Michel Perdrial . Textes en revues

Michel Perdrial




Loïc Boyer
On trouvera ici de mes textes courts publiés depuis mil neuf cent quatre-vingt-quinze dans des revues littéraires en France (Supérieur Inconnu, Supplément d’Ame, Nouvelle Donne, Le Bord de l’Eau, Pris de Peur, l’Art du Bref, Sol’Air, Gros Textes, Salmigondis, Verso, Décharge, Bulle, Filigranes, Diérèse, Martobre, Comme ça et Autrement, (Cahier d’) Ecritures, La Nef des Fous), en Belgique (Traversées, Ecrits Vains, L’Arbre à Plumes, Inédit Nouveau, Bleu d’Encre), au Canada (Les Saisons Littéraires) et en Italie (Les Cahiers du Ru).

Les courageuses Editions du Chardon ont publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Erotica, un recueil de vingt-huit de ces textes, illustré par Isabelle Pio et Antoine Lopez et préfacé par Sarane Alexandrian, toujours disponible auprès de moi.

Je suis également l’auteur d’une pièce de théâtre et de plusieurs romans ou récits à ce jour inédits.

Depuis le onze novembre deux mille six, je publie mon Journal via Internet, un temps sous-titré Persiflages, moquages et autres énervages mâtinés de complimentages et de contentages. Sa première partie est lisible chez Eklablog, la deuxième chez L’Imprimante.

Je vis au centre de Rouen dans un ancien monastère où autrefois les Sœurs de la Miséricorde se vouaient à l’éducation des jeunes filles.








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Texte paru dans la revue Supérieur Inconnu n°5 d’octobre/décembre 1996


Elle a décidé de s’acheter un haut. C’est comme cela qu’elle nomme tout vêtement destiné à couvrir la moitié supérieure de son corps de nymphe. Je l’accompagne de déshabillages en essayages. Mais rien ne lui convient, c’est toujours trop ceci ou pas assez cela et nous avons déjà visité les trois quarts des boutiques de mode de Rouen.
Elle s’impatiente et s’étonne de mon calme. Normalement, je devrais déjà être hors de moi. Je sens que bientôt elle va me dire que je ne suis pas comme les autres.
-On peut essayer les grands magasins si tu veux, lui dis-je, Printemps ou Nouvelles Galeries ?
-Commençons par les Nougats, soupire-t-elle.
-Ah, et puis, j’en ai marre de ce soutien-gorge, s’exclame-t-elle en trifouillant sous son tee-shirt, il me fait mal.
-Tu es sûre que tu n’as pas mis les bonnets dans le dos ?
-Mais qu’il est con ce mec, et la voilà pliée de rire au milieu de la rue Saint-Romain.
Des Anglais à la recherche de l’Aître Saint-Maclou la regarde, intrigués. Mais sa bonne humeur ne dure pas, elle reprend sa litanie…et que rien de lui va…et que toutes les fringues sont moches dans cette ville. Heureusement, les Nougats ne sont pas loin.
Parmi les vêtements aguicheurs, j’aperçois un superbe body noir en lycra.
-Tu devrais essayer ça, lui dis-je.
-Ah non, c’est trop indécent. Jamais je n’oserai porter ça, se récrie-t-elle.
-Mais si, essaie-le au moins.
Elle se laisse convaincre et se rend dans une cabine d’essayage. Quelques minutes plus tard, elle m’appelle.   
-Tu veux que je t’aide à le fermer ?
-Tu es vraiment un vieil obsédé ! Non viens voir.
J’entre dans la cabine. Elle m’explique qu’elle ne peut pas porter ça, que ses seins sont encore plus visibles que si elle était nue, que sa famille serait scandalisée de la voir ainsi vêtue.
-Tu devrais oublier tes parents parfois, lui dis-je. Ça te va très bien. Attends que je regarde de plus près.
Elle me repousse.
-Va-t-en ou je crie. Je ne veux pas que tu me touches.
J’obéis mais avant de sortir je glisse son soutien-gorge dans le sac que je porte en bandoulière.
Quand elle me rejoint, elle est vraiment furieuse. Elle me dit que je suis un vrai gamin et que jamais plus elle ne fera les magasins avec moi.
-Mais tu es mieux comme cela. Tu n’as plus mal et puis tes seins sont si menus qu’ils tiennent tout seuls.
-Ça m’irrite le frôlement du tee-shirt sur les bouts. Ça les fait se dresser et tout le monde le voit.
-Si tes tétons se tendent, petite fille, c’est parce que tu es folle de désir pour moi, il n’y a pas d’autre raison.
-Tu peux rêver. Allez rends-le moi, s’il te plaît, gémit-elle, en s’accrochant à mon bras.
-Pas question et n’insiste pas sinon je le sors de mon sac et j’improvise une vente aux enchères ici dans le magasin. Je suis sûr qu’il y a plein de fétichistes que ça intéresserait.
Elle renonce et nous sortons des Nougats.
L’après-midi s’achève et elle n’a pas trouvé ce qu’elle voulait mais que désirait-elle ? Nous décidons de rentrer à Villeneuve et retournons à ma voiture.
Elle est encore vexée de la subtilisation de son sous-vêtement.
-Si c’était moi qui t’avais piqué ton slip, on t’entendrait gueuler jusqu’au bout de la ville, me dit-elle.
-Pas du tout. Je n’aurais absolument rien dit. Je comprendrais bien que tu veuilles t’approprier ce qui enveloppe la partie de mon corps que tu préfères.
-Alors, vas-y, donne-le moi, me défie-t-elle.
-D’accord, allez, viens…
Je l’entraîne à l’intérieur de la Cathédrale. J’avise un confessionnal et j’entre dans la guérite du curé. J’ôte prestement mon jean et fais glisser mon slip que je lui envoie par la porte entrouverte. Elle regarde avec inquiétude autour d’elle avant de l’empocher nerveusement tandis que je me rhabille.
-Tu es vraiment fêlé, me dit-elle.
C’est ainsi que nous regagnons Villeneuve, dans sa poche mon slip, dans mon sac son soutien-gorge.
-Imagine, lui dis-je, qu’un meurtre vienne d’être commis et que les gendarmes à la recherche de l’arme du crime arrêtent toutes les voitures et fouillent leurs occupants, on aurait l’air malin…
Son sourire ne dure qu’un instant ; à la sortie du virage, deux gendarmes nous font signe de stopper sur le bas-côté.

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