Mathilde trouvait que Noël en famille, c'était bien mais que, sûrement, Noël avec des malheureux, c'était mieux. Et justement, quelques garçons et filles de sa faculté avaient émis l'idée d'organiser un réveillon pour les sans-logis. Elle se joignit à eux et, le soir du vingt-quatre décembre, tous se retrouvèrent en haut de la tour Montparnasse.
La nouvelle s'était vite répandue chez les miséreux parisiens et ils se pressaient à la fête, hirsutes et dépenaillés, se remplissant la panse de nourritures diverses et buvant, plus que de raison, un vin blanc avec des bulles qui aurait bien voulu passer pour du champagne mais qui n'en était pas, aucun doute, se dit Mathilde lorsqu'elle y goûta.
Comme le lui dit Jean-Luc, l'un des étudiants, et cela la fit sourire: "C'est un vin qui veut pétiller plus haut que son cru."
Quoi qu'il en fût, on s'amusait bien tout en haut de la tour et la musique était bonne. Mathilde et ses amies étudiantes étaient fort sollicitées par les sans-abris qui n'avaient pas souvent l'occasion, on s'en serait douté, de danser bien au chaud, un verre à la main, tout en tenant une jolie petite poulette, comme ils disaient, de l'autre bras.
Cela valait à Mathilde et à ses camarades quelques tripotages auxquels elles résistaient stoïquement tout en s'efforçant de ne pas respirer trop fort à cause de l'odeur.
La télévision était là. Plusieurs équipes de journalistes, prévenus par l'un des étudiants, filmaient les réjouissances et interrogeaient les invités.
Lorsque minuit fut passé et que quelques miséreux se mirent à vomir dans les coins, Gwendal, un étudiant, grimpa sur une table et déclara que la fête était finie.
Mathilde se fit raccompagner par Jean-Luc et se retrouva seule chez elle. Ses parents et son frère cadet, vexés peut-être par sa défection, réveillonnaient chez son oncle et sa tante et elle eut le temps de méditer un peu sur sa soirée avant de trouver un difficile sommeil.
Lorsqu'elle se leva, vers midi, elle avait encore en tête ses interrogations nocturnes. Pourquoi vouloir à tout prix entraîner tout le monde dans la fête? Pourquoi créer du rêve et de l'illusion chez ceux qui retourneraient à la rue? Pourquoi cette présence des équipes de télévision obligeant les sans-logis à dire que c'était le plus beau jour de leur vie, larmes à l'appui?
Des questions auxquelles elle ne trouvait pas de réponse mais qui passèrent bien vite à l'arrière-plan au bénéfice d'une autre, bien plus angoissante, lorsqu'elle s'observa attentivement dans les miroirs de la salle de bain: Comment faire, maman au secours, pour se débarrasser des poux qui couraient dans sa chevelure?
La nouvelle s'était vite répandue chez les miséreux parisiens et ils se pressaient à la fête, hirsutes et dépenaillés, se remplissant la panse de nourritures diverses et buvant, plus que de raison, un vin blanc avec des bulles qui aurait bien voulu passer pour du champagne mais qui n'en était pas, aucun doute, se dit Mathilde lorsqu'elle y goûta.
Comme le lui dit Jean-Luc, l'un des étudiants, et cela la fit sourire: "C'est un vin qui veut pétiller plus haut que son cru."
Quoi qu'il en fût, on s'amusait bien tout en haut de la tour et la musique était bonne. Mathilde et ses amies étudiantes étaient fort sollicitées par les sans-abris qui n'avaient pas souvent l'occasion, on s'en serait douté, de danser bien au chaud, un verre à la main, tout en tenant une jolie petite poulette, comme ils disaient, de l'autre bras.
Cela valait à Mathilde et à ses camarades quelques tripotages auxquels elles résistaient stoïquement tout en s'efforçant de ne pas respirer trop fort à cause de l'odeur.
La télévision était là. Plusieurs équipes de journalistes, prévenus par l'un des étudiants, filmaient les réjouissances et interrogeaient les invités.
Lorsque minuit fut passé et que quelques miséreux se mirent à vomir dans les coins, Gwendal, un étudiant, grimpa sur une table et déclara que la fête était finie.
Mathilde se fit raccompagner par Jean-Luc et se retrouva seule chez elle. Ses parents et son frère cadet, vexés peut-être par sa défection, réveillonnaient chez son oncle et sa tante et elle eut le temps de méditer un peu sur sa soirée avant de trouver un difficile sommeil.
Lorsqu'elle se leva, vers midi, elle avait encore en tête ses interrogations nocturnes. Pourquoi vouloir à tout prix entraîner tout le monde dans la fête? Pourquoi créer du rêve et de l'illusion chez ceux qui retourneraient à la rue? Pourquoi cette présence des équipes de télévision obligeant les sans-logis à dire que c'était le plus beau jour de leur vie, larmes à l'appui?
Des questions auxquelles elle ne trouvait pas de réponse mais qui passèrent bien vite à l'arrière-plan au bénéfice d'une autre, bien plus angoissante, lorsqu'elle s'observa attentivement dans les miroirs de la salle de bain: Comment faire, maman au secours, pour se débarrasser des poux qui couraient dans sa chevelure?