En lisant Waugh part en campagne d’Auberon Waugh

21 février 2018


Parmi mes livres lus : Waugh part en campagne d’Auberon Waugh (Anatolia/Editions du Rocher), lequel, indique la quatrième de couverture, fut une « figure légendaire de Soho, génial polémiste et satiriste, bête noire des imbéciles de tous bords qu’il traqua sans relâche ». Ce recueil rassemble les textes qu’il écrivait chaque été pour les grands journaux londoniens lors de ses vacances en France à Montmaur (Aude) et en Angleterre dans le Kent ou le Somerset.
J’en ai tiré peu :
Jamais je n’aurais cru vivre assez vieux pour voir un Français verser du ketchup sur son bifteck.
Le capitalisme technologique a ses joies et notamment celle-ci : même s’il fait du bruit, sent mauvais, salit tout et s’accompagne de pollution morale, il n’oblige pas plus d’un tiers de nos concitoyens à travailler. Les deux tiers restants peuvent ainsi vivre fort agréablement du surplus produit, laissant le travail à ceux qui l’apprécient, ou à ceux qui veulent toujours en avoir plus que les autres, ou à ceux que leurs insuffisances émotionnelles poussent à faire la loi à leur prochain.
Les appartements de mes enfants sont situés à une bonne quarantaine de mètres de la pièce  où j’écris et nous ne nous en portons que mieux, tous autant que nous sommes.
La nouvelle autoroute fera passer les vacanciers dangereusement près de la ville…
L’arrivée d’une équipe de tournage, venue réaliser un film dans le Somerset, a de tout temps signalé à la population locale que le moment était venu d’enfiler son tablier de cuir et de se tenir à la barrière de son jardin, occupé à boire du cidre en suçotant une paille.
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Auberon Waugh, tout malin qu’il était, écrivit aussi ceci pendant ses vacances estivales :
Je n’ai jamais rien eu à reprocher à Picasso et très franchement je ne trouve pas ses peintures pires que celles que mes enfants gribouillent à l’école, chaque jour que Dieu fait, et que je suis censé accueillir avec des cris d’émerveillement et de stupeur. (…) … pas une seule voix n’a émis l’idée que Picasso est tout simplement, le plus grand fumiste de tous les temps : qu’il a pris pour cible le monde des gens dans le vent, des intellectuels et des artistes au grand complet et que depuis soixante-cinq ans, il se paie leur tête dans les grandes largeurs. Peut-être, quand il mourra, trouvera-t-on un document renfermant son ultime message à la planète. Six mots pourraient suffire, voire moins –l’équivalent espagnol, quel qu’il soit, de la phrase : Alors, je vous ai bien eus.
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Autre lecture, celle-là complètement décevante, L’écrivain national de Serge Joncour (Flammarion). Bien qu’il soit écrit « roman » sur la couverture, je pensais, suite à un extrait entendu sur France Cul, qu’il s’agissait de la narration narquoise du déroulement de sa résidence d’écrivain en milieu rural. Pas du tout, Joncour a écrit une histoire dont il est le héros et dans laquelle il séduit l’héroïne du fait divers du coin, Rien de crédible dans cette complaisante autofiction, même ses gendarmes sont invraisemblables.
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A treize ans –l’âge des premières amours– il fut déniaisé par une fille de Montmartre qui lui prit quarante francs et ses illusions en lui disant de faire vite. Madeleine Choisy a le goût du zeugme.
Son livre reportage Un mois chez les filles paru en mil neuf cent vingt-huit aux Editions Montaigne, réédité en deux mille quinze aux Editions Stock, écrit tout en phrases courtes, m’a bien plu.
Extrait :
Le Havre. Rue des Galions. C’est plus étroit qu’une vierge, moins étroit que la vertu. Ça sent la marée, la femme, la courtisane économe, le lit tourné et l’urine.
Mais, à l’intérieur, quelle paix ! Rien ne saurait donner une idée de la vie familiale d’un bordel de province. On cause. On rit. On coud. On s’amuse à de petits jeux innocents.