Dernières notes
Loïc Boyer
Je suis l’auteur de textes courts qui furent publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.
Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.
Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième ici.
Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.
19 février 2016
La Maison Victor Hugo, aisément repérable grâce aux barrières de Vigipirate qui empêchent le stationnement devant, est située à l’un des angles de la place des Vosges. J’ouvre mon sac au vigile avant de le mettre au vestiaire. Muni de mon billet à sept euros, je monte l’escalier majestueux jusqu’au premier étage afin d’y voir, ce mercredi, l’exposition Eros Hugo, laquelle « comprend des images susceptibles de heurter la sensibilité d’un public non averti, en particulier mineur ». Cette formulation permet de tenir compte de la pudibonderie actuelle tout en autorisant l’entrée des moins de dix-huit ans. Il en est une dans la première salle qui s’attarde devant Esméralda, gravure anonyme montrant l’usage plaisant que cette héroïne de fiction fait de sa chèvre.
De nombreuses jeunes femmes nues sont accrochées aux murs des salles suivantes dont le parquet craque presque autant que celui de ma petite chambre. Elles sont dues au talent de Vivant Denon, Millet, Devéria, Richomme, Corot, Chassériau, Ingres, Guys, Rops, Böcklin et Hugo himself. Je découvre que Théophile Gautier savait peindre, dont est montré Une jeune femme nue – L’innocence (de façade).
Plus loin sont quelques statues de Rodin, parmi lesquelles Eve, et des dessins du même dont le titre dit tout, ainsi Femme allongée, aux jambes écartées, le vêtement relevé. En face, également signé Auguste Rodin, un plâtre de grande taille, étude pour le monument Hugo : Victor Hugo, assis nu. Lui aussi a les jambes écartées mais il lui manque un bras.
On trouve même là une reproduction du Rêve de la femme du pêcheur d’Hokusai. C’est que dans Les Travailleurs de la mer celui que Juliette Drouet appelait mon Toto évoque la même scène version masculine, laquelle est lisible sur le mur d’à côté (un homme y est bu par une créature marine fantastique).
-C’est juste un prétexte pour faire une exposition qui attire du monde, commente une jeune femme qui trouve cela un peu tiré par la queue.
C’est oublier que si l’œuvre littéraire de Victor Hugo n’est pas franchement marquée par l’érotisme sa vie sexuelle fut bien débridée (comme on dit). En témoigne la présence sous verre de l’un des carnets secrets et codés ultérieurement déchiffrés et publiés par Henri Guillemin. Ah, les secours de quelques francs que donnait le vieil Hugo à de jeunes pauvresses contre avantage en nature !
Rebroussant, je regarde mieux les photos frustrantes de Jules Vallou de Villeneuve et de Félix-Jacques-Antoine Moulin, les pornographiques Scènes d’atelier de Francesco Hayez dessinées au crayon sur papier vélin (il faut avoir de bons yeux) et le bronze anonyme Satyre aux trois femmes (toutes occupées à le sucer, il en a trois).
Je n’ai pas un goût effréné pour les intérieurs d’écrivains mais, étant sur place, je monte au deuxième étage où vécut Hugo, locataire de deux cent quatre-vingts mètres carrés entre mil huit cent trente-deux et quarante-huit. Balcon et couloirs ont disparu. Les pièces en enfilade sont occupées par un mobilier reconstitué retraçant les diverses périodes de la vie de l’écrivain dans ses habitations successives. Ainsi trouve-t-on ici le salon chinois de Juliette Drouet à Guernesey et tout au bout la dernière chambre de Toto avenue d’Eylau avec le lit à baldaquin étroit et court que l’on voit sur les murs dans plusieurs tableaux montrant l’écrivain mort, raison pour laquelle on y parle à voix basse.
De nombreuses jeunes femmes nues sont accrochées aux murs des salles suivantes dont le parquet craque presque autant que celui de ma petite chambre. Elles sont dues au talent de Vivant Denon, Millet, Devéria, Richomme, Corot, Chassériau, Ingres, Guys, Rops, Böcklin et Hugo himself. Je découvre que Théophile Gautier savait peindre, dont est montré Une jeune femme nue – L’innocence (de façade).
Plus loin sont quelques statues de Rodin, parmi lesquelles Eve, et des dessins du même dont le titre dit tout, ainsi Femme allongée, aux jambes écartées, le vêtement relevé. En face, également signé Auguste Rodin, un plâtre de grande taille, étude pour le monument Hugo : Victor Hugo, assis nu. Lui aussi a les jambes écartées mais il lui manque un bras.
On trouve même là une reproduction du Rêve de la femme du pêcheur d’Hokusai. C’est que dans Les Travailleurs de la mer celui que Juliette Drouet appelait mon Toto évoque la même scène version masculine, laquelle est lisible sur le mur d’à côté (un homme y est bu par une créature marine fantastique).
-C’est juste un prétexte pour faire une exposition qui attire du monde, commente une jeune femme qui trouve cela un peu tiré par la queue.
C’est oublier que si l’œuvre littéraire de Victor Hugo n’est pas franchement marquée par l’érotisme sa vie sexuelle fut bien débridée (comme on dit). En témoigne la présence sous verre de l’un des carnets secrets et codés ultérieurement déchiffrés et publiés par Henri Guillemin. Ah, les secours de quelques francs que donnait le vieil Hugo à de jeunes pauvresses contre avantage en nature !
Rebroussant, je regarde mieux les photos frustrantes de Jules Vallou de Villeneuve et de Félix-Jacques-Antoine Moulin, les pornographiques Scènes d’atelier de Francesco Hayez dessinées au crayon sur papier vélin (il faut avoir de bons yeux) et le bronze anonyme Satyre aux trois femmes (toutes occupées à le sucer, il en a trois).
Je n’ai pas un goût effréné pour les intérieurs d’écrivains mais, étant sur place, je monte au deuxième étage où vécut Hugo, locataire de deux cent quatre-vingts mètres carrés entre mil huit cent trente-deux et quarante-huit. Balcon et couloirs ont disparu. Les pièces en enfilade sont occupées par un mobilier reconstitué retraçant les diverses périodes de la vie de l’écrivain dans ses habitations successives. Ainsi trouve-t-on ici le salon chinois de Juliette Drouet à Guernesey et tout au bout la dernière chambre de Toto avenue d’Eylau avec le lit à baldaquin étroit et court que l’on voit sur les murs dans plusieurs tableaux montrant l’écrivain mort, raison pour laquelle on y parle à voix basse.
18 février 2016
Brouillard et prés givrés, au chaud dans le train de huit heures douze pour Paris, je vois défiler la campagne normande ce mercredi. Un mendiant passe de voyageur en voyageuse et demande « juste trente centimes ». Un homme qui lit La Sonate à Kreutzer dans une édition du Livre de Poche du temps où les tranches étaient colorées est plus généreux que moi. Dans la capitale, le soleil est parfois voilé.
Je passe chez Book-Off, rue du Faubourg Saint-Antoine. On y diffuse les Beatles en concert, un cédé que j’ai déjà eu l’occasion d’écouter ici ou dans l’autre, Les morceaux sont tellement rodés qu’on ne sait qu’il s’agit d’un enregistrement public que par les hurlements des filles à la fin de chacun.
Je déjeune au Café des Phares, place de la Bastille. La formule plat du jour et café est à neuf euros. La banquette est creusée d’avoir supporté beaucoup de fesses et la saucisse de Toulouse a les lentilles un peu croquantes. Je la mange entre un homme qui sera au cimetière à quatre heures pour un hommage à un dominicain mort il y a un an (« un p’tit gros aux cheveux longs, dit-il à la jeune femme qui prend un café avec lui, la Mairie donne son nom à une maison relais, mais ils font ça à l’heure de la messe en sa mémoire, ces cons-là. ») et une femme qui attend sa sœur (« mets-toi là, lui dit-elle quand celle-ci un peu grosse et plus âgée arrive, tu auras davantage de place, et tes lunettes elles sont où ? dans ton sac ? mets-les ! »)
Avec un quart de côtes-du-rhône, cela fait seize euros. Sur son ticket de caisse, le Café des Phares se vante encore d’avoir été le premier café philo. De là, je gagne la place des Vosges afin de visiter l’exposition Eros Hugo puis, avec la ligne Huit du métro, je rejoins le deuxième Book-Off.
J’y croise le vieux bouquiniste que j’ai soupçonné un jour d’avoir le droit d’entrer avant les autres dans le premier. Ici, il n’a pas plus qu’autrui le droit de fouiller dans les livres non encore mis en rayon. Son panier est vide et il désespère. « C’est fini l’époque des bonnes affaires, me dit-il, maintenant il y a trop de concurrence et puis on ne leur vend plus autant de bons livres. Autrefois, j’achetais pour mille euros par mois. »
Après un passage Chez Léon, dont de hardis touristes anglophones goûtent la cuisine rustique en milieu d’après-midi, je vais attendre mon train et suis surpris de trouver dans la gare Saint-Lazare le Playboy Communiste, bien connu artiste de rue sans abri rouennais, comme toujours hirsute sous sa couverture.
C’était couru, me dis-je, à force de zoner dans la gare de Rouen il a fini par monter dans un train. Je me demande s’il bénéficiera ici de la même tolérance de la part de la Secenefe et surtout s’il saura rentrer.
Revenu à la maison, j’envoie un message à certains qui propagent ses gravages de portes et de palissades via Internet.
« Bonjour, j'ai vu cet après-midi Alain Rault errant dans la gare Saint-Lazare, je ne sais si c'est inquiétant ou pas. Comme vous le connaissez, je préfère vous en avertir. Cordialement. »
« Bonjour merci pour ce message mais il le fait régulièrement en effet. Il lui arrive de prendre un train et de faire son retour quelques jours plus tard. Cordialement. »
*
Tous ces cuisiniers des restaurants parisiens que je croyais pakistanais sont en fait sri lankais et précisément tamouls, ai-je appris d’un article de Street Press. Dans le métier, on les appelle les photocopieurs. Tu leur montres une fois comment on fait un plat traditionnel français et ils le refont à l’identique.
Je passe chez Book-Off, rue du Faubourg Saint-Antoine. On y diffuse les Beatles en concert, un cédé que j’ai déjà eu l’occasion d’écouter ici ou dans l’autre, Les morceaux sont tellement rodés qu’on ne sait qu’il s’agit d’un enregistrement public que par les hurlements des filles à la fin de chacun.
Je déjeune au Café des Phares, place de la Bastille. La formule plat du jour et café est à neuf euros. La banquette est creusée d’avoir supporté beaucoup de fesses et la saucisse de Toulouse a les lentilles un peu croquantes. Je la mange entre un homme qui sera au cimetière à quatre heures pour un hommage à un dominicain mort il y a un an (« un p’tit gros aux cheveux longs, dit-il à la jeune femme qui prend un café avec lui, la Mairie donne son nom à une maison relais, mais ils font ça à l’heure de la messe en sa mémoire, ces cons-là. ») et une femme qui attend sa sœur (« mets-toi là, lui dit-elle quand celle-ci un peu grosse et plus âgée arrive, tu auras davantage de place, et tes lunettes elles sont où ? dans ton sac ? mets-les ! »)
Avec un quart de côtes-du-rhône, cela fait seize euros. Sur son ticket de caisse, le Café des Phares se vante encore d’avoir été le premier café philo. De là, je gagne la place des Vosges afin de visiter l’exposition Eros Hugo puis, avec la ligne Huit du métro, je rejoins le deuxième Book-Off.
J’y croise le vieux bouquiniste que j’ai soupçonné un jour d’avoir le droit d’entrer avant les autres dans le premier. Ici, il n’a pas plus qu’autrui le droit de fouiller dans les livres non encore mis en rayon. Son panier est vide et il désespère. « C’est fini l’époque des bonnes affaires, me dit-il, maintenant il y a trop de concurrence et puis on ne leur vend plus autant de bons livres. Autrefois, j’achetais pour mille euros par mois. »
Après un passage Chez Léon, dont de hardis touristes anglophones goûtent la cuisine rustique en milieu d’après-midi, je vais attendre mon train et suis surpris de trouver dans la gare Saint-Lazare le Playboy Communiste, bien connu artiste de rue sans abri rouennais, comme toujours hirsute sous sa couverture.
C’était couru, me dis-je, à force de zoner dans la gare de Rouen il a fini par monter dans un train. Je me demande s’il bénéficiera ici de la même tolérance de la part de la Secenefe et surtout s’il saura rentrer.
Revenu à la maison, j’envoie un message à certains qui propagent ses gravages de portes et de palissades via Internet.
« Bonjour, j'ai vu cet après-midi Alain Rault errant dans la gare Saint-Lazare, je ne sais si c'est inquiétant ou pas. Comme vous le connaissez, je préfère vous en avertir. Cordialement. »
« Bonjour merci pour ce message mais il le fait régulièrement en effet. Il lui arrive de prendre un train et de faire son retour quelques jours plus tard. Cordialement. »
*
Tous ces cuisiniers des restaurants parisiens que je croyais pakistanais sont en fait sri lankais et précisément tamouls, ai-je appris d’un article de Street Press. Dans le métier, on les appelle les photocopieurs. Tu leur montres une fois comment on fait un plat traditionnel français et ils le refont à l’identique.
17 février 2016
Soixante-cinq ans ce mardi, un anniversaire que je fêterai samedi en compagnie de celle qui viendra de Paris, un pas de plus dans la vieillesse avec à chaque fois l’idée que ce pourrait être le dernier.
Ce seize février est aussi l’ultime jour des soldes d’hiver et encore une fois j’ai raté l’occasion de renouveler le contenu de ma penderie, pas eu envie de me heurter à la foule du début, trop de mauvais temps depuis dix jours, et ce mardi ensoleillé autre chose à faire. J’en connais une qui va me dire : « Je te l’avais bien dit. »
Au début de l’après-midi, je me poste dans l’île Lacroix et vois arriver à l’heure dite le camion jaune du démolisseur d’autos. Ma petite voiture est hissée sur la plate-forme. Je monte dans la cabine et en route pour Canteleu remplir les papiers.
Je rentre par le bus Teor avec au cœur la tristesse d’avoir abandonné cette voiture où pendant douze ans était assise quelqu’une à mon côté avec laquelle j’explorais les provinces et des petits bouts d’étranger. Celle qui viendra fêter mon changement d’âge samedi l’appelait Twinnie.
*
Ce mardi matin, pendant que ma sœur, qui n’oublie jamais mon anniversaire, m’appelle pour me le souhaiter bon, les pompiers sont dans le jardin. La fenêtre réparée est à nouveau brisée par l’un d’eux chez la voisine de l’étage. Quand je demande ce qu’il en est à la propriétaire d’Aboyus (animal criard interdit par le règlement de copropriété), elle me tourne furieusement le dos en haussant les épaules et lâche un : « C’est la vie ».
Pas de doute, elle m’aime de plus en plus.
Ce seize février est aussi l’ultime jour des soldes d’hiver et encore une fois j’ai raté l’occasion de renouveler le contenu de ma penderie, pas eu envie de me heurter à la foule du début, trop de mauvais temps depuis dix jours, et ce mardi ensoleillé autre chose à faire. J’en connais une qui va me dire : « Je te l’avais bien dit. »
Au début de l’après-midi, je me poste dans l’île Lacroix et vois arriver à l’heure dite le camion jaune du démolisseur d’autos. Ma petite voiture est hissée sur la plate-forme. Je monte dans la cabine et en route pour Canteleu remplir les papiers.
Je rentre par le bus Teor avec au cœur la tristesse d’avoir abandonné cette voiture où pendant douze ans était assise quelqu’une à mon côté avec laquelle j’explorais les provinces et des petits bouts d’étranger. Celle qui viendra fêter mon changement d’âge samedi l’appelait Twinnie.
*
Ce mardi matin, pendant que ma sœur, qui n’oublie jamais mon anniversaire, m’appelle pour me le souhaiter bon, les pompiers sont dans le jardin. La fenêtre réparée est à nouveau brisée par l’un d’eux chez la voisine de l’étage. Quand je demande ce qu’il en est à la propriétaire d’Aboyus (animal criard interdit par le règlement de copropriété), elle me tourne furieusement le dos en haussant les épaules et lâche un : « C’est la vie ».
Pas de doute, elle m’aime de plus en plus.
16 février 2016
Plusieurs mois que je me demande quoi faire de ma petite voiture en bout de course, plus de cent trente mille kilomètres et de nombreux problèmes : tout un côté rayé suite à un endormissement au volant, l’embrayage fatigué, un frein qui couine, les pneus usés et l’électronique de la clé qui va lâcher.
Impossible de la vendre dans cet état et ce n’est pas la peine de faire des réparations pas rentables. Impossible de la donner à une association (qui la remettrait à quelqu'un n’en ayant pas pour aller travailler) sans passer par le contrôle technique et rien ne dit que la clé ne lâcherait pas dès qu’offerte, pas terrible le cadeau.
M’a traversé l’idée de bricoler un faux accident afin d’en être remboursé par l’assurance, mais l’honnêteté a eu le dessus. Ne restait que la casse, solution que je repoussais de jour en jour.
Ce lundi matin, voulant la démarrer, je ne puis. La batterie est déchargée. J’appelle donc une casse auto agréée par la Préfecture où l’on me dit que celui qui pourrait se charger de venir la chercher n’est pas là : « Rappelez demain matin ».
Peu probable que j’en rachète une. Conduire ne m’a jamais passionné et j’en ai encore moins le goût depuis que l’on risque l’amende et le retrait de points de permis à chaque traversée de ville ou de village. Par ailleurs, pour diverses raisons, je n’en ai plus un besoin indispensable, notamment l’hiver, cette saison où je ne savais que faire de celle dont les jours sont comptés, m’obligeant à aller où je n’avais rien à faire uniquement pour qu’elle roule.
Impossible de la vendre dans cet état et ce n’est pas la peine de faire des réparations pas rentables. Impossible de la donner à une association (qui la remettrait à quelqu'un n’en ayant pas pour aller travailler) sans passer par le contrôle technique et rien ne dit que la clé ne lâcherait pas dès qu’offerte, pas terrible le cadeau.
M’a traversé l’idée de bricoler un faux accident afin d’en être remboursé par l’assurance, mais l’honnêteté a eu le dessus. Ne restait que la casse, solution que je repoussais de jour en jour.
Ce lundi matin, voulant la démarrer, je ne puis. La batterie est déchargée. J’appelle donc une casse auto agréée par la Préfecture où l’on me dit que celui qui pourrait se charger de venir la chercher n’est pas là : « Rappelez demain matin ».
Peu probable que j’en rachète une. Conduire ne m’a jamais passionné et j’en ai encore moins le goût depuis que l’on risque l’amende et le retrait de points de permis à chaque traversée de ville ou de village. Par ailleurs, pour diverses raisons, je n’en ai plus un besoin indispensable, notamment l’hiver, cette saison où je ne savais que faire de celle dont les jours sont comptés, m’obligeant à aller où je n’avais rien à faire uniquement pour qu’elle roule.
15 février 2016
Plus de barrières destinées à tenir loin de l’église Saint-Maclou le passant que je suis ce dimanche matin de Saint Valentin, l’inspection télescopique de vendredi dernier ayant conclu qu’aucune chute de pierres ne suivrait celle de lundi (c’est une grande croix qui est tombée mal retenue par Dieu). Je fais le tour du marché en ce jour où il ne pleut plus. Les fleuristes sont à l’ouvrage :
-Elle va savoir combien je l’aime, dit un acheteur sortant un billet de dix.
Cette fête ne me concerne plus.
Il y a vingt-trois ans, ce jour, Salman Rushdie était l’objet de la fatoua de Khomeiny appelant tout musulman à le tuer pour avoir écrit Les Versets sataniques. S’ensuivit la vie sous protection policière permanente qu’il raconte à la troisième personne du singulier dans Joseph Anton, une autobiographie (Plon, deux mille douze), une lecture des plus intéressantes que je termine au café Le Clos Saint-Marc, précisément pour cet anniversaire, ayant noté quelques passages sur mon carnet :
Les souvenirs les plus vifs que ses amis gardèrent plus tard de cette époque étaient invariablement des souvenirs de la Special Branch. Une amitié improbable se développait entre le monde littéraire londonien et la police secrète britannique. Les policiers appréciaient ses amis qui les accueillaient bien volontiers, veillaient à leur confort et les nourrissaient. « Vous n’imaginez pas, lui disaient-ils, de quelle manière nous sommes traités généralement. » Les éminences de la politique et leurs épouses traitaient souvent ces braves gens comme des domestiques.
Comme tous les écrivains, il avait l’habitude de la solitude, passait souvent plusieurs heures par jour tout seul. Son entourage s’était habitué à son besoin de silence. Mais à présent il vivait avec quatre colosses armés, des hommes qui n’étaient pas habitués à l’inactivité, tout le contraire des amateurs de livres casaniers. Ils faisaient du raffut, claquaient les portes et riaient fort…
Quelque chose de nouveau était en train de se produire, la montée d’une nouvelle intolérance. Elle se répandait à la surface de la terre mais personne ne voulait en convenir. Un nouveau mot avait été inventé pour permettre aux aveugles de rester aveugles : l’islamophobie.
« Islamophobie » était un nouveau terme ajouté à la novlangue d’Humpty Dumpty. Il prenait la place du langage de l’analyse, de la raison et de la discussion pour le mettre à l’envers.
Zooropa, la tournée géante de U2, arriva au stade de Wembley et Bono l’appela pour lui demander s’il avait envie de monter sur scène. U2 voulait faire un geste de solidarité et c’était là le plus spectaculaire qu’ils aient imaginé. A sa grande surprise la Special Branch n’émit aucune objection. Ils pensaient peut-être qu’il ne risquait pas d’y avoir des assassins islamiques à un concert de U2 ou alors avaient-ils eux-mêmes très envie d’assister au concert.
Une autre chose se produisit à Paris, Caroline Lang, la fille belle et brillante de Jack Lang, vint un après-midi lui tenir compagnie à l’hôtel de l’Abbaye, et à cause de sa beauté, du vin et des problèmes avec Elisabeth, ils couchèrent ensemble, aussitôt après ils décidèrent de ne plus recommencer mais de rester amis.
*
Pendant les années où il était promis à la mort par l'Iran, Salman Rushdie a été soutenu et aidé par presque tous les grands écrivains du monde entier. Deux exceptions notables : John Berger et John Le Carré. Était favorable à son exécution : l’ancien chanteur Cat Stevens, converti.
Des milliers de musulmans de Grande-Bretagne ont été autorisés à hurler à la mort de Rushdie dans des manifestations de rues par des gouvernements britanniques qui hormis lui donner une protection policière n’ont pas fait grand-chose pour lui.
Aujourd’hui, l’Iran n’exige plus la mort de Rushdie, qui vit surtout aux Etats-Unis, mais certains extrémistes le menacent toujours.
*
En mil neuf cent quatre-vingt-onze, le traducteur japonais des Versets sataniques, Hitoshi Igarashi, a été poignardé à mort, le traducteur italien, Ettore Capriolo, a été lui aussi poignardé mais a survécu et l'éditeur norvégien du livre, William Nygaard, a été gravement blessé lors d’une tentative de meurtre par balles.
Le deux juillet mil neuf cent quatre-vingt-treize, des islamistes turcs ont incendié l’hôtel où séjournait Aziz Nesin, lui aussi traducteur des Versets sataniques. Il a survécu mais trente-sept personnes sont mortes dans l'incendie.
*
Au Clos Saint-Marc :
-Hier, je me suis endormi devant la télé sur le canapé avec Lola.
-C’est qui Lola ?
-Ma chienne.
-Elle va savoir combien je l’aime, dit un acheteur sortant un billet de dix.
Cette fête ne me concerne plus.
Il y a vingt-trois ans, ce jour, Salman Rushdie était l’objet de la fatoua de Khomeiny appelant tout musulman à le tuer pour avoir écrit Les Versets sataniques. S’ensuivit la vie sous protection policière permanente qu’il raconte à la troisième personne du singulier dans Joseph Anton, une autobiographie (Plon, deux mille douze), une lecture des plus intéressantes que je termine au café Le Clos Saint-Marc, précisément pour cet anniversaire, ayant noté quelques passages sur mon carnet :
Les souvenirs les plus vifs que ses amis gardèrent plus tard de cette époque étaient invariablement des souvenirs de la Special Branch. Une amitié improbable se développait entre le monde littéraire londonien et la police secrète britannique. Les policiers appréciaient ses amis qui les accueillaient bien volontiers, veillaient à leur confort et les nourrissaient. « Vous n’imaginez pas, lui disaient-ils, de quelle manière nous sommes traités généralement. » Les éminences de la politique et leurs épouses traitaient souvent ces braves gens comme des domestiques.
Comme tous les écrivains, il avait l’habitude de la solitude, passait souvent plusieurs heures par jour tout seul. Son entourage s’était habitué à son besoin de silence. Mais à présent il vivait avec quatre colosses armés, des hommes qui n’étaient pas habitués à l’inactivité, tout le contraire des amateurs de livres casaniers. Ils faisaient du raffut, claquaient les portes et riaient fort…
Quelque chose de nouveau était en train de se produire, la montée d’une nouvelle intolérance. Elle se répandait à la surface de la terre mais personne ne voulait en convenir. Un nouveau mot avait été inventé pour permettre aux aveugles de rester aveugles : l’islamophobie.
« Islamophobie » était un nouveau terme ajouté à la novlangue d’Humpty Dumpty. Il prenait la place du langage de l’analyse, de la raison et de la discussion pour le mettre à l’envers.
Zooropa, la tournée géante de U2, arriva au stade de Wembley et Bono l’appela pour lui demander s’il avait envie de monter sur scène. U2 voulait faire un geste de solidarité et c’était là le plus spectaculaire qu’ils aient imaginé. A sa grande surprise la Special Branch n’émit aucune objection. Ils pensaient peut-être qu’il ne risquait pas d’y avoir des assassins islamiques à un concert de U2 ou alors avaient-ils eux-mêmes très envie d’assister au concert.
Une autre chose se produisit à Paris, Caroline Lang, la fille belle et brillante de Jack Lang, vint un après-midi lui tenir compagnie à l’hôtel de l’Abbaye, et à cause de sa beauté, du vin et des problèmes avec Elisabeth, ils couchèrent ensemble, aussitôt après ils décidèrent de ne plus recommencer mais de rester amis.
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Pendant les années où il était promis à la mort par l'Iran, Salman Rushdie a été soutenu et aidé par presque tous les grands écrivains du monde entier. Deux exceptions notables : John Berger et John Le Carré. Était favorable à son exécution : l’ancien chanteur Cat Stevens, converti.
Des milliers de musulmans de Grande-Bretagne ont été autorisés à hurler à la mort de Rushdie dans des manifestations de rues par des gouvernements britanniques qui hormis lui donner une protection policière n’ont pas fait grand-chose pour lui.
Aujourd’hui, l’Iran n’exige plus la mort de Rushdie, qui vit surtout aux Etats-Unis, mais certains extrémistes le menacent toujours.
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En mil neuf cent quatre-vingt-onze, le traducteur japonais des Versets sataniques, Hitoshi Igarashi, a été poignardé à mort, le traducteur italien, Ettore Capriolo, a été lui aussi poignardé mais a survécu et l'éditeur norvégien du livre, William Nygaard, a été gravement blessé lors d’une tentative de meurtre par balles.
Le deux juillet mil neuf cent quatre-vingt-treize, des islamistes turcs ont incendié l’hôtel où séjournait Aziz Nesin, lui aussi traducteur des Versets sataniques. Il a survécu mais trente-sept personnes sont mortes dans l'incendie.
*
Au Clos Saint-Marc :
-Hier, je me suis endormi devant la télé sur le canapé avec Lola.
-C’est qui Lola ?
-Ma chienne.
13 février 2016
Suite et fin des notes prises lors de ma lecture du choix de lettres de la Correspondance de Charles Baudelaire publié par Folio Classique :
Ce livre est immonde et inepte. J’ai montré, à ce sujet, que je possédais l’art de mentir. Il m’a écrit, pour me remercier, une lettre absolument ridicule. Cela prouve qu’un grand homme peut être un sot. À Madame Aupick, ce même dix août mil huit cent soixante deux, à propos des Misérables de Victor Hugo
Et croyez-vous qu’il soit immoral de dire qu’une fille est mûre à onze ans, quand on sait qu’Aïscha (qui n’était pas une négresse, née sous le Tropique) était plus jeune encore alors que Mahomet l’épousa ? À Gervais Charpentier, directeur de revue qui voulait le censurer, le vingt juin mil huit cent soixante-trois
Manet vient de m’annoncer la nouvelle la plus inattendue. Il part ce soir pour la Hollande, d’où il ramènera sa femme. Il a cependant quelques excuses ; car il paraîtrait que sa femme est belle, très bonne, et très grande artiste ? Tant de trésors en une seule personne femelle, n’est-ce pas monstrueux ? À Etienne Carjat, le six octobre mil huit cent soixante-trois
Malgré que j’hésite toujours à demander quoi que ce soit aux personnes pour lesquelles j’ai le plus d’affection et d’estime, je viens aujourd’hui vous demander un gros service, un énorme service. À Victor Hugo le dix-sept décembre mil huit cent soixante-trois (il s’agissait de faire dire du bien de lui et de ses livres à un éditeur)
Croyez, Mademoiselle, que je garderai toujours le souvenir du plaisir que vous m’avez donné. À Judith Gautier, le neuf avril mil huit cent soixante-quatre, propos délicieusement ambigu dans mon esprit mais pas dans le sien
J’ai le droit d’en conclure que ce libraire, appartenant à une race qui a crucifié Notre-Seigneur, a pu, très naturellement, faire l’économie d’un exemplaire, à votre détriment. À Sainte-Beuve, le jeudi trente mars mil huit cent soixante-cinq
Tout en faisant la queue autour de lui pour attraper une poignée de main, les Belges se sont moqués de lui. Cela est ignoble. Un homme peut être respectable pour sa vitalité, vitalité de nègre, c’est vrai. À Sainte-Beuve, le jeudi trente mars mil huit cent soixante-cinq, il parle d’Alexandre Dumas
Victor Hugo qui a résidé pendant quelque temps à Bruxelles et qui veut que j’aille passer quelque temps dans son île, m’a bien ennuyé, bien fatigué. Je n’accepterais ni sa gloire ni sa fortune, s’il me fallait en même temps posséder ses énormes ridicules. Mme Hugo est à moitié idiote, et ses deux fils de grands sots. À Madame Aupick, le vendredi trois novembre mil huit cent soixante-cinq,
Excepté Chateaubriand, Balzac, Stendhal, Mérimée, de Vigny, Flaubert, Banville, Gautier, Leconte de Lisle, toute la racaille moderne me fait horreur. À Narcisse Ancelle, le dimanche dix-huit février mil huit cent soixante-six.
Ce livre est immonde et inepte. J’ai montré, à ce sujet, que je possédais l’art de mentir. Il m’a écrit, pour me remercier, une lettre absolument ridicule. Cela prouve qu’un grand homme peut être un sot. À Madame Aupick, ce même dix août mil huit cent soixante deux, à propos des Misérables de Victor Hugo
Et croyez-vous qu’il soit immoral de dire qu’une fille est mûre à onze ans, quand on sait qu’Aïscha (qui n’était pas une négresse, née sous le Tropique) était plus jeune encore alors que Mahomet l’épousa ? À Gervais Charpentier, directeur de revue qui voulait le censurer, le vingt juin mil huit cent soixante-trois
Manet vient de m’annoncer la nouvelle la plus inattendue. Il part ce soir pour la Hollande, d’où il ramènera sa femme. Il a cependant quelques excuses ; car il paraîtrait que sa femme est belle, très bonne, et très grande artiste ? Tant de trésors en une seule personne femelle, n’est-ce pas monstrueux ? À Etienne Carjat, le six octobre mil huit cent soixante-trois
Malgré que j’hésite toujours à demander quoi que ce soit aux personnes pour lesquelles j’ai le plus d’affection et d’estime, je viens aujourd’hui vous demander un gros service, un énorme service. À Victor Hugo le dix-sept décembre mil huit cent soixante-trois (il s’agissait de faire dire du bien de lui et de ses livres à un éditeur)
Croyez, Mademoiselle, que je garderai toujours le souvenir du plaisir que vous m’avez donné. À Judith Gautier, le neuf avril mil huit cent soixante-quatre, propos délicieusement ambigu dans mon esprit mais pas dans le sien
J’ai le droit d’en conclure que ce libraire, appartenant à une race qui a crucifié Notre-Seigneur, a pu, très naturellement, faire l’économie d’un exemplaire, à votre détriment. À Sainte-Beuve, le jeudi trente mars mil huit cent soixante-cinq
Tout en faisant la queue autour de lui pour attraper une poignée de main, les Belges se sont moqués de lui. Cela est ignoble. Un homme peut être respectable pour sa vitalité, vitalité de nègre, c’est vrai. À Sainte-Beuve, le jeudi trente mars mil huit cent soixante-cinq, il parle d’Alexandre Dumas
Victor Hugo qui a résidé pendant quelque temps à Bruxelles et qui veut que j’aille passer quelque temps dans son île, m’a bien ennuyé, bien fatigué. Je n’accepterais ni sa gloire ni sa fortune, s’il me fallait en même temps posséder ses énormes ridicules. Mme Hugo est à moitié idiote, et ses deux fils de grands sots. À Madame Aupick, le vendredi trois novembre mil huit cent soixante-cinq,
Excepté Chateaubriand, Balzac, Stendhal, Mérimée, de Vigny, Flaubert, Banville, Gautier, Leconte de Lisle, toute la racaille moderne me fait horreur. À Narcisse Ancelle, le dimanche dix-huit février mil huit cent soixante-six.
12 février 2016
Ce vendredi matin, le temps étant de nouveau à la pluie avant un retour du vent annoncé, j’ai vite fait d’explorer le peu d’étalages présents au marché à la brocante et aux livres de la place Saint-Marc. Au retour, j’assiste à l’arrivée d’un camion à nacelle télescopique rue Martainville le long de l’église Saint-Maclou, là d’où sont tombées nuitamment pendant la tempête du début de la semaine d’énormes pierres restaurées, obligeant depuis tous les restaurants depuis la Walsheim jusqu’à la Voûte Musicale à se priver de terrasse. Je fais le badaud un court moment puis me réfugie à la maison, songeant combien je pesterais si je faisais encore l’instituteur d’être en vacances de février par un tel temps.
*
Voici donc Laurent le Fabuliste entré dans la maison de retraite nommée Conseil Constitutionnel et le gouvernement remanié de façon drolatique : la cheffe du Parti Ecologiste tellement arriviste qu’elle quitte son poste sans en informer les adhérents pour devenir Secrétaire d’Etat d’un Président dont elle dénonçait « la connerie » naguère dans un gazouillis, un Sénateur ancien membre du même Parti qui devient lui aussi Secrétaire d’Etat (Jean-Vincent Placé, comme son nom l’indique) lequel en deux mille onze déclarait au Journal du Dimanche : «La tradition française veut que, quand on a été président d'un groupe parlementaire, on n'obtienne pas moins qu'une fonction de ministre...» et qu’il n’accepterait donc pas d’être Secrétaire d'État: «Maman va penser que je fais le courrier!», une femme nommée Secrétaire d’Etat aux Victimes (celles des attentats je suppose et peut-être des crimes et catastrophes naturelles ou industrielles, et pourquoi pas celles du chômage et des politiciens), une autre femme nommée Secrétaire d’Etat à l’Egalité réelle (celle du nombre d’hommes et de femmes au gouvernement, les premiers s’occupant des choses sérieuses) et une Ministre des Droits des Femmes, de l’Enfance, de la Famille et du Ménage de la Salle du Conseil des Ministres chaque mercredi, il a belle allure le dernier gouvernement d’Hollande, Socialiste.
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Voici donc Laurent le Fabuliste entré dans la maison de retraite nommée Conseil Constitutionnel et le gouvernement remanié de façon drolatique : la cheffe du Parti Ecologiste tellement arriviste qu’elle quitte son poste sans en informer les adhérents pour devenir Secrétaire d’Etat d’un Président dont elle dénonçait « la connerie » naguère dans un gazouillis, un Sénateur ancien membre du même Parti qui devient lui aussi Secrétaire d’Etat (Jean-Vincent Placé, comme son nom l’indique) lequel en deux mille onze déclarait au Journal du Dimanche : «La tradition française veut que, quand on a été président d'un groupe parlementaire, on n'obtienne pas moins qu'une fonction de ministre...» et qu’il n’accepterait donc pas d’être Secrétaire d'État: «Maman va penser que je fais le courrier!», une femme nommée Secrétaire d’Etat aux Victimes (celles des attentats je suppose et peut-être des crimes et catastrophes naturelles ou industrielles, et pourquoi pas celles du chômage et des politiciens), une autre femme nommée Secrétaire d’Etat à l’Egalité réelle (celle du nombre d’hommes et de femmes au gouvernement, les premiers s’occupant des choses sérieuses) et une Ministre des Droits des Femmes, de l’Enfance, de la Famille et du Ménage de la Salle du Conseil des Ministres chaque mercredi, il a belle allure le dernier gouvernement d’Hollande, Socialiste.
11 février 2016
Après deux nuits et deux jours de tempête et de draches rouennaises avec nouvelle chute des parties récemment restaurées de l’église Saint-Maclou, c’est sous la pluie encore, mais le vent tombé, que je longe la Palais de Justice ce mercredi matin en me tenant à distance des gargouilles du vingt et unième siècle, ce pour rejoindre la gare, dont certains des panneaux de l’horloge sont tombés dès avant le vent.
Durant le trajet vers Paris, le ciel se libère et dans la capitale il est bleu, de quoi passer un moment à fouiller dans les livres du marché d’Aligre mais rien n’est pour moi. J’y suis abordé par une jeune fille de Greenpeace, pas pour une demande d’argent cette fois, mais pour me faire signer une pétition « contre les pesticides de Leclerc » via une tablette noire qu’elle me tend. Je m’étonne :
-Pourquoi ceux de Leclerc et pas les autres, alors qu’ici nous sommes entourés de fruits et légumes du marché qui en sont plein ?
-Leclerc, c’est le plus gros, me dit-elle. Il faut le faire tomber et après les autres suivront. C’est la technique des dominos.
Je lui dis que je trouve ça naïf et elle me plante là.
Chez Céleste, je déjeune d’un tartare de courgettes et d’anchois suivi d'un mafé de bœuf.
Encore une fois, j’achète plus de livres qu’il ne m’en faut chez Book-Off, mais comment résister à un roman, bien que je n’en lise plus, quand s’y trouve une carte avec un dessin d’Yvan Pommaux représentant un loup en costard, un verre de ouisqui sur le bras de son fauteuil, lisant Le Petit Chaperon rouge.
Ce livre est L’Attente du soir de Tatiana Arfel (Editions José Corti, deux mille dix).
« Cher Pascal.
Cela me fait toujours plaisir de te croiser avec Oscar.
Tu faisais partie de mon paysage.
Je t’envoie un livre que j’ai aimé et n’oublie pas que c’est à moi que je fais plaisir !
Tu as le droit de ne pas aimer en plus, je ne t’en voudrai pas. Porte-toi bien, et au plaisir de se croiser au hasard de la vie !
Amitié
Colette »
Une égoïste cette Colette, m’écrire que je faisais partie du paysage et que c’est à elle qu’elle faisait plaisir, s’est dit le destinataire début deux mille seize en retrouvant ce livre qu’il n’a pas lu, allez hop revendu chez Book-Off et la carte de Pommaux avec, mais je me demande qui est Oscar. Le compagnon de Colette ou celui de Pascal ? L'enfant d'elle ou de lui?
Je vais garder la carte, revendre le livre (si je peux).
*
La femme qui entre pleine d’espoir chez Book-Off et en repart déçue :
-Vous avez les œuvres complètes de Pessoa ?
*
Chez Léon : sont contents d’être dans un bistrot des années cinquante mais au moment de payer sont surpris d’apprendre qu’on ne peut y payer avec la carte bancaire.
*
Naturalia, Bio c’ Bon, Bio et Bien plus, les chaînes spécialisées dans les produits biologiques et naturels essaiment à Paris. A Rouen, ville où il pleut quand on revient de la capitale, un seul Bio c’est Bon, ouvert récemment place des Carmes. Certains Rouennais le prennent pour un magasin local, comme ils ont longtemps cru que Paul était une boulangerie de quartier.
Durant le trajet vers Paris, le ciel se libère et dans la capitale il est bleu, de quoi passer un moment à fouiller dans les livres du marché d’Aligre mais rien n’est pour moi. J’y suis abordé par une jeune fille de Greenpeace, pas pour une demande d’argent cette fois, mais pour me faire signer une pétition « contre les pesticides de Leclerc » via une tablette noire qu’elle me tend. Je m’étonne :
-Pourquoi ceux de Leclerc et pas les autres, alors qu’ici nous sommes entourés de fruits et légumes du marché qui en sont plein ?
-Leclerc, c’est le plus gros, me dit-elle. Il faut le faire tomber et après les autres suivront. C’est la technique des dominos.
Je lui dis que je trouve ça naïf et elle me plante là.
Chez Céleste, je déjeune d’un tartare de courgettes et d’anchois suivi d'un mafé de bœuf.
Encore une fois, j’achète plus de livres qu’il ne m’en faut chez Book-Off, mais comment résister à un roman, bien que je n’en lise plus, quand s’y trouve une carte avec un dessin d’Yvan Pommaux représentant un loup en costard, un verre de ouisqui sur le bras de son fauteuil, lisant Le Petit Chaperon rouge.
Ce livre est L’Attente du soir de Tatiana Arfel (Editions José Corti, deux mille dix).
« Cher Pascal.
Cela me fait toujours plaisir de te croiser avec Oscar.
Tu faisais partie de mon paysage.
Je t’envoie un livre que j’ai aimé et n’oublie pas que c’est à moi que je fais plaisir !
Tu as le droit de ne pas aimer en plus, je ne t’en voudrai pas. Porte-toi bien, et au plaisir de se croiser au hasard de la vie !
Amitié
Colette »
Une égoïste cette Colette, m’écrire que je faisais partie du paysage et que c’est à elle qu’elle faisait plaisir, s’est dit le destinataire début deux mille seize en retrouvant ce livre qu’il n’a pas lu, allez hop revendu chez Book-Off et la carte de Pommaux avec, mais je me demande qui est Oscar. Le compagnon de Colette ou celui de Pascal ? L'enfant d'elle ou de lui?
Je vais garder la carte, revendre le livre (si je peux).
*
La femme qui entre pleine d’espoir chez Book-Off et en repart déçue :
-Vous avez les œuvres complètes de Pessoa ?
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Chez Léon : sont contents d’être dans un bistrot des années cinquante mais au moment de payer sont surpris d’apprendre qu’on ne peut y payer avec la carte bancaire.
*
Naturalia, Bio c’ Bon, Bio et Bien plus, les chaînes spécialisées dans les produits biologiques et naturels essaiment à Paris. A Rouen, ville où il pleut quand on revient de la capitale, un seul Bio c’est Bon, ouvert récemment place des Carmes. Certains Rouennais le prennent pour un magasin local, comme ils ont longtemps cru que Paul était une boulangerie de quartier.
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