Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
9 juin 2023
Les cars BreizhGo qui font la liaison Saint-Brieuc Paimpol (ligne numéro Un) ne sont pas des plus récents. J’ai l’impression qu’on y met ceux en fin de course. Certains n’annoncent pas les arrêts. Il faut donc avoir l’œil. Ce jeudi matin, dès que je devine les ruines, je sonne. Le chauffeur me dépose à l’arrêt Eglise à Kérity, logiquement situé devant l’église Saint-Samson. Elle n’a rien de remarquable.
Je remonte la route où circulent trop de voitures et camions jusqu’à trouver le sentier goudronné qui mène à l’abbaye de Beauport. A l’entrée de cet accès est une belle boîte à livres dont j’ouvre les portes. A l’intérieur, près de la daube habituelle, un certain nombre de livres neufs, de la poésie (elle ne se vend pas alors diffusons-la gratuitement). Il y a là des numéros de la revue Rumeurs, des hommages à Pasolini et à Boris Vian (pour son centenaire) et des recueils de divers auteurs publiés à La Passe du Vent. Je parcours tout ça, c’est mauvais.
Rien de plus avantageux pour une abbaye que d’être en ruine. Celle de Beauport l’est à moitié. Le soleil qui est de sortie me fait face, gênant pour les photos. Je la contourne en descendant vers la mer et trouve dans un pré, devant les bâtiments, des bovins qui se la coulent douce. L’un d’eux n’est pas couché, il est vautré. Au loin j’aperçois la pointe de Guilben. Nous sommes ici à Paimpol, dont Kérity est un quartier. Autrefois, c’était une commune indépendante. Jeanne Weber, tueuse en série, surnommée « l’Ogresse de la Goutte d’Or » y est née.
L’abbaye de Beauport se visite en payant mais ce n’est pas mon intention. Je remonte sur la route. La Crêperie de l’Abbaye n’est pas encore ouverte, je ne peux savoir si son intérieur m’inspirerait pour y déjeuner, et le seul troquet, le Cruckin Bar, ne me tente pas pour un café. Je consulte les horaires du car de retour et je vois qu’il y en a un dans cinq minutes à neuf heures quarante-cinq.
Ce qui me permet d’être sur mon perchoir du Café de la Plage à dix heures vingt-cinq. J’y termine Lettres d’Afrique de Karen Blixen, une relecture qui m’a enchanté. J’enchaîne avec Lettres à Sophie Volland de Denis Diderot, début d’une autre relecture.
A midi je déjeune à l’intérieur, du menu du jour à dix-neuf euros, œuf parfait bio crème au lard, burgueur de poisson pané maison sauce citron confit (hélas trop sec), moelleux au chocolat maison glace vanille, puis retrouve ma table haute dehors pour le café. A Rouen c’est le début de L’Armada, un évènement auquel je suis fort content d’échapper.
*
Parmi les livres de poésie de la boîte à livres de Kérity, Eparpillés de Cali (Editions Invenit). Un jour, il a quitté l’Hôtel de l’Europe où il logeait à Rouen avec un livre tiré de ma bibliothèque, des poésies de Guillaume Apollinaire. La comparaison est cruelle.
Je remonte la route où circulent trop de voitures et camions jusqu’à trouver le sentier goudronné qui mène à l’abbaye de Beauport. A l’entrée de cet accès est une belle boîte à livres dont j’ouvre les portes. A l’intérieur, près de la daube habituelle, un certain nombre de livres neufs, de la poésie (elle ne se vend pas alors diffusons-la gratuitement). Il y a là des numéros de la revue Rumeurs, des hommages à Pasolini et à Boris Vian (pour son centenaire) et des recueils de divers auteurs publiés à La Passe du Vent. Je parcours tout ça, c’est mauvais.
Rien de plus avantageux pour une abbaye que d’être en ruine. Celle de Beauport l’est à moitié. Le soleil qui est de sortie me fait face, gênant pour les photos. Je la contourne en descendant vers la mer et trouve dans un pré, devant les bâtiments, des bovins qui se la coulent douce. L’un d’eux n’est pas couché, il est vautré. Au loin j’aperçois la pointe de Guilben. Nous sommes ici à Paimpol, dont Kérity est un quartier. Autrefois, c’était une commune indépendante. Jeanne Weber, tueuse en série, surnommée « l’Ogresse de la Goutte d’Or » y est née.
L’abbaye de Beauport se visite en payant mais ce n’est pas mon intention. Je remonte sur la route. La Crêperie de l’Abbaye n’est pas encore ouverte, je ne peux savoir si son intérieur m’inspirerait pour y déjeuner, et le seul troquet, le Cruckin Bar, ne me tente pas pour un café. Je consulte les horaires du car de retour et je vois qu’il y en a un dans cinq minutes à neuf heures quarante-cinq.
Ce qui me permet d’être sur mon perchoir du Café de la Plage à dix heures vingt-cinq. J’y termine Lettres d’Afrique de Karen Blixen, une relecture qui m’a enchanté. J’enchaîne avec Lettres à Sophie Volland de Denis Diderot, début d’une autre relecture.
A midi je déjeune à l’intérieur, du menu du jour à dix-neuf euros, œuf parfait bio crème au lard, burgueur de poisson pané maison sauce citron confit (hélas trop sec), moelleux au chocolat maison glace vanille, puis retrouve ma table haute dehors pour le café. A Rouen c’est le début de L’Armada, un évènement auquel je suis fort content d’échapper.
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Parmi les livres de poésie de la boîte à livres de Kérity, Eparpillés de Cali (Editions Invenit). Un jour, il a quitté l’Hôtel de l’Europe où il logeait à Rouen avec un livre tiré de ma bibliothèque, des poésies de Guillaume Apollinaire. La comparaison est cruelle.
8 juin 2023
Une clientèle en trois tiers au Mustang ce mercredi vers sept heures et demie : en terrasse de jeunes soulards, dans un angle autour de l’habitué en chef les autres habitués et au centre un quatuor de marcheurs à bâton qui semblent tombés de la lune, deux couples (c’est courant cette façon de partir en vacances, elle évite à un époux et à une épouse d’être face à face). Quant à moi, je suis l’électron libre.
Ce matin, les habitués parlent cambriolage. L’un d’eux a eu de la visite cette nuit. Sa porte de garage a résisté mais est déformée. « Ce n’est pas à moi que ça arriverait, déclare l’octogénaire habitué en chef, j’ai mes chiens et puis de quoi dans ma cuisine avec les bastos dedans. »
Je rejoins les ports par le sentier dont je ne me lasse pas, mon endroit préféré étant celui où le chemin semble tomber dans la mer, et constate à l’arrivée que Le Poisson Rouge est en congé.
Il fait gris mais doux, cela me permet d’aller lire sur un banc de la jetée. Un bleu ou un jaune, j’ai le choix. De tels bancs en bois sont disposés un peu partout dans Saint-Quay, anciens et solides. Et par coïncidence, aux couleurs de l’Ukraine, où les évènements se précipitent et s’aggravent. De quoi est encore capable cette ordure de Poutine ? Nul ne le sait.
Ce n’est pas de ça dont parlent un groupe de femmes à l’intérieur de L’Ecume où je bois un café et lis en attendant midi, mais de la Fête des Mères de Laeticia Hallyday qui a publié une photo d’elle avec ses filles adoptives portant une robe ras la moule. L’une veut la montrer aux autres mais ne la retrouve pas : « Elle l’a retirée, elle a eu trop honte. »
Aux Plaisanciers, parmi les travailleurs qui font le tour du buffet, une dizaine de Gendarmes (certains armés) et aussi (mais assis ailleurs) deux Céhéresses dont un vieux, petit et maigre, qui doit se cacher derrière les autres quand il s’agit de bastonner. Comme plat, je choisis les rognons de bœuf.
Le café, c’est sous le soleil revenu à l’une des deux tables hautes du Café de la Plage. A l’autre est une femme triste devant un verre de vin blanc et la vue magnifique. Le goéland vient la voir mais elle en a peur et finit par partir.
*
Entendu dans la rue : « T’as été à Paimpol hier ? Y a plus la fête foraine j’espère. »
Ce matin, les habitués parlent cambriolage. L’un d’eux a eu de la visite cette nuit. Sa porte de garage a résisté mais est déformée. « Ce n’est pas à moi que ça arriverait, déclare l’octogénaire habitué en chef, j’ai mes chiens et puis de quoi dans ma cuisine avec les bastos dedans. »
Je rejoins les ports par le sentier dont je ne me lasse pas, mon endroit préféré étant celui où le chemin semble tomber dans la mer, et constate à l’arrivée que Le Poisson Rouge est en congé.
Il fait gris mais doux, cela me permet d’aller lire sur un banc de la jetée. Un bleu ou un jaune, j’ai le choix. De tels bancs en bois sont disposés un peu partout dans Saint-Quay, anciens et solides. Et par coïncidence, aux couleurs de l’Ukraine, où les évènements se précipitent et s’aggravent. De quoi est encore capable cette ordure de Poutine ? Nul ne le sait.
Ce n’est pas de ça dont parlent un groupe de femmes à l’intérieur de L’Ecume où je bois un café et lis en attendant midi, mais de la Fête des Mères de Laeticia Hallyday qui a publié une photo d’elle avec ses filles adoptives portant une robe ras la moule. L’une veut la montrer aux autres mais ne la retrouve pas : « Elle l’a retirée, elle a eu trop honte. »
Aux Plaisanciers, parmi les travailleurs qui font le tour du buffet, une dizaine de Gendarmes (certains armés) et aussi (mais assis ailleurs) deux Céhéresses dont un vieux, petit et maigre, qui doit se cacher derrière les autres quand il s’agit de bastonner. Comme plat, je choisis les rognons de bœuf.
Le café, c’est sous le soleil revenu à l’une des deux tables hautes du Café de la Plage. A l’autre est une femme triste devant un verre de vin blanc et la vue magnifique. Le goéland vient la voir mais elle en a peur et finit par partir.
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Entendu dans la rue : « T’as été à Paimpol hier ? Y a plus la fête foraine j’espère. »
7 juin 2023
Deux crêpes pour un euro quarante à la boulangerie Jacob Vincent et un allongé pour un euro cinquante au Narval, les deux seuls endroits ouverts à Binic vers huit heures quinze, voilà de quoi est fait mon petit-déjeuner de ce mardi. Il se déroule à l’intérieur car c’est encore ciel gris et vent frisquet. Le patron du bar tabac se demande depuis combien de temps ça dure. Bref, c’est encore un jour à marcher sur le Géherre Trente-Quatre. Ce que je vais faire, côté Saint-Brieuc, après avoir longé la plage de la Banche et contourné l’Hôtel de la Plage qui n’usurpe pas son nom. Mon objectif est la Pointe de Bréhin.
Ça démarre doucement mais c’est ensuite une succession de bonnes montées et de bonnes descentes séparées par du plat étroit, à peine la place d’y passer seul en se méfiant des orties. Un imposant escalier à descendre me fait penser être près du but. Il n’en est rien. Il faut encore grimper et descendre. Quand je commence à me décourager, j’aperçois la pointe, bien acérée, et je m’en tiens là.
En me retournant, je vois au loin tout Binic. Il me faut remonter l’imposant escalier. Ensuite c’est moins éprouvant qu’à l’aller. Néanmoins je dois m’asseoir sur un banc au-dessus de la plage de la Banche pour récupérer avant de rejoindre le port.
Pas loin de l’église est Le Chaland Qui Passe, un café maintenant ouvert dont la petite terrasse est à abri du vent et permet la vue sur les bateaux. J’y bois un café verre d’eau et y lis Karen Blixen. Vers onze heures et demie, on accroche une ardoise derrière mon dos. C’est ainsi que je découvre que l’endroit fait aussi restaurant succinct avec une formule plat dessert à douze euros. Je demande si je peux garder la table pour en profiter. « Pas de problème, me dit le cuisinier, je peux même vous servir maintenant si vous voulez. » Voilà qui est bien, je commande un quart de vin rouge pour accompagner le filet mignon pommes de terre rôties petits légumes sauce du chef. Le dessert est une mousse au chocolat menthe.
C’est une cuisine sans prétention mais fort bonne pour laquelle je paie dix-huit euros quarante en incluant le café d’avant repas. Par la rue intérieure, je rejoins le Narval pour un nouveau café lecture, en terrasse côté port (un euro quarante), puis je vais attendre le car BreizhGo du retour. J’en descends à l’arrêt Kertugal, encore plus proche de mon studio Air Bibi.
*
Pas très fier de moi : avant de découvrir que Le Chaland Qui Passe proposait à manger, j’avais réservé une table à L’Adresse où il y a deux ans et demi j’avais bien déjeuné. On m’aura attendu en vain. Je n’aime pas faire ça.
*
« Ouvert » est-il écrit en gros sur les vitres de certains hôtels qui doivent manquer de clientèle. Pourtant, il y a davantage de touristes à Binic qu’à Saint-Quay-Portrieux.
Un port rectangulaire, une plage de chaque côté, des restaurants bien alignés sur le port et dans la rue parallèle, on ne risque pas de s’égarer à Binic.
Saint-Quay n’est pas évidente mais tellement plus intéressante.
Ça démarre doucement mais c’est ensuite une succession de bonnes montées et de bonnes descentes séparées par du plat étroit, à peine la place d’y passer seul en se méfiant des orties. Un imposant escalier à descendre me fait penser être près du but. Il n’en est rien. Il faut encore grimper et descendre. Quand je commence à me décourager, j’aperçois la pointe, bien acérée, et je m’en tiens là.
En me retournant, je vois au loin tout Binic. Il me faut remonter l’imposant escalier. Ensuite c’est moins éprouvant qu’à l’aller. Néanmoins je dois m’asseoir sur un banc au-dessus de la plage de la Banche pour récupérer avant de rejoindre le port.
Pas loin de l’église est Le Chaland Qui Passe, un café maintenant ouvert dont la petite terrasse est à abri du vent et permet la vue sur les bateaux. J’y bois un café verre d’eau et y lis Karen Blixen. Vers onze heures et demie, on accroche une ardoise derrière mon dos. C’est ainsi que je découvre que l’endroit fait aussi restaurant succinct avec une formule plat dessert à douze euros. Je demande si je peux garder la table pour en profiter. « Pas de problème, me dit le cuisinier, je peux même vous servir maintenant si vous voulez. » Voilà qui est bien, je commande un quart de vin rouge pour accompagner le filet mignon pommes de terre rôties petits légumes sauce du chef. Le dessert est une mousse au chocolat menthe.
C’est une cuisine sans prétention mais fort bonne pour laquelle je paie dix-huit euros quarante en incluant le café d’avant repas. Par la rue intérieure, je rejoins le Narval pour un nouveau café lecture, en terrasse côté port (un euro quarante), puis je vais attendre le car BreizhGo du retour. J’en descends à l’arrêt Kertugal, encore plus proche de mon studio Air Bibi.
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Pas très fier de moi : avant de découvrir que Le Chaland Qui Passe proposait à manger, j’avais réservé une table à L’Adresse où il y a deux ans et demi j’avais bien déjeuné. On m’aura attendu en vain. Je n’aime pas faire ça.
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« Ouvert » est-il écrit en gros sur les vitres de certains hôtels qui doivent manquer de clientèle. Pourtant, il y a davantage de touristes à Binic qu’à Saint-Quay-Portrieux.
Un port rectangulaire, une plage de chaque côté, des restaurants bien alignés sur le port et dans la rue parallèle, on ne risque pas de s’égarer à Binic.
Saint-Quay n’est pas évidente mais tellement plus intéressante.
6 juin 2023
Terminé le soleil, ce lundi au réveil le ciel est gris. Ici, il semble ne faire beau que le dimanche. Autre désagrément, plus de ouifi. La box est dans le logement Air Bibi du dessous et les nouveaux arrivants, qui ne m’ont pas empêché de dormir, ont dû la débrancher. J’avertis mon logeur et c’est l’occasion de tester le partage de connexion de mon smartphone qu’a rendu opérationnel le serviable étudiant qui m’avait contacté au vu de mon peu de capacité dans ce domaine. Ça marche on ne peut mieux.
A mon arrivée au Mustang je trouve parmi la clientèle deux serveurs du Café de la Plage, établissement qui ferme à deux heures du matin. Déjà bien alcoolisés, ils boivent une bière avec des peutes à eux. L’un d’eux garde son verre pour aller aux toilettes.
Deux autres alcoolisés font l’ouverture du Poisson Rouge. Leur verre fini, ils s’en vont au volant de leur voiture. C’est jour de marché au Portrieux. Des femmes se retrouvent en terrasse après les courses. Elles font le compte des bouquets et cadeaux reçus la veille.
Quand vient le moment où je ne tiens plus dehors, je vais prendre un autre café à l’intérieur du Bon Dieu Sans Confession, un troquet situé dans une petite rue perpendiculaire au port, en face duquel se trouve une belle et grande librairie, Le Fanal, qui n’était pas là lors de mon précédent passage. Pas mal de femmes et d’hommes se succèdent au comptoir pendant que je lis à une table haute. C’est petit mais l’été, la rue est barrée et Le Bon Dieu y prend ses aises avec moult tables et quatre serveurs, raconte le patron à qui je paie un euro cinquante.
A midi, retour aux Plaisanciers où parmi les ouvriers et habitués du coin se glissent quelques touristes, dont un quatuor de marcheurs à bâton et sac à dos. Ces porteurs de chorte regardent l’agitation autour du buffet comme s’ils étaient arrivés chez une peuplade aux mœurs étranges et inquiétantes. Refusant de se mêler aux indigènes, ils prennent un plat unique et filent retrouver le chemin côtier.
Cette fois, je suis seul à la terrasse du Café de la Plage où les deux serveurs alcoolisés sont présents. Personne sur le plongeoir de la piscine d’eau de mer et pour cause : elle a été vidée et est en train d’être curée à l’aide d’une pelleteuse.
Remonté à mon logis temporaire, j’y retrouve sa ouifi maison.
*
Dans la partie détour par la route du chemin côtier, à huit heures trente, une fille en bikini pieds nus sur le macadam, suivi d’un garçon qui lui ne s’est pas baigné. « Je te l’avais dit qu’il fallait s’organiser », lui dit-il.
*
Un gars et une fille de la ville nettoyant les plantations du quai où se trouve le Poisson Rouge : « Oh, le soleil, là, putain, on n’en peut plus ! » « Oui, c’est la misère ».
*
Une cliente du Poisson Rouge à propos des moineaux qui viennent mendier des miettes de petits gâteaux :
-Ils sont marrants.
Le patron :
-Ils sont pas marrants, ils sont chiants.
*
Au Café de la Plage c’est un goéland qui vient se poser au plus près de ma table dans l’espoir de nourriture. Si je chasse les moineaux, je photographie l’oiseau blanc.
A mon arrivée au Mustang je trouve parmi la clientèle deux serveurs du Café de la Plage, établissement qui ferme à deux heures du matin. Déjà bien alcoolisés, ils boivent une bière avec des peutes à eux. L’un d’eux garde son verre pour aller aux toilettes.
Deux autres alcoolisés font l’ouverture du Poisson Rouge. Leur verre fini, ils s’en vont au volant de leur voiture. C’est jour de marché au Portrieux. Des femmes se retrouvent en terrasse après les courses. Elles font le compte des bouquets et cadeaux reçus la veille.
Quand vient le moment où je ne tiens plus dehors, je vais prendre un autre café à l’intérieur du Bon Dieu Sans Confession, un troquet situé dans une petite rue perpendiculaire au port, en face duquel se trouve une belle et grande librairie, Le Fanal, qui n’était pas là lors de mon précédent passage. Pas mal de femmes et d’hommes se succèdent au comptoir pendant que je lis à une table haute. C’est petit mais l’été, la rue est barrée et Le Bon Dieu y prend ses aises avec moult tables et quatre serveurs, raconte le patron à qui je paie un euro cinquante.
A midi, retour aux Plaisanciers où parmi les ouvriers et habitués du coin se glissent quelques touristes, dont un quatuor de marcheurs à bâton et sac à dos. Ces porteurs de chorte regardent l’agitation autour du buffet comme s’ils étaient arrivés chez une peuplade aux mœurs étranges et inquiétantes. Refusant de se mêler aux indigènes, ils prennent un plat unique et filent retrouver le chemin côtier.
Cette fois, je suis seul à la terrasse du Café de la Plage où les deux serveurs alcoolisés sont présents. Personne sur le plongeoir de la piscine d’eau de mer et pour cause : elle a été vidée et est en train d’être curée à l’aide d’une pelleteuse.
Remonté à mon logis temporaire, j’y retrouve sa ouifi maison.
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Dans la partie détour par la route du chemin côtier, à huit heures trente, une fille en bikini pieds nus sur le macadam, suivi d’un garçon qui lui ne s’est pas baigné. « Je te l’avais dit qu’il fallait s’organiser », lui dit-il.
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Un gars et une fille de la ville nettoyant les plantations du quai où se trouve le Poisson Rouge : « Oh, le soleil, là, putain, on n’en peut plus ! » « Oui, c’est la misère ».
*
Une cliente du Poisson Rouge à propos des moineaux qui viennent mendier des miettes de petits gâteaux :
-Ils sont marrants.
Le patron :
-Ils sont pas marrants, ils sont chiants.
*
Au Café de la Plage c’est un goéland qui vient se poser au plus près de ma table dans l’espoir de nourriture. Si je chasse les moineaux, je photographie l’oiseau blanc.
5 juin 2023
Heureuse surprise au réveil, du soleil et quasiment plus de vent. Pas de quoi toutefois s’asseoir à la terrasse du Mustang qui est à l’ombre vers sept heures et demie. A l’intérieur, ces messieurs parlent de leur service militaire. Celui qui retient l’attention l’a fait comme chauffeur au Ministère de la Défense du temps de Chevènement. Il conduisait ses enfants à Henri IV et sa femme à ses activités. Un qui vient d’entrer s’approche de ma table : « Il me semble que je vous connais. » Serait-ce un autre frère de ce Momo qui me faisait le coup à Toulon. Il lui ressemble un peu, lui aussi d’origine arabe. Il me dit avoir vécu à Rouen quand je lui dis que j’en viens mais ne m’en raconte pas plus. Je lui souhaite une bonne journée.
La mer est encore plus haute qu’hier ce dimanche. De la piscine ne dépasse que le plongeoir. La plage de la Comtesse est complétement sous l’eau. J’arrive au Poisson Rouge quand il ouvre, à neuf heures, et m’installe à l’une des petites tables rondes au soleil. J’y reste longtemps à lire. Jusqu’à ce que je sente que ma table est l’objet de convoitise.
En revenant par le dedans du bourg, je m’arrête à la boulangerie du milieu et achète un sandouiche poulet crudités et une part de far, six euros vingt pour le tout. Je poursuis jusqu’au Mustang. Cette fois, le soleil donne en terrasse. Il est onze heures et quart. Je commande à la fille de la maison une formule six huîtres verre de chardonnay avec du pain et du beurre. Elles sont fraîches et fort bonnes.
-Huit euros, me demande cette séduisante serveuse quand je l’appelle pour payer.
-Huit euros cinquante, lui dis-je.
-Non, huit euros.
-Huit euros cinquante avec le pain beurre, c’est ce qu’on m’a dit dimanche dernier.
-Ah oui, j’avais oublié. Merci monsieur. Vous êtes gentil.
C’est bien qu’on s’en aperçoive de temps en temps.
Je rejoins l’un des bancs au-dessus de la Grève Noire, enlève ma veste et sors de mon sac la suite de mon repas. Les vieilles et vieux propulsés à l’aide de l’électricité sont de retour sur le muret. Par les marches des jeunes couples et des jeunes femmes seules descendent pour la baignade. J’ai presque trop chaud à lire sur ce banc.
Vers quatorze heures je le quitte et ai la chance de trouver une des deux tables hautes libre au Café de le Plage. C’est la Fête des Mères, pas une table basse sans sa daronne. A l’autre table haute, une femme seule devant ses huîtres. Elle aussi y a droit car son téléphone sonne. « Oh mon chéri, c’est toi, tu ne m’as pas oubliée. »
La piscine d’eau de mer voit se succéder les plongeons. Encore un truc qui fait crier les filles. Autant qu’un manège à la Saint-Romain.
*
Un pêcheur au Mustang : « Ils annoncent encore de la mer ».
La mer est encore plus haute qu’hier ce dimanche. De la piscine ne dépasse que le plongeoir. La plage de la Comtesse est complétement sous l’eau. J’arrive au Poisson Rouge quand il ouvre, à neuf heures, et m’installe à l’une des petites tables rondes au soleil. J’y reste longtemps à lire. Jusqu’à ce que je sente que ma table est l’objet de convoitise.
En revenant par le dedans du bourg, je m’arrête à la boulangerie du milieu et achète un sandouiche poulet crudités et une part de far, six euros vingt pour le tout. Je poursuis jusqu’au Mustang. Cette fois, le soleil donne en terrasse. Il est onze heures et quart. Je commande à la fille de la maison une formule six huîtres verre de chardonnay avec du pain et du beurre. Elles sont fraîches et fort bonnes.
-Huit euros, me demande cette séduisante serveuse quand je l’appelle pour payer.
-Huit euros cinquante, lui dis-je.
-Non, huit euros.
-Huit euros cinquante avec le pain beurre, c’est ce qu’on m’a dit dimanche dernier.
-Ah oui, j’avais oublié. Merci monsieur. Vous êtes gentil.
C’est bien qu’on s’en aperçoive de temps en temps.
Je rejoins l’un des bancs au-dessus de la Grève Noire, enlève ma veste et sors de mon sac la suite de mon repas. Les vieilles et vieux propulsés à l’aide de l’électricité sont de retour sur le muret. Par les marches des jeunes couples et des jeunes femmes seules descendent pour la baignade. J’ai presque trop chaud à lire sur ce banc.
Vers quatorze heures je le quitte et ai la chance de trouver une des deux tables hautes libre au Café de le Plage. C’est la Fête des Mères, pas une table basse sans sa daronne. A l’autre table haute, une femme seule devant ses huîtres. Elle aussi y a droit car son téléphone sonne. « Oh mon chéri, c’est toi, tu ne m’as pas oubliée. »
La piscine d’eau de mer voit se succéder les plongeons. Encore un truc qui fait crier les filles. Autant qu’un manège à la Saint-Romain.
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Un pêcheur au Mustang : « Ils annoncent encore de la mer ».
4 juin 2023
Quand j’arrive au Mustang, ce samedi matin, j’en vois sortir une superbe fille en tenue de motarde, casque sous le bras, qui n’est autre que la serveuse qualifiée de pineupe par une cliente hier, c’est-à-dire la fille du patron. Lui aussi a une moto.
-Vous les rangez où la nuit ? lui demande l’habitué en chef.
-A l’intérieur du café, lui est-il répondu.
Lui-même en a eu une autrefois, qu’il rangeait dans sa cuisine. Aujourd’hui, il a d’autres soucis. Des sangliers labourent ses deux hectares. Il a acheté un bidon de goudron, soixante euros quand même, pour en répandre un peu partout. Les sangliers détestent cette odeur. Avec ça, tu es tranquille pour six mois.
Le ciel est à nouveau gris et le vent froid souffle toujours. Arrivé sur le sentier, je constate que la mer est encore plus haute qu’hier. La piscine, submergée par les vagues, change son eau. L’île de la Comtesse mérite totalement son nom. Tous les bateaux flottent dans le Vieux Port du Portrieux.
Malgré la fraîcheur, je reste à lire en terrasse après avoir bu mon café du Poisson Rouge. Ce temps frisquet désole mes voisins, deux marins. Ils parlent d’un voilier parti de l’Arcouest pour se rendre à l’Armada de Rouen et qui a envoyé des images de sa navigation particulièrement secouée. Vers dix heures et demie je dois lever le camp car la température baisse.
Après avoir retenu une table aux Plaisanciers, je suis contraint de me réfugier à l’intérieur de L’Ecume jusqu’à midi. Filet mignon aux champignons avec gratin de pommes de terre, tel est le plat du jour. La salle où je mange est emplie d’autochtones qui sont peut-être tous plus âgés que moi. A l’un d’eux, son voisin doit couper sa viande. Un trio détonne, composé d’un quinquagénaire qui doit être le père de l’un des deux autres, un couple de trentenaires. « Ah bah non, je vivrai pas jusqu’à quatre-vingts ans, déclare la jeune femme sensible à ce qui l’environne, déjà si j’arrive à soixante… ».
Comme hier, le ciel se dégage vers treize heures. Ce qui me permet de m’installer à une table haute du Café de la Plage pour un café lecture. J’y reste jusqu’à l’arrivée des invité(e)s d’un mariage, essentiellement de jeunes militaires à cordons et médailles. Ces uniformes d’apparat ont tellement l’air d’uniformes d’opérette que je me demande si ce sont des vrais, une question à ne pas leur poser. Ce qui est certain, c’est que, vêtu comme je suis, on ne peut me prendre pour un invité de la noce.
*
Je ne suis quand même pas dans le même état que Karen Blixen en mil neuf cent vingt-cinq : Comme je suis fort mal habillée, avec mes chaussures percées et me vêtements en lambeaux, – ce qui, je crois, m’a valu d’être regardée quelque peu de travers par la patronne de l’hôtel, – je suis surtout restée sur la rive gauche de la Seine… (dans une lettre à sa mère).
-Vous les rangez où la nuit ? lui demande l’habitué en chef.
-A l’intérieur du café, lui est-il répondu.
Lui-même en a eu une autrefois, qu’il rangeait dans sa cuisine. Aujourd’hui, il a d’autres soucis. Des sangliers labourent ses deux hectares. Il a acheté un bidon de goudron, soixante euros quand même, pour en répandre un peu partout. Les sangliers détestent cette odeur. Avec ça, tu es tranquille pour six mois.
Le ciel est à nouveau gris et le vent froid souffle toujours. Arrivé sur le sentier, je constate que la mer est encore plus haute qu’hier. La piscine, submergée par les vagues, change son eau. L’île de la Comtesse mérite totalement son nom. Tous les bateaux flottent dans le Vieux Port du Portrieux.
Malgré la fraîcheur, je reste à lire en terrasse après avoir bu mon café du Poisson Rouge. Ce temps frisquet désole mes voisins, deux marins. Ils parlent d’un voilier parti de l’Arcouest pour se rendre à l’Armada de Rouen et qui a envoyé des images de sa navigation particulièrement secouée. Vers dix heures et demie je dois lever le camp car la température baisse.
Après avoir retenu une table aux Plaisanciers, je suis contraint de me réfugier à l’intérieur de L’Ecume jusqu’à midi. Filet mignon aux champignons avec gratin de pommes de terre, tel est le plat du jour. La salle où je mange est emplie d’autochtones qui sont peut-être tous plus âgés que moi. A l’un d’eux, son voisin doit couper sa viande. Un trio détonne, composé d’un quinquagénaire qui doit être le père de l’un des deux autres, un couple de trentenaires. « Ah bah non, je vivrai pas jusqu’à quatre-vingts ans, déclare la jeune femme sensible à ce qui l’environne, déjà si j’arrive à soixante… ».
Comme hier, le ciel se dégage vers treize heures. Ce qui me permet de m’installer à une table haute du Café de la Plage pour un café lecture. J’y reste jusqu’à l’arrivée des invité(e)s d’un mariage, essentiellement de jeunes militaires à cordons et médailles. Ces uniformes d’apparat ont tellement l’air d’uniformes d’opérette que je me demande si ce sont des vrais, une question à ne pas leur poser. Ce qui est certain, c’est que, vêtu comme je suis, on ne peut me prendre pour un invité de la noce.
*
Je ne suis quand même pas dans le même état que Karen Blixen en mil neuf cent vingt-cinq : Comme je suis fort mal habillée, avec mes chaussures percées et me vêtements en lambeaux, – ce qui, je crois, m’a valu d’être regardée quelque peu de travers par la patronne de l’hôtel, – je suis surtout restée sur la rive gauche de la Seine… (dans une lettre à sa mère).
3 juin 2023
« Du vent, du vent du vent », se lamente un homme entrant au Mustang ce vendredi matin. C’est l’un des commerçants du marché près de l’église. Les autres sont dans le même état d’humeur. Une femme vient faire diversion : « Hier, j’ai cru que c’était changé de propriétaire, y avait une pineupe derrière le comptoir. »
-Ah, vous avez vu Audrey, lui répond le patron.
C’est cette serveuse que j’avais à l’œil dimanche dernier en mangeant mes huîtres.
Toujours du vent, oui, mais il fait moins froid qu’hier. Je le vérifie en marchant une nouvelle fois sur le sentier du littoral en direction des ports. C’est marée haute. La Comtesse a les pieds dans l’eau. A mon arrivée, je vais voir de près le phare vert et blanc au bout de la jetée. Tout en métal, il est démontable.
Sa carrière a débuté à Paris, lors de l’Exposition Universelle de mil huit cent soixante-sept. Transféré à Saint-Quay, son premier feu fut allumé le dix juin mil huit cent soixante-huit. Suite à l’allongement de la jetée, il occupe sa place actuelle sur son nouveau musoir depuis mil huit cent soixante-dix-neuf. C’est aujourd’hui un feu solarisé, alimenté par générateurs photovoltaïques et équipé d’une source lumineuse à diode électroluminescente à éclats verts. Tout cela est écrit sur un petit panneau.
Il m’est possible de lire en terrasse au Poisson Rouge, vent moins fort et petites percées du soleil, Lettres d’Afrique de Karen Blixen. Ses propos sur le sort de ceux qu’elle nomme les « natives » et sur celui des femmes européennes de son époque, son analyse du couple et du mariage, sont d’une totale lucidité.
A midi, le temps qui continue à s’améliorer ne me permet toutefois pas de déjeuner dehors. C’est donc à ma table préférée à l’intérieur des Plaisanciers qui je m’installe à midi moins cinq sans qu’on me dise que j’arrive trop tôt. Je ne suis même pas le premier. D’autres m’ont précédé. Il y a aussi là tous les jours un ancêtre qui commence à manger vers onze heures et termine quand les autres débutent. Une serveuse doit l’aider à remettre sa veste. « A demain », lui dit-elle en l’appelant par son prénom. Je me demande combien de demains il lui reste.
Le plat du jour est la cuisse de canard à l’orange et j’ignore le nom de mon dessert choisi sur le plateau que présente l’une des serveuses. Au buffet d’entrées, c’est toujours l’abondance : bulots, bouquets, rillettes de poisson, pâtés, œufs, asperges, crudités, paëlla, quiche, etc.
On remballe le marché quand je reviens vers la plage du Casino. Le ciel est de plus en plus bleu. Malgré le vent, je peux m’installer à une table haute en terrasse du Café de la Plage. En contrebas, un couple assez âgé entre dans la piscine d’eau de mer. Il n’y reste pas longtemps.
*
Le ouiquennede arrive et avec lui, dimanche et pour trois nuits, de nouveaux locataires pour le logement Air Bibi du rez-de-chaussée. Moins bruyants que les précédents, j’espère. La semaine a été calme en dessous, pour raison d’inoccupation.
En revanche, j’ai droit tous les jours aux bruits engendrés par le locataire de l’appartement du dessus. Lequel racle sa chaise sur le sol et y traîne je ne sais quoi. Heureusement, il travaille et a donc les mêmes horaires que moi, couché tôt, levé matin.
-Ah, vous avez vu Audrey, lui répond le patron.
C’est cette serveuse que j’avais à l’œil dimanche dernier en mangeant mes huîtres.
Toujours du vent, oui, mais il fait moins froid qu’hier. Je le vérifie en marchant une nouvelle fois sur le sentier du littoral en direction des ports. C’est marée haute. La Comtesse a les pieds dans l’eau. A mon arrivée, je vais voir de près le phare vert et blanc au bout de la jetée. Tout en métal, il est démontable.
Sa carrière a débuté à Paris, lors de l’Exposition Universelle de mil huit cent soixante-sept. Transféré à Saint-Quay, son premier feu fut allumé le dix juin mil huit cent soixante-huit. Suite à l’allongement de la jetée, il occupe sa place actuelle sur son nouveau musoir depuis mil huit cent soixante-dix-neuf. C’est aujourd’hui un feu solarisé, alimenté par générateurs photovoltaïques et équipé d’une source lumineuse à diode électroluminescente à éclats verts. Tout cela est écrit sur un petit panneau.
Il m’est possible de lire en terrasse au Poisson Rouge, vent moins fort et petites percées du soleil, Lettres d’Afrique de Karen Blixen. Ses propos sur le sort de ceux qu’elle nomme les « natives » et sur celui des femmes européennes de son époque, son analyse du couple et du mariage, sont d’une totale lucidité.
A midi, le temps qui continue à s’améliorer ne me permet toutefois pas de déjeuner dehors. C’est donc à ma table préférée à l’intérieur des Plaisanciers qui je m’installe à midi moins cinq sans qu’on me dise que j’arrive trop tôt. Je ne suis même pas le premier. D’autres m’ont précédé. Il y a aussi là tous les jours un ancêtre qui commence à manger vers onze heures et termine quand les autres débutent. Une serveuse doit l’aider à remettre sa veste. « A demain », lui dit-elle en l’appelant par son prénom. Je me demande combien de demains il lui reste.
Le plat du jour est la cuisse de canard à l’orange et j’ignore le nom de mon dessert choisi sur le plateau que présente l’une des serveuses. Au buffet d’entrées, c’est toujours l’abondance : bulots, bouquets, rillettes de poisson, pâtés, œufs, asperges, crudités, paëlla, quiche, etc.
On remballe le marché quand je reviens vers la plage du Casino. Le ciel est de plus en plus bleu. Malgré le vent, je peux m’installer à une table haute en terrasse du Café de la Plage. En contrebas, un couple assez âgé entre dans la piscine d’eau de mer. Il n’y reste pas longtemps.
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Le ouiquennede arrive et avec lui, dimanche et pour trois nuits, de nouveaux locataires pour le logement Air Bibi du rez-de-chaussée. Moins bruyants que les précédents, j’espère. La semaine a été calme en dessous, pour raison d’inoccupation.
En revanche, j’ai droit tous les jours aux bruits engendrés par le locataire de l’appartement du dessus. Lequel racle sa chaise sur le sol et y traîne je ne sais quoi. Heureusement, il travaille et a donc les mêmes horaires que moi, couché tôt, levé matin.
2 juin 2023
Ce jeudi est le jour de mon retour à Paimpol. A sept heures quarante-sept, je monte dans le car BreizhGo dont le terminus est la Gare de cette cité portuaire. Pour l’atteindre, il traverse une Bretagne rurale à maisons de pierre.
A l’arrivée, je me dirige tout dret vers le Fournil du Martray, deux euros cinquante les deux pains au chocolat. Toujours excellents, je m’en aperçois en les mangeant avec un allongé à un euro soixante-dix, à l’intérieur de L’Epoque. La vue sur le port est empêchée par une fête foraine miteuse. Les manèges et attractions ont trente ou quarante ans. Le temps gris et froid ajoute à la tristesse qui en émane.
Pour la troisième journée consécutive, je me lance dans une longue marche, avec pour objectif l’extrémité de la pointe de Guilben. Le chemin côtier est assez plat dans sa première partie puis vient une succession de petites montées et de petites descentes. Rien de difficile, mais soudain apparaît un obstacle, sous la forme d’un arbre chu dont le tronc barre le passage.
Plutôt que de le scier, ceux qui s’occupent du Géherre Trente-Quatre n’ont rien trouvé de mieux que de peindre un trait blanc et un trait rouge sur son écorce. Impossible de passer par-dessus à cause des branches. Cours de yoga gratuit, je plie mes jambes, j’incline le buste et je réussis à me glisser dessous mais j’ai du mal à me relever comme chaque fois que je m’accroupis.
Quand j’arrive aux deux beaux arbres à branches étalées entre lesquels j’avais trouvé la jeune campeuse itinérante avec qui j’avais passé une partie de la journée il y a deux ans et demi, je constate que l’un deux a eu une branche vrillée par une tempête. Il me reste peu à marcher pour atteindre le bout de la pointe d’où j’admire de petites îles en forme de Mont Fuji. Au sommet de la butte, la maisonnette qui ferait le bonheur d’un ermite est toujours fermée.
Sur le chemin du retour, je m’invente une variante à travers champ pour ne pas repasser sous l’arbre chu. Il est onze heures dix quand je suis à bon port. Je retiens une table Chez Tonton Guy puis continue le tour du port mais cette fête foraine endormie gâche le plaisir.
A midi moins cinq, j’entre Chez Tonton Guy où je suis reçu froidement par une petite femme blonde qui semble être la nouvelle patronne. « Il n’est pas midi, me dit-elle, vous pouvez aller prendre un apéritif au bar de l’hôtel. » « Non non, lui dis-je, je préfère attendre dehors dans le vent glacial. » Un peu plus loin est L’Islandais. Son menu du jour me convient. J’y trouve place.
L’intérieur de L’Islandais est typique des restaurants d’hiver. On y a mis du chauffage pour parfaire l’illusion. C’est assez vite complet. Pour dix-sept euros, je déjeune d’un velouté de carottes aux lardons, d’un poulet potatoes et de panna cotta à la fraise, le tout cuisiné à mon goût.
Le café, c’est à L’Epoque où je reste à lire un moment. Je fais ensuite un tour dans les rues de la vieille ville puis vais attendre le car BreizhGo de seize heures cinq face à la Gare, au Nelson Kafé où le café est à un euro quarante. Deux Allemands à sac à dos s’y réchauffent avant de reprendre leur marche.
Du côté des Bretons, certains en sont à gémir sur le temps qu’il fait. Encore une journée où on n’aura pas vu le soleil et ça va continuer.
A l’arrivée, je me dirige tout dret vers le Fournil du Martray, deux euros cinquante les deux pains au chocolat. Toujours excellents, je m’en aperçois en les mangeant avec un allongé à un euro soixante-dix, à l’intérieur de L’Epoque. La vue sur le port est empêchée par une fête foraine miteuse. Les manèges et attractions ont trente ou quarante ans. Le temps gris et froid ajoute à la tristesse qui en émane.
Pour la troisième journée consécutive, je me lance dans une longue marche, avec pour objectif l’extrémité de la pointe de Guilben. Le chemin côtier est assez plat dans sa première partie puis vient une succession de petites montées et de petites descentes. Rien de difficile, mais soudain apparaît un obstacle, sous la forme d’un arbre chu dont le tronc barre le passage.
Plutôt que de le scier, ceux qui s’occupent du Géherre Trente-Quatre n’ont rien trouvé de mieux que de peindre un trait blanc et un trait rouge sur son écorce. Impossible de passer par-dessus à cause des branches. Cours de yoga gratuit, je plie mes jambes, j’incline le buste et je réussis à me glisser dessous mais j’ai du mal à me relever comme chaque fois que je m’accroupis.
Quand j’arrive aux deux beaux arbres à branches étalées entre lesquels j’avais trouvé la jeune campeuse itinérante avec qui j’avais passé une partie de la journée il y a deux ans et demi, je constate que l’un deux a eu une branche vrillée par une tempête. Il me reste peu à marcher pour atteindre le bout de la pointe d’où j’admire de petites îles en forme de Mont Fuji. Au sommet de la butte, la maisonnette qui ferait le bonheur d’un ermite est toujours fermée.
Sur le chemin du retour, je m’invente une variante à travers champ pour ne pas repasser sous l’arbre chu. Il est onze heures dix quand je suis à bon port. Je retiens une table Chez Tonton Guy puis continue le tour du port mais cette fête foraine endormie gâche le plaisir.
A midi moins cinq, j’entre Chez Tonton Guy où je suis reçu froidement par une petite femme blonde qui semble être la nouvelle patronne. « Il n’est pas midi, me dit-elle, vous pouvez aller prendre un apéritif au bar de l’hôtel. » « Non non, lui dis-je, je préfère attendre dehors dans le vent glacial. » Un peu plus loin est L’Islandais. Son menu du jour me convient. J’y trouve place.
L’intérieur de L’Islandais est typique des restaurants d’hiver. On y a mis du chauffage pour parfaire l’illusion. C’est assez vite complet. Pour dix-sept euros, je déjeune d’un velouté de carottes aux lardons, d’un poulet potatoes et de panna cotta à la fraise, le tout cuisiné à mon goût.
Le café, c’est à L’Epoque où je reste à lire un moment. Je fais ensuite un tour dans les rues de la vieille ville puis vais attendre le car BreizhGo de seize heures cinq face à la Gare, au Nelson Kafé où le café est à un euro quarante. Deux Allemands à sac à dos s’y réchauffent avant de reprendre leur marche.
Du côté des Bretons, certains en sont à gémir sur le temps qu’il fait. Encore une journée où on n’aura pas vu le soleil et ça va continuer.
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