parle cinéma, etc… si j’aime bien Gérard Ph. C’est très étrange. Un peu triste. Oui, ambigu. On est plusieurs ; quoiqu’infiniment seul, et l’on ne sait jamais auquel on s’adresse. (A «Mon petit Gérard», début février mil neuf cent cinquante-cinq)
Je suis très las –ça doit se sentir– peut-être à cause de la piqûre contre la variole, peut-être à cause d’une chute que j’ai faite en jouant à cache-cache avec une petite fille. (Même jour)
Il me semble parfois que nous avons été très près l’un de l’autre, aussi près que deux hommes peuvent espérer de l’être, en temps de guerre pacifique. Je nous croyais fâchés, terme absurde dans une société aussi frivole. Je veux dire que je pensais que tu pouvais très bien te passer de mon affection, de mon attention, bref, de ma présence. Et je trouvais ça très naturel. Tant mieux qu’il n’en est rien. (Vingt janvier mil neuf cent cinquante-neuf)
De Gérard à Georges :
Bien que ce soit sans doute compliqué à envisager, viens. Je pourrais peut-être t’aider. (…/…)
Tu pourras te taire ou parler. (…/…)
Que le voyage ne soit pas une question, permets-moi de te l’offrir comme un caillou qu’on met dans une balance. (Vingt-trois août mil neuf cent cinquante-neuf)
Gérard Philippe meurt quelque mois plus tard, le vingt-cinq novembre mil neuf cent cinquante-neuf.
*
Plaisir à lire le Journal de Virginia Woolf. Elle va au suicide comme on va aux toilettes. (A «Chère Anne», dix-huit juillet mil neuf cent soixante-dix-sept)
*
Cette Correspondance (1946-1978) de Georges Perros avec Anne & Gérard Philipe est publiée par Finitude, préfacée par Jérôme Garcin et illustrée.
Le café présente un autre avantage. On y est seul, quoiqu’assisté. La vie est là, qui bouge, qui murmure, qui tisse ses mille et un réseaux. Cette situation retire tout romantisme, toute envie de cracher à la solitude, qui, bien portée, est le contraire de la sauvagerie. (Janvier mil neuf cent cinquante-trois)
On me demande souvent, dans les cafés où je vais boire un verre, où l’on parle cinéma, etc… si j’aime bien Gérard Ph. C’est très étrange. Un peu triste. Oui, ambigu. On est plusieurs ; quoiqu’infiniment seul, et l’on ne sait jamais auquel on s’adresse. (A «Mon petit Gérard», début février mil neuf cent cinquante-cinq)
Je suis très las –ça doit se sentir– peut-être à cause de la piqûre contre la variole, peut-être à cause d’une chute que j’ai faite en jouant à cache-cache avec une petite fille. (Même jour)
Il me semble parfois que nous avons été très près l’un de l’autre, aussi près que deux hommes peuvent espérer de l’être, en temps de guerre pacifique. Je nous croyais fâchés, terme absurde dans une société aussi frivole. Je veux dire que je pensais que tu pouvais très bien te passer de mon affection, de mon attention, bref, de ma présence. Et je trouvais ça très naturel. Tant mieux qu’il n’en est rien. (Vingt janvier mil neuf cent cinquante-neuf)
De Gérard à Georges :
Bien que ce soit sans doute compliqué à envisager, viens. Je pourrais peut-être t’aider. (…/…)
Tu pourras te taire ou parler. (…/…)
Que le voyage ne soit pas une question, permets-moi de te l’offrir comme un caillou qu’on met dans une balance. (Vingt-trois août mil neuf cent cinquante-neuf)
Gérard Philippe meurt quelque mois plus tard, le vingt-cinq novembre mil neuf cent cinquante-neuf.
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Plaisir à lire le Journal de Virginia Woolf. Elle va au suicide comme on va aux toilettes. (A «Chère Anne», dix-huit juillet mil neuf cent soixante-dix-sept)
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Cette Correspondance (1946-1978) de Georges Perros avec Anne & Gérard Philipe est publiée par Finitude, préfacée par Jérôme Garcin et illustrée.
3 décembre 2016
Comme chaque année, Rouen devient givrée à l’approche de Noël, cette fête pénible dont la Mairie fait un mélange d’opération commerciale (marché de Noël, magasins ouverts tous les dimanches) et de fête foraine (grande roue, manèges et patinoire), de quoi me donner l’envie de parcourir la ville le moins possible mais où se réfugier ?
Ce jeudi, je suis une nouvelle fois chassé de l’Ubi, lieu artistique mutualisé (où il y aura aussi bientôt un marché de Noël) mais cette fois c’est par le froid. Depuis que le faux plafond a été enlevé dans le but de refaire l’électricité, faire fonctionner le chauffage électrique n’augmente la température que d’un degré. Il reste donc éteint. Le radiateur d’appoint mis au plus près de moi par l’aimable Service Civique est inopérant. Au bout d’une heure, les doigts gourds, je dois partir avant d’être congelé (en un seul mot).
*
Fausse vraie surprise du jeudi soir : François Hollande annonce sa non candidature à la prochaine Présidentielle. C’était ça ou perdre d’une façon humiliante. La patate chaude est maintenant entre les mains de Manuel Valls, futur vaincu.
*
Fillon, qui lors des Primaires de la Droite (et du Centre), affirme avoir voté « toutes les lois qui ont permis l’accès à l’IVG ».
Vérification faite (un peu tardivement) par Le Monde :
Trente et un décembre mil neuf cent quatre-vingt-deux ; remboursement par l’Assurance-maladie. Il vote contre.
Vingt-sept janvier mil neuf cent quatre-vingt-treize : création du délit d’entrave à l’IVG. Il vote contre.
Quatre juillet deux mille un: allongement du délai à douze semaines de grossesse. Il vote contre.
Quatre août deux mille quatorze : suppression de la notion de détresse. Il s’abstient.
Vingt-six janvier deux mille seize : suppression du délai de réflexion. Il vote contre.
La seule fois où il a voté pour, c’est le vingt-six novembre deux mille quatorze, lors de l’adoption d’une « résolution réaffirmant le droit fondamental à l’IVG en France et en Europe », un texte purement formel.
François Fillon, possible futur Président de la République Française, est un menteur.
*
Valérie Fourneyron, députée de Rouen, Socialiste, est contente. La proposition de loi, qu’elle avait déposée avec quelques collègues, permettant aux médecins de prescrire à certains patients une activité physique adaptée par ordonnance, est adoptée. Une raison de plus pour ne pas aller chez le médecin.
Ce jeudi, je suis une nouvelle fois chassé de l’Ubi, lieu artistique mutualisé (où il y aura aussi bientôt un marché de Noël) mais cette fois c’est par le froid. Depuis que le faux plafond a été enlevé dans le but de refaire l’électricité, faire fonctionner le chauffage électrique n’augmente la température que d’un degré. Il reste donc éteint. Le radiateur d’appoint mis au plus près de moi par l’aimable Service Civique est inopérant. Au bout d’une heure, les doigts gourds, je dois partir avant d’être congelé (en un seul mot).
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Fausse vraie surprise du jeudi soir : François Hollande annonce sa non candidature à la prochaine Présidentielle. C’était ça ou perdre d’une façon humiliante. La patate chaude est maintenant entre les mains de Manuel Valls, futur vaincu.
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Fillon, qui lors des Primaires de la Droite (et du Centre), affirme avoir voté « toutes les lois qui ont permis l’accès à l’IVG ».
Vérification faite (un peu tardivement) par Le Monde :
Trente et un décembre mil neuf cent quatre-vingt-deux ; remboursement par l’Assurance-maladie. Il vote contre.
Vingt-sept janvier mil neuf cent quatre-vingt-treize : création du délit d’entrave à l’IVG. Il vote contre.
Quatre juillet deux mille un: allongement du délai à douze semaines de grossesse. Il vote contre.
Quatre août deux mille quatorze : suppression de la notion de détresse. Il s’abstient.
Vingt-six janvier deux mille seize : suppression du délai de réflexion. Il vote contre.
La seule fois où il a voté pour, c’est le vingt-six novembre deux mille quatorze, lors de l’adoption d’une « résolution réaffirmant le droit fondamental à l’IVG en France et en Europe », un texte purement formel.
François Fillon, possible futur Président de la République Française, est un menteur.
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Valérie Fourneyron, députée de Rouen, Socialiste, est contente. La proposition de loi, qu’elle avait déposée avec quelques collègues, permettant aux médecins de prescrire à certains patients une activité physique adaptée par ordonnance, est adoptée. Une raison de plus pour ne pas aller chez le médecin.
2 décembre 2016
Sorti de chez New New, ce mercredi vers treize heures, j’entre au Centre Pompidou et descends au niveau Moins Un où se tient en accès gratuit une exposition consacrée aux photos de graffiti prises par Brassaï à partir des années trente, la plupart de ceux-ci ayant été faits par grattage de la pierre tendre. Ce n’est pas ce que je préfère de Brassai mais l’ensemble ne manque pas d’intérêt.
Je monte ensuite par la chenille au niveau Six où c’est le premier jour de l’exposition Cy Twombly. Aucune difficulté pour avoir un regard individuel sur les œuvres, lesquelles sont toutes de grandes dimensions, car les visiteurs sont peu nombreux. La plupart parlent anglais ou japonais, je ne peux savoir ce qu’ils en pensent.
En ce qui me concerne, confirmant l’impression que j’ai eue aux Etats-Unis, les gribouillis de Cy Twombly m’ennuient. Je passe plus de temps à observer les toits de Paris et ses monuments lointains dans la lumière blanche sur fond de ciel bleu que les toiles de l’artiste américain. Néanmoins, les dernières me plaisent un peu, plus colorées et rappelant vaguement le Monet des Nymphéas.
La ligne Quatorze du métro étant en panne depuis le matin suite à un gros problème électrique, c’est avec le Sept que j’atteins le quartier de l’Opéra Garnier. Après avoir cherché sans grand succès de quoi me plaire chez Book-Off, je passe par Chez Léon où un trio discute d’un ancien collègue de travail :
-Je pense qu’humainement, c’était un gros con, un vrai salaud.
A la gare Saint-Lazare, c’est encore soir de pagaille, trains supprimés et trains non encore à quai. Celui de dix-huit heures trente est là et part au moment indiqué mais très vite (si je puis dire) il perd vingt minutes sur son horaire officiel « suite à différents retards affectant les trains précédents ».
*
A partir du premier décembre, tous les trains en retard de plus de trente minutes, qu’elle en soit responsable ou non, donneront droit à un dédommagement partiel de la Senecefe sous forme de bon d’achat. Quand on regarde ça de près, on apprend que les trains sous l’autorité de la Région ne sont pas concernés et en Normandie, ils le seront bientôt tous, selon le vœu de Monsieur le Duc, Hervé Morin. Centriste de Droite.
*
Les suicides (immobilisation du train entre deux et trois heures) vont coûter cher à la Senecefe (remboursement de la moitié du prix du billet). Je vois venir le jour où elle voudra rentrer dans ses frais en préemptant l’héritage du défunt (s’il y en a un).
*
Mécontents, les agents Senecefe de la gare Saint-Lazare, raconte Le Parisien, suite à la découverte d’un ficher rédigé par un responsable lors d’une passation de pouvoir avec son successeur, dans lequel ils ont décrits par ces mots : «roi de l’embrouille», «stupide», «vient du fin fond de la campagne», «détesté par l’équipe». «cafte les autres », «un peu conne», «fêtard»,. «racaille bas de plafond». Plates excuses de la Direction ont été faites.
*
Quand même, ce serait bien de surveiller celui-ci : «prière au local... sans gêne pour les autres».
Je monte ensuite par la chenille au niveau Six où c’est le premier jour de l’exposition Cy Twombly. Aucune difficulté pour avoir un regard individuel sur les œuvres, lesquelles sont toutes de grandes dimensions, car les visiteurs sont peu nombreux. La plupart parlent anglais ou japonais, je ne peux savoir ce qu’ils en pensent.
En ce qui me concerne, confirmant l’impression que j’ai eue aux Etats-Unis, les gribouillis de Cy Twombly m’ennuient. Je passe plus de temps à observer les toits de Paris et ses monuments lointains dans la lumière blanche sur fond de ciel bleu que les toiles de l’artiste américain. Néanmoins, les dernières me plaisent un peu, plus colorées et rappelant vaguement le Monet des Nymphéas.
La ligne Quatorze du métro étant en panne depuis le matin suite à un gros problème électrique, c’est avec le Sept que j’atteins le quartier de l’Opéra Garnier. Après avoir cherché sans grand succès de quoi me plaire chez Book-Off, je passe par Chez Léon où un trio discute d’un ancien collègue de travail :
-Je pense qu’humainement, c’était un gros con, un vrai salaud.
A la gare Saint-Lazare, c’est encore soir de pagaille, trains supprimés et trains non encore à quai. Celui de dix-huit heures trente est là et part au moment indiqué mais très vite (si je puis dire) il perd vingt minutes sur son horaire officiel « suite à différents retards affectant les trains précédents ».
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A partir du premier décembre, tous les trains en retard de plus de trente minutes, qu’elle en soit responsable ou non, donneront droit à un dédommagement partiel de la Senecefe sous forme de bon d’achat. Quand on regarde ça de près, on apprend que les trains sous l’autorité de la Région ne sont pas concernés et en Normandie, ils le seront bientôt tous, selon le vœu de Monsieur le Duc, Hervé Morin. Centriste de Droite.
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Les suicides (immobilisation du train entre deux et trois heures) vont coûter cher à la Senecefe (remboursement de la moitié du prix du billet). Je vois venir le jour où elle voudra rentrer dans ses frais en préemptant l’héritage du défunt (s’il y en a un).
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Mécontents, les agents Senecefe de la gare Saint-Lazare, raconte Le Parisien, suite à la découverte d’un ficher rédigé par un responsable lors d’une passation de pouvoir avec son successeur, dans lequel ils ont décrits par ces mots : «roi de l’embrouille», «stupide», «vient du fin fond de la campagne», «détesté par l’équipe». «cafte les autres », «un peu conne», «fêtard»,. «racaille bas de plafond». Plates excuses de la Direction ont été faites.
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Quand même, ce serait bien de surveiller celui-ci : «prière au local... sans gêne pour les autres».
1er décembre 2016
Une lueur rouge au-dessus de Paris annonce une belle journée mais froide pour le dernier jour de ce mois de novembre que j’ai réussi à traverser sans trop d’idées noires. A l’arrivée à Saint-Lazare, le sept heures vingt-huit n’a que cinq minutes de retard, suite à un arrêt inattendu à Villennes-sur-Seine en raison d’une signalisation défectueuse.
Dans le bus Vingt, une jeune femme brune réussit à se mettre du rouge à lèvres tout en évitant que l’étui de son violoncelle chute à chaque freinage. Elle descend à l’Opéra Bastille et je fais de même. Au Café du Faubourg, mon voisin de comptoir lit Le Canard Enchaîné « Valls tragique à l’Elysée, au moins un mort ». Après un passage chez Book-Off, j’achète deux euros au marché d’Aligre un exemplaire de Proust et Céleste de Christian Péchenard (La Table Ronde) portant, collé en page de garde, l’avis de décès de son auteur, avocat à la cour, survenu le vingt-neuf août mil neuf cent quatre-vingt-seize à Montpellier à l’âge de soixante-six ans. Au stand voisin, les vêtements à vendre sont couverts de givre. Moins quatre cette nuit, dit-on ici et là.
Je brave la froidure à pied jusqu’à Beaubourg et entre à la Galerie Templon qui fête cette année ses cinquante ans. J’ai appris à cette occasion qu’avant d’ouvrir sa première galerie, rue Bonaparte, Daniel Templon fut instituteur à Nanterre. J’y visite l’exposition Pirate Heart de Francesco Clemente, une série de tableaux de petit format consacrée à l’amour, où dominent le rose et le bleu ciel. Certains sont agrémentés d’empreintes digitales façon école maternelle. Des peintures assez anodines, sauf une qui représente une bite dans laquelle est fiché un fanion triangulaire, ça saigne et ça fait mal.
La rue Beaubourg traversée, je déjeune chinois à volonté chez New New. Près de moi, un trentenaire mange machinalement, le visage collé sur Le Figaro dont chaque page est illustrée d’une tête de Fillon. J’ai l’impression que les photos de son champion le font bander. On pourrait lui planter un petit drapeau tricolore.
Dans le bus Vingt, une jeune femme brune réussit à se mettre du rouge à lèvres tout en évitant que l’étui de son violoncelle chute à chaque freinage. Elle descend à l’Opéra Bastille et je fais de même. Au Café du Faubourg, mon voisin de comptoir lit Le Canard Enchaîné « Valls tragique à l’Elysée, au moins un mort ». Après un passage chez Book-Off, j’achète deux euros au marché d’Aligre un exemplaire de Proust et Céleste de Christian Péchenard (La Table Ronde) portant, collé en page de garde, l’avis de décès de son auteur, avocat à la cour, survenu le vingt-neuf août mil neuf cent quatre-vingt-seize à Montpellier à l’âge de soixante-six ans. Au stand voisin, les vêtements à vendre sont couverts de givre. Moins quatre cette nuit, dit-on ici et là.
Je brave la froidure à pied jusqu’à Beaubourg et entre à la Galerie Templon qui fête cette année ses cinquante ans. J’ai appris à cette occasion qu’avant d’ouvrir sa première galerie, rue Bonaparte, Daniel Templon fut instituteur à Nanterre. J’y visite l’exposition Pirate Heart de Francesco Clemente, une série de tableaux de petit format consacrée à l’amour, où dominent le rose et le bleu ciel. Certains sont agrémentés d’empreintes digitales façon école maternelle. Des peintures assez anodines, sauf une qui représente une bite dans laquelle est fiché un fanion triangulaire, ça saigne et ça fait mal.
La rue Beaubourg traversée, je déjeune chinois à volonté chez New New. Près de moi, un trentenaire mange machinalement, le visage collé sur Le Figaro dont chaque page est illustrée d’une tête de Fillon. J’ai l’impression que les photos de son champion le font bander. On pourrait lui planter un petit drapeau tricolore.
30 novembre 2016
Rangement ces jours-ci de quelques-uns des livres lus en cet été deux mille seize. Il y a là matière à citations.
De Bill Bryson, Motel blues (Petite Bibliothèque Payot) :
Au milieu de la place il y a un jardin public avec de gros arbres, un kiosque à musique, un mât avec le drapeau américain et des bancs un peu partout. Une bande de vieux à casquette John Deere y parlent du temps où ils avaient autre chose à faire qu’à rester assis à parler du temps où ils avaient autre chose à faire.
De Thomas Mann, Traversée avec Don Quichotte (Complexe) :
La critique de la traduction comme genre littéraire que Cervantès met dans la bouche de Don Quichotte ne saurait être dépassée. Il a l’impression, dit-il, que quand on traduit d’une langue dans une autre, c’est comme si on regardait des tapisseries flamandes du mauvais côté.
Dans Alexandre Najar, Le procureur de l’Empire (Ernest Pinard, l’homme qui persécuta Baudelaire, Flaubert, Sue…) (Balland), deux extraits de lettres de Gustave à son frère Achille :
J’attends de minute en minute le papier timbré qui m’indiquera le jour où je dois aller m’asseoir (pour crime d’avoir écrit en français) sur le banc des filous et des pédérastes.
Tu verras, du reste, tous les débats, mot pour mot, parce que j’avais à moi (à raison de 60 francs de l’heure) un sténographe qui a tout pris.
De Samuel Brussel, Soliloques de l’exil (Grasset)
Ceci :
« Que faire ? » demanda un jeune Pétersbourgeois exalté.
« Voilà ce qu’il faut faire : quand c’est l’été, cueillir des framboises pour faire des confitures ; quand c’est l’hiver, boire du thé à la confiture de framboises. »
Et cela :
« Si l’on veut que tout reste comme avant, il faudra faire de grands changements » : cette citation historique du roman de Giuseppe Tomasi di Lampedusa, je la redécouvre à chaque pas, dans la ville barbouillée de manifestes électoraux.
D’Isaac Schœnberg à sa fiancée Chana, le quinze décembre mil neuf cent quarante et un, parmi les Lettres de Drancy (Tallandier) :
La personne, Khanouchi, qui vit à Paris, libre, et croit faire un trait d’esprit quand il dit qu’il envie les juifs à Pithiviers, cette personne-là n’a pas idée de ce qui s’appelle vivre dans un camp, même si c’est un camp « modèle » comme on nomme celui de Pithiviers, avec de belles baraques modèles, de la paille modèle et même de la boue modèle, sans parler des personnes modèles et de leur éducation modèle.
*
Ai également lu Une histoire des haines d’écrivains de Chateaubriand à Proust d’Anne Boquel et Etienne Kern (Champs/Flammarion), un ouvrage globalement décevant. Je n’y ai rien appris de nouveau sur les inimitiés féroces entre ces gens de même activité.
Et puis aussi Cinq années de ma vie, la correspondance avec sa femme et le journal d’Alfred Dreyfus (La Découverte), une lecture impressionnante dont je ne donne aucune citation. Quel courage il fallu à cet homme pour supporter, en plus de l’accusation mensongère, les mauvais traitements subis en captivité.
De Bill Bryson, Motel blues (Petite Bibliothèque Payot) :
Au milieu de la place il y a un jardin public avec de gros arbres, un kiosque à musique, un mât avec le drapeau américain et des bancs un peu partout. Une bande de vieux à casquette John Deere y parlent du temps où ils avaient autre chose à faire qu’à rester assis à parler du temps où ils avaient autre chose à faire.
De Thomas Mann, Traversée avec Don Quichotte (Complexe) :
La critique de la traduction comme genre littéraire que Cervantès met dans la bouche de Don Quichotte ne saurait être dépassée. Il a l’impression, dit-il, que quand on traduit d’une langue dans une autre, c’est comme si on regardait des tapisseries flamandes du mauvais côté.
Dans Alexandre Najar, Le procureur de l’Empire (Ernest Pinard, l’homme qui persécuta Baudelaire, Flaubert, Sue…) (Balland), deux extraits de lettres de Gustave à son frère Achille :
J’attends de minute en minute le papier timbré qui m’indiquera le jour où je dois aller m’asseoir (pour crime d’avoir écrit en français) sur le banc des filous et des pédérastes.
Tu verras, du reste, tous les débats, mot pour mot, parce que j’avais à moi (à raison de 60 francs de l’heure) un sténographe qui a tout pris.
De Samuel Brussel, Soliloques de l’exil (Grasset)
Ceci :
« Que faire ? » demanda un jeune Pétersbourgeois exalté.
« Voilà ce qu’il faut faire : quand c’est l’été, cueillir des framboises pour faire des confitures ; quand c’est l’hiver, boire du thé à la confiture de framboises. »
Et cela :
« Si l’on veut que tout reste comme avant, il faudra faire de grands changements » : cette citation historique du roman de Giuseppe Tomasi di Lampedusa, je la redécouvre à chaque pas, dans la ville barbouillée de manifestes électoraux.
D’Isaac Schœnberg à sa fiancée Chana, le quinze décembre mil neuf cent quarante et un, parmi les Lettres de Drancy (Tallandier) :
La personne, Khanouchi, qui vit à Paris, libre, et croit faire un trait d’esprit quand il dit qu’il envie les juifs à Pithiviers, cette personne-là n’a pas idée de ce qui s’appelle vivre dans un camp, même si c’est un camp « modèle » comme on nomme celui de Pithiviers, avec de belles baraques modèles, de la paille modèle et même de la boue modèle, sans parler des personnes modèles et de leur éducation modèle.
*
Ai également lu Une histoire des haines d’écrivains de Chateaubriand à Proust d’Anne Boquel et Etienne Kern (Champs/Flammarion), un ouvrage globalement décevant. Je n’y ai rien appris de nouveau sur les inimitiés féroces entre ces gens de même activité.
Et puis aussi Cinq années de ma vie, la correspondance avec sa femme et le journal d’Alfred Dreyfus (La Découverte), une lecture impressionnante dont je ne donne aucune citation. Quel courage il fallu à cet homme pour supporter, en plus de l’accusation mensongère, les mauvais traitements subis en captivité.
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