Granville (seize) : plage d’Hacqueville

18 septembre 2024


Ce mardi, la mer est haute et mouvementée, que je vois par ma fenêtre à mon lever. Le vent souffle sans que cela se traduise par une poussée sur celle-ci, il est dirigé vers ailleurs. Si les bus Néva ont l’avantage d’être gratuits, ils sont assez rares. Celui qui va vers Saint-Pair passe en bas de mon studio Air Bibi à sept heures quarante-six, trop tôt pour moi, puis à huit heures quarante et une, j’ai largement le temps de petit-déjeuner avant de le prendre.
J’en descends à l’arrêt Lycées, qui dessert le Lycée Hôtelier et le Lycée Julliot de la Morandière, et m’emploie à trouver le sentier du littoral qui passe en dessous. Il est neuf heures, m’apprend la sonnerie emplie de zénitude qui appelle des élèves invisibles en cours.
Je marche d’abord vers les ports de Granville mais de ce côté on ne peut aller loin sans devoir contourner de belles demeures par la route. La pointe de la Roche Gautier, je ne l’aurai vue que de loin. En revanche vers Saint-Pair le sentier est attrayant et sportif, agrémenté de multiples escaliers rustiques et d’arbres chus sous lesquels il faut passer. Je suis au-dessus de la plage d’Hacqueville, longue de quatre cents mètres. C’est marée haute, cette plage de rochers et de sable est à peine visible. Ensuite, la mer se retirera sur un kilomètre et demi. Je finis par atteindre la pointe où se montre un peu là le Château de la Crête « réceptions et séminaires ».
Au-delà, le sentier devient routier. Je reviens sur mes pas et me pose sur un muret, au-dessus de la plage et sous le Lycée, en attendant le bus de dix heures vingt-cinq pour Granville Centre. A l’arrivée, direction Au Tout Va Bien. Des pêcheurs y ont des discussions de pêcheurs : praires, coquilles, amandes, bulots et séjours à la Gendarmerie quand on dépasse de trente  kilos. Au menu du jour : terrine de thon, saucisse purée et tarte au citron meringuée. « Y a encore du monde à traîner », constate un pêcheur. « Bah, y fait beau, c’est les retraités qui se promènent », lui répond un autre.
Il en est même un qui monte à la Haute Ville, son repas terminé, pour un café relecture en terrasse à La Rafale à la table qui garde le soleil le plus longtemps. Il y a une drôle d’odeur. D’égout peut-être, la rue de ce nom est à côté. « Ça doit être la marée qui remonte », dit la serveuse.
Pourtant elle doit descendre si j’en juge par les hommes à épuisette que je vois passer vers la pêche à pied. C’est le début des grandes marées.
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Eviter de devenir le célibataire trentenaire meilleur ami de la famille. (Jean-Luc Lagarce Journal mercredi vingt-six mars mil neuf cent quatre-vingt-six)