Ce dimanche matin, la ventilation tourne toujours à fond avec un bruit d’enfer à la station Palais de Justice où j’attends le métro vers neuf heures afin d’aller une troisième fois au désherbage de la Bibliothèque Municipale de Sotteville-lès-Rouen, encore en compagnie du journaliste de France Trois qui ce soir donnera des informations imprécises sur les conséquences de la lubrizolisation.
A l’arrivée je fais pour la première fois de ma vie le tour du marché de Sotteville où les marchands luttent contre le vent. N’ayant rien à acheter, j’entre au Rocher de Cancale où Martine vient me serrer la main. Je lui commande un café que je bois en regardant mes voisins s’enfiler des verres de calva et de rosé et l’un d’eux manger un sandouiche au saucisson sec. Il est neuf heures et quart.
Une demi-heure plus tard, je suis appuyé contre le mur en briques de la Bibliothèque en compagnie d’une dame fort discrète que je suspecte d’avoir d’autres lectures que moi. Je regarde passer la Sottevillaise et le Sottevillais qui vont au marché puis qui en reviennent.
A dix heures, je ne suis guère gêné par autrui pour explorer une dernière fois les cartons de livres désherbés. Deux bibliothécaires s’occupent à diviser par deux le prix des beaux livres qui restent, mais de ceux-là je ne veux pas. Je trouve encore de quoi me plaire dans les ouvrages à un euro car à Sotteville on ne veut plus lire Arno Schmidt, Pierre Michon et W.G. Sebald. A ces renommés, j’ajoute des moins connus : Hélène Bessette avec N’avez-vous pas froid (Léo Scheer), Ladislav Klima avec Tout, écrits intimes (La Différence) et Jean Galli de Bibiena avec La poupée (Desjonquères), « un roman à l’érotisme délicat et pervers » qui n’a été emprunté qu’une fois le deux février deux mille.
Au total : quinze livres pour quinze euros, cela tient cette fois dans un seul sac. L’aimable bibliothécaire à qui je paie me dit que j’ai droit à un cédé gratuit, mais j’ai la flemme de chercher celui qui pourrait m’intéresser.
Tandis que je rejoins le métro je croise le mendiant en tenue de cycliste à moule bite habituellement à Rouen et parfois à Paris avec sa pancarte « Je sors de prison » et sa formule « Je cherche un euro. »
-Il sort de prison et il est tout bronzé, observe une perspicace.
Au retour à Rouen, ça ne sent rien à la sortie de métro Théâtre des Arts.
*
Ce dimanche, Yvon Robert, Socialiste, Maire de Rouen, sur France Info, au lieu d’avoir souci de ses concitoyen(ne)s, prend la défense de Lubrizol qui « a toujours respecté les réglementations », alors que l’usine a été mise en demeure en deux mille dix-sept pour insuffisance du dispositif anti incendie.
« Fondamentalement, l'industrie fait aussi partie de notre richesse collective », ajoute-t-il, alors que cette usine appartient au milliardaire Warren Buffett.
Avant de terminer par cette ode à Lubrizol dont il fait une entreprise écolo : « L'usine Lubrizol est aussi une usine qui a contribué aux progrès environnementaux. Les voitures consomment moins d'essence, consomment moins d'huile. C'est grâce aux additifs de Lubrizol. »
Le pire dans ses propos, c’est peut-être ceci :
« L’objectif, c’est d’abord et avant tout d’avoir le maximum de mesures réglementaires de précaution, de vigilance pour éviter des incidents. »
*
Qualifier cette catastrophe industrielle d’incident ! J’attends de savoir ce qu’en pense Nicolas Mayer-Rossignol, son conseiller municipal qui espère le remplacer au poste de Maire en mars prochain.
A chaque second tour d’élection municipale rouennaise, je me suis abstenu ou bien j’ai voté nul. Si le Fier de Rouen ne désavoue pas les propos de Robert, ce sera encore le cas.
*
Par la volonté de Valérie Fourneyron, sa Maire, et d’Yvon Robert, le premier adjoint d’alors, Rouen (Normandie) est jumelée avec Cleveland (Ohio) depuis le dix juillet deux mille huit.
Or, Cleveland est le siège de la Lubrizol Corporation. On s’étonne moins qu’Yvon Robert en soit le porte-parole local.
Selon l’une de mes connaissances croisée en ville ce dimanche, le Comité de Jumelage Rouen Cleveland permet avant tout à ceux qui le composent de s’offrir des voyages outre-Atlantique.
Une enquête journalistique sur la question serait la bienvenue.
*
Au Bistrot du Coin, une femme habitant Canteleu : « Moi j’ai entendu l’explosion, j’ai cru que c’était un de mes enfants qui était tombé du lit ». Un jeune homme : « Cette nuit, j’ai craché du sang, j’ouvre le balcon pour respirer : Lubrizol total. »
A l’arrivée je fais pour la première fois de ma vie le tour du marché de Sotteville où les marchands luttent contre le vent. N’ayant rien à acheter, j’entre au Rocher de Cancale où Martine vient me serrer la main. Je lui commande un café que je bois en regardant mes voisins s’enfiler des verres de calva et de rosé et l’un d’eux manger un sandouiche au saucisson sec. Il est neuf heures et quart.
Une demi-heure plus tard, je suis appuyé contre le mur en briques de la Bibliothèque en compagnie d’une dame fort discrète que je suspecte d’avoir d’autres lectures que moi. Je regarde passer la Sottevillaise et le Sottevillais qui vont au marché puis qui en reviennent.
A dix heures, je ne suis guère gêné par autrui pour explorer une dernière fois les cartons de livres désherbés. Deux bibliothécaires s’occupent à diviser par deux le prix des beaux livres qui restent, mais de ceux-là je ne veux pas. Je trouve encore de quoi me plaire dans les ouvrages à un euro car à Sotteville on ne veut plus lire Arno Schmidt, Pierre Michon et W.G. Sebald. A ces renommés, j’ajoute des moins connus : Hélène Bessette avec N’avez-vous pas froid (Léo Scheer), Ladislav Klima avec Tout, écrits intimes (La Différence) et Jean Galli de Bibiena avec La poupée (Desjonquères), « un roman à l’érotisme délicat et pervers » qui n’a été emprunté qu’une fois le deux février deux mille.
Au total : quinze livres pour quinze euros, cela tient cette fois dans un seul sac. L’aimable bibliothécaire à qui je paie me dit que j’ai droit à un cédé gratuit, mais j’ai la flemme de chercher celui qui pourrait m’intéresser.
Tandis que je rejoins le métro je croise le mendiant en tenue de cycliste à moule bite habituellement à Rouen et parfois à Paris avec sa pancarte « Je sors de prison » et sa formule « Je cherche un euro. »
-Il sort de prison et il est tout bronzé, observe une perspicace.
Au retour à Rouen, ça ne sent rien à la sortie de métro Théâtre des Arts.
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Ce dimanche, Yvon Robert, Socialiste, Maire de Rouen, sur France Info, au lieu d’avoir souci de ses concitoyen(ne)s, prend la défense de Lubrizol qui « a toujours respecté les réglementations », alors que l’usine a été mise en demeure en deux mille dix-sept pour insuffisance du dispositif anti incendie.
« Fondamentalement, l'industrie fait aussi partie de notre richesse collective », ajoute-t-il, alors que cette usine appartient au milliardaire Warren Buffett.
Avant de terminer par cette ode à Lubrizol dont il fait une entreprise écolo : « L'usine Lubrizol est aussi une usine qui a contribué aux progrès environnementaux. Les voitures consomment moins d'essence, consomment moins d'huile. C'est grâce aux additifs de Lubrizol. »
Le pire dans ses propos, c’est peut-être ceci :
« L’objectif, c’est d’abord et avant tout d’avoir le maximum de mesures réglementaires de précaution, de vigilance pour éviter des incidents. »
*
Qualifier cette catastrophe industrielle d’incident ! J’attends de savoir ce qu’en pense Nicolas Mayer-Rossignol, son conseiller municipal qui espère le remplacer au poste de Maire en mars prochain.
A chaque second tour d’élection municipale rouennaise, je me suis abstenu ou bien j’ai voté nul. Si le Fier de Rouen ne désavoue pas les propos de Robert, ce sera encore le cas.
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Par la volonté de Valérie Fourneyron, sa Maire, et d’Yvon Robert, le premier adjoint d’alors, Rouen (Normandie) est jumelée avec Cleveland (Ohio) depuis le dix juillet deux mille huit.
Or, Cleveland est le siège de la Lubrizol Corporation. On s’étonne moins qu’Yvon Robert en soit le porte-parole local.
Selon l’une de mes connaissances croisée en ville ce dimanche, le Comité de Jumelage Rouen Cleveland permet avant tout à ceux qui le composent de s’offrir des voyages outre-Atlantique.
Une enquête journalistique sur la question serait la bienvenue.
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Au Bistrot du Coin, une femme habitant Canteleu : « Moi j’ai entendu l’explosion, j’ai cru que c’était un de mes enfants qui était tombé du lit ». Un jeune homme : « Cette nuit, j’ai craché du sang, j’ouvre le balcon pour respirer : Lubrizol total. »