Aguiché par une météo prévoyant un lundi au soleil, j’ai pris samedi un billet de train pour Dieppe et me voici au matin remontant la rue de la Jeanne sous un ciel gris et quelques gouttes après qu’il a plu dans la nuit.
Ce train pour Dieppe est caché voie huit. Il est tout neuf, muni d’écrans indiquant où l’on en est du trajet comme dans un avion. Un groupe de moutards étonnamment calmes me tient compagnie. A l’arrivée, le contrôleur dit au revoir à chacun comme à la descente d’un bateau.
Les bateaux sont là dans le port mais peu visibles car c’est marée basse. Je longe ceux des pêcheurs et, passant devant l’Office de Tourisme, y entre poser une question dont je connais par avance la réponse :
-Avez-vous une documentation sur Dieppe et les écrivains ?
C’est pourtant le seul endroit où Céline et Cioran étaient capables de venir en vacances, et nombreux sont ceux qui sont passés par ici, Faulkner y fut même arrêté pour vagabondage.
Après un café au Tout Va Bien et le temps s’améliorant, je vais voir la plage quasi déserte puis marche jusqu’au bout de la jetée, laquelle est colonisée par les pêcheurs. Une forte odeur d’urine justifie la pancarte « Défense d’uriner ». Là, je fais quelques photos des brise-lames de béton ajouré.
A midi, délaissant les restaurants à touristes, je déjeune à L’Espérance d’un menu à dix euros soixante-dix : assiette de buffet, langue sauce provençale accompagnée de frites de la maison, creumebeule aux pommes, avec une demie de sauvignon à cinq cinquante et vue sur le port derrière les voitures. J’y côtoie quelques employés solitaires, deux uniformes des Affaires Maritimes et un trio père mère fille. C’est bien bon et le service est aimable.
Pour le café, le temps devenu beau et pas trop chaud, je vise Le Mieux Ici Qu’En Face du Pollet mais cette taverne est fermée. Je me rabats sur l’intérieur de la ville et le prends à la terrasse du Brazza, sur la place de l’église Saint-Rémy autour de laquelle s’activent des chasseurs de Pokémon dont deux montés sur roulettes électriques (« On devient de plus en plus dingos », commente la serveuse). J’y lis, publié par Solin/Actes Sud, Paris 1941, le journal de Felix Hartlaub (qui fut soldat d’occupation francophile et mourut à Berlin en mil neuf cent quarante-cinq).
Rejoignant la gare pour y prendre le train de seize heures, je croise le seul Dieppois que je connaisse, en élégante tenue estivale et avec sa compagne. Nous échangeons quelques mots (sa peinture, mes écritures, nos lieux de vie) et nous nous invitons réciproquement à passer à l’occasion.
*
Un garçon de café du Tout Va Bien : « Le soir Dieppe c’est comme une île déserte, il fait froid à partir de six heures, six heures et demie. »
*
Avant le départ du train pour Rouen :
Un moutard et sa tante se séparant, des « je t’aime » et des « tu vas me manquer » à n’en plus finir et à n’y pas croire.
Une femme à une autre restée sur le quai : « L’argent est toujours planqué dans le livre Tous les chiens, tous les chats. »
Ce train pour Dieppe est caché voie huit. Il est tout neuf, muni d’écrans indiquant où l’on en est du trajet comme dans un avion. Un groupe de moutards étonnamment calmes me tient compagnie. A l’arrivée, le contrôleur dit au revoir à chacun comme à la descente d’un bateau.
Les bateaux sont là dans le port mais peu visibles car c’est marée basse. Je longe ceux des pêcheurs et, passant devant l’Office de Tourisme, y entre poser une question dont je connais par avance la réponse :
-Avez-vous une documentation sur Dieppe et les écrivains ?
C’est pourtant le seul endroit où Céline et Cioran étaient capables de venir en vacances, et nombreux sont ceux qui sont passés par ici, Faulkner y fut même arrêté pour vagabondage.
Après un café au Tout Va Bien et le temps s’améliorant, je vais voir la plage quasi déserte puis marche jusqu’au bout de la jetée, laquelle est colonisée par les pêcheurs. Une forte odeur d’urine justifie la pancarte « Défense d’uriner ». Là, je fais quelques photos des brise-lames de béton ajouré.
A midi, délaissant les restaurants à touristes, je déjeune à L’Espérance d’un menu à dix euros soixante-dix : assiette de buffet, langue sauce provençale accompagnée de frites de la maison, creumebeule aux pommes, avec une demie de sauvignon à cinq cinquante et vue sur le port derrière les voitures. J’y côtoie quelques employés solitaires, deux uniformes des Affaires Maritimes et un trio père mère fille. C’est bien bon et le service est aimable.
Pour le café, le temps devenu beau et pas trop chaud, je vise Le Mieux Ici Qu’En Face du Pollet mais cette taverne est fermée. Je me rabats sur l’intérieur de la ville et le prends à la terrasse du Brazza, sur la place de l’église Saint-Rémy autour de laquelle s’activent des chasseurs de Pokémon dont deux montés sur roulettes électriques (« On devient de plus en plus dingos », commente la serveuse). J’y lis, publié par Solin/Actes Sud, Paris 1941, le journal de Felix Hartlaub (qui fut soldat d’occupation francophile et mourut à Berlin en mil neuf cent quarante-cinq).
Rejoignant la gare pour y prendre le train de seize heures, je croise le seul Dieppois que je connaisse, en élégante tenue estivale et avec sa compagne. Nous échangeons quelques mots (sa peinture, mes écritures, nos lieux de vie) et nous nous invitons réciproquement à passer à l’occasion.
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Un garçon de café du Tout Va Bien : « Le soir Dieppe c’est comme une île déserte, il fait froid à partir de six heures, six heures et demie. »
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Avant le départ du train pour Rouen :
Un moutard et sa tante se séparant, des « je t’aime » et des « tu vas me manquer » à n’en plus finir et à n’y pas croire.
Une femme à une autre restée sur le quai : « L’argent est toujours planqué dans le livre Tous les chiens, tous les chats. »