Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
29 juin 2020
La catastrophe va tranquillement son chemin. On est maintenant sûr de deux choses : pas de traitement contre ce coronavius, pas de disparition estivale. Pour le vaccin, on verra plus tard, peut-être.
Bref, il est urgent de bouger avant de se trouver à nouveau confiné ou, pire, malade. Plus que les autres années, j’ai à l’esprit que cet été pourrait pour moi être le dernier. Cette semaine a des allures de compte à rebours. Dans ma tête, ma valise est déjà faite.
Je passe les matins au jardin où règne en ce moment une calme monacal, La nouvelle voisine, installée dans le studio rénové du rez-de-chaussée est fort discrète, au point que je ne sais jamais si elle est là ou non. Elle a installé une petite table à l’extérieur et laisse aller son chat à sa guise, ne se doutant pas que dans une dizaine de jours, si toutefois la situation ne leur interdit pas de venir du lointain endroit où ils sont, vont débouler Abrutus et Aboyus.
En début d’après-midi, je suis à ma table habituelle au Son du Cor où le poids de l’air est un peu atténué par le vent coulis qui remonte la rue Eau-de-Robec. J’y lis Elégance des temps endormis du Vicomte de Lascano-Tegui dans l’excellente traduction de Francis de Miomandre, un petit livre réédité au Dilettante, découvert autrefois parmi ceux à un euro de Book-Off. Avant que le hasard ne me le mette entre les mains, jamais je n’avais entendu parler de ce texte en forme de journal, ni de son auteur. J’y fais une moisson d’extraits sur lesquels je reviendrai lorsque je reviendrai.
Ce samedi, averti la veille par mail de l’arrivée de mes lunettes chez les Opticiens Mutualistes, je m’y présente à neuf heures et bien que je n’aie pas rendez-vous, l’affaire est vite faite. De retour à la maison, je me débarrasse de mon masque et ressors pour aller à la Poste de la rue de la Jeanne où l’aimable vigile refuse de me laisser entrer.
Ne voilà-t-il pas que seulement maintenant, fin juin donc, on y a rendu le masque obligatoire. Plus qu’à retourner le chercher. De retour sur place, je constate que ce service public a aussi installé des parois de plexiglas entre les automates, lesquels sont distants de moins d’un mètre ; jusqu’à présent, cela ne posait pas problème.
*
Quinze heures au Café du Philosophe. Un couple entre pour un déjeuner tardif. Lui commande un Ricard, un œuf à la parisienne et un fish and chips. Pas forcément ce à quoi je m’attendais de la part d’un dirigeant national d’Europe Ecologie Les Verts.
*
Tiré d’Elégance des temps endormis du Vicomte de Lascano-Tegui :
Deux janvier mil huit cent… : La vie, c’est le triomphe du fœtus. Naître est son but. La mort ne lui apparaît pas encore, dans ses neuf mois de réflexion comme la tragédie qu’elle représente pour les philosophes chrétiens. On ne pense à rien dans les salles d’attente.
Seize janvier mil huit cent… : Les écrivains exagèrent lorsqu’ils tuent les acteurs de leurs romans dans une catastrophe, un incendie ou un crime. Ils ne croient donc pas à la lente asphyxie des jours monotones.
Bref, il est urgent de bouger avant de se trouver à nouveau confiné ou, pire, malade. Plus que les autres années, j’ai à l’esprit que cet été pourrait pour moi être le dernier. Cette semaine a des allures de compte à rebours. Dans ma tête, ma valise est déjà faite.
Je passe les matins au jardin où règne en ce moment une calme monacal, La nouvelle voisine, installée dans le studio rénové du rez-de-chaussée est fort discrète, au point que je ne sais jamais si elle est là ou non. Elle a installé une petite table à l’extérieur et laisse aller son chat à sa guise, ne se doutant pas que dans une dizaine de jours, si toutefois la situation ne leur interdit pas de venir du lointain endroit où ils sont, vont débouler Abrutus et Aboyus.
En début d’après-midi, je suis à ma table habituelle au Son du Cor où le poids de l’air est un peu atténué par le vent coulis qui remonte la rue Eau-de-Robec. J’y lis Elégance des temps endormis du Vicomte de Lascano-Tegui dans l’excellente traduction de Francis de Miomandre, un petit livre réédité au Dilettante, découvert autrefois parmi ceux à un euro de Book-Off. Avant que le hasard ne me le mette entre les mains, jamais je n’avais entendu parler de ce texte en forme de journal, ni de son auteur. J’y fais une moisson d’extraits sur lesquels je reviendrai lorsque je reviendrai.
Ce samedi, averti la veille par mail de l’arrivée de mes lunettes chez les Opticiens Mutualistes, je m’y présente à neuf heures et bien que je n’aie pas rendez-vous, l’affaire est vite faite. De retour à la maison, je me débarrasse de mon masque et ressors pour aller à la Poste de la rue de la Jeanne où l’aimable vigile refuse de me laisser entrer.
Ne voilà-t-il pas que seulement maintenant, fin juin donc, on y a rendu le masque obligatoire. Plus qu’à retourner le chercher. De retour sur place, je constate que ce service public a aussi installé des parois de plexiglas entre les automates, lesquels sont distants de moins d’un mètre ; jusqu’à présent, cela ne posait pas problème.
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Quinze heures au Café du Philosophe. Un couple entre pour un déjeuner tardif. Lui commande un Ricard, un œuf à la parisienne et un fish and chips. Pas forcément ce à quoi je m’attendais de la part d’un dirigeant national d’Europe Ecologie Les Verts.
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Tiré d’Elégance des temps endormis du Vicomte de Lascano-Tegui :
Deux janvier mil huit cent… : La vie, c’est le triomphe du fœtus. Naître est son but. La mort ne lui apparaît pas encore, dans ses neuf mois de réflexion comme la tragédie qu’elle représente pour les philosophes chrétiens. On ne pense à rien dans les salles d’attente.
Seize janvier mil huit cent… : Les écrivains exagèrent lorsqu’ils tuent les acteurs de leurs romans dans une catastrophe, un incendie ou un crime. Ils ne croient donc pas à la lente asphyxie des jours monotones.
26 juin 2020
D’Ecrits et correspondances de Franz Marc, publié par l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts, payé cinq euros avant-guerre chez Book-Off, j’ai sauté beaucoup de pages car sont très souvent abordées des questions relatives à la peinture, ce qui ne m’intéresse pas assez pour que je m’y arrête.
Ce qui a retenu mon attention est le récit en français du grand voyage que fit Franz Marc du dix-huit mai au vingt-six septembre mil neuf cent trois, accompagné de Friedrich Lauer qui finançait l’expédition,
Après avoir visité Paris et Versailles (avec excursion à Chartres), les Châteaux de la Loire, Angers, Nantes, Auray, Carnac, Quimperlé, Quimper, Douarnenez, Audierne, la Pointe du Raz, Brest, Saint-Malo, Dinard, le Mont-Saint-Michel, Guingamp, Concarneau, Pont-l’Abbé, Douarnenez encore, Ploërmel, être repassé à Paris, y avoir eu une aventure avec la jeune Marie qu’il nomme Petite chocolatière, il met le cap sur la Normandie :
Samedi douze septembre mil neuf cent trois : nos adieux à Paris, le matin encore dans la laiterie, moi plus tard je me promenais. Dames emballait. A 1h25 nous partîmes pour Le Havre. Petite chocolatière et Mme Devaux montaient dans notre voiture, adieux à la gare Saint-Lazare. Petite chocolatière voulait nous accompagner à Rouen ! Nos cœurs attristés. Le Havre Hôtel Frascati, ne vaut pas celui de Paris, premier Hôtel de Havre.
Dimanche : le matin visité La Lorraine (Le Havre-New York) le soir à Rouen, même attristement dans nos cœurs, le soir au théâtre (Blanchette, par Brieux, une pièce populaire trop française). L’anglais tel qu’on le parle, très gai – de la musique et de l’entrain dans la ville. Le tout d’une étrange vivacité. Hôtel de France, très bon et agréable.
Lundi et mardi : à Rouen. Les cathédrales, magnifiques vitres. Les pâtisseries de Rouen ! mardi soir sur la colline de Bonsecours ; monument (par Barrias) de la Jeanne d’Arc. Vue sur Rouen ! atmosphère de fête. Le musée de Rouen contient 2 Corot et un superbe portrait par J.F. Millet (un officier).
Sa dernière étape française (avant un passage à Bruxelles, Anvers, Cologne, Heidelberg, puis le retour à Munich) est Amiens :
Mercredi quatorze septembre mil neuf cent trois : à Amiens. Hôtel de France et d’Angleterre, cher et délabré, mauvais repas. L’immense et belle cathédrale. Beau musée (Frz Hals).
à la basse-ville, un petit Venise (aussi sale et puante, mais pittoresque comme quelques coins perdus de Venise.)
*
Le dernier voyage de Franz Marc en France, il le fera comme engagé volontaire dans l’armée allemande et y mourra d’un éclat d’obus le quatre mars mil neuf cent seize à Braquis près de Verdun âgé de trente-six ans.
Ce qui a retenu mon attention est le récit en français du grand voyage que fit Franz Marc du dix-huit mai au vingt-six septembre mil neuf cent trois, accompagné de Friedrich Lauer qui finançait l’expédition,
Après avoir visité Paris et Versailles (avec excursion à Chartres), les Châteaux de la Loire, Angers, Nantes, Auray, Carnac, Quimperlé, Quimper, Douarnenez, Audierne, la Pointe du Raz, Brest, Saint-Malo, Dinard, le Mont-Saint-Michel, Guingamp, Concarneau, Pont-l’Abbé, Douarnenez encore, Ploërmel, être repassé à Paris, y avoir eu une aventure avec la jeune Marie qu’il nomme Petite chocolatière, il met le cap sur la Normandie :
Samedi douze septembre mil neuf cent trois : nos adieux à Paris, le matin encore dans la laiterie, moi plus tard je me promenais. Dames emballait. A 1h25 nous partîmes pour Le Havre. Petite chocolatière et Mme Devaux montaient dans notre voiture, adieux à la gare Saint-Lazare. Petite chocolatière voulait nous accompagner à Rouen ! Nos cœurs attristés. Le Havre Hôtel Frascati, ne vaut pas celui de Paris, premier Hôtel de Havre.
Dimanche : le matin visité La Lorraine (Le Havre-New York) le soir à Rouen, même attristement dans nos cœurs, le soir au théâtre (Blanchette, par Brieux, une pièce populaire trop française). L’anglais tel qu’on le parle, très gai – de la musique et de l’entrain dans la ville. Le tout d’une étrange vivacité. Hôtel de France, très bon et agréable.
Lundi et mardi : à Rouen. Les cathédrales, magnifiques vitres. Les pâtisseries de Rouen ! mardi soir sur la colline de Bonsecours ; monument (par Barrias) de la Jeanne d’Arc. Vue sur Rouen ! atmosphère de fête. Le musée de Rouen contient 2 Corot et un superbe portrait par J.F. Millet (un officier).
Sa dernière étape française (avant un passage à Bruxelles, Anvers, Cologne, Heidelberg, puis le retour à Munich) est Amiens :
Mercredi quatorze septembre mil neuf cent trois : à Amiens. Hôtel de France et d’Angleterre, cher et délabré, mauvais repas. L’immense et belle cathédrale. Beau musée (Frz Hals).
à la basse-ville, un petit Venise (aussi sale et puante, mais pittoresque comme quelques coins perdus de Venise.)
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Le dernier voyage de Franz Marc en France, il le fera comme engagé volontaire dans l’armée allemande et y mourra d’un éclat d’obus le quatre mars mil neuf cent seize à Braquis près de Verdun âgé de trente-six ans.
25 juin 2020
La Métropole de Rouen, dirigée par les Socialistes et leurs alliés Ecologistes, a entrepris de détruire, sans étude préalable, soixante hectares de la forêt du Madrillet pour construire des bâtiments universitaires. J’ai signé la pétition contre, mais ne suis pas allé à la manifestation. On y scandait un slogan inepte : « Tout le monde déteste le béton ». J’aime le béton, mais pas n’importe où.
L’un de ma connaissance résume la situation ainsi :
« Heureusement que c'est l'alliance socialo - écolo qui va prendre la tête de la Métropole » dit l'un .... « Mais ils y sont déjà depuis très longtemps » répond l'autre .... « Oui mais les nouveaux sont plus verts foncés que les anciens » rétorque le premier .... « Alors tout va s'arranger » consent le second .....
C’est exactement ça. Voter pour eux serait une aberration. Voter pour les autres aussi.
J’ai reçu depuis un moment le matériel dont je ne me servirai pas.
Sur le visuel de la liste de Droite, Jean-François Bures figure en compagnie de son alliée du Centre, Marine Caron, avec un peu de vert évocateur entre les deux.
Sur le visuel de la liste de Gauche, Nicolas Meyer-Rossignol est tout seul, comme s’il voulait faire oublier son allié écolo Jean-Michel Bérégovoy.
Il faut dire aussi que Meyer-Rossignol et Bérégovoy côte-à-côte, c’est un peu Monsieur le Directeur avec son jardinier.
L’un de ma connaissance résume la situation ainsi :
« Heureusement que c'est l'alliance socialo - écolo qui va prendre la tête de la Métropole » dit l'un .... « Mais ils y sont déjà depuis très longtemps » répond l'autre .... « Oui mais les nouveaux sont plus verts foncés que les anciens » rétorque le premier .... « Alors tout va s'arranger » consent le second .....
C’est exactement ça. Voter pour eux serait une aberration. Voter pour les autres aussi.
J’ai reçu depuis un moment le matériel dont je ne me servirai pas.
Sur le visuel de la liste de Droite, Jean-François Bures figure en compagnie de son alliée du Centre, Marine Caron, avec un peu de vert évocateur entre les deux.
Sur le visuel de la liste de Gauche, Nicolas Meyer-Rossignol est tout seul, comme s’il voulait faire oublier son allié écolo Jean-Michel Bérégovoy.
Il faut dire aussi que Meyer-Rossignol et Bérégovoy côte-à-côte, c’est un peu Monsieur le Directeur avec son jardinier.
24 juin 2020
Une envie d’aller à Dieppe ou au Havre, vu le beau temps, mais non suivie d’effet par la perspective d’un voyage masqué, me conduit ce lundi matin à faire le touriste à la terrasse de la Brasserie Paul. Le café est à un euro quatre-vingt-dix, vue imprenable sur la Cathédrale.
Quand même entre ce magnifique édifice et moi s’épanouissent des conteneurs à ordures enterrés dont dépassent les bouches avides. Des femmes et des hommes se succèdent pour en nourrir une de leurs bouteilles bues. Le verre en se fracassant les dénonce et me fait lever la tête de ma lecture, Les deux bouts d’Henri Calet, que je fais durer.
Les deux bouts sont ceux que n’arrivent pas à joindre des hommes et des femmes de Paris et banlieue dont Calet fit les portraits d’un ton empreint de désespoir narquois pour Le Parisien Libéré à partir de février mil neuf cent cinquante-trois. Gallimard les publia un an plus tard, deux ans avant la mort de l’auteur. Cet ouvrage a heureusement été réédité en deux mille seize par l’éditeur suisse Héros-Limite.
Dans ces femmes et hommes qu’il choisissait au hasard de ses pérégrinations (sauf le couple de retraités vivant dans la misère du dernier portrait, dont on apprend à la fin qu’il s’agit de ses propres parents), voici mon prélèvement :
Odette Ruet n’a que 16 ans et demi. Elle semblait égarée dans la cohue des Grands Boulevards ; c’était un lundi, elle sortait du cinéma.
-Je vais sur mes 17 ans, m’a-t-elle dit.
Le lendemain, nous nous retrouvions dans l’arrière-boutique des Fermes Sarthoises, une crémerie de la rue Jean-Jaurès, où elle travaille. (…)
Mme Roquet est à la caisse vitrée. Odette s’habille en blanc, le tablier marqué « Roquet » est seul fourni. Et c’est la vente jusqu’à midi et demi. Lait en bouteille ou à la bassine, beurre demi-sel ou laitier.
-Les clientes préfèrent le beurre au poids, elles trouvent qu’il a plus de volume. (…)
Je lui ai demandé de me dire à quoi elle aspirait :
-Réussir dans mon travail. Acheter un petit fonds, plus tard, à Paris.
Très bien. Des crémières, il en faut. Et que pensait-elle du mariage ?
*
Tout de même que le futur époux. Ce « Tout de même que » est employé pour « Comme » par Calet à plusieurs reprises.
*
Sur ce qu’on appelle les réseaux sociaux, beaucoup condamnent les jeunes gens dansant en masse dans une rue parisienne le soir de la Fête de la Musique.
Des jeunes qui ont envie de vivre, rien de plus. S’ils sont malades du Covid par la suite, ce sera sans conséquence pour eux. Et il faut bien qu’il y ait de plus en plus de malades pour atteindre l’immunité collective (si ça fonctionne). J’en côtoie d’autres pas plus raisonnables au Café du Philosophe. Je prends des risques, c’est certain.
L’une de mes jeunes voisines à sa copine :
-Tu fais quoi ce soir ?
-Bah je sais pas, je vais peut-être boire un verre avec ma sœur et ma cousine. Pas ma cousine grosse moche. L’autre.
*
Un vieux qui s’est bien amusé le soir de la Fête de la Musique, c’est Patrick Balkany, que l’on a filmé dansant avec son pull rose dans les rues de Levallois. De quoi exciter les toujours indigné(e)s « C’est une honte » « Je vais vomir ».
J’adore ce type, ayant une faiblesse pour les escrocs flamboyants. Alors que je ne supporte pas ceux du genre faux cul, comme Fillon.
Okay pour une soirée avec les Balkany au Moulin de Giverny mais pour rien au monde avec les Fillon au Manoir de Beaucé.
*
Examen d’économie à distance au Café du Philosophe, le professeur interroge l’élève via l’ordinateur. Ce dernier a près de lui un autre élève qui à la vitesse de l’éclair trouve sur son téléphone les réponses aux questions posées sans être vu par la caméra. Le regard toujours tourné vers la gauche de l’interrogé pourrait le dénoncer, mais il fait ça bien, jouant avec talent celui qui hésite et réfléchit en laissant errer ses yeux.
-Bon là c’est sûr, j’ai au moins le dix dont j’ai besoin, commente-t-il à la fin de son épreuve.
Quand même entre ce magnifique édifice et moi s’épanouissent des conteneurs à ordures enterrés dont dépassent les bouches avides. Des femmes et des hommes se succèdent pour en nourrir une de leurs bouteilles bues. Le verre en se fracassant les dénonce et me fait lever la tête de ma lecture, Les deux bouts d’Henri Calet, que je fais durer.
Les deux bouts sont ceux que n’arrivent pas à joindre des hommes et des femmes de Paris et banlieue dont Calet fit les portraits d’un ton empreint de désespoir narquois pour Le Parisien Libéré à partir de février mil neuf cent cinquante-trois. Gallimard les publia un an plus tard, deux ans avant la mort de l’auteur. Cet ouvrage a heureusement été réédité en deux mille seize par l’éditeur suisse Héros-Limite.
Dans ces femmes et hommes qu’il choisissait au hasard de ses pérégrinations (sauf le couple de retraités vivant dans la misère du dernier portrait, dont on apprend à la fin qu’il s’agit de ses propres parents), voici mon prélèvement :
Odette Ruet n’a que 16 ans et demi. Elle semblait égarée dans la cohue des Grands Boulevards ; c’était un lundi, elle sortait du cinéma.
-Je vais sur mes 17 ans, m’a-t-elle dit.
Le lendemain, nous nous retrouvions dans l’arrière-boutique des Fermes Sarthoises, une crémerie de la rue Jean-Jaurès, où elle travaille. (…)
Mme Roquet est à la caisse vitrée. Odette s’habille en blanc, le tablier marqué « Roquet » est seul fourni. Et c’est la vente jusqu’à midi et demi. Lait en bouteille ou à la bassine, beurre demi-sel ou laitier.
-Les clientes préfèrent le beurre au poids, elles trouvent qu’il a plus de volume. (…)
Je lui ai demandé de me dire à quoi elle aspirait :
-Réussir dans mon travail. Acheter un petit fonds, plus tard, à Paris.
Très bien. Des crémières, il en faut. Et que pensait-elle du mariage ?
*
Tout de même que le futur époux. Ce « Tout de même que » est employé pour « Comme » par Calet à plusieurs reprises.
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Sur ce qu’on appelle les réseaux sociaux, beaucoup condamnent les jeunes gens dansant en masse dans une rue parisienne le soir de la Fête de la Musique.
Des jeunes qui ont envie de vivre, rien de plus. S’ils sont malades du Covid par la suite, ce sera sans conséquence pour eux. Et il faut bien qu’il y ait de plus en plus de malades pour atteindre l’immunité collective (si ça fonctionne). J’en côtoie d’autres pas plus raisonnables au Café du Philosophe. Je prends des risques, c’est certain.
L’une de mes jeunes voisines à sa copine :
-Tu fais quoi ce soir ?
-Bah je sais pas, je vais peut-être boire un verre avec ma sœur et ma cousine. Pas ma cousine grosse moche. L’autre.
*
Un vieux qui s’est bien amusé le soir de la Fête de la Musique, c’est Patrick Balkany, que l’on a filmé dansant avec son pull rose dans les rues de Levallois. De quoi exciter les toujours indigné(e)s « C’est une honte » « Je vais vomir ».
J’adore ce type, ayant une faiblesse pour les escrocs flamboyants. Alors que je ne supporte pas ceux du genre faux cul, comme Fillon.
Okay pour une soirée avec les Balkany au Moulin de Giverny mais pour rien au monde avec les Fillon au Manoir de Beaucé.
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Examen d’économie à distance au Café du Philosophe, le professeur interroge l’élève via l’ordinateur. Ce dernier a près de lui un autre élève qui à la vitesse de l’éclair trouve sur son téléphone les réponses aux questions posées sans être vu par la caméra. Le regard toujours tourné vers la gauche de l’interrogé pourrait le dénoncer, mais il fait ça bien, jouant avec talent celui qui hésite et réfléchit en laissant errer ses yeux.
-Bon là c’est sûr, j’ai au moins le dix dont j’ai besoin, commente-t-il à la fin de son épreuve.
23 juin 2020
Un premier passage à la gare vendredi pour tenter d’obtenir au guichet un billet au même prix que sur le site de Oui. « Impossible, me dit celle à qui je fais ma demande, on n’a pas le même tarif ». Je lui explique que, n’ayant ni mobile ni imprimante, il m’est désormais impossible d’éditer un billet pris via Internet à la borne. Elle me certifie qu’on peut encore le faire.
De retour chez moi, je fais ma réservation d’un billet de Paris à mon lieu d’arrivée, constatant qu’entre la veille et ce jour son prix a augmenté de quatre euros. Après avoir payé, en lisant les petites lignes, je découvre qu’effectivement, en cas d’oubli du billet imprimé chez soi, on peut en obtenir une copie à la borne. Je relève les six lettres de son identifiant.
Ce samedi matin, je repasse à la Gare et les indique à la borne. Mon billet n’apparaît pas sur l’écran. Je vais au guichet. Celui à qui j’explique mon cas l’imprime. Comme je lui dis qu’il est de plus en plus difficile de voyager avec la Senecefe qui pourtant se plaint d’avoir quatre milliards de déficit, il me déclare qu’un billet comme le mien coûte cinq euros rien que pour le papier, puis il me vante le changement.
-Le changement, c’est le discours de la Macronie, lui dis-je, et un jour il conduira à ce que vous n’ayez plus d’emploi.
Lui et ses collègues disent du mal de moi dans mon dos tandis que je m’éloigne pour aller prendre à la borne mon billet Rouen Paris à sept euros (dont cinq pour le papier, s’il faut le croire).
*
Pour cette escapade qui durera le temps qu’elle durera, je ne m’occupe que de l’aller. Pour me loger, je ne réserve que la première semaine sur le site d’Air Bibi où l’on peut lire que depuis le quatorze mars les annulations liées au Covid Dix-Neuf ne sont pas considérées comme cas de force majeure et donc plus remboursées.
Se projeter au bout de la semaine est déjà incertain. « On est repassé à l’orange », s’inquiète le patron au Café du Philosophe. « On » désigne la Normandie. C’est même au rouge pour l’un des indicateurs, essentiellement par la faute de la banlieue rouennaise de la rive gauche où ont été détectées des contagions familiales.
Il aurait été prudent d’interdire la Fête des Mères. La Fêtes des Pères aussi.
*
Du danger de lire en bord de rue à la terrasse du Son du Cor. « Vous attendez la Princesse Charmante ?, m’interpelle une vieille revenant du marché, moi ça fait longtemps que je l’attends le Prince Charmant. »
Je lui offre mon regard le plus méprisant. Elle ne demande pas son reste (comme on dit).
De retour chez moi, je fais ma réservation d’un billet de Paris à mon lieu d’arrivée, constatant qu’entre la veille et ce jour son prix a augmenté de quatre euros. Après avoir payé, en lisant les petites lignes, je découvre qu’effectivement, en cas d’oubli du billet imprimé chez soi, on peut en obtenir une copie à la borne. Je relève les six lettres de son identifiant.
Ce samedi matin, je repasse à la Gare et les indique à la borne. Mon billet n’apparaît pas sur l’écran. Je vais au guichet. Celui à qui j’explique mon cas l’imprime. Comme je lui dis qu’il est de plus en plus difficile de voyager avec la Senecefe qui pourtant se plaint d’avoir quatre milliards de déficit, il me déclare qu’un billet comme le mien coûte cinq euros rien que pour le papier, puis il me vante le changement.
-Le changement, c’est le discours de la Macronie, lui dis-je, et un jour il conduira à ce que vous n’ayez plus d’emploi.
Lui et ses collègues disent du mal de moi dans mon dos tandis que je m’éloigne pour aller prendre à la borne mon billet Rouen Paris à sept euros (dont cinq pour le papier, s’il faut le croire).
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Pour cette escapade qui durera le temps qu’elle durera, je ne m’occupe que de l’aller. Pour me loger, je ne réserve que la première semaine sur le site d’Air Bibi où l’on peut lire que depuis le quatorze mars les annulations liées au Covid Dix-Neuf ne sont pas considérées comme cas de force majeure et donc plus remboursées.
Se projeter au bout de la semaine est déjà incertain. « On est repassé à l’orange », s’inquiète le patron au Café du Philosophe. « On » désigne la Normandie. C’est même au rouge pour l’un des indicateurs, essentiellement par la faute de la banlieue rouennaise de la rive gauche où ont été détectées des contagions familiales.
Il aurait été prudent d’interdire la Fête des Mères. La Fêtes des Pères aussi.
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Du danger de lire en bord de rue à la terrasse du Son du Cor. « Vous attendez la Princesse Charmante ?, m’interpelle une vieille revenant du marché, moi ça fait longtemps que je l’attends le Prince Charmant. »
Je lui offre mon regard le plus méprisant. Elle ne demande pas son reste (comme on dit).
22 juin 2020
Je suis à lire les Lettres d’Oscar Wilde ce vendredi en début d’après-midi en terrasse du Son du Cor quand un son de cloche m’alerte. Le petit train électrique de la ville de Rouen s’approche. Arrivé à ma hauteur il s’arrête. Son conducteur ouvre la vitre. Nous nous saluons chaleureusement.
-Alors ça y est c’est reparti ? lui demandé-je
-A partir de lundi, me répond-il.
Nous célébrons l’évènement d’un pouce levé, un dernier salut et le voilà reparti.
Entre lui et moi, ça avait pourtant mal commencé, une rencontre rue Saint-Romain alors qu’il conduisait le train précédent, celui à gasoil. Ce nouveau chauffeur ne cessait d’actionner la cloche.
-C’est bon on vous entend, lui avais-je dit, il faut vous calmer avec la clochette.
-Ça amuse les enfants, m’avait-il répondu.
-Si vous voulez amuser les enfants, il faut aller conduire un petit train chez Disney, avais-je répliqué un peu méchamment.
Je ne me souviens pas du mot qu’il m’adressa en retour mais c’était une insulte.
Le lendemain, alors que je traversais en diagonale le parvis de la Cathédrale, je le vis descendre de son train à l’arrêt et se diriger droit sur moi.
Ce n’était pas pour me faire un sort, mais pour s’excuser. J’en fis autant et depuis nous sommes les meilleurs amis du monde. Pas une fois nous nous croisons sans que j’aie droit à un petit coup de cloche.
*
Faut-il l’écrire ou pas ? Cet homme a la peau noire. Le préciser est désagréable car s’il avait la peau blanche je ne le ferais pas, mais si je ne le dis pas, qui lira imaginera un homme à la peau blanche.
-Alors ça y est c’est reparti ? lui demandé-je
-A partir de lundi, me répond-il.
Nous célébrons l’évènement d’un pouce levé, un dernier salut et le voilà reparti.
Entre lui et moi, ça avait pourtant mal commencé, une rencontre rue Saint-Romain alors qu’il conduisait le train précédent, celui à gasoil. Ce nouveau chauffeur ne cessait d’actionner la cloche.
-C’est bon on vous entend, lui avais-je dit, il faut vous calmer avec la clochette.
-Ça amuse les enfants, m’avait-il répondu.
-Si vous voulez amuser les enfants, il faut aller conduire un petit train chez Disney, avais-je répliqué un peu méchamment.
Je ne me souviens pas du mot qu’il m’adressa en retour mais c’était une insulte.
Le lendemain, alors que je traversais en diagonale le parvis de la Cathédrale, je le vis descendre de son train à l’arrêt et se diriger droit sur moi.
Ce n’était pas pour me faire un sort, mais pour s’excuser. J’en fis autant et depuis nous sommes les meilleurs amis du monde. Pas une fois nous nous croisons sans que j’aie droit à un petit coup de cloche.
*
Faut-il l’écrire ou pas ? Cet homme a la peau noire. Le préciser est désagréable car s’il avait la peau blanche je ne le ferais pas, mais si je ne le dis pas, qui lira imaginera un homme à la peau blanche.
20 juin 2020
Une femme m’a précédé un peu avant neuf heures devant la porte encore fermée des opticiens mutualistes de la rue de la Champmeslé. Une opticienne arrivant à bicyclette nous propose d’attendre à l’intérieur, masqués tous les deux. Cette dame a rendez-vous à neuf heures. Je découvre qu’il en fallait un, rapport au coronavirus. J’indique à l’opticien qui me le confirme que c’est juste pour changer les verres, que je n’ai pas envie d’une nouvelle monture. Il va voir si on peut me prendre quand même.
-Venez avec moi, me dit-il quand il réapparait, je vais m’occuper de vous.
Tandis que son ordinateur démarre lentement, je lui demande si c’est normal que l’antireflet de mes verres ait été détruit par le soleil en seulement deux ans.
Il est surpris car ce sont des Essilor.
C’est pourtant la deuxième fois que ça m’arrive, lui dis-je. Ne serait-ce pas de l’obsolescence programmée ? Il ne se prononce pas, entre un tas de renseignements dans son ordinateur puis me propose trois devis en commençant par le « reste à charge zéro», avec quand même des Essilor, que ma mutuelle est obligée de rembourser totalement, puis un plus cher avec aussi des Essilor et pas mal de reste à charge, enfin un intermédiaire avec des verres d’une autre marque mais bien quand même. L’avantage des deux derniers, c’est une plus grande largeur de vision sans avoir à tourner la tête.
-C’est utile pour conduire, lui dis-je.
-Oui voilà, me répond-il plein d’espoir.
-Je ne conduis plus, lui dis-je, je vais me contenter du reste à charge zéro.
Il ne montre pas trop sa déception. Si l’antireflet ne doit pas durer plus de deux ans, inutile que je fasse des frais, ne lui dis-je pas.
Il entre encore un tas de renseignements dans l'ordinateur et m’annonce qu’il ne faut pas compter les avoir avant huit dix jours.
Moi qui comptais récupérer ces lunettes avant de partir en escapade. Il écrit « urgent » sur mon dossier et je lui donne mon adresse mail pour être prévenu dès que ce sera prêt. Si ça traîne trop, je viendrai les chercher à mon retour. Je ne peux lui dire quel jour car, comme Malbrough, ne sais quand reviendrai.
Il est dix heures moins le quart quand il en a fini avec moi et peut prendre en charge une qui avait rendez-vous à neuf heures et demie.
*
Le masque ôté, porteur d’anciennes lunettes aux verres intacts, je rentre à la maison, croisant en chemin les soldats de l’opération Sentinelle, certains à lunettes et tous débarrassés de leur masque qu’ils n’auront pas supporté longtemps.
-Venez avec moi, me dit-il quand il réapparait, je vais m’occuper de vous.
Tandis que son ordinateur démarre lentement, je lui demande si c’est normal que l’antireflet de mes verres ait été détruit par le soleil en seulement deux ans.
Il est surpris car ce sont des Essilor.
C’est pourtant la deuxième fois que ça m’arrive, lui dis-je. Ne serait-ce pas de l’obsolescence programmée ? Il ne se prononce pas, entre un tas de renseignements dans son ordinateur puis me propose trois devis en commençant par le « reste à charge zéro», avec quand même des Essilor, que ma mutuelle est obligée de rembourser totalement, puis un plus cher avec aussi des Essilor et pas mal de reste à charge, enfin un intermédiaire avec des verres d’une autre marque mais bien quand même. L’avantage des deux derniers, c’est une plus grande largeur de vision sans avoir à tourner la tête.
-C’est utile pour conduire, lui dis-je.
-Oui voilà, me répond-il plein d’espoir.
-Je ne conduis plus, lui dis-je, je vais me contenter du reste à charge zéro.
Il ne montre pas trop sa déception. Si l’antireflet ne doit pas durer plus de deux ans, inutile que je fasse des frais, ne lui dis-je pas.
Il entre encore un tas de renseignements dans l'ordinateur et m’annonce qu’il ne faut pas compter les avoir avant huit dix jours.
Moi qui comptais récupérer ces lunettes avant de partir en escapade. Il écrit « urgent » sur mon dossier et je lui donne mon adresse mail pour être prévenu dès que ce sera prêt. Si ça traîne trop, je viendrai les chercher à mon retour. Je ne peux lui dire quel jour car, comme Malbrough, ne sais quand reviendrai.
Il est dix heures moins le quart quand il en a fini avec moi et peut prendre en charge une qui avait rendez-vous à neuf heures et demie.
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Le masque ôté, porteur d’anciennes lunettes aux verres intacts, je rentre à la maison, croisant en chemin les soldats de l’opération Sentinelle, certains à lunettes et tous débarrassés de leur masque qu’ils n’auront pas supporté longtemps.
19 juin 2020
Ce mercredi dix-sept juin, je rejoins à pied la Clinique Mathilde et y arrive peu avant treize heures quarante-cinq, l’heure de mon rendez-vous chez l’ophtalmologue. J’enfile le masque obligatoire. Un homme en tenue de pompier filtre les arrivées. N’entrent là que celles et ceux qui y sont attendus. Le lavage des mains au gel hydro alcoolique est exigé.
-Y nous font chier avec ces trucs-là, ronchonne une vieille.
-Restez polie madame, lui répond le vigile, on est mercredi, il peut y avoir des enfants.
Il vit encore dans le monde d’avant-guerre, quand les moutards allaient à l’école.
Plutôt que d’être à plusieurs dans un ascenseur, je monte seul par l’escalier et arrive au deuxième étage singulièrement essoufflé.
La secrétaire m’apprend que c’est une remplaçante qui me recevra. Après une courte attente, je suis appelé par l’associée subalterne dénommée orthoptiste. Elle est chargée des examens préalables, une tâche répétitive qui m’ennuierait prodigieusement si j’avais à l’effectuer. Elle ne me dit pas un mot. Il faut que je l’interroge pour connaître ma tension oculaire. Autour de quinze pour chaque œil, ce qui est dans la normalité.
La remplaçante n’est pas une débutante. Elle me confirme la bonne tension oculaire, pour le maintien de laquelle je mets une goutte de médicament soir et matin. C’est rassurant, me dit-elle. Elle m’indique que ma forte myopie complique la lecture des examens du glaucome. Et il en manque, que n’a pas transmis mon ancienne ophtalmo de ville. Il faudra les faire dans six mois. Elle ne me parle pas d’opération, n’évoque même pas le début de cataracte. Je ne peux m’empêcher de penser que c’est parce qu’elle n’a point d’intérêt financier dans cette entreprise qu’est la Clinique Mathilde.
Mes verres de lunettes ayant été abîmés par le soleil, je lui demande de m’en prescrire de nouveaux. Sitôt sorti, j’ôte le masque.
*
Cette infirmière parisienne de cinquante-cinq ans qui se fait violemment arrêter après avoir fait des doigts d’honneur aux Policiers et leur avoir lancé des pierres, montre qu’il ne faut plus participer aux manifestations depuis que celles-ci sont confisquées par l’Armée Noire, l’effet de foule risquant de vous entraîner à des actes d’une totale stupidité.
*
Philippe Torreton, comédien : « Pourquoi on peut s'asseoir côte à côte dans un train et pas au théâtre : expliquez-moi. »
Je t’explique Philippe, dans un train on n’a qu’un seul proche voisin, au théâtre deux, d’où un risque doublé d’être assis à côté d’un malade. D’autre part, si ton voisin de train tousse, tu peux changer de place ou même choisir de voyager debout, au théâtre non.
-Y nous font chier avec ces trucs-là, ronchonne une vieille.
-Restez polie madame, lui répond le vigile, on est mercredi, il peut y avoir des enfants.
Il vit encore dans le monde d’avant-guerre, quand les moutards allaient à l’école.
Plutôt que d’être à plusieurs dans un ascenseur, je monte seul par l’escalier et arrive au deuxième étage singulièrement essoufflé.
La secrétaire m’apprend que c’est une remplaçante qui me recevra. Après une courte attente, je suis appelé par l’associée subalterne dénommée orthoptiste. Elle est chargée des examens préalables, une tâche répétitive qui m’ennuierait prodigieusement si j’avais à l’effectuer. Elle ne me dit pas un mot. Il faut que je l’interroge pour connaître ma tension oculaire. Autour de quinze pour chaque œil, ce qui est dans la normalité.
La remplaçante n’est pas une débutante. Elle me confirme la bonne tension oculaire, pour le maintien de laquelle je mets une goutte de médicament soir et matin. C’est rassurant, me dit-elle. Elle m’indique que ma forte myopie complique la lecture des examens du glaucome. Et il en manque, que n’a pas transmis mon ancienne ophtalmo de ville. Il faudra les faire dans six mois. Elle ne me parle pas d’opération, n’évoque même pas le début de cataracte. Je ne peux m’empêcher de penser que c’est parce qu’elle n’a point d’intérêt financier dans cette entreprise qu’est la Clinique Mathilde.
Mes verres de lunettes ayant été abîmés par le soleil, je lui demande de m’en prescrire de nouveaux. Sitôt sorti, j’ôte le masque.
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Cette infirmière parisienne de cinquante-cinq ans qui se fait violemment arrêter après avoir fait des doigts d’honneur aux Policiers et leur avoir lancé des pierres, montre qu’il ne faut plus participer aux manifestations depuis que celles-ci sont confisquées par l’Armée Noire, l’effet de foule risquant de vous entraîner à des actes d’une totale stupidité.
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Philippe Torreton, comédien : « Pourquoi on peut s'asseoir côte à côte dans un train et pas au théâtre : expliquez-moi. »
Je t’explique Philippe, dans un train on n’a qu’un seul proche voisin, au théâtre deux, d’où un risque doublé d’être assis à côté d’un malade. D’autre part, si ton voisin de train tousse, tu peux changer de place ou même choisir de voyager debout, au théâtre non.
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