Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
24 janvier 2021
Le premier octobre mil neuf cent quarante-deux, Heinrich Böll, soldat du Reich, quitte le cap Gris-Nez pour Rouen. Il est ensuite transféré le onze octobre à Louviers (ma ville natale) puis dans une commune proche nommée Léry (où j’ai des attaches familiales) à quelques kilomètres de Pont-de-l’Arche. L’année suivante, il est au Tréport guettant les Anglais.
Suite de mes prélèvements dans Lettres de guerre 1939-1945 publié chez L’Iconoclaste :
A sa femme, Léry (Eure), le quinze octobre mil neuf cent quarante-deux : Oui, je ne saurais te dire combien j’ai rencontré de paysans et de paysannes, jeunes et vieux ; sur chacun d’eux on pourrait écrire un roman, rien que sur leurs visages, ces visages de paysans au milieu de leur ferme, beaux et sévères, avec souvent un petit air effrayé ; nulle part je n’ai vu, comme en France, une telle sensualité, si ouverte et si belle sur les visages des paysans et de leurs femmes…
A sa femme, Pont-de-l’Arche, le vingt-six octobre mil neuf cent quarante-deux : Il y a quelque chose d’un peu déprimant à la longue quand on s’entretient avec les Français, tant ils sont convaincus que nous allons perdre la guerre ; vraiment, c’est étrange, je dirais qu’on en devient presque timide quand on demande un cantonnement ou autre chose ; on n’apparaît plus du tout comme des vainqueurs.
A sa femme, Pont-de-l’Arche, le quatre novembre mil neuf cent quarante-deux : Devant moi, à une table, sont assis quatre Français qui jouent aux dés, on en rencontre en masse et à toute heure du jour dans les cafés ; ils ont tout le temps de vivre ! Ah, je les envie tellement, même les ouvriers vêtus de loques sur leurs vélos ; souvent je les suis du regard, fasciné par leur air libre et digne ; ils sont vraiment magnifiques, j’en connais certains assez bien, des bûcherons de la forêt, des serruriers, des menuisiers, des peintres, des couvreurs ; ils sont tellement fiers et superbes…
A sa femme, à l’Ouest, Noël mil neuf cent quarante-deux : Je dois malheureusement écouter le discours de M. le ministre du Reich, le Dr Goebbels. Bon, ça va passer vite… Mais c’est bien le plus grand crime qu’on puisse commettre envers les soldats morts au combat ; le plus grand crime, ce sont ces phrases creuses, ces discours visqueux… Quelle horreur d’entendre des vers d’Hölderlin de la bouche de cet homme…
A sa femme, Tully, le vingt-neuf janvier mil neuf cent quarante-trois : Les Français ont imaginé une nouvelle vacherie qui (…) m’a atteint comme un coup de massue ! L’effet en est foudroyant, ils inscrivent tout simplement « 1918 » sur les murs, ces quatre chiffres sans aucun commentaire, un simple nombre, mais ô combien déprimant…
A sa femme, Le Tréport, le vingt-trois mars mil neuf cent quarante-trois : Ah, je pense sans arrêt au jour où, libéré du fardeau gris de la guerre, je pourrai admirer ces merveilles avec toi : oui, tous les lieux que j’ai visités ici en France, Amiens, Rouen, tous les petits coins sur la côte et dans l’intérieur des terres, et aussi les petits patelins gris et désolés des étapes, les positions de réserve, et surtout Paris, si grand, si splendide.
A sa femme, Le Tréport, le vingt-six mars mil neuf cent quarante-trois : A vrai dire, je me suis senti très à l’aise au milieu de ces gens dans leurs bleus de travail en haillons ; nulle part on ne trouve une atmosphère aussi chaleureuse et sympathique que là où beaucoup de pauvres sont réunis.
A sa femme, Le Tréport, le vingt-sept mars mil neuf cent quarante-trois : Cet après-midi, j’ai vu un cortège amusant passer sous notre fenêtre. Une noce. Une très jeune fille marchait devant, blonde et rayonnante, âgée peut-être de seize ans, puis venaient plusieurs couples, et à la fin un jeune homme de dix-huit ans donnant le bras à une très vieille femme.
A sa femme, Le Tréport, le quatre avril mil neuf cent quarante-trois : Puis nous nous sommes rendus dans la petite ville voisine (Mers-les-Bains), où la promenade de la plage est un peu plus élégante et mieux entretenue ; pour l’heure, tout est défiguré par des bunkers, des tranchées et quantité de barbelés ; c’est fantastique de voir les belles villas élégantes dans ce décor menaçant ; les maisons au bord de la plage sont toutes inhabitées et murées du côté de la mer ; mais 10 mètres derrière ce « front avancé », la vie civile recommence déjà.
A sa femme, Le Tréport, le six avril mil neuf cent quarante-trois : Je dois encore te décrire un joli tableau que j’ai eu sous les yeux aujourd’hui. Nous avons ici une petite cuisinière, elle s’appelle Jacqueline, une blonde de seize ans, une jeune fille vraiment très gentille, une véritable enfant avec de grands yeux couleur de mer – je l’ai surprise ce soir avec son petit ami, elle a alors rougi – ce midi, j’ai vu cette fille frêle et pourtant naturelle – un rejeton d’une très vieille famille de pêcheurs – nettoyer des poissons dans la cuisine. C’est extraordinaire de voir avec quel sang-froid elle leur tranchait la tête, ouvrant le ventre et puis, découvrant mon regard horrifié de citadin, riait d’une façon très surprenante ; un tableau que Breughel aurait pu peindre : cette gamine plongée dans une occupation aussi sanglante et pourtant si innocente.
A sa femme, Le Tréport, le dix-sept avril mil neuf cent quarante-trois : Dehors, nous avons une belle soirée d’été, oui, vraiment estivale. L’air est chaud et parfumé, la mer roule ses vagues, et la jeunesse est dehors sur le quai ou accoudée, à chanter des chansons. Notre uniforme gris est décidément en exil.
A sa femme, Le Tréport, le dix-huit avril mil neuf cent quarante-trois : Les nuits ici sont maintenant souvent très agitées, même les après-midi sont remplis de violents combats aériens (…). La population s’amasse aux endroits d’où l’on voit le mieux, et sur leurs visages se dessine le reflet d’une profonde joie intérieure qui vibre de façon effrayante.
A sa femme, Le Tréport, le vingt avril mil neuf cent quarante-trois : Aujourd’hui, j’ai vécu une histoire très triste ; la police nous amène chaque jour les civils qui ont pénétré dans la zone interdite sans laissez-passer ; c’est souvent un mélange international d’Arabes, d’aventurières parisiennes et de braves gens, qui sont vraiment inoffensifs ; aujourd’hui, c’étaient ces pauvres filles. (…) … il me semble que, quelque part, une certaine égalité existe entre moi et ces filles ; comme si nous étions écorchés, dénudés et vendus de la même manière par la société des hommes…
Suite de mes prélèvements dans Lettres de guerre 1939-1945 publié chez L’Iconoclaste :
A sa femme, Léry (Eure), le quinze octobre mil neuf cent quarante-deux : Oui, je ne saurais te dire combien j’ai rencontré de paysans et de paysannes, jeunes et vieux ; sur chacun d’eux on pourrait écrire un roman, rien que sur leurs visages, ces visages de paysans au milieu de leur ferme, beaux et sévères, avec souvent un petit air effrayé ; nulle part je n’ai vu, comme en France, une telle sensualité, si ouverte et si belle sur les visages des paysans et de leurs femmes…
A sa femme, Pont-de-l’Arche, le vingt-six octobre mil neuf cent quarante-deux : Il y a quelque chose d’un peu déprimant à la longue quand on s’entretient avec les Français, tant ils sont convaincus que nous allons perdre la guerre ; vraiment, c’est étrange, je dirais qu’on en devient presque timide quand on demande un cantonnement ou autre chose ; on n’apparaît plus du tout comme des vainqueurs.
A sa femme, Pont-de-l’Arche, le quatre novembre mil neuf cent quarante-deux : Devant moi, à une table, sont assis quatre Français qui jouent aux dés, on en rencontre en masse et à toute heure du jour dans les cafés ; ils ont tout le temps de vivre ! Ah, je les envie tellement, même les ouvriers vêtus de loques sur leurs vélos ; souvent je les suis du regard, fasciné par leur air libre et digne ; ils sont vraiment magnifiques, j’en connais certains assez bien, des bûcherons de la forêt, des serruriers, des menuisiers, des peintres, des couvreurs ; ils sont tellement fiers et superbes…
A sa femme, à l’Ouest, Noël mil neuf cent quarante-deux : Je dois malheureusement écouter le discours de M. le ministre du Reich, le Dr Goebbels. Bon, ça va passer vite… Mais c’est bien le plus grand crime qu’on puisse commettre envers les soldats morts au combat ; le plus grand crime, ce sont ces phrases creuses, ces discours visqueux… Quelle horreur d’entendre des vers d’Hölderlin de la bouche de cet homme…
A sa femme, Tully, le vingt-neuf janvier mil neuf cent quarante-trois : Les Français ont imaginé une nouvelle vacherie qui (…) m’a atteint comme un coup de massue ! L’effet en est foudroyant, ils inscrivent tout simplement « 1918 » sur les murs, ces quatre chiffres sans aucun commentaire, un simple nombre, mais ô combien déprimant…
A sa femme, Le Tréport, le vingt-trois mars mil neuf cent quarante-trois : Ah, je pense sans arrêt au jour où, libéré du fardeau gris de la guerre, je pourrai admirer ces merveilles avec toi : oui, tous les lieux que j’ai visités ici en France, Amiens, Rouen, tous les petits coins sur la côte et dans l’intérieur des terres, et aussi les petits patelins gris et désolés des étapes, les positions de réserve, et surtout Paris, si grand, si splendide.
A sa femme, Le Tréport, le vingt-six mars mil neuf cent quarante-trois : A vrai dire, je me suis senti très à l’aise au milieu de ces gens dans leurs bleus de travail en haillons ; nulle part on ne trouve une atmosphère aussi chaleureuse et sympathique que là où beaucoup de pauvres sont réunis.
A sa femme, Le Tréport, le vingt-sept mars mil neuf cent quarante-trois : Cet après-midi, j’ai vu un cortège amusant passer sous notre fenêtre. Une noce. Une très jeune fille marchait devant, blonde et rayonnante, âgée peut-être de seize ans, puis venaient plusieurs couples, et à la fin un jeune homme de dix-huit ans donnant le bras à une très vieille femme.
A sa femme, Le Tréport, le quatre avril mil neuf cent quarante-trois : Puis nous nous sommes rendus dans la petite ville voisine (Mers-les-Bains), où la promenade de la plage est un peu plus élégante et mieux entretenue ; pour l’heure, tout est défiguré par des bunkers, des tranchées et quantité de barbelés ; c’est fantastique de voir les belles villas élégantes dans ce décor menaçant ; les maisons au bord de la plage sont toutes inhabitées et murées du côté de la mer ; mais 10 mètres derrière ce « front avancé », la vie civile recommence déjà.
A sa femme, Le Tréport, le six avril mil neuf cent quarante-trois : Je dois encore te décrire un joli tableau que j’ai eu sous les yeux aujourd’hui. Nous avons ici une petite cuisinière, elle s’appelle Jacqueline, une blonde de seize ans, une jeune fille vraiment très gentille, une véritable enfant avec de grands yeux couleur de mer – je l’ai surprise ce soir avec son petit ami, elle a alors rougi – ce midi, j’ai vu cette fille frêle et pourtant naturelle – un rejeton d’une très vieille famille de pêcheurs – nettoyer des poissons dans la cuisine. C’est extraordinaire de voir avec quel sang-froid elle leur tranchait la tête, ouvrant le ventre et puis, découvrant mon regard horrifié de citadin, riait d’une façon très surprenante ; un tableau que Breughel aurait pu peindre : cette gamine plongée dans une occupation aussi sanglante et pourtant si innocente.
A sa femme, Le Tréport, le dix-sept avril mil neuf cent quarante-trois : Dehors, nous avons une belle soirée d’été, oui, vraiment estivale. L’air est chaud et parfumé, la mer roule ses vagues, et la jeunesse est dehors sur le quai ou accoudée, à chanter des chansons. Notre uniforme gris est décidément en exil.
A sa femme, Le Tréport, le dix-huit avril mil neuf cent quarante-trois : Les nuits ici sont maintenant souvent très agitées, même les après-midi sont remplis de violents combats aériens (…). La population s’amasse aux endroits d’où l’on voit le mieux, et sur leurs visages se dessine le reflet d’une profonde joie intérieure qui vibre de façon effrayante.
A sa femme, Le Tréport, le vingt avril mil neuf cent quarante-trois : Aujourd’hui, j’ai vécu une histoire très triste ; la police nous amène chaque jour les civils qui ont pénétré dans la zone interdite sans laissez-passer ; c’est souvent un mélange international d’Arabes, d’aventurières parisiennes et de braves gens, qui sont vraiment inoffensifs ; aujourd’hui, c’étaient ces pauvres filles. (…) … il me semble que, quelque part, une certaine égalité existe entre moi et ces filles ; comme si nous étions écorchés, dénudés et vendus de la même manière par la société des hommes…
23 janvier 2021
Parmi mes lectures d’avant-guerre, Lettres de guerre 1939-1945 d’Heinrich Böll chez L’Iconoclaste. Car avant d’être Prix Nobel de Littérature, Böll fut sous l’uniforme nazi, soldat malgré lui dans l’armée d’occupation allemande. Ses premières lettres sont pour ses parents, puis le voici marié écrivant à sa femme.
Mon choix :
A ses parents, Osnabrück, le vingt-sept octobre mil neuf cent trente-neuf : Je vous remercie pour toutes ces affaires, surtout pour les fixe-chaussettes, qui me sont très utiles.
A ses parents, Beaucourt-sur-l’Hallue, douze août mil neuf cent quarante : Notre chef de section, un sous-lieutenant de vingt-deux ans, a même la Croix de fer de première classe, je ne l’ai vu jusqu’ici qu’en état d’ébriété dans un café français ; il avait l’air plutôt sympathique.
A ses parents, Beaucourt-sur-l’Hallue, dix-huit août mil neuf cent quarante : Nous menons donc, en apparence, une vie radieuse, malheureusement ce n’est qu’une apparence…
A ses parents, Bientques, près de Saint-Omer, le dix mai mil neuf cent quarante-deux : Le plus agréable, c’est encore de parler de temps en temps de la guerre avec de bons vieux Français ; qui va la gagner ou la perdre, quand va-t-elle se terminer, et de conclure que la vie de soldat est une sacrée merde…
A sa femme, Bientques, dimanche de Pentecôte mil neuf cent quarante-deux : De douces collines se succèdent dans le paysage aussi loin que porte le regard, partout des arbustes et des arbrisseaux, la moindre petite propriété est entourée d’un buisson épais ; c’est l’endroit idéal pour faire l’école buissonnière, c’est-à-dire sécher l’école. Ah, sécher l’école, pouvoir encore sécher l’école. Je ne pense pourtant pas être devenu moins raisonnable au fil des années, absolument pas, mais je regrette vraiment de ne pas avoir manqué l’école plus souvent, chaque jour aurait été un jour de gagné sur la vie.
A sa femme, Calais, le seize juillet mil neuf cent quarante-deux : Notre vie est vraiment et véritablement habitée par cette guerre, cette guerre qui s’empare totalement de nous…
A sa femme, cap Gris-Nez, le dix-huit juillet mil neuf cent quarante-deux : Mais aujourd’hui, je suis trempé, frigorifié et triste. Je suis triste à cause de cette misère immense et absurde qu’est la guerre, qui nous use et nous détruit tous : j’ai les nerfs complètement à plat, au point qu’il m’arrive d’oublier des choses qu’on m’a dîtes une minute plus tôt ; ce métier de soldat, je le déteste au-delà de toute expression.
A sa femme, cap Gris-Nez, le dix-neuf juillet mil neuf cent quarante-deux : Quand je rentrerai de la guerre, tu devras au début, avoir beaucoup de patience avec moi, je serai compliqué, paresseux, instable, j’aurai du mal à bien comprendre l’utilité du travail…
A sa femme, cap Gris Nez, neuf août mil neuf cent quarante-deux : Rends-toi compte, il a suffi qu’une petite catin vienne de Calais ou de Boulogne et barbote dans la mer pour que l’on se réjouisse ; je ne l’ai pas regardée longtemps, et ne suis, pas allé la voir à la jumelle – tous les troufions s’y sont précipités comme des sauvages…
A sa femme, cap Gris-Nez, le cinq septembre mil neuf cent quarante-deux : Aujourd’hui, la mer a rejeté beaucoup de morts de l’expédition de Dieppe ; des Anglais, mon Dieu, ils ont un aspect épouvantable ; dans toute la baie, il en est arrivé beaucoup sur le rivage, l’un d’eux juste devant notre bunker, apparemment un Canadien, un homme brun, à part ça on ne distinguait plus rien de son visage, il avait une petite croix dorée sur la poitrine ; un Canadien catholique sans doute ; c’est une chose vraiment horrible de voir ainsi le vrai visage de la guerre.
A sa femme, cap Gris-Nez, le neuf septembre mil neuf cent quarante-deux : Souvent, ces ouvriers français en guenilles qui nous croisent sur leurs vélos antédiluviens et boueux, et qui nous regardent avec indifférence, me font l’effet de jeunes dieux ; le soir venu, ils peuvent embrasser leur femme et boire du vin, et même s’ils sont privés de toute liberté politique – chose terriblement humiliante pour un homme – ils n’en sont pas moins auréolés de cette grandeur de la pauvreté et de la douleur, qui élève le mendiant au niveau du noble…
*
Nous avons affaire à un jeune homme plutôt content de lui, outrecuidant à souhait, assez vert et immature pour répéter pieusement les pires poncifs de la raciologie de son temps et d’une psychologie de peuples apprise en famille, à l’école et au comptoir. écrit dans la préface Johan Chapoutot, professeur d’histoire contemporaine à la Sorbonne. Je ne sais où ce professeur est allé chercher ça. Chacune des lettres d’Heinrich Böll montre le contraire.
Mon choix :
A ses parents, Osnabrück, le vingt-sept octobre mil neuf cent trente-neuf : Je vous remercie pour toutes ces affaires, surtout pour les fixe-chaussettes, qui me sont très utiles.
A ses parents, Beaucourt-sur-l’Hallue, douze août mil neuf cent quarante : Notre chef de section, un sous-lieutenant de vingt-deux ans, a même la Croix de fer de première classe, je ne l’ai vu jusqu’ici qu’en état d’ébriété dans un café français ; il avait l’air plutôt sympathique.
A ses parents, Beaucourt-sur-l’Hallue, dix-huit août mil neuf cent quarante : Nous menons donc, en apparence, une vie radieuse, malheureusement ce n’est qu’une apparence…
A ses parents, Bientques, près de Saint-Omer, le dix mai mil neuf cent quarante-deux : Le plus agréable, c’est encore de parler de temps en temps de la guerre avec de bons vieux Français ; qui va la gagner ou la perdre, quand va-t-elle se terminer, et de conclure que la vie de soldat est une sacrée merde…
A sa femme, Bientques, dimanche de Pentecôte mil neuf cent quarante-deux : De douces collines se succèdent dans le paysage aussi loin que porte le regard, partout des arbustes et des arbrisseaux, la moindre petite propriété est entourée d’un buisson épais ; c’est l’endroit idéal pour faire l’école buissonnière, c’est-à-dire sécher l’école. Ah, sécher l’école, pouvoir encore sécher l’école. Je ne pense pourtant pas être devenu moins raisonnable au fil des années, absolument pas, mais je regrette vraiment de ne pas avoir manqué l’école plus souvent, chaque jour aurait été un jour de gagné sur la vie.
A sa femme, Calais, le seize juillet mil neuf cent quarante-deux : Notre vie est vraiment et véritablement habitée par cette guerre, cette guerre qui s’empare totalement de nous…
A sa femme, cap Gris-Nez, le dix-huit juillet mil neuf cent quarante-deux : Mais aujourd’hui, je suis trempé, frigorifié et triste. Je suis triste à cause de cette misère immense et absurde qu’est la guerre, qui nous use et nous détruit tous : j’ai les nerfs complètement à plat, au point qu’il m’arrive d’oublier des choses qu’on m’a dîtes une minute plus tôt ; ce métier de soldat, je le déteste au-delà de toute expression.
A sa femme, cap Gris-Nez, le dix-neuf juillet mil neuf cent quarante-deux : Quand je rentrerai de la guerre, tu devras au début, avoir beaucoup de patience avec moi, je serai compliqué, paresseux, instable, j’aurai du mal à bien comprendre l’utilité du travail…
A sa femme, cap Gris Nez, neuf août mil neuf cent quarante-deux : Rends-toi compte, il a suffi qu’une petite catin vienne de Calais ou de Boulogne et barbote dans la mer pour que l’on se réjouisse ; je ne l’ai pas regardée longtemps, et ne suis, pas allé la voir à la jumelle – tous les troufions s’y sont précipités comme des sauvages…
A sa femme, cap Gris-Nez, le cinq septembre mil neuf cent quarante-deux : Aujourd’hui, la mer a rejeté beaucoup de morts de l’expédition de Dieppe ; des Anglais, mon Dieu, ils ont un aspect épouvantable ; dans toute la baie, il en est arrivé beaucoup sur le rivage, l’un d’eux juste devant notre bunker, apparemment un Canadien, un homme brun, à part ça on ne distinguait plus rien de son visage, il avait une petite croix dorée sur la poitrine ; un Canadien catholique sans doute ; c’est une chose vraiment horrible de voir ainsi le vrai visage de la guerre.
A sa femme, cap Gris-Nez, le neuf septembre mil neuf cent quarante-deux : Souvent, ces ouvriers français en guenilles qui nous croisent sur leurs vélos antédiluviens et boueux, et qui nous regardent avec indifférence, me font l’effet de jeunes dieux ; le soir venu, ils peuvent embrasser leur femme et boire du vin, et même s’ils sont privés de toute liberté politique – chose terriblement humiliante pour un homme – ils n’en sont pas moins auréolés de cette grandeur de la pauvreté et de la douleur, qui élève le mendiant au niveau du noble…
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Nous avons affaire à un jeune homme plutôt content de lui, outrecuidant à souhait, assez vert et immature pour répéter pieusement les pires poncifs de la raciologie de son temps et d’une psychologie de peuples apprise en famille, à l’école et au comptoir. écrit dans la préface Johan Chapoutot, professeur d’histoire contemporaine à la Sorbonne. Je ne sais où ce professeur est allé chercher ça. Chacune des lettres d’Heinrich Böll montre le contraire.
22 janvier 2021
Chaque jour est un peu plus décourageant que le précédent. On en est maintenant à devoir se tenir à deux mètres des autres et il faudra bientôt porter le masque médical en forme de bec de canard. Tout ça par la faute du variant dit anglais qui nous promet des jours encore plus noirs et un troisième confinement.
Quant à songer être vacciné prochainement il ne saurait en être question, admet Oliver Véran, Ministre de la Santé. Pas la peine que j’y compte avant les beaux jours (si je suis encore vivant).
« Soixante-six millions de procureurs », déclare Emmanuel Macron, Président, se plaignant des Français, y compris des moutards. Et moi et moi et moi ?
*
Viendra le jour où il faudra sortir en scaphandre.
*
« Depuis le parvis et la rue Saint-Romain, quatre gros impacts sont visibles dans la bâche blanche (20 m de haut) terminée depuis quelques semaines seulement. Le clocheton situé juste à côté semble lui aussi touché dans sa partie sommitale. », écrit Paris Normandie m’expliquant pourquoi j’ai si peu dormi l’autre nuit quand soufflait la tempête qui n’a pas de nom.
Quant à songer être vacciné prochainement il ne saurait en être question, admet Oliver Véran, Ministre de la Santé. Pas la peine que j’y compte avant les beaux jours (si je suis encore vivant).
« Soixante-six millions de procureurs », déclare Emmanuel Macron, Président, se plaignant des Français, y compris des moutards. Et moi et moi et moi ?
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Viendra le jour où il faudra sortir en scaphandre.
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« Depuis le parvis et la rue Saint-Romain, quatre gros impacts sont visibles dans la bâche blanche (20 m de haut) terminée depuis quelques semaines seulement. Le clocheton situé juste à côté semble lui aussi touché dans sa partie sommitale. », écrit Paris Normandie m’expliquant pourquoi j’ai si peu dormi l’autre nuit quand soufflait la tempête qui n’a pas de nom.
21 janvier 2021
Il est des tempêtes dotées d’un prénom dont la météo annonce l’importance et qui ne donnent que des effets insignifiants. Il est aussi des coups de vent non qualifiés de tempête, et donc non prénommés, qui s’avèrent bien plus bruyants. Ainsi cette nuit, celui qui m’empêche de dormir en raison de sa rencontre avec le pansement en plastique qui entoure le bas de la flèche de la Cathédrale. Aux pires moments, c’est comme si j’étais sur un quai de gare au moment où passe un train de fret.
Au matin de ce jeudi, le vent souffle toujours et le bruit persiste en haut de la Cathédrale. Cet édifice est le plus bruyant des voisins. Chaque dimanche à dix heures, une volée de cloches m’empêche d’entendre le début de Remède à la Mélancolie. Son Archevêque pourrait être mis en cause pour tapage, diurne et nocturne.
*
Lors de la cérémonie d’investiture de Kamala Harris et Joe Baden This Land is Your Land de Woody Guthrie chanté par Jennifer Lopez. Ce qui me rappelle, au temps de leur splendeur, Joan Baez et Bob Dylan.
Au matin de ce jeudi, le vent souffle toujours et le bruit persiste en haut de la Cathédrale. Cet édifice est le plus bruyant des voisins. Chaque dimanche à dix heures, une volée de cloches m’empêche d’entendre le début de Remède à la Mélancolie. Son Archevêque pourrait être mis en cause pour tapage, diurne et nocturne.
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Lors de la cérémonie d’investiture de Kamala Harris et Joe Baden This Land is Your Land de Woody Guthrie chanté par Jennifer Lopez. Ce qui me rappelle, au temps de leur splendeur, Joan Baez et Bob Dylan.
20 janvier 2021
Encore un rendez-vous bancaire à l’approche de mes soixante-dix ans, celui qui me fait pousser la porte de la maison de L’Ecureuil ce mardi à dix heures place Saint-Marc (je fréquentais celle de la place de la Calende mais elle a été fermée).
Je fais le point avec celui qui est censé s’occuper de mon compte et qui se plaint de ne pas avoir tous les papiers nécessaires me concernant. Il en a pourtant déjà pas mal. Il me répond qu’on en demande toujours plus. Il s’en passera cette fois encore. « Je suis malgré tout client chez vous depuis ma naissance », lui fais-je remarquer. Pour fêter l’évènement, Grand-Mère Eugénie avait ouvert un Livret A à mon nom.
Comme je suis resté trop longtemps sans faire de retrait ou de dépôt sur mon Livret A, cela m’a valu de recevoir il y a quelques semaines une lettre circulaire de L’Ecureuil me menaçant de mettre mon avoir dans la Caisse des Dépôts et Consignations.
*
Un qui était né la même année que moi et n’aura pas soixante-dix ans : Jean-Pierre Bacri, mort d’un cancer en ce Blue Monday réputé le jour le plus déprimant de l’année. Je l’ai apprécié dans certains de ses films, notamment On connaît la chanson, quand j’allais au cinéma, bien accompagné.
En deux mille dix-huit dans sa dernière interviou sur France Culture, il évoquait le sujet qui hante mes nuits et mes jours :
« Ce que provoque le vieillissement, on se sent exilé, on se sent rejeté (…) on ne peut plus être dans tout ce qui bouillonne. On nait dans la jeunesse, on passe son temps à être jeune et puis un jour on est exilé de ce pays, et l’exil c’est toujours dur. Tout à coup, on vous explique que vous n’êtes plus dans le coup. Votre miroir vous l’explique. Vous prenez conscience que vous vous modifiez, que le regard sur vous se modifie, que vous perdez ces jeux de séduction que vous amusait tellement avec les jeunes femmes. C’est terminé. Et puis vous vous regardez vieillir, vous voyez les plis, les choses qui tombent de votre menton. Vous êtes obligé de le constater. Ce que font la plupart des gens qui vous disent qu’ils ont une sorte de sérénité qui leur est tombée dessus à la vieillesse, mais on sait très bien que ce n’est pas ça, c’est un bouleversement terrible et on est obligé de le remarquer et d’en être affecté pendant un moment. »
Je fais le point avec celui qui est censé s’occuper de mon compte et qui se plaint de ne pas avoir tous les papiers nécessaires me concernant. Il en a pourtant déjà pas mal. Il me répond qu’on en demande toujours plus. Il s’en passera cette fois encore. « Je suis malgré tout client chez vous depuis ma naissance », lui fais-je remarquer. Pour fêter l’évènement, Grand-Mère Eugénie avait ouvert un Livret A à mon nom.
Comme je suis resté trop longtemps sans faire de retrait ou de dépôt sur mon Livret A, cela m’a valu de recevoir il y a quelques semaines une lettre circulaire de L’Ecureuil me menaçant de mettre mon avoir dans la Caisse des Dépôts et Consignations.
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Un qui était né la même année que moi et n’aura pas soixante-dix ans : Jean-Pierre Bacri, mort d’un cancer en ce Blue Monday réputé le jour le plus déprimant de l’année. Je l’ai apprécié dans certains de ses films, notamment On connaît la chanson, quand j’allais au cinéma, bien accompagné.
En deux mille dix-huit dans sa dernière interviou sur France Culture, il évoquait le sujet qui hante mes nuits et mes jours :
« Ce que provoque le vieillissement, on se sent exilé, on se sent rejeté (…) on ne peut plus être dans tout ce qui bouillonne. On nait dans la jeunesse, on passe son temps à être jeune et puis un jour on est exilé de ce pays, et l’exil c’est toujours dur. Tout à coup, on vous explique que vous n’êtes plus dans le coup. Votre miroir vous l’explique. Vous prenez conscience que vous vous modifiez, que le regard sur vous se modifie, que vous perdez ces jeux de séduction que vous amusait tellement avec les jeunes femmes. C’est terminé. Et puis vous vous regardez vieillir, vous voyez les plis, les choses qui tombent de votre menton. Vous êtes obligé de le constater. Ce que font la plupart des gens qui vous disent qu’ils ont une sorte de sérénité qui leur est tombée dessus à la vieillesse, mais on sait très bien que ce n’est pas ça, c’est un bouleversement terrible et on est obligé de le remarquer et d’en être affecté pendant un moment. »
19 janvier 2021
C’est parti pour le vaccinage des plus de soixante-quinze ans et des pas encore vieux mais déjà fragiles. A Rouen, ces privilégiés peuvent choisir de se faire piquer au Céhachu ou au Cabinet Médical des Carmes. La deuxième option semble la plus confortable. C’est celle que j’aurais choisie si j’avais été concerné.
Quand ce lundi matin je passe par cette place des Carmes, je constate que cela n’aura pas lieu dans le cabinet médical mais devant, sous des tentes genre Croix Rouge. C’est toujours moins bien que prévu.
Je suis curieux de savoir comment ça se passera quand on en sera à la deuxième dose pour les premiers de la liste. Ils bloqueront toute possibilité de nouveaux rendez-vous et y aura-t-il assez de doses pour tous ? Il y a bien longtemps quand, enseignant, j’avais dû me faire vacciner en deux fois contre l’une des hépatites, à la première j’avais eu le vaccin français et à la seconde le vaccin américain, car plus de français. « Ce n’est pas grave », m’avait dit le médecin.
Là, en ce qui me concerne, j’ai bien peur, quand ce sera mon tour, de n’avoir droit qu’au troisième vaccin, l’Astra-Zeneca, celui qui n’est efficace qu’à soixante-dix pour cent, et donc d’être vacciné sans pour autant être bien protégé du Covid. Comme, pour la grippe, le sont et ne le sont pas, les vaccinés.
Grâce au vaccinage, il y aura toujours des malades du Covid, mais moins. Ce qui permettra de ne pas engorger les réanimations des hôpitaux. Les morts se feront discrets, ils ne déborderont plus sur les trottoirs. Et donc, une fois que leur nombre sera tout à fait acceptable, on n’en aura rien à foutre, comme de ceux de la grippe saisonnière, avant-guerre.
La vie avant l’économie (qu’ils disent). En réalité c’est : l’économie arrêtée plutôt que l’insupportable spectacle de la mort.
*
Le vaccinage des Carmes se fera dans le dos de la statue de Flaubert, ce fils de médecin dont on fêtera en fin d’année le deux centième anniversaire de la naissance.
« Faites-moi des grimaces dans le dos tant que vous voudrez ; mon cul vous contemple. », écrivait-il le vingt-huit juin mil huit cinquante-trois à Louise Colet.
Quand ce lundi matin je passe par cette place des Carmes, je constate que cela n’aura pas lieu dans le cabinet médical mais devant, sous des tentes genre Croix Rouge. C’est toujours moins bien que prévu.
Je suis curieux de savoir comment ça se passera quand on en sera à la deuxième dose pour les premiers de la liste. Ils bloqueront toute possibilité de nouveaux rendez-vous et y aura-t-il assez de doses pour tous ? Il y a bien longtemps quand, enseignant, j’avais dû me faire vacciner en deux fois contre l’une des hépatites, à la première j’avais eu le vaccin français et à la seconde le vaccin américain, car plus de français. « Ce n’est pas grave », m’avait dit le médecin.
Là, en ce qui me concerne, j’ai bien peur, quand ce sera mon tour, de n’avoir droit qu’au troisième vaccin, l’Astra-Zeneca, celui qui n’est efficace qu’à soixante-dix pour cent, et donc d’être vacciné sans pour autant être bien protégé du Covid. Comme, pour la grippe, le sont et ne le sont pas, les vaccinés.
Grâce au vaccinage, il y aura toujours des malades du Covid, mais moins. Ce qui permettra de ne pas engorger les réanimations des hôpitaux. Les morts se feront discrets, ils ne déborderont plus sur les trottoirs. Et donc, une fois que leur nombre sera tout à fait acceptable, on n’en aura rien à foutre, comme de ceux de la grippe saisonnière, avant-guerre.
La vie avant l’économie (qu’ils disent). En réalité c’est : l’économie arrêtée plutôt que l’insupportable spectacle de la mort.
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Le vaccinage des Carmes se fera dans le dos de la statue de Flaubert, ce fils de médecin dont on fêtera en fin d’année le deux centième anniversaire de la naissance.
« Faites-moi des grimaces dans le dos tant que vous voudrez ; mon cul vous contemple. », écrivait-il le vingt-huit juin mil huit cinquante-trois à Louise Colet.
18 janvier 2021
Chaque semaine ressemble à la précédente. En journée, j’écoute France Culture. Le matin, je n’omets que la superficielle émission consacrée à l’Histoire. L’après-midi, je vais des Pieds sur terre à La Méthode scientifique (si le sujet me tente). Le soir, je me réfugie dans les livres. Hier, je suis arrivé au bout des Journaux de Lewis Carroll, ce qui m’a demandé quelque effort. Certaines années sont manquantes. On ne sait pas si perdues ou détruites en raison de leur contenu. De même qu’on ne sait pas pourquoi l’auteur abandonna la photographie.
*
Pas une journée sur France Culture sans entendre que « le diable est dans les détails ». Autre expression exaspérante qu’on y emploie à tout va : « sortir de sa zone de confort ».
*
Entendu aussi une intervenante déclarer « J’habite un corps de femme ». Ayant d’abord compris « J’habite un corps de ferme », je me suis dit « Quel rapport avec le sujet de l’émission ? » (il était question de Sade et de Villon).
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Pas une journée sur France Culture sans entendre que « le diable est dans les détails ». Autre expression exaspérante qu’on y emploie à tout va : « sortir de sa zone de confort ».
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Entendu aussi une intervenante déclarer « J’habite un corps de femme ». Ayant d’abord compris « J’habite un corps de ferme », je me suis dit « Quel rapport avec le sujet de l’émission ? » (il était question de Sade et de Villon).
15 janvier 2021
Cette fois je me dispense de suivre l’intervention de Jean Castex, connaissant déjà comme tout le monde le point essentiel, l’avance du couvre-feu à dix-huit heures, ce qui ne saurait me concerner en rien. Cela fait des mois que je n’ai pas mis un pied dehors après dix-huit heures. Qu’y ferais-je ? Même quand les cafés étaient ouverts on ne m’y voyait pas. Je déteste l’heure de l’apéro, où l’humain doit être « convivial ».
On échappe donc, à ce stade (comme disent certains Ministres), au troisième confinement. La situation française n’est pas suffisamment grave, surtout quand on la compare aux pays voisins. Le gouvernement dit que c’est grâce à lui. Peut-être, mais il y a aussi le hasard, ce me semble. Tant de choses échappent à l’entendement dans la propagation de ce coronavirus et de ses variants.
Ainsi, pourquoi donc l’Hôpital de Dieppe est-il à ce point touché ? Cent vingt patients y sont atteints du Covid et soixante-quatorze membres de son personnel sont positifs et donc absents.
*
Il y a de quoi se poiler d’entendre sur France Culture user du verbe divulgâcher à la place de spoiler alors qu’il suffirait d’employer dévoiler.
*
A partir de quelle année, est-il devenu criminel de dévoiler la fin d’un film ou d’un livre à qui ne l’a pas encore vu ou lu ? Je me souviens d’un temps où nul ne s’en offusquait.
On échappe donc, à ce stade (comme disent certains Ministres), au troisième confinement. La situation française n’est pas suffisamment grave, surtout quand on la compare aux pays voisins. Le gouvernement dit que c’est grâce à lui. Peut-être, mais il y a aussi le hasard, ce me semble. Tant de choses échappent à l’entendement dans la propagation de ce coronavirus et de ses variants.
Ainsi, pourquoi donc l’Hôpital de Dieppe est-il à ce point touché ? Cent vingt patients y sont atteints du Covid et soixante-quatorze membres de son personnel sont positifs et donc absents.
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Il y a de quoi se poiler d’entendre sur France Culture user du verbe divulgâcher à la place de spoiler alors qu’il suffirait d’employer dévoiler.
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A partir de quelle année, est-il devenu criminel de dévoiler la fin d’un film ou d’un livre à qui ne l’a pas encore vu ou lu ? Je me souviens d’un temps où nul ne s’en offusquait.
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