Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
5 janvier 2021
Une enveloppe carrée dorée affranchie avec un timbre orné d’un œuf d’émeu dans ma boîte à lettres en ce premier lundi de janvier, elle contient une carte de vœux sur laquelle figure une sorte de colombe de la paix entourée d’une couronne végétale, un choix assurément féminin, que me confirme l’écriture. « Féminin ou masculin ? » me demande-t-on en me vouvoyant. J’ai déjà répondu.
L’expéditrice anonyme est forcément une de mes amies de chez Effe Bé. Or, seules deux me vouvoient. J’ai vite ma petite idée car sur les deux, l’une m’a titillée sur mon étonnante capacité à reconnaître une écriture féminine. Je ne peux confirmer cette hypothèse avec le cachet de la Poste car on ne trouve plus de flamme touristique sur les enveloppes depuis un certain nombre d’années. C’est bien dommage. Il faudrait pétitionner pour un retour de flamme.
Je me souviens du temps où chaque enveloppe indiquait si le courrier avait été posté à Elbeuf ou à Noirmoutier. A cette époque, il fallait recourir à la ruse lorsqu’on ne désirait pas être reconnu comme expéditeur, mettre son courrier dans une autre enveloppe adressée à un complice, à Paris par exemple, qui le posterait pour vous, vous forgeant un alibi ou vous permettant de rester anonyme. J’ai recouru à ce stratagème, mais je ne sais plus pourquoi.
Cette aimable correspondante me souhaite une année deux mille vingt et un telle que j’en aurai envie. C’est mettre la barre un peu haut.
*
L’œuf d’émeu, ça m’émeut.
*
« C’est bien vous ? », demandé-je à la suspecte ce mardi matin. « Ah zut ! Mais comment vous avez deviné ??? », me répond-elle.
L’expéditrice anonyme est forcément une de mes amies de chez Effe Bé. Or, seules deux me vouvoient. J’ai vite ma petite idée car sur les deux, l’une m’a titillée sur mon étonnante capacité à reconnaître une écriture féminine. Je ne peux confirmer cette hypothèse avec le cachet de la Poste car on ne trouve plus de flamme touristique sur les enveloppes depuis un certain nombre d’années. C’est bien dommage. Il faudrait pétitionner pour un retour de flamme.
Je me souviens du temps où chaque enveloppe indiquait si le courrier avait été posté à Elbeuf ou à Noirmoutier. A cette époque, il fallait recourir à la ruse lorsqu’on ne désirait pas être reconnu comme expéditeur, mettre son courrier dans une autre enveloppe adressée à un complice, à Paris par exemple, qui le posterait pour vous, vous forgeant un alibi ou vous permettant de rester anonyme. J’ai recouru à ce stratagème, mais je ne sais plus pourquoi.
Cette aimable correspondante me souhaite une année deux mille vingt et un telle que j’en aurai envie. C’est mettre la barre un peu haut.
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L’œuf d’émeu, ça m’émeut.
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« C’est bien vous ? », demandé-je à la suspecte ce mardi matin. « Ah zut ! Mais comment vous avez deviné ??? », me répond-elle.
4 janvier 2021
Un psychodrame, ce début de campagne de vaccination contre le Covid. Il y a ceux qui ne veulent pas. Il y a ceux qui veulent vite. Il y a ceux qui ont les vaccins mais pas assez pour tous les volontaires et essaient de faire croire que c’est à cause des réfractaires qu’il ne faut pas brusquer.
Il y a aussi les petits malins, des Maires qui désirent de se faire vacciner avant les prioritaires. Pour montrer l’exemple, disent-ils. Comme si un récalcitrant pouvait changer d’avis à la vue de son Maire piqué ! Cela n’aura pas lieu, et heureusement, car la dose qu’on donnerait à ces héros municipaux serait retirée de l’épaule d’un fragile qui s’il était ensuite contaminé aurait toutes les chances de mourir grâce à eux.
Pour justifier les retards, il y a l’alibi du « consentement éclairé » demandé aux ancêtres, lequel nécessite plusieurs jours de réflexion pour être valide. On pourrait pourtant simplifier : « Tu la veux la piquouze, oui ou merde ? ».
Il y a aussi les petits malins, des Maires qui désirent de se faire vacciner avant les prioritaires. Pour montrer l’exemple, disent-ils. Comme si un récalcitrant pouvait changer d’avis à la vue de son Maire piqué ! Cela n’aura pas lieu, et heureusement, car la dose qu’on donnerait à ces héros municipaux serait retirée de l’épaule d’un fragile qui s’il était ensuite contaminé aurait toutes les chances de mourir grâce à eux.
Pour justifier les retards, il y a l’alibi du « consentement éclairé » demandé aux ancêtres, lequel nécessite plusieurs jours de réflexion pour être valide. On pourrait pourtant simplifier : « Tu la veux la piquouze, oui ou merde ? ».
3 janvier 2021
Lorsque je mets le nez dehors, ce samedi brumeux, pour aller à la Poste de la rue de la Jeanne, celui-ci est surpris par une odeur répugnante typiquement rouennaise. Au moins ne souffré-je pas d’anosmie, ce symptôme de Covid, me dis-je.
Rentré, je constate que sur les réseaux soucieux on suppute sur les origines de cette nuisance olfactive qui atteint toute la ville et ses banlieues huppées. Sans surprise, le suspect numéro un est Lubrizol. La vérité est ailleurs, annonce alors Rouen.fr, le site officiel de la Ville de Rouen :
« Ces odeurs sont sans doute liées aux feux de cheminées en cette période froide. »
Et d’ajouter :
« Les feux de cheminée sont donc à éviter, en particulier les feux d'agrément.
Et est à bannir totalement le brûlage des emballages cadeaux (papier dorés, plastiques et autres combustibles non adéquats). »
L’équation du jour : feux de cheminées + emballages cadeaux = odeur d’hydrocarbure.
*
Cette année encore, une hausse de dix pour cent pour les tarifs postaux. La Poste met ça sur le compte de la diminution du nombre d’envois. Les jours précédents, elle se réjouissait de l’augmentation du nombre de colis, suite à la pandémie, qui l’obligeait à créer des centres de tris supplémentaires.
Rentré, je constate que sur les réseaux soucieux on suppute sur les origines de cette nuisance olfactive qui atteint toute la ville et ses banlieues huppées. Sans surprise, le suspect numéro un est Lubrizol. La vérité est ailleurs, annonce alors Rouen.fr, le site officiel de la Ville de Rouen :
« Ces odeurs sont sans doute liées aux feux de cheminées en cette période froide. »
Et d’ajouter :
« Les feux de cheminée sont donc à éviter, en particulier les feux d'agrément.
Et est à bannir totalement le brûlage des emballages cadeaux (papier dorés, plastiques et autres combustibles non adéquats). »
L’équation du jour : feux de cheminées + emballages cadeaux = odeur d’hydrocarbure.
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Cette année encore, une hausse de dix pour cent pour les tarifs postaux. La Poste met ça sur le compte de la diminution du nombre d’envois. Les jours précédents, elle se réjouissait de l’augmentation du nombre de colis, suite à la pandémie, qui l’obligeait à créer des centres de tris supplémentaires.
2 janvier 2021
Désagréable passage d’une année obscurcie à une année incertaine, cela débute par une douleur dans la gorge, de type angine mais sans fièvre. Je m’en ouvre au pharmacien qui me propose un collutoire pour atténuer ce symptôme.
Las, il ne me délivre pas du mal. Pire, celui-ci gagne la mâchoire inférieure et l’oreille droite. Quand je me décide à appeler le médecin c’est trop tard, la secrétaire n’est plus là pour me donner un rendez-vous.
Le soir venu, explorant ma cavité buccale à l’aide d’un doigt hardi, je me découvre un kyste sur la gencive au-delà de la dernière molaire. L’auto-chirurgie pourrait-elle être la solution ? Utilisant la trompe du collutoire, je m’acharne sur l’excroissance et en viens à bout. En moins d’une heure tout s’arrange, plus aucune douleur.
Ceci n’est pas une allégorie.
*
« Quoi qu’il arrive », martèle notre Président, qui a retrouvé la santé, durant ses vœux du trente et un décembre à la télévision. Il propose d’accélérer la vaccination. La France commençait à devenir la risée de ses voisins. « Essayer encore, rater mieux ».
Après cela, je me mets au lit avec Lewis Carroll, le premier tome de ses œuvres complètes publiées chez Bouquins dont je ne lis que les préfaces jusqu’à arriver à son Journal. Nulle fête nocturne ne vient troubler ma nuit.
*
« Bonne chance » ou « bon courage », c’est tout ce que l’on peut se souhaiter pour deux mille vingt et un. « Bonne année » ou « bonne santé », comme on l’a fait au début de deux mille vingt, c’est trop risqué.
Las, il ne me délivre pas du mal. Pire, celui-ci gagne la mâchoire inférieure et l’oreille droite. Quand je me décide à appeler le médecin c’est trop tard, la secrétaire n’est plus là pour me donner un rendez-vous.
Le soir venu, explorant ma cavité buccale à l’aide d’un doigt hardi, je me découvre un kyste sur la gencive au-delà de la dernière molaire. L’auto-chirurgie pourrait-elle être la solution ? Utilisant la trompe du collutoire, je m’acharne sur l’excroissance et en viens à bout. En moins d’une heure tout s’arrange, plus aucune douleur.
Ceci n’est pas une allégorie.
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« Quoi qu’il arrive », martèle notre Président, qui a retrouvé la santé, durant ses vœux du trente et un décembre à la télévision. Il propose d’accélérer la vaccination. La France commençait à devenir la risée de ses voisins. « Essayer encore, rater mieux ».
Après cela, je me mets au lit avec Lewis Carroll, le premier tome de ses œuvres complètes publiées chez Bouquins dont je ne lis que les préfaces jusqu’à arriver à son Journal. Nulle fête nocturne ne vient troubler ma nuit.
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« Bonne chance » ou « bon courage », c’est tout ce que l’on peut se souhaiter pour deux mille vingt et un. « Bonne année » ou « bonne santé », comme on l’a fait au début de deux mille vingt, c’est trop risqué.
31 décembre 2020
Chez Book-Off, un employé enrhumé on ne peut plus français muni d’un masque de protection à la japonaise., m’étonnais-je le dix-sept janvier dernier sans faire le rapport avec le virus apparu en Chine dont on parlait depuis quelques semaines.
Ma première évocation de l’épidémie date du vingt-sept janvier lorsque je raconte ma journée de la veille passée à Dieppe :
Près de moi sont deux étudiantes. L’une écrit sur son ordinateur. L’autre lit le fil d’actualité de son mobile. « La France est le premier pays européen à être touché par le coronavirus ». A l’extérieur la campagne gît dans le brouillard.
Ce même jour, je citais le propos prémonitoire d’une autochtone au Tout Va Bien :
Trois femmes sexagénaires profitent de l’absence des maris « Y a la Foire aux Livres à la Paul Eluard, y sont là-bas ». Elles sont toutes gaies mais, remarque l’une, « Vous allez voir, on va moins rigoler avec le virus qui s’amène ».
Quatre jours plus tard, c’était le Nouvel An chinois et j’étais à Paris :
… grâce au métro Huit je suis à midi moins le quart au Péhemmu chinois de la rue du Faubourg Saint-Antoine.
-Bonne année du Rat, dis-je à la gentille serveuse.
-On espère qu’elle va être bonne, me répond-elle.
-Oui, cela commence mal, lui dis-je.
-Mais cela va s’arranger, conclut-elle.
Là, le propos de cette charmante fille, que depuis mars la pandémie m’a empêché de revoir, n’était guère prémonitoire.
De semaine en semaine, l’inquiétude monte, comme le montre cet extrait de ma journée à Paris mi-février :
Après m’être tenu à l’écart de nombreux tousseurs (l’air de ce BéO ne serait-il pas coronavicié ?) et avoir dépensé quelques euros, je rejoins Beaubourg à pied.
Et bientôt l’avenir s’annonce sombre :
Les rues ont leur aspect désert qui désole. Comme si la ville de Rouen était déjà confinée en raison de l’expansion du coronavirus, ainsi que le sont depuis hier des villes italiennes situées entre Milan et Venise. Que l’on impose ce genre de mesure en Chine n’a rien d’étonnant, mais qu’un pays, dit démocratique, empêche si rapidement la circulation de sa population sous peine d’amende et de prison, je ne m’y attendais pas.
Où en sera-t-on dans un mois, à la date que j’ai choisie pour une escapade dans le Sud, pas très loin de la frontière, billet et location déjà payés. Cette région sera-t-elle interdite ? Pire, serons-nous tous assignés à résidence ? écrivais-je le vingt-cinq février.
Pourtant, début mars on en rigole encore :
C’est sous le parapluie que je me rends chez mon dentiste ce lundi matin pour la visite bisannuelle. Je suis son premier rendez-vous. « Je ne vous serre pas la main, mais le cœur y est », me dit-il à l’arrivée. « Avec mes assistantes, on se salue avec les pieds », ajoute-t-il en me faisant une petite démonstration.
Enfin, arrive le cinq mars, la dernière fois où je vois celle avec qui je fête en retard mon anniversaire au Café L’Arsenal près de la Bastille :
Faisant fi de la prudence, nous nous embrassons.
La suite, ce sont les jours plombés, confinement, déconfinement, reconfinement.
*
On ne va pas le regretter l’an vain, l’an foiré comme l’appellent certains journalistes (mais Libération le disait déjà de deux mille treize).
Comment nommer celui qui vient ? Je propose l’an brouillé, vu qu’il n’y a aucune visibilité. Espérons qu’à sa fin, ce ne sera pas l’an merdé.
Ma première évocation de l’épidémie date du vingt-sept janvier lorsque je raconte ma journée de la veille passée à Dieppe :
Près de moi sont deux étudiantes. L’une écrit sur son ordinateur. L’autre lit le fil d’actualité de son mobile. « La France est le premier pays européen à être touché par le coronavirus ». A l’extérieur la campagne gît dans le brouillard.
Ce même jour, je citais le propos prémonitoire d’une autochtone au Tout Va Bien :
Trois femmes sexagénaires profitent de l’absence des maris « Y a la Foire aux Livres à la Paul Eluard, y sont là-bas ». Elles sont toutes gaies mais, remarque l’une, « Vous allez voir, on va moins rigoler avec le virus qui s’amène ».
Quatre jours plus tard, c’était le Nouvel An chinois et j’étais à Paris :
… grâce au métro Huit je suis à midi moins le quart au Péhemmu chinois de la rue du Faubourg Saint-Antoine.
-Bonne année du Rat, dis-je à la gentille serveuse.
-On espère qu’elle va être bonne, me répond-elle.
-Oui, cela commence mal, lui dis-je.
-Mais cela va s’arranger, conclut-elle.
Là, le propos de cette charmante fille, que depuis mars la pandémie m’a empêché de revoir, n’était guère prémonitoire.
De semaine en semaine, l’inquiétude monte, comme le montre cet extrait de ma journée à Paris mi-février :
Après m’être tenu à l’écart de nombreux tousseurs (l’air de ce BéO ne serait-il pas coronavicié ?) et avoir dépensé quelques euros, je rejoins Beaubourg à pied.
Et bientôt l’avenir s’annonce sombre :
Les rues ont leur aspect désert qui désole. Comme si la ville de Rouen était déjà confinée en raison de l’expansion du coronavirus, ainsi que le sont depuis hier des villes italiennes situées entre Milan et Venise. Que l’on impose ce genre de mesure en Chine n’a rien d’étonnant, mais qu’un pays, dit démocratique, empêche si rapidement la circulation de sa population sous peine d’amende et de prison, je ne m’y attendais pas.
Où en sera-t-on dans un mois, à la date que j’ai choisie pour une escapade dans le Sud, pas très loin de la frontière, billet et location déjà payés. Cette région sera-t-elle interdite ? Pire, serons-nous tous assignés à résidence ? écrivais-je le vingt-cinq février.
Pourtant, début mars on en rigole encore :
C’est sous le parapluie que je me rends chez mon dentiste ce lundi matin pour la visite bisannuelle. Je suis son premier rendez-vous. « Je ne vous serre pas la main, mais le cœur y est », me dit-il à l’arrivée. « Avec mes assistantes, on se salue avec les pieds », ajoute-t-il en me faisant une petite démonstration.
Enfin, arrive le cinq mars, la dernière fois où je vois celle avec qui je fête en retard mon anniversaire au Café L’Arsenal près de la Bastille :
Faisant fi de la prudence, nous nous embrassons.
La suite, ce sont les jours plombés, confinement, déconfinement, reconfinement.
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On ne va pas le regretter l’an vain, l’an foiré comme l’appellent certains journalistes (mais Libération le disait déjà de deux mille treize).
Comment nommer celui qui vient ? Je propose l’an brouillé, vu qu’il n’y a aucune visibilité. Espérons qu’à sa fin, ce ne sera pas l’an merdé.
30 décembre 2020
Karl Marx avait trois filles : Jenny, Laura et Eleanor. Les lettres écrites entre elles et celles à leur père ont été publiées en mil neuf cent soixante-dix-neuf par Albin Michel sous le titre Les filles de Karl Marx Lettres inédites avec une préface de Michelle Perrot. Mon exemplaire a vécu, trouvé avant-guerre au marché d’Aligre (y retournerai-je un jour ?).
Difficile d’être une fille de Marx sans être marxiste et en épouser un. Laura se marie la première avec Paul Lafargue (elle aura trois enfants en quatre ans, qui ne survivront pas). Jenny se marie avec Charles Longuet (elle aura six enfants en dix ans, quatre survivront). Quant à Eleanor, ma préférée, elle choisit de vivre maritalement avec Lissagaray, ce qui déplaît fort à son bourgeois de père qui juge l’élu trop libertaire et n’apprécie pas leur différence d’âge, ce Karl Marx qui de son côté a fait un enfant à la bonne, un garçon qu’Engels a reconnu pour lui rendre service (ce n’est qu’après la mort de ce dernier que Laura et Eleanor, Jenny étant déjà morte, apprendront la vérité). Eleanor n’aura jamais d’enfant, elle traduira Madame Bovary en anglais et vivra avec Edward Aveling qui, lorsqu’elle aura quarante-trois ans se mariera secrètement avec une jeune actrice tout en continuant à vivre avec elle. L’ayant appris, celle qui était aussi la préférée de son père se suicidera en avalant du poison pour chien. Laura et Paul Lafargue se suicideront ensemble, bien plus tard.
Mes quelques prélèvements :
Nous sommes actuellement dans un hôtel de Dieppe où nous avons trouvé tout ce que nous désirions et même bien plus. Le temps est beau et la ville extrêmement jolie. Laura Lafargue à Karl Marx le vendredi trois avril mil huit cent soixante-huit
Je suis invitée cet après-midi à une grande réception chez Lady Wilde. C’est la mère de ce jeune homme très déplaisant et très boiteux, Oscar Wilde, qui s’est rendu si diablement ridicule en Amérique. Comme le fils n’est pas encore rentré et que la mère est gentille, il se peut que j’y aille… Eleanor à Jenny le premier juillet mil neuf cent quatre-vingt-deux
Comme j’aimerais qu’on ne vive pas dans des maisons et qu’on n’ait pas à faire de cuisine, de pâtisserie, de lessive et de ménage ! Eleanor à Laura le douze avril mil huit cent quatre-vingt-cinq
Cela me fait de la peine pour Louise. Bebel et tous les autres lui ont dit qu’il était de son devoir envers le Parti de s’installer ici. Elle ne mérite guère cela. Son travail marchait si bien à Vienne et ce n’est pas rien de sacrifier toute sa carrière – on ne demanderait pas à un homme d’en faire autant. Elle est encore si jeune, à peine 30 ans. Il semble injuste de l’enfermer et de lui ôter toute chance d’une vie plus pleine et plus heureuse. Eleanor à Laura le dix-neuf décembre mil huit cent quatre-vingt-dix (il s’agissait pour Louise de faire gouvernante chez Engels vieillissant)
Il est possible que je sois très « sentimentale » mais je ne peux m’empêcher de trouver que Freddy a été toute sa vie victime de l’injustice. Quand on regarde les choses bien en face, n’est-il pas extraordinaire de voir à quel point on pratique rarement toutes les vertus qu’on prêche … aux autres ? Eleanor à Laura le vingt-six juillet mil huit quatre-vingt-douze (elle ne sait pas encore que Freddy est son demi-frère)
Difficile d’être une fille de Marx sans être marxiste et en épouser un. Laura se marie la première avec Paul Lafargue (elle aura trois enfants en quatre ans, qui ne survivront pas). Jenny se marie avec Charles Longuet (elle aura six enfants en dix ans, quatre survivront). Quant à Eleanor, ma préférée, elle choisit de vivre maritalement avec Lissagaray, ce qui déplaît fort à son bourgeois de père qui juge l’élu trop libertaire et n’apprécie pas leur différence d’âge, ce Karl Marx qui de son côté a fait un enfant à la bonne, un garçon qu’Engels a reconnu pour lui rendre service (ce n’est qu’après la mort de ce dernier que Laura et Eleanor, Jenny étant déjà morte, apprendront la vérité). Eleanor n’aura jamais d’enfant, elle traduira Madame Bovary en anglais et vivra avec Edward Aveling qui, lorsqu’elle aura quarante-trois ans se mariera secrètement avec une jeune actrice tout en continuant à vivre avec elle. L’ayant appris, celle qui était aussi la préférée de son père se suicidera en avalant du poison pour chien. Laura et Paul Lafargue se suicideront ensemble, bien plus tard.
Mes quelques prélèvements :
Nous sommes actuellement dans un hôtel de Dieppe où nous avons trouvé tout ce que nous désirions et même bien plus. Le temps est beau et la ville extrêmement jolie. Laura Lafargue à Karl Marx le vendredi trois avril mil huit cent soixante-huit
Je suis invitée cet après-midi à une grande réception chez Lady Wilde. C’est la mère de ce jeune homme très déplaisant et très boiteux, Oscar Wilde, qui s’est rendu si diablement ridicule en Amérique. Comme le fils n’est pas encore rentré et que la mère est gentille, il se peut que j’y aille… Eleanor à Jenny le premier juillet mil neuf cent quatre-vingt-deux
Comme j’aimerais qu’on ne vive pas dans des maisons et qu’on n’ait pas à faire de cuisine, de pâtisserie, de lessive et de ménage ! Eleanor à Laura le douze avril mil huit cent quatre-vingt-cinq
Cela me fait de la peine pour Louise. Bebel et tous les autres lui ont dit qu’il était de son devoir envers le Parti de s’installer ici. Elle ne mérite guère cela. Son travail marchait si bien à Vienne et ce n’est pas rien de sacrifier toute sa carrière – on ne demanderait pas à un homme d’en faire autant. Elle est encore si jeune, à peine 30 ans. Il semble injuste de l’enfermer et de lui ôter toute chance d’une vie plus pleine et plus heureuse. Eleanor à Laura le dix-neuf décembre mil huit cent quatre-vingt-dix (il s’agissait pour Louise de faire gouvernante chez Engels vieillissant)
Il est possible que je sois très « sentimentale » mais je ne peux m’empêcher de trouver que Freddy a été toute sa vie victime de l’injustice. Quand on regarde les choses bien en face, n’est-il pas extraordinaire de voir à quel point on pratique rarement toutes les vertus qu’on prêche … aux autres ? Eleanor à Laura le vingt-six juillet mil huit quatre-vingt-douze (elle ne sait pas encore que Freddy est son demi-frère)
29 décembre 2020
J’aimerais faire comme Mauricette, tendre mon épaule à la dame qui fait des piqûres (jamais d’hommes, évidemment) mais je crains de ne pouvoir le faire en deux mille vingt et un, vu le nombre de doses qui seront disponibles en France.
Les journalistes passent leur temps à discuter sur les refus de vacciner. Ils feraient mieux de s’intéresser à l’impossibilité de se faire vacciner. Jamais je n’ai pu le faire contre la grippe cette année. Quand je ferai partie des ayant-droits à celui contre la Covid, ce sera l’été ou alors l’automne. Il est probable que je serai en vadrouille. Pas question de revenir pour être bloqué à Rouen pendant trois semaines, le temps nécessaire aux deux injections. Quand je rentrerai, on risque de me dire que c’est trop tard.
*
Si ce vaccin est aussi efficace qu’on le dit, quatre-vingt-quinze pour cent de ceux qui vont mourir de la maladie dans les semaines et les mois qui viennent seraient restés en vie s’ils avaient pu en bénéficier. L’Etat Français par sa lenteur pourrait être accusé par la famille de chacun d’eux de non-assistance à personne en danger ou de mise en danger de la vie d’autrui.
*
Parmi les images que je suis incapable de regarder sur un écran, la piqûre égale la prise de sang.
Les journalistes passent leur temps à discuter sur les refus de vacciner. Ils feraient mieux de s’intéresser à l’impossibilité de se faire vacciner. Jamais je n’ai pu le faire contre la grippe cette année. Quand je ferai partie des ayant-droits à celui contre la Covid, ce sera l’été ou alors l’automne. Il est probable que je serai en vadrouille. Pas question de revenir pour être bloqué à Rouen pendant trois semaines, le temps nécessaire aux deux injections. Quand je rentrerai, on risque de me dire que c’est trop tard.
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Si ce vaccin est aussi efficace qu’on le dit, quatre-vingt-quinze pour cent de ceux qui vont mourir de la maladie dans les semaines et les mois qui viennent seraient restés en vie s’ils avaient pu en bénéficier. L’Etat Français par sa lenteur pourrait être accusé par la famille de chacun d’eux de non-assistance à personne en danger ou de mise en danger de la vie d’autrui.
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Parmi les images que je suis incapable de regarder sur un écran, la piqûre égale la prise de sang.
28 décembre 2020
Bella : premiers coups de vent vers quatre heures du matin, cette tempête n’aura rien de tragique mais elle fera du dernier dimanche de deux mille vingt une journée particulièrement pourrie. Cela ne m’empêche pas de me lever avant le jour.
Moi qui n’aime rien tant que me simplifier la vie, j’aurais dû réfléchir avant d’acheter à la fin du premier confinement un lot de chaussettes noires brodées des jours de la semaine car je n’arrive, ni à en mettre une marquée d’un jour avec une autre sans jour, ni à en mettre une d’un jour avec une d’un autre jour, ni même à en mettre deux du même jour un jour qui n’est pas le bon.
Bref je passe pour mon habillage dominical un temps fou à chercher la première chaussette marquée dimanche puis sa seconde pour faire la paire.
Il en sera ainsi toute la semaine.
*
Voici maintenant les variants : variant anglais, variant sud-africain. L’un étant peut-être le futur dominant. En France, la première vaccinée s’appelle Mauricette. On attend le troisième confinement. (Dernières nouvelles du Covid)
Moi qui n’aime rien tant que me simplifier la vie, j’aurais dû réfléchir avant d’acheter à la fin du premier confinement un lot de chaussettes noires brodées des jours de la semaine car je n’arrive, ni à en mettre une marquée d’un jour avec une autre sans jour, ni à en mettre une d’un jour avec une d’un autre jour, ni même à en mettre deux du même jour un jour qui n’est pas le bon.
Bref je passe pour mon habillage dominical un temps fou à chercher la première chaussette marquée dimanche puis sa seconde pour faire la paire.
Il en sera ainsi toute la semaine.
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Voici maintenant les variants : variant anglais, variant sud-africain. L’un étant peut-être le futur dominant. En France, la première vaccinée s’appelle Mauricette. On attend le troisième confinement. (Dernières nouvelles du Covid)
© 2014 Michel Perdrial - Design: Bureau l’Imprimante