Lundi 14 Mars 2011

Livres

Nadia Sendin

L'Heure du roi de Boris Khazanov aux éditions Viviane Hamy bis (poche)


COMPTE-RENDU LITTERAIRE
Boris Khazanov est né à Léningrad en 1928. Après des années passées au Goulag pour « propagande anti-soviétique », il entreprend des études de médecine après sa libération. Tout en exerçant son métier, il écrit clandestinement. Toutes ses œuvres sont publiées à l'étranger (l'Heure du roi est publiée dans une revue israélienne de langue russe.) Il a été traduit pour la première fois en France en 2005 aux éditions Viviane Hamy.

L'histoire se déroule pendant la seconde guerre mondiale, dans un pays indéterminé, un pays du Nord ressemblant aux Pays-Bas ou au Danemark. Ce petit pays a pour roi Cédric X, une figure symbolique sans véritable pouvoir. Un jour, la population voit son pays envahi par les forces armées nazies, comme l'ont été d'autres nations abandonnées par l'Europe.
Après une faible rébellion vite réprimée, la population se laisse soumettre au joug de l'ennemi. Ni terreur, ni répression, ni déportation, ni torture, juste une occupation qui s'organise et remplace l'ordre ancien. Les habitants acceptent la présence de l'ennemi sans pour autant pratiquer la délation ni oublier leur identité.
Le roi accepte l'occupation, reste inactif lorsque sa cavalerie est massacrée, subit la cérémonie humiliante et grotesque d'instauration du nouveau pouvoir. Néanmoins, la nouvelle loi concernant le statut d'exception des juifs contribue à la prise de conscience du roi qui décide de descendre dans la rue arborant l'étoile jaune.

A travers cette fable politique qui se situe au moment de la seconde guerre mondiale, l'auteur fait aussi un parallèle avec le régime stalinien qui imposa la terreur aux pays voisins. Il interroge le système absurde de ses régimes totalitaires et traite de questions interdites dans son propre pays telle que celle de l'extermination des juifs. Ce roman est également une fable philosophique, où l'auteur pose la question de la capacité de l'individu à prendre conscience de la barbarie et à résister.
Enfin, ce texte qui se distingue de la tradition des romans russes historiques, est un bijou de finesse, de concision, de profondeur et d'intelligence en s'attachant à la conscience profonde de l'homme lorsque la guerre rend encore plus aigüe la nécessité du choix.